Bien que son nom n'apparaisse ni sur la couverture ni dans les premières pages, la plus grande partie du livre est l'oeuvre de R.J. Grenier. Il présente les deux textes de Ramond de Carbonnières, deux versions du récit de l'ascension en 1802 du Mont-Perdu, considéré alors comme le sommet des Pyrénées.
Le texte de R.J. Grenier raconte de façon intéressante les périples du fondateur du pyrénéisme, sa carrière de savant parisien et de professeur passionné de l'école centrale de Tarbes, dont il fut le fondateur. Les infatigables observations géologiques et botaniques de Ramond de Carbonières sont suivies de querelles entre savants : Lapeyrouse considérait les Pyrénées comme son domaine et supportait mal de se voir dépasser. J'ai beaucoup appris sur la vie politique de ces périodes troublées, où Ramond, après avoir été une figure marquantes des débats de la jeune Révolution Française, finit en prison et échappa de peu à l'échafaud pendant la terreur.
Le récit de l'ascension elle-même, par cet "écrivain à manchettes", est bref, car pour fier qu'il soit de cet exploit de montagnard, il est surtout passionné par l'étude des couches sédimentaires qui sont sans équivalent pour un sommet de cette altitude. Mais la façon dont il décrit l'observation des fossiles, la nature des roches et fait des hypothèses sur l'historique de la formation du massif, est intéressante, deux siècles plus tard, si on est ouvert à autre chose qu'aux exploits de ce marcheur infatigable.
C'est donc une opportune réédition.
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Cette montagne est non seulement la plus haute des Pyrénées, elle est encore le point le plus haut de notre hémisphère, où on ait trouvé des débris organiques ; elle est, en un mot, de tous les monuments connus des derniers travaux de la mer, le plus considérable par son volume, et le plus extraordinaire par sa structure. Un pareil terrain est classique pour l'étude des montagnes secondaires, et pour l'histoire des dernières révolutions du globe : il exercera plus d'une fois désormais la sagacité des interprètes de la nature, et quelque chose que j'en aie dite, on voit que je suis bien loin d'avoir dit à son sujet le dernier mot de la géologie.
De part et d'autre, s'élèvent à perte de vue les parois de cette vaste fissure, disposées en étages d'une hauteur prodigieuse, et dont l'aplomb; , la matière, les couleurs et les joints, rappellent à tel point les structures humaines, qu'on croirait voir un immense édifice en ruines.
Qui ne fût pas content? Ce fût Lapeyrouse. Aussi ses élèves envoyèrent-ils à Ramond "une belle lettre anonyme" sur son voyage au Mont-Perdu, "bête à faire plaisir".