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EAN : 9782020375061
267 pages
Seuil (28/08/2002)
3.34/5   93 notes
Résumé :
Poétique des années 60. Ainsi Olivier Rolin aurait pu signer également son livre Tigre en papier. Des années 60, avec tout ce qu'elles possédaient pour rugir et mordre dans la vie. Né entre la mère des défaites et Diên Biên Phu, le narrateur s'emploie à raconter sa jeunesse en roulant frénétiquement le long du périphérique parisien. Une jeunesse qui voit se déployer portraits, objets et gestuel. C'est le temps des copains, des clampins sympathiques "à la vie à... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (14) Voir plus Ajouter une critique
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Pourquoi au singulier ? Car les tigres de papier, ils sont nombreux en cette fin des années 60. Il y a bien sûr les américains qui s'embourbent au Vietnam et qu'haïssent les jeunes maoïstes que sont Rolin et ses amis, qui en sont d'autres ; des tigres en papier. L'auteur nous décrit ces anciens compagnons de « la Cause » comme idéalistes et romantiques, mais surtout, avec le recul, comme des pieds nickelés naïfs et imbéciles. le ton est donc désenchanté et ironique, une sorte de nostalgie goguenarde pleine d'autodérision. L'action se passe en une nuit sur le périphérique parisien, une vieille D.S. Citroën tourne au rythme de l'Histoire parisienne, et de la litanie pénible et colorée des néons publicitaires. Martin (Rolin) conduit en racontant à la fille de Treize, son vieux pote de l'époque « héroïque », leurs mésaventures d'alors. Ces jeunes utopistes pensaient refaire le monde et entrer dans l'Histoire en la changeant radicalement. Ils se sont mis le doigt dans l'oeil, la Pax Americana a prit la main. Il parait même, selon certains gugusses, que l'Histoire est finie ( ?!?), personnellement, je pense qu'elle s'est seulement assoupie, mais pour combien de temps ?
Vers la fin du roman (ou, autre étiquette, de l'autofiction), Martin nous raconte son voyage au Vietnam - celui d'aujourd'hui - sur les traces du « lieutenant » (son père), mort à une époque ... encore Historique. L'épisode formidable du retour en moto et sous l'orage, de My-Thô à Hô-Chi-Minh-Ville, vaut à elle seule la lecture de ce beau texte, plus poétique qu'il n'y parait. Allez, salut camarades lecteurs  .
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A la demande de la fille de son meilleur ami et camarade de luttes mort depuis longtemps, un homme exhume leur passé militant dans cette France de Pompidou qui menaçait de reprendre son « ennui » après l'épisode Mai 68 et où quelques jeunes maoïstes de la Gauche prolétarienne espéraient faire vivre la flamme de la Révolution.

Ainsi, au volant de sa vieille DS, sur un périph' désert où souvenirs imprécis et désirs réfrénés baignent dans l'omniprésente lumière des panneaux publicitaires (symboles de notre époque de « fin des idéologies »), revivent sous sa plume souvent acerbe, mais sans aigreur ni nostalgie, dans un récit où les faits s'enchevêtrent et s'emmêlent dans les digressions du cinquantenaire, ces petits épisodes de jeunesse idéologique abandonnée avant qu'en « Allemagne et en Italie l'histoire de ces années-là ne s'enfonce dans le sang » (p. 92).

On y croise alors certains de ces maos aujourd'hui passés au Rotary, les Benny Lévy (Gédéon) ou Serge July (Amédée), des jeunes intellectuels honteux se rachetant auprès des masses dans ces établis qui les firent vivre au milieu des ouvriers, des bourgeois en quête d'aventure (qu'on n'appelait pas encore des bobos), des étudiants avides de servir et de transcendance, des ratés, des pauvres bougres un peu à la masse, tous un peu confondus dans l'action mais aux prises, inexorablement, avec les affres de leurs indécrottables individualités, donnant raison à cet anonyme qui avait écrit sur le tableau de la Sorbonne que « les structures ne descendent pas dans la rue ».
Tigre en papier est une sorte de road movie dans le temps où Martin, le narrateur, essaye de trainer sa petite Candide dans une Weltanschauung marxiste qui lui est étrangère. Ce n'est ainsi ni un essai, ni un documentaire, ni un dialogue critique (Marie s'avère vite n'avoir d'épaisseur que corporelle), mais le ''simple'' témoignage d'un type un peu ivre, un peu perdu, qui tourne sur un périph' dont l'écrivain aura pris le soin de décrire tous les panneaux publicitaires rencontrés ; procédé au demeurant très superflu et très peu efficace, si ces quelques fantômes de lumière étaient censés symboliser le début du XXIème siècle, puisque, dès les premières pages, l'oeil passe rapidement sur ces intermèdes redondants.

Désireux de toucher à l'image juste, Martin, ayant trouvé une petite Marie / Madeleine pour l'écouter à défaut de pleurer sur son sort, monologue le plus souvent et s'interroge incessamment sur des détails infimes (…), qui, tout en créant une atmosphère de brouillon et de bouillonnement sans fil directeur, rend plutôt bien le style de la débauche de bonne volonté de ces militants sans réelle efficacité. Tout en donnant un petit surplus d'authenticité à ce récit.
Authenticité, car, non pas que le souvenir soit tenu à la précision d'une reconstitution d'enquête — et au contraire le flou fait bien partie de leur histoire, comme le souligne le conteur —, il fallait montrer que l'image, ce fantôme que pourfendait Platon, fut bien la substance de leur engagement. La force du témoignage par rapport à l'étude est de permettre d'enfiler une certaine quantité de petits épisodes que Marcel Duchamp aurait qualifié d'« infra-minces », et qui servent de supports concrets à une analyse, certes moins systématique, mais bien plus fidèle que ne pourrait l'être une analyse traitant son sujet de manière plus lointaine. Ainsi, le fatras d'éléments du décor des années 70, d'idéologie mao, d'épisodes ou de situations qui s'entremêlent dans le roman, esquisse avec plus de force qu'un tableau trop ennuyeusement réaliste, le mélange de besoin personnel, de théâtralité narcissique ou sincèrement vécue, de mentalités collectives qui ont pu (et peuvent encore) pousser un jeune homme à se consacrer (dans son sens le plus fort) à de tels groupuscules plutôt qu'à suivre une vie plus ordinaire, tâchant de réussir à se faire une place confortable dans la société héritée de ses parents. On touche au point le plus vrai quand il montre de l'intérieur (mais avec l'appui du regard distant de l'âge) ce que seul un pamphlet aurait pu montrer du dehors, le côté puéril ou livresque (…) d'où procède tout engagement dans le militantisme politique révolutionnaire, sans le railler et en essayant toujours d'en garder la grandeur intrinsèque. Fût-elle, cette grandeur, impossible à atteindre, et avilie au moment même où ils essayaient de s'en rendre dignes.

Pour le côté puéril, en effet, a-t-on lu toute la littérature marxiste quand on s'engage à 20 ans dans la Gauche prolétarienne ? Certainement pas. Parce qu'on a montré les coulisses du théâtre stalinien et que l'illusion chinoise n'a pas encore été révélée, on deviendra maoïste. On a envie d'adopter une pose, une certaine poésie de la révolte soutenue par toute une iconographie de héros tombés avant vous et que le sublime de la guerre aura auréolé, soutenu par le sentiment que la vie vaut plus d'être vécu en Rimbaud clandestin qu'en élève studieusement assis et futur travailleur sans histoire.

Pour la part d'héroïsme en quête de hauteur, rien de mieux que le danger, l'interdit et un peu de sang qui menace au coin de rue, pour que, sous la menace du risque encouru et des privations en commun, la fraternité prenne un tour nouveau.

Une fois passé ce sensationnalisme, quand l'homme plus mûr pèse la signification exacte de ses actes et leur efficacité, quand il comprend qu'il a plutôt incarné Derrick que Trintignant jouant leur propre rôle, il abandonne cette supercherie grandiloquente qui a fait d'eux des « tigres en papier » (selon la formule de Mao qualifiant ainsi les EUA), à défaut de les laisser devenir de dangereux partisans fanatiques. Il lui faut bien s'avouer alors, ou simplement expliciter ce qu'il savait déjà au fond de sa conscience, que les jeunes qu'ils furent ne désiraient pas tant émanciper l'humanité (qu'ils ne connaissaient pas) que leur propre existence. Et tout ceci Rolin nous le restitue avec une légèreté qui n'en est que plus forte, luisant encore un peu de l'éclat du rêve d'antan, sans tout le langage pontifiant de ces petits enfants-soldats apprentis désidéologues abrutis par la théorie de la spontanéité chinoise, mais par l'ironie tendre et lucide d'un être qui a vu couler bien d'autres eaux sous les ponts...

(La suite sur mon site...)
Lien : http://dbcdf.com/app-crit/re..
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Bien que j'ai lu ce livre il y a plusieurs années déjà, j'en ai gardé un très bon souvenir. le thème m'a passionné ainsi que la construction du roman et le style d'écriture d'Olivier Rolin. La construction est en effet un peu particulière puisque le lecteur suite des évènements qui se sont passés des années plus tôt et le narrateur, Martin, qui nous replonge complètement dans ce que fut la guerre du Vietnam et de ces jeunes engagés qui croyaient dur comme fer à la puissance maoïste et rêvait la vie en rouge pour l'éternité. Pour eux, cette "guerre du peuple" était un moyen de terrasser l'immense machine de guerre qu'était l'Amérique..
Martin narre donc ses évènement à la fille de l'un de ses frères d'armes, Treize, décédé au combat.
Ce livre est une pure merveille , touchant et attendrissant par moments mais aussi dur en raison du thème évoqué, celui de la guerre, où des milliers d'âmes perdirent la vie. A découvrir !
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Certes, le livre fait un peu "les Martiens parlent aux Martiens" et il faut un doctorat en maoïsme pour comprendre les nombreuses allusions, références, "private jokes" et personnages de ce roman à clés...
Mais Olivier Rolin a une telle qualité d'écriture, son roman est si bien construit, sa vision si aigüe que l'on se prend au jeu et dévore son portrait au vitriol (tendre, mais au vitriol quand même...) d'une génération qui faillit être perdue.
Génération qui manqua basculer dans le terrorisme.
Episode peu connu, en effet : "La Cause du Peuple" (ou plutôt son chef Benny Lévy) décida de dissoudre son organisation (dont la branche armée, la "Nouvelle Résistance Populaire", était dirigée par... Olivier Rolin) en 72, et seuls quelques rares dissidents (sur les milliers de militants fanatisés que comprenait "La Cause") décidèrent de désobéir pour rejoindre l'anarchiste André Rouillan et former "Action Directe"...
Autrement dit, notre pays est passé à deux doigts des exactions massives de la RAF allemande ou des Brigades rouges italiennes.
Un grand merci donc à Benny Lévy et... Olivier Rolin.
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Mai 68 raconté par un des ses acteurs (dans un des groupuscules maoïstes), une trentaine d'années plus tard, et (curieuse mise en scène !) dans une voiture sur le périphérique de Paris, avec la fille d'un ancien compagnon de barricade qui vient de mourir. Des bons passages (avec parfois, très rarement il faut bien le dire, une courageuse "autocritique") mais je reproche à Olivier Rollin une certaine cécité à l'égard des nouveaux types de militance. "Autrefois c'était quand même mieux !" est un peu le slogan (un de plus ...) qui résume ce livre. Heureusement certains comme Dany Cohn-Bendit ont su murir sans renier leurs idéaux.

(note de lecture rédigée en 2004)
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Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
Mais vos modèles à vous, vous les trouvez dans la pub, cette espèce d’éternité de pacotille qui est le contraire de l’histoire. Alors là, évidemment, c’est le bonheur à tous les étages. Mais ça ne marche pas comme ça. L’humanité, merde, on n’est pas des top modèles…
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Angelo était alors en hypokhâgne, expliques-tu à la fille de Treize, c'était le chef des lycéens de La Cause. Avec ses troupes il interrompait les profs par des quolibets ou des imprécations, ça dépendait de leur humeur, ils se baladaient nus dans les couloirs, introduisaient des animaux puants dans les locaux de l'administration, répondaient à coups de grenades artisanales aux observations des "surgés", organisaient, aux beaux jours, des baignades dans les bassins des cours d'honneur, ils invitaient des tapineuses aux cours de philosophie, ils créaient dans une salle d'étude une "prison du peuple" où ils prétendaient enfermer de supposés fascistes, bref ils ne s'ennuyaient pas.
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Et pendant que tu racontes ces histoires que scande le métronome d’une jeune jambe au rythme d’une de ces musiques qu’on passe dans les fêtes de vieux, Cesaria Evora ou Paolo Conte, ou Alain Souchon pour faire plus peuple, ou un bon vieux Rolling Stones pour rappeler qu’on a été jeunes nous aussi, ou alors Richard Anthony ou Françoise Hardy, tous les garçons et les filles de mon âge, pour l’ironie (et il se peut que tu les adresses, ces histoires, à cette jambe gracieuse et à l’autre sur laquelle, croisée, elle bat, à rien ni personne d’autre, il se peut que ces jambes qui font jaillir tant de lumière de la courte toile noire de la jupe soient le reflet lointain de celles de Chloé, comme les signes d’une parenthèse qui se ferme, où aura tenu presque toute ta vie), pendant que tu parles ainsi les masques continuent leur danse lente de cyprins dans la profondeur du miroir, trouble comme celle d’une eau pas changée depuis longtemps.
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Mort sur le rach du Mékong, donc, le lieutenant, quelques mois après ta naissance : ça faisait que tu connaissais ce mot-là, rac ou rach, bien avant de lire Un barrage contre le Pacifique. Mot aujourd’hui disparu, entré dans la langue avec la conquête de la Coquinchine, sans doute, et sorti sur la pointe des pieds après Diên Biên Phu. Sorti en catimini de la langue française comme elle-même s’était retirée du Vietnam, réduite désormais à quelques traces bien plus rares, plus mortes que celles du latin chez nous, un « veston » proposé à la vitrine d’un tailleur, une « villa Les Roses » oubliée sous les festons mauves des bougainvillées, un signe « RF » mal martelé au fronton d’une porte.
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Cet entrefilet dans Le Monde faisait passer la mort du lieutenant de l'état de malheur domestique à celui de "res gesta", d'événement inscrit dans le Grand Registre, presque d'exploit : tant l'écrit (non l'image) a partie liée avec l'Histoire.
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Videos de Olivier Rolin (40) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Olivier Rolin
Rencontre avec Olivier Rolin autour de Jusqu'à ce que mort s'ensuive paru aux éditions Gallimard.


Olivier Rolin, né en 1947 à Boulogne-Billancourt, est un écrivain français, lauréat notamment du prix Femina en 1994 pour Port-Soudan et du prix France Culture en 2002 pour Tigre en papier. Il a publié entre autres: Circus 1 (Éditions du Seuil, 2011), Bric et broc (Verdier, 2011), Circus 2 (Seuil, 2012), Veracruz (Verdier, 2015), Extérieur monde (Gallimard, 2019) et Vider les lieux (Gallimard, 2022).
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