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sur 209 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
En 2010, alors qu'il est invité à participer à une conférence à l'université d'Arkhangelsk, Olivier Rolin, passionné par la Russie depuis toujours décide de prendre l'avion pour aller visiter un monastère sur les îles Solovki. Il vient souvent faire des conférences dans ce pays auquel il est attaché depuis l'époque de l'URSS, ayant été lui-même maoïste dans sa jeunesse.
Il est attiré par ces îles tant sur le plan géographique, le nord de la Russie, l'immensité de la Sibérie que sur le plan historique.

Ce monastère a été le premier goulag mis en place. Il apprend lors de sa visite, « qu'il y a avait existé, dans le camp, une bibliothèque de trente mille volumes, formée directement ou indirectement par les livres des déportés qui étaient, pour beaucoup d'entre eux, des nobles ou des intellectuels… » C'est ainsi que naît, d'ailleurs, l'idée de lui consacrer un film.

Au cours de sa visite, il tombe sur un album, reproduction de lettres qu'il envoyait à sa femme Varvara et à leur fille Eléonora, âgée de quatre ans quand il est déporté, dessins, herbiers, devinettes, et fait ainsi la connaissance de leur auteur : Alexeï Féodossiévitch Vangengheim, déporté aux Solovki en 1934. Cet album, hors commerce a été publié par Eléonora, à la mémoire de son père.

Tout au long de ce livre, il va nous raconter la vie de cet homme, né en Ukraine, d'origine noble, qui quitte tout pour épouser le Communisme et se consacrer corps et âme à la reconstruction de son pays en épousant la cause de la Révolution. Alexeï est météorologue et ses prédictions permettent aux avions de décoller ou atterrir dans de bonnes conditions ou aux bateaux de se frayer un passage dans la mer gelée.

Ce que j'en pense :

J'ai eu envie de lire ce livre après avoir vu le film "Solovki, la bibliothèque disparue" qui m'avait beaucoup intéressée.

On assiste à l'emballement d'Alexeï pour le communisme ; il est membre du Parti, fait partie des gens influents dont le travail est reconnu car ses prévisions peuvent être d'une grande aide pour l'agriculture socialiste que Staline dans sa folie veut collectiviser en éliminant les propriétaires terriens (des bourgeois, ou des nobles) ce qui aboutira à la famine en Ukraine provoquant la mort de trois millions de personnes…

Alexeï Féodossiévitch Vangengheim a des idées novatrices, il fait établir un cadastre des vents (il a la vision d'une forêt d'éoliennes, car « l'énergie du vent n'est pas seulement énorme sur notre territoire, écrit-il en 1935 mais elle est renouvelable et inépuisable… le vent peut transformer les déserts en oasis » et il envisage même « un cadastre du soleil » (quel précurseur !!!)
Un jour, où il devait se rendre au théâtre avec sa femme, il est arrêté. Un de ses collaborateurs vint d'avouer qu'il existe une organisation contre-révolutionnaire au sein du service d'Alexeï et qu'il en est le chef. Leur but : saboter la lutte contre la sécheresse en falsifiant les prévisions météorologiques.
Après un simulacre de procès, il est condamné pour sabotage économique et espionnage, à dix ans de camps de rééducation par le travail.

Oliver Rolin a divisé son livre en quatre parties. Dans la première, environ la moitié du livre, il évoque la vie d'Alexeï jusqu'à son arrivée aux Solovki. Dans la deuxième partie, on découvre la vie au Monastère et le courrier qu'il envoie à sa famille et aux autorités. La troisième partie est consacrée à la fin du voyage. Et enfin, dans la dernière Olivier Rolin reprend la parole et livre son interprétation des évènements.

On fait le parallèle bien-sûr avec les atrocités nazies, les deux tyrans, dictateurs fonctionnent de la même façon faisant régner la terreur ; Hitler a fait périr des millions de gens parce qu'ils étaient juifs, ou simples opposants, Staline a fait mourir son peuple, les paysans qu'il détestait, les intellectuels, et tant d'autres, car l'antisémitisme est omniprésent aussi.
Tous deux ont exploité le culte de la personnalité et, on peut dire qu'ils ont fait des émules ; tout deux aussi ont déporté, assassiné des personnes et les goulags russes sont aussi bien organisés que les camps d'extermination nazie. Ce vingtième siècle a imposé la terreur par ses dictateurs le vingt-et-unième siècle débute par des guerres de religions qu'on croyait d'un autre âge…

L'écriture d'Olivier Rolin est belle, avec beaucoup de rythme et on dévore ce livre avec passion. Parfois, il faut faire une pause pour s'aérer l'esprit car certaine scènes sont dures, notamment la troisième partie mais tout cela a existé. La description des paysages, de la Sibérie, des aurores boréales sont tellement vivantes qu'on a l'impression de faire partie du voyage, d'être penché par-dessus l'épaule d'Alexeï pour le voir dessiner. Les dessins sont exposés à la fin du livre, avec des herbiers géométriques, arithmétiques d'une belle précision.

Ce livre rend un bel hommage à cet homme ordinaire, qui n'était pas un politicien, pour bien prouver que cela pouvait arriver à n'importe qui. Olivier Rolin rend aussi hommage à la littérature russe, notamment un auteur qui est dans ma PAL depuis un moment : Vassili Grossman, qui évoque cette période dans son oeuvre (« Vie et Destin »), ou Bounine (« La vie d'Arséniev ») et d'autres.

Évidemment, ce livre est un coup de coeur et je vous le conseille vivement, ainsi que le film.
Note : 9,2/10
Et voici le lien avec le film, cela vous donnera une idée…
https://www.youtube.com/watch?v=pZtpHbF0wLE

Lien : http://eveyeshe.canalblog.co..
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Invité à parler à l'université d'Arkhangelsk en 2010, Olivier Rolin décide de rejoindre en avion l ‘archipel des Solovki où se dresse un monastère :
« C'était la beauté du lieu, tel que je l'avais découvert sur des photographies, qui m'avait poussé à entreprendre ce voyage. Et en effet, à peine sorti de la petite aérogare en planches badigeonnées de bleu, à la vue des murailles, des tours trapues et des clochers (d'or…) du monastère-forteresse allongé sur un isthme entre une baie et un lac emmitouflés de neige, j'avais compris que j'avais eu raison de venir là. La même beauté que le mont Saint-Michel, sauf que c'était tout le contraire : un monument monastique et militaire, et carcéral, au milieu de la mer – mais se déployant dans l'horizontale, quand le mont s'élance à la verticale. Et puis, ici, pas de foule, pas de pacotille touristique. »

Ce lieu magnifique est devenu, à partir de 1923, l'un des premiers camp du Goulag.
Olivier Rolin va y rencontrer un homme, un homme qui n'est pas un héros « Le météorologue », Alexeï Féodossiévitch Vangengheim, déporté aux Solovki en 1934.
Pourquoi lui, parce qu'une vieille dame, mémoire de l'île, va lui montrer un album, édité par Eleonora, la fille de cet homme qui avait 4 ans à l'époque, composé des reproductions des lettres qu'il lui envoyait et des herbiers, des dessins « une aurore boréale, des glaces marines, un renard noir, une poule, une pastèque, un samovar, un avion, des bateaux, un chat, une mouche, une bougie, des oiseaux… Herbiers et dessins étaient beaux, mais ils n'étaient pas composés seulement pour plaire à l'oeil, ils avaient une fin éducative. À l'aide des plantes, le père apprenait à sa fille les rudiments de l'arithmétique et de la géométrie. »


J'avais été bouleversée par le film intitulé « Solovki - La bibliothèque disparue » diffusé sur Arte où Olivier Rolin part à la recherche de traces de la bibliothèque du goulag des îles Solovki, 30 000 volumes dont des livres rares rassemblés par les déportés, disparue après la fermeture du camp en 1939.


Vous pouvez le revoir sur you tube avec le lien suivant : http://www.youtube.com/watch?v=hJ_CFsNYZmg 


Ce livre, qui en est l'aboutissement, rend un bel hommage, à travers le destin tragique d'un des leurs, aux millions d'hommes qui ont été broyés par le régime totalitaire stalinien qui pourtant avait tout fait pour effacer leur mémoire.
Olivier Rolin leur redonnent dignité et vie. Il nous fait croiser bon nombre d'entre eux auxquels il restitue leur identité et des poètes et des écrivains, eux connus.
Et sa conclusion après ce voyage nous concerne tous, nous qui étions si près et avons préféré ne pas voir :
« Il y a dans Voyage au pays des ze-ka un dialogue entre un ingénieur soviétique et le détenu Margolin. « Aujourd'hui, dit ce dernier, je sais exactement ce que j'éprouve en face de l'Union soviétique : c'est la peur. Avant d'arriver dans ce pays, je n'avais jamais eu peur des hommes. Mais l'URSS m'a appris à avoir peur de l'homme. » Phrase à quoi fait écho une autre, de Nadiejda Mandelstam : « De tout ce que nous avons connu, le plus fondamental et le plus fort, c'est la peur […] La peur a brouillé tout ce qui fait d'ordinaire une vie humaine. » Cette peur immense, diversement reflétée, subie, affrontée, dépassée, dans des centaines de milliers de regards, nous ne nous en sommes guère souciés. Nous nous alarmons aujourd'hui à bon droit des risques de voir de l'inhumain reparaître en Russie, mais nos alarmes seraient plus crédibles si nous avions prêté attention à ce qui dans l'histoire de ce pays fut humain, et cette humanité fut d'abord celle des victimes. »
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« J'ai raconté aussi scrupuleusement que j'ai pu, sans romancer, en essayant de m'en tenir à ce que je savais, l'histoire d'Alexeï Féodossiévitch Vangengheim, le météorologue. Un homme qui s'intéressait aux nuages et faisait des dessins pour sa fille, pris dans une histoire qui fut une orgie de sang. »

En exhumant les victimes de la « Grande Terreur » (environ sept cent cinquante mille exécutions entre 1937 et 1938), Olivier Rolin dresse le portrait d'un homme ordinaire, et partage avec le lecteur la genèse de son récit.
Le livre est en soi une plongée stupéfiante dans la Russie sanglante de Staline, pourvoyeuse de victimes hébétées, parmi les plus innocentes que les révolutions puissent produire, elles-mêmes, au bout du compte, toujours défigurées, toujours piétinées et trahies.

Aussi précis que possible vis-à-vis de l'indescriptible folie qui s'était logée dans le cerveau même de l'appareil d'état, l'auteur exhume une victime exemplaire et expiatoire, aussi bien la proie des démences paranoïaques les plus délirantes, que le bouc émissaire des désastres de l'agriculture collectivisée. Staline, pour se dédouaner de sa politique agricole calamiteuse, avait été bien inspiré en attribuant la responsabilité de son échec aux prévisions du météorologue…

Dans ce récit douloureux, Olivier Rolin, relatant au plus près la descente aux enfers, dans les îles Solovki, de cet homme vertueux, donne toute la mesure contradictoire de la souffrance humaine et de la servitude du révolutionnaire vis-à-vis de sa foi : « ma confiance dans le parti n'est pas ébranlé », écrit à maintes reprises Vangengheim à sa femme.

L'auteur, qui s'interroge à juste titre sur l'abnégation glaçante de cet homme , lequel n'est ni un génie, ni un héros, lequel n'est qu'un homme « moyen », ne se détourne pas, loin de là, de son calvaire enduré. L'être écrasé, humilié, oublié et dans le plus profond dénuement, est ce que l'on retient de cette effarante réalité.
Ainsi, dans une écriture éminemment détaillée, nous suivons, horrifiés, l'itinéraire accablant de Féodossiévitch Vangengheim, qui, pour se distraire, fabriquait, pendant ses moments d'isolement, des portraits de Staline avec des éclats de pierre !

Nous sommes abasourdis de tant de cruauté envers cet ingénu, et tellement bouleversés à la toute fin du livre par l'assemblage poignant des modestes dessins, à visée pédagogique, que cet homme méprisé destinait à sa fille pour son apprentissage. Cette sobre collection de dessins colorés et remplis d'espièglerie, tragiquement exposée comme dans un appendice, nous témoigne, ô combien, de sa sollicitude envers sa petite fille, quatre ans, qu'il ne reverra plus. Une dizaine de planches : Herbiers arithmétiques, devinettes, baies, animaux…

Au bout de ce chemin, d'une intransigeante pureté, les interrogations d'Olivier Rolin sur la genèse de son livre synthétisent en quelques pages son histoire personnelle et celle, contradictoire, de notre histoire commune avec l'URSS, la Russie, mettant en examen nos sentiments discordants vis-à-vis de ce qu'il nomme « l'épopée des temps modernes », vécue comme une promesse par des millions de gens….
Puis, « L'ignominie est si grande », écrit-il… la plaie, inguérissable…
« ces centaines de milliers de morts, dans les forêts de la nuit… ».

http://www.christinamirjol.com/
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Ce livre-là, je l'attendais. Comme la promesse toujours renouvelée d'une lecture qui plus qu'aucune autre me comblera totalement.

Lire les mots, les phrases, les textes d'Olivier Rolin, c'est lire une matière poétique, c'est lire un texte d'une exceptionnelle densité. Car quel que soit le sujet qu'il choisit, il convoque pour l'aborder tous les écrivains qui l'ont précédé et qui en ont parlé avant lui.
Sa connaissance d'un sujet passe d'abord par la découverte qu'il en a lui-même faite au travers des livres qu'il a lus. Dès lors, il se glisse dans un continuum littéraire et nous invite à le suivre, à marcher dans ses pas pour découvrir un pays ou un événement qui ont d'abord une existence littéraire, avant d'avoir une existence matérielle, et auxquels il ajoute sa propre voix.
A des mots, que nous avons ou non en partage, il ajoute ses propres mots qui, comme des strates successives, donnent chair à ce qui est révélé. Car le monde n'existe que parce qu'on le dit, comme il nous l'avait si magnifiquement démontré dans ce qui m'apparaît aujourd'hui comme son manifeste littéraire et qui reste pour moi son chef-d'oeuvre, L'Invention du monde. L'écrivain y apparaissait comme un démiurge, orchestrant le monde, lui conférant sous son apparent chaos une véritable unité.
Dès lors tous les mots sont conviés et aucun n'est à exclure - qu'ils appartiennent à des langues étrangères, à différents niveaux de langue, du plus soutenu au plus familier, si la trivialité de ce qui est dit l'exige, qu'ils soient issus d'articles de journaux ou d'encyclopédie, de romans, de poésies, de notices techniques... tout ce qui produit du sens a sa place. Et c'est ce qui fait pour moi la beauté et la richesse de ses textes.

De quoi Olivier Rolin nous parle-t-il aujourd'hui dans le météorologue ? D'un homme ordinaire, un Russe issu de la noblesse qui choisit par conviction personnelle de mettre ses compétences scientifiques au service de la classe ouvrière et de la Révolution.
S'appuyant sur les lettres qu'il écrivit à sa femme et à sa fille, Rolin retrace les dernières années de la vie d'Alexei Féodossiévitch Vangengheim, celles qu'il passa dans un camp.
Ce faisant, il sonde son âme. Il essaye de trouver le moment où la confiance qu'il avait placée dans le Petit père des peuples et dans le régime socialiste fut rompue. Si toutefois elle le fût un jour. Car briser cette confiance c'eût été mourir avant même de recevoir cette balle dans la nuque qui mit définitivement fin à ses jours dans une forêt glaciale de Sibérie. C'eût été anéantir l'objet d'une vie. Un être humain a-t-il la force, même s'il est - ou justement quand il l'est - terrassé, muselé par la terreur et la tyrannie, de renoncer à ce qui donne sens à son existence, lui permettant ainsi d'en supporter le poids ?
Au travers du destin singulier d'un être moyen, d'un individu comme vous et moi, Olivier Rolin montre le fonctionnement terriblement oppressif de cette effroyable machine à broyer l'humain que fut le régime stalinien.
Par son écriture extrêmement précise, ses observations parfois cliniques, telle cette litanie des noms de ceux qui furent exécutés avec Vangengheim, il parvient à restituer les lieux, les acteurs et l'atmosphère de cette terrifiante tragédie. La lecture en est saisissante.

Pourquoi un tel sujet ? Parce qu'il interroge l'idéal révolutionnaire, dans sa dimension collective autant qu'intime. Un idéal qui fut bien évidemment au coeur de l'existence d'Olivier Rolin lui-même, qui embrassa la cause révolutionnaire en militant activement au sein du mouvement maoïste dans les années 70. Pas étonnant d'ailleurs de voir le narrateur et son héros se confondre parfois au fil du récit...
Comme pour nombre de personnes, la désillusion fut à la mesure de l'espoir. Une douleur, une béance que rien n'est venu combler par la suite. Olivier Rolin n'en finit pas d'interroger cet élan qui une fois brisé a laissé le champ libre à un individualisme forcené et à la formation de la société ultralibérale que nous connaissons aujourd'hui. Une réflexion qui concerne chacun de nous, qu'on le veuille ou non. Quelle est notre place dans la société ? Quel avenir voulons-nous construire ? Et avec quels moyens ?

Ici, vie et récit s'unissent intimement ; les espaces littéraire et politique, au sens noble du terme, se confondent. Et c'est cela, sans doute, qui me touche si profondément. Car en ce qui me concerne également, la littérature est la clef d'accès au monde. La plus belle et la plus riche qui soit.

Lien : http://delphine-olympe.blogs..
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"J'ai raconté aussi scrupuleusement que j'ai pu, sans romancer, en essayant de m'en tenir à ce que je savais, l'histoire d'Alexeï Féodossiévitch Vangengheim, le météorologue. Un homme qui s'intéressait aux nuages et faisait des dessins pour sa fille, pris dans une histoire qui fut une orgie de sang."
C'est par ces lignes que l'auteur conclut son livre.
Vangengheim était un météorologue de haut rang, membre du Parti communiste de l'Urss. Dans les années 30 il fut injustement condamné au Goulag et interné dans le camp des îles Solovki. Pourquoi ? Nul ne sait. La seule hypothèse plausible est une dénonciation calomnieuse par l'un des ses adjoints ambitieux, voulant prendre sa place.
Olivier Rolin s'intéresse à cet homme, et retrace ici son histoire en se fondant sur quelques rares témoignages, dont les lettres émouvantes que l'exilé adressa à sa famille et dont quelques unes ont pu être sauvées.
Au-delà des terribles conditions de vie dans ces camps, ce qui frappe est la fidélité et la foi que Vangengheim manifestera jusqu'au bout envers son parti, persuadé que son internement résulte d'une erreur et que celle-ci sera réparée.
Il n'en fut rien : en 1937, il fut évacué des îles Solovki en compagnie de 1800 détenus, transféré sur le continent et fusillé. Pourquoi, comment ? Nul ne sait.
Voilà un témoignage terrible sur le Goulag, la réhabilitation d'un homme ordinaire, honnête et naïf, un livre écrit avec sobriété, sans emphase ni pathos excessif, 180 pages denses et émouvantes à faire lire absolument aux jeunes générations déjà loin de cette époque terrible.
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À travers l'histoire d'Alexeï Feodossiévitch Vangengheim, Olivier Rolin raconte la vie d'un homme broyé comme des milliers d'autres, comme ses bourreaux eux-mêmes, par un système devenu criminel, destructeur, au nom d'une idéologie qui, pourtant, soulève ou a soulevé tant d'espoirs chez ceux qui y ont cru, à commencer par le météorologue lui-même. Récit poignant et glaçant, lu à l'heure où Poutine rêve d'une grande Russie en envahissant l'Ukraine, reproduit les mensonges d'Etat et déclare illégale l'association Mémorial qui a permis de connaître la vérité sur la mort de cet homme et des autres...
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Magnifique récit, très poignant. Olivier Rolin, relate suite à la découverte d'un album reproduisant une série de lettres envoyées par un déporté à sa fille, lors d'un voyage aux îles Solovki, l'itinéraire tragique d'un brillant météorologue russe. le roman nous replace en URSS durant la période appelée la Grande Terreur et relate le calvaire d'un innocent pris dans l'engrenage d'un régime politique en lequel il avait totalement foi. Jugé et condamné à tort, comme tant d'autres, il fit les frais de la paranoïa stalinienne et fut envoyé en camp de travail d'où il ne ressortira jamais. Au travers des lettres envoyées à sa femme et sa fille, se dévoile le portrait d'un homme tout à fait ordinaire avec ses forces et ses faiblesses, faisant toute confiance au Parti et qui jusqu'au dernier moment gardera l'espoir de retrouver un jour les siens.
Ce récit mérite vraiment d'être lu car il fait avant tout revivre la mémoire des milliers d'innocents disparus durant cette période terrible de notre histoire.
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On a certes déjà écrit sur la barbarie stalinienne mais la lecture de ce récit n'en est pas moins édifiante.
En 1934, Alexeï Féodossiévitch Vangengheim, météorologue et membre du Parti Communiste, est arrêté arbitrairement pour acte de sabotage contre l'agriculture soviétique et déporté dans un camp situé sur une île au nord de la Russie, "il fallait trouver des boucs émissaires pour les désastres de l'agriculture collectivisée."
Emu par la correspondance envoyée par cet homme à sa petite fille âgée de cinq ans au moment de son internement, Olivier Rolin a enquêté pour évoquer les dernières années de la vie de celui qui a longtemps cru à un dénouement heureux de sa détention. Loin d'être lucide sur Staline et le Parti Communiste, Vangengheim finira exécuté au fond d'une fosse en 1937.
A travers la destinée tragique d'un homme finalement ordinaire, Olivier Rolin contribue à montrer à quel point certains ont pu se fourvoyer dans le soutien apporté jusqu'à l'aveuglement à un régime dont la cruauté n'avait pas de limites.
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Magnifique roman biographique de cette victime de l'épuration stalinienne. Visite inoubliable de cet endroit aussi magique que maudit. L'écriture est concise, dans le pur style d'Olivier Rolin. le météorologue nous attrape, l'injustice dont il est question est habilement distillée tout au long du texte, montrant la folie de ce dictateur et du monde de terreur dans lequel il plongea la Russie.
Une réussite totale. Merci M Rolin.
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Olivier Rolin retrace le destin d'Alexei Féodossiévitch Vangenheim, scientifique et membre du Parti qui fut arrêté et déporté sous le régime de Staline. A travers sa correspondance avec sa femme et sa fille on découvre le caractère terriblement banal d'une histoire semblable à celles de milliers d'autres détenus, un homme que l'auteur ne cherche pas à transformer en héros. Sa foi inébranlable dans la justice de son pays, son refus de voir la réalité en face nous exaspèrent même parfois. C'est une des forces du roman que de nous montrer la difficulté de renoncer à croire à l'idéal promis par cette révolution, la fin d'une espérance d'un monde meilleur. Cela ne perdurerait-il pas encore aujourd'hui? L'horreur de cette période est souvent méconnue du grand public, au contraire des crimes nazis par exemple. La description des années qui suivirent la chute du régime et la façon dont ces assassinats ont été maquillés sont d'ailleurs édifiantes.

L'autre force du Météorologue réside dans les procédés narratifs: Rolin mêle avec justesse l'enquête, les faits historiques,la retranscription des lettres ou les sentiments du condamné et joue avec les tons, maniant même l'ironie, pour donner du rythme à son récit.

Enfin, je vous laisse découvrir la plus belle partie, la conclusion de ce roman surprenant.
Lien : https://yaourtlivres.canalbl..
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