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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Cet ouvrage est tout d'abord une critique d'un certain orientalisme qui crée l'Orient pour en faire un espace marqué par la barbarie et la sauvagerie. C'est d'ailleurs cette manière de faire et de voir qui a toujours caractérisé la littérature coloniale, mais également le discours de certains auteurs autochtones ou d'autres écrivains extrêmement controversés comme Albert Camus par exemple. Said s'insurge contre ce discours réducteur et propose une redéfinition de l'appareillage conceptuel ciblant les anciennes colonies. C'est dans ce sens que son livre fait date, déconstruisant le regard de l' « Occident » sur un « Orient » schématisé, stéréotypé , une création de l'imaginaire « occidental », produit d'une vision du « dehors », faisant de l'Autre, un bloc singulièrement pauvre, qui ne pourrait retrouver une certaine humanité que s'il acceptait de se fondre dans l'instance européenne. Mohamed Arkoun va également dans ce sens en évoquant le cas de l'Algérie : "Les Français modernes, représentants des Lumières laïques, ont créé en Algérie le droit de l'indigénat conçu et géré par l'État républicain. L'Autre est ainsi vraiment l'étranger radical, qui ne peut entrer dans mon espace citoyen ou dans mon espace de valeurs religieuses et/ou démocratiques que s'il se convertit ou s'assimile, comme on dit encore à propos des immigrés".

Nourri des textes fondateurs de Fanon (Les damnés de la terre ; Peau noire, masques blancs), de Césaire (Cahier d'un retour au pays natal ; Discours sur le colonialisme) et d'Albert Memmi (Portrait du colonisateur) et d'une certaine littérature anglo-saxonne rejetant l'Autre, Edward Said propose une relecture du monde, démontant les mécanismes du fonctionnement du discours colonial traversant les contrées des pratiques sociales, politiques, littéraires et artistiques. le postcolonialisme qui va par la suite s'enrichir des travaux de Bhabha et de Spivak, apportant une autre manière de lire les réalités coloniales, notamment, à partir des expériences asiatiques et indiennes, propose certes une nouvelle exploration du discours colonial, mais peut tomber dans les pièges du rejet de l'"Occident" considéré comme un bloc, une totalité dépouillée de ses contradictions et de ses luttes, d'ailleurs non défini, ni délimité et du particularisme qui engendrerait une lecture essentialiste du monde, loin des jeux libérateurs et opératoires de l'Histoire. Une lecture fondée sur les jeux de polarités pourrait neutraliser toute lecture sérieuse et altérer la réalité. Avec l'émergence d'idées nouvelles et de débats nouveaux caractérisés par la présence d'interrogations puisées dans les propositions de Deleuze, Foucault, Derrida et Ibn Khaldoun, Ibn Rochd ou Abed el Jabiri, de sérieux positionnements sont possibles, nourris de la positionalité chère à Foucault, de la dissémination (Derrida) ou de la notion de rhizome, mais surtout de Glissant, Said, Mroua et d'Arkoun et de l'idée de transculturalité de Fernado Ortiz rendant désormais obsolète cette histoire d'interculturalité, trop peu engageante.Une autre critique, plus ou moins libérée des canons dominants est-elle possible ? N'y a-t-il pas risque d'une nostalgie et de la célébration d'un passé mythique ?
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Cet ouvrage suscitait ma curiosité depuis longtemps, alors que je le voyais cité, commenté et critiqué par différentes études, essais et même mouvements idéologiques.
J'ai enfin pu le lire pour me faire ma propre idée.
Le grand apport d'Edward SAID est d'avoir donné un cadre conceptuel, une méthode avec des outils, des arguments et des exemples pour saisir l'Orientalisme dans sa globalité; dans sa dimension littéraire, scientifique et politique.
L'objet de ce livre est de montrer comment l'orientalisme comme sytème de fictions idéologiques apparu en Europe au 18ème siècle, a contribué à démystifier, représenter, s'approprier, dominer et enfin façonner l'Orient sur plus de deux cents ans.
On parle ici de l'Orient comme concept abstrait figé (tout comme l'Occident) crée par l'invention d'une ligne de démarcation géographique imaginaire pour désigner «l'autre» opposé au «nous».
L'oriental devient un mythe déshumanisé.
La relation entre Orient et Occident qui en découle est une relation antagoniste et déséquilibrée.
Cette relation asymétrique qui dénote un rapport de domination peut être étendue aujourd'hui au rapport Nord Sud.
Il ne s'agit dans cette étude ni de condamner ni de faire le procès de l'Occident mais de comprendre et rationaliser cette relation: avoir une prise de conscience.
L'objectif est de nous inciter à adopter une démarche plus humaniste qui intègre que les cultures et les civilisations sont interdépendantes et liées. Toute culture est hybride et hétérogène.
Ce livre paru en 1978 est encore plus que jamais utile pour comprendre notre monde.
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"L'Orientalisme: L'Orient Crée par l'Occident" est un très grand livre basé sur une érudition énorme. Son très grand succès, cependant, est du comme souligne Saïd dans sa "Postface" de 1994 à la bonne chance. "L'Orientalisme" est sorti en 1978 l'année où l'Intifada a commence. La révolution islamique en Iran (1979), l'invasion soviétique de l'Afghanistan (1979) et l'invasion de Liban (1982) ont suivi en succession rapide. Bref, "L'Orientalisme" a répondu à une demande importante. Tout le monde voulait connaitre la genèse des mythes et des fausses conceptions qui ont entrainé tant d'événements fâcheux.
La grande thèse de Saïd est que "l'Orient" est une fiction intéressé élaborée après les guerres napoléoniennes pour justifier la domination par la France et l'Angleterre au Moyen-Orient, en Inde , et en Chine. En fait Saïd discute surtout de l'imagé erroné fabriqué des arabes du Moyen-Orient. À l'avis de Saïd les Orientalistes n'ont rien fait que dénigrer les peuples arables et leur ont fait beaucoup de tort.
"L'Orientalisme" a été au début un terme crée pour désigner des nouveaux programmes universitaires dédiés aux langues de l'Asie. On étudiait de préférence des versions anciennes des langues ou des langues carrément mortes comme le sanscrit. Les Orientalistes présentaient des arabes comme étant rusés plutôt qu'intelligents, paresseux et inapte à se gouverneur. Surtout les arabes dans la vision orientaliste étaient luxurieux.
Saïd choisit de ne pas faire l'analyse du mouvement des peintres orientalistes dont le chef de file étaient sans question Jean-Léon Gérôme. L'emploi des tableaux de Gérôme dur des éditions du livre est assez trompeur. Saïd ne mentionne pas non plus le Schéhérazade de Rimski-Korsakov. Il a été de métier un prof de littérature comparé.
Saïd fait preuve d'une maitrise remarquable de la littérature francais. Il fait des commentaires très intéressants des écrits orientalistes de Gustave Flaubert, Gérard de Nerval, François-René de Chateaubriand et de Victor Hugo. Il fait un analyse très détaillé de l'oeuvre de l'universitaire Ernest Renan qu'il généralement reconnu comme le fondateur du mouvement orientaliste académique. Finalement, Saïd parle beaucoup d 'Abraham-Hyacinthe Anquetil-Duperron qu'il faut considérer comme un précurseur du mouvement orientaliste.
Saïd parle aussi beaucoup des orientalistes anglophones, notamment Sir Richard Burton, Lord Cromer (Evelyn Baring), Sir Hamilton Gibb, Edward Lane, T.E. Lawrence et Gertrude Bell. Dans l'ensemble je connais beaucoup moins bien les auteurs de langue anglaise que ceux de langue français. Les anglais ont commencé à dominé l'Orientalisme vers la fin du dix-neuvième. Ils insistaient surtout sur la incapacité des arabes de gouverner leurs propres pays. Ils ont fini par justifier l'attitude des diplomates, militaires et politiciens américains qui au moment où Saïd écrivaient avaient très peu d'estime pour les arabes.
Le grand vilain pour Saïd est Bernard Lewis qui continue la grande tradition de dénigrement des arabes par les Orientalistes et qui possédait à la fin du XXe siècle une grande influence malsaine sur les instances du pouvoir américain.
J'ai beaucoup de réserves sur bien des points dans le livre. Notamment je pense que Saïd est très injuste vers Gertrude Bell et T.E. Lawrence qu'il regarde comme étant des Orientalistes traditionnels qui voulaient garder les peuples arabes sous la tutelles des pays occidentaux. En fait Bell et Lawrence voulaient plus d'indépendance et plus d'estime pour les arabes.
Néanmoins il faut reconnaitre que "L'Orientalisme" est un excellent livre et les connaissances de Saïd" sont remarquables. le coté polémique du livre est toujours valable. Les pays de l'Occident n'accordent toujours pas aux peuples arabes le respect qu'ils méritent. Tant et aussi longtemps que ca ne change pas les tragédies que nous connaissons vont continuer à se produire.
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“Arabs are simply Jews on horseback, and all are Orientals at heart.” How's that for a quote to catch your attention! It's one of thousands of examples used by the brilliant Edward Said as he puts the spotlight on the so-called experts of a poorly defined geographical entity called the Orient. This is for the most part the largest part of the globe that isn't, in the minds of many, referred to as the Occident, leaving, for the most part, Africa without a place to fit in.

The quote by the way is by self-proclaimed Orientalist and former British Prime Minister Benjamin Disraeli, from his novel Tancred.

The UK, followed later by the US, created Orientalism as an academic label - schools of Orientalism popped up at respected universities in both countries, and were, almost entirely, run by non-orientals. They existed to explain the orient - whether it be the Middle East, India, China or Japan, to a domestic audience.

Said argues that to this very day, schools of Orientalism rarely consult with those for whom they create widely generalised stereotypes nor do they dip into the wealth of literature produced by those they claim to know so much about.

Today's Orientalists, (Said writes in an updated afterword marking the 25th anniversary of Orientalism's publication) especially in the US, are most concerned with security issues and use their own brand of knowledge to advise government and business of any apparent threat, especially from the Middle East (read: the Arabic-speaking lands).

Little has changed since the book first appeared, except perhaps that the gap between the two worlds has widened.

Our level of understanding of the “other” has probably diminished as the world becomes more polarised. There's probably never been a better time to read Orientalism. We need to exchange with each other rather than study and make assumptions.
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