À pic
Je le vois remonter, mon père,
par ce passage à pic
au creux de la falaise,
un de ces jours clairs
un peu comme ses yeux.
Pourquoi cette image-là,
aujourd’hui, pourquoi,
même s’il coule d’encre
que l’expression « à pic »
bue, juste avant, dans un livre
n’est pas étrangère à cette
contre-plongée soudaine
du cœur, pourquoi donc au juste ?
Peut-être
simplement pour dire
le sommet du mal
en lui
dont il ne revint jamais.
Tours de piste
I
Adolescence,
hiver,
autos tamponneuses,
Gauquelin Despallières .
Quelque chose à dire.
Je ne sais quoi.
Alors je creuse
autour de cette idée-là :
Adolescence,
hiver,
autos tamponneuses,
Gauquelin Despallières…
Alors je guette
un choc, un déclic,
entre les mots rompus
aux tours de piste :
Adolescence,
hiver,
autos tamponneuses,
Gauquelin Despallières…
Entrain fantôme…
je repars de là,
à peine étourdi,
sans d’autres jetons
à glisser, ce coup-ci,
dans la fente
de la machine
à poémer le temps.
Petit cheval
Aujourd’hui, des cordes. Tendue,
capricieuse, la voix
du ciel sur les graviers
de la rue encore en chantier
me ramène à ces pleurs
retour d’une fête foraine.
J’avais quatre ans
et n’y entendais goutte –
d’autant plus qu’il
ne plut pas, ce jour-là ! –
et montais donc plutôt haut
sur mon petit cheval
d’émois, à la moindre idée
de borne, de limite. Rien
n’a tellement changé depuis.
Tours de piste
II
A quelques jours
de Noël,
vingt ans plus tard
environ,
un manège
sur la place,
le même
à peu près
ainsi
que le froid
qui sévit
et saisit,
à cet instant
précis,
mots et visage
à une ride
près.