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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Le livre est dense et remuant.

Dense en ce qu'il secoue la pensée.

Le Quichotte est décrit dans son universalité et les lettres adressées à son auteur Miguel de Cervantès par Lydie Salvayre analyse les moindres errances (c'est le cas de le dire) de l'hidalgo trop souvent réduit à une histoire de moulins.
La « quête » du héros est décortiquée et nous amène à des préoccupations contemporaines.
Tout continue, tirer le fil de l'histoire des hommes et jamais il ne se casse…

Remuant car il renvoie le lecteur à lui-même, à tenter de comprendre les motivations qui animent cette quête et où lui-même se situe.

Riche, tourbillonnant, à lire, à user tant chaque phrase contient des mots qui percutent.
Il y a des passages sur la littérature, sur l'illusion et son contraire, sur la violence, sur l'amour, sur l'attitude humaine : ses oppositions, ses servitudes, ses violences, des passages qui atteignent leur but : penser, voir, peut-être comprendre.

De l'humour aussi, un humour lucide, des termes plus terre à terre mais appropriés aux situations décrites, un livre « manifeste » est-il mentionné en quatrième de couverture, un livre qui bouleverse et poursuit un chemin en chacun de nous.
Un livre qui porte « Le Quichotte » en étendard de notre monde.

Une histoire d'un temps maudit (l'Inquisition) et ses autodafés (censure actuelle mais autodafé au Canada - le livre n'arrête pas de nous renvoyer à l'actualité).
Un temps maudit qui a mis d'autres oripeaux en nos jours et c'est ce que Lydie Salvayre nous dit sans détours en laissant cependant place à l'espoir -autre Quichotte?-. Illusion?

Un livre magnifique, personnel et singulier, offert à tous, un livre qui prend place au sein de la littérature digne de ce nom.
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Il ne faut « pas pleurer », mais si « tout homme est une nuit », on peut, on doit « marcher jusqu'au soir », et puis « rêver debout »… On ne peut s'empêcher, en associant ainsi dans une seule longue phrase les quatre titres des derniers livres parus (le dernier en août 2021 au Seuil) de Lydie Salvayre, d'y repérer comme l'expression d'un cheminement têtu (débuté bien avant d'ailleurs, si face à « la vie commune », et pour exalter le « vif du vivant », l'auteure écrit, depuis longtemps, « contre »), d'une volonté de présenter la vie et la littérature, si l'on veut qu'elles vaillent la peine, comme oeuvres de résistance, élans courageux contre toutes les violences que la réalité nous oppose. Rien d'étonnant, dès lors, que l'on retrouve, au tournant de quelques pages de « Rêver debout », la mère républicaine et sa pugnace bravoure de « Pas pleurer », l'étranger inquiétant et mal accueilli, qui traverse le second livre, le fantôme de « l'homme qui marche » de Giacometti, cette sculpture avec laquelle l'écrivaine dialoguait dans la nuit du musée Picasso, cette haute figure symbolique de l'effort humain pour avancer en dépit des contraintes et des oppressions. « Rêver debout » est annoncé comme un « roman », mais s'il doit entrer dans le genre, c'est au titre de roman épistolaire, le texte se construisant autour d'une série de lettres que la narratrice/auteure adresse, au fil d'une relecture du mythique « Don Quichotte », à Cervantès. Il s'agit, d'abord, de lui faire part de son courroux contre la manière dont il ridiculise et laisse maltraiter constamment son illustre personnage tout au long de ses aventures, le sadisme avec lequel il le transforme en victime permanente des insultes et des coups d'autrui. Il s'agit surtout de rendre hommage à tout ce qui dans les propos et les gestes du héros, sans cesse bousculé et rudoyé dans le cours de l'histoire, montre sa bonté, sa générosité, toute son attention aux pauvres et aux bannis, son féminisme, sa mise en question régulière des pouvoirs politiques et religieux, du poids des institutions de l'époque, son goût prononcé, enfin, pour les chemins de traverse, l'utopie, l'importance de privilégier parfois le rêve face à la réalité, la poésie contre le prosaïsme aride du quotidien. Il faut défendre Quichotte, oui, le libre-penseur et « l'anar », nous dit Lydie Salvayre, il faut défendre aussi, d'ailleurs, le couple paradoxal qu'il forme avec son serviteur (et finalement ami) Sancho, les deux formant ensemble le miroir de notre humaine condition. Et finalement, l'auteure feint de découvrir que Cervantès n'a transformé son Quichotte en souffre-douleur que pour mieux lui faire tenir son rôle de porte-parole d'une sagesse critique, difficilement exprimable sans le masque de la fiction face aux autorités du temps, … et, bien sûr, se déclarant « fan » du démiurge et de sa créature, de l'en féliciter, en soulignant toute l'actualité de l'oeuvre et de son protagoniste. Ah, quel bonheur, encore une fois, ce nouveau Salvayre, où l'on retrouve le panache de l'éternelle rebelle, la saveur de cette langue acide autant qu'allègre, un regard politique lucide, nourri d'une joie toute spinoziste, un appel enthousiaste à ne pas se résigner à l'état des choses, au pire qui attend nos sociétés et notre planète, si nous ne faisons rien ! Alors, demain, tous des Quichottes ? Laissons Lydie Salvayre nous le suggérer, de si belle et engageante manière !
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Lydie Salvaire prête sa plume alerte et sa langue tellement vivante à sa narratrice pour interpeller Miguel de Cervantès y Saavedra. Rien que cela !

Cette dame lui reproche de trop souvent tourner en ridicule son don Quichotte de la Manche, de trop l'exposer aux railleries et aux coups de ses adversaires.
En 15 lettres qu'elle lui adresse, entre colère et enthousiasme, elle va lui expliquer tout le bien qu'il faut penser du célèbre chevalier errant.

Ce plaidoyer suffirait à nous régaler tant la vision de don Quichotte et de son ami Sancho (« égaux mais pas potes ») qui nous est donnée ici est originale et pertinente.
Mais notre plaisir est d'autant plus grand que les arguments sont développés dans une langue à la fois experte et truculente, savante et populaire.

Et quand pour illustrer son propos sur la folie de don Quichotte sont convoqués A.Artaud, P.P.Pasolini ou F.Nietzsche, qui sont autant de fous que nous aimons, nous sommes ravis.

Au fur et à mesure que nous avançons dans notre lecture nous comprenons, avant qu'elle-même finisse par l'avouer, que la narratrice ne peut vouer une telle admiration à don Quichotte, à son courage, à son désir d'absolu, à sa soif de liberté, à sa générosité dispensée sans mégoter, sans vouer une admiration et une gratitude au moins égales à Cervantès, son auteur.

Une autre originalité de ce livre, qui n'est pas le moindre instrument de sa puissance, réside dans le fait qu'un pont est tendu au-dessus des 400 ans qui nous séparent de don Quichotte.
Pour bien nous faire comprendre les conditions de vie de don Quichotte et de ses contemporains la narratrice les comparent à certains événements ou certaines situations actuelles.
Pour bien nous faire sentir les caractères et profils des gens de pouvoir et de leurs sbires auxquels don Quichotte avait à faire, elle évoque nos propres experts, technocrates et autres stars médiatiques.
Cet exercice est tout à fait réjouissant et efficace sans jamais être « tiré par les cheveux », comme pourrait dire notre épistolière, tant tout s'enchaîne comme naturellement et avec beaucoup d'évidence.
Si les événements à l'origine des aventures et mésaventures de don Quichotte trouvent un écho dans notre époque actuelle, aucun don Quichotte ne semble encore décidé à nous sortir du mauvais pas où nous nous trouvons, au grand dam de la narratrice.

A lire Lydie Salvaire nous comprenons combien don Quichotte est quelqu'un de précieux et d'indispensable pour nous apprendre à rêver : mais rêver debout…. pour ne pas mourir couché.
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C'est le titre et la couverture, dans un premier temps, qui m'ont attirée vers cet ouvrage. Pour entrer dans un texte classique, je prends des chemins de traverse, sans doute parce que je garde un mauvais souvenir de mes années collège-lycée. Je dois vous l'avouer ; j'étais un cancre. L'analyse de texte, les commentaires de textes étaient une souffrance pour moi. Pourtant, j'adore lire. Dès que j'ai su lire et écrire, ma seconde maison était la bibliothèque de mon quartier.
Pour en revenir à « Rêver debout » de Lydie Salvayre, mes bras m'en sont tombés. Excusez pour l'image simpliste. J'ai découvert Don Quichotte grâce au film de Terry Gilliam : « L'homme qui tua Don Quichotte ». Orson Welles s'est aussi attaqué à ce pan de la littérature classique espagnole sans réussir à l'achever. Lydie Salvayre écrit à l'auteur plusieurs lettres en sachant qu'il n'y aura pas de réponse car quatre-cents ans les séparent. Miguel de Cervantès a vécu au XVIe siècle. Lydie Salvayre pose un acte avec une intention pour donner un sens très contemporain aux mésaventures de ce chevalier errant et de son acolyte Sancho sans oublier le fidèle canasson, Rossinante.
J'ai été maraboutée, embarquée dans une autre dimension. J'ai exploré, découvert, expérimenté ; j'ai vu, écouté, senti un rythme ancien, celui de la fièvre et de l'aventure. « La littérature est une escroquerie » (page 65). C'est un vice où je m'abandonne avec délectation et jouissance. Autant que lorsque j'écoute la BOF d' »Ascenseur pour l'échafaud » de Louis Malle. Dans ces moments-là, je ne suis là pour personne. Lydie Salvayre rapproche deux époques, celle du siècle de l'Inquisition où exécutions, tortures et mise au bûcher étaient presque banales à celle contemporaine de nos démocraties où la précarité, les inégalités, les guerres sont matées quotidiennement dans les médias. Sylvie Salvayre n'épargne ni les institutions étatiques, ni celles de l'Eglise. L'auteure nous fait voir la détermination, le courage d'un homme contre tous en convoquant les philosophes comme Gilles Deleuze, Spinoza (encore lui), d'autres écrivains russes, entre autre.
Au chapitre onze, nous faisons connaissance avec Miguel de Cervantès, son pédigrée, sa participation à la bataille de Lépante contre les Turcs, sa capture et ses cinq longues années loin de chez lui avant d'être racheté. Je n'ai pas compté aussi le nombre de fois où j'ai rencontré les mots réalité, utopie et folie que j'aurais aimé remplacer par être, idéalisme et visionnaire. En fin d'ouvrage, l'auteur mentionne Nelson Mandela comme défenseur moderne de la liberté. Je rajouterai le chef Raoni, qui milite pour la préservation de la forêt amazonienne.
J'en reste sans voix. En fait, non. Je remercie l'auteure de m'avoir réconciliée avec la littérature classique.
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Roman épistolaire dont le destinataire n'est autre que Miguel de Cervantès Saavedra et dès les premiers lignes, le ton est donné :

« Monsieur, je vous le dis tout net, je ne suis pas d'humeur à rire, et les façons dont vous traitez votre Quichotte ne sont pas de mon goût ».

Pour Lydie Salvayre, Cervantès tourne en ridicule toutes les actions de son Quichotte et elle s'en explique, dissèque avec verve, colère, enthousiasme ou point l'amour de ce livre et de son auteur.

Quel régal de lire ce livre jamais redondant, gai, enlevé. L'autrice écrit tout le bien qu'elle pense de Quichotte et de Sancho, retourne les situations jugées grotesques, ridicules pour montrer le courage du chevalier de la Manche

« Car le Quichotte n'est pas infaillible, vous insistez pesamment, Monsieur, sur ce point, comme si vous y preniez je ne sais quel plaisir mauvais. »

« S'il est vrai que le Quichotte s'expose, se mouille, et va au charbon avec une témérité et une vaillance rares existe t-il d'autres façons, Monsieur, de faire bouger les choses ?- Il endure dans tout son corps la vérité vraie d'une bataille, autrement dit il se ramasse une fois sur deux et s'en prend plein les gencives, à la différence de ces embusqués qui, prodigues en péroraisons subversives, se croient dispensés de remuer le petit doigt, lequel repose sur un verre de charmes-chambertin qu'ils sirotent, les yeux mi-clos et l'air pénétré dans leur salon cosy et devant un feu de cheminée, si faire se peut. »

Et pan, dans les gencives des planqués-nantis-beaux causeurs, experts en tout et rien, technocrates imbus de leurs savoirs. « Or, don Quichotte l'affirme avec fermeté, obtenir un titre prestigieux après des années d'intrigues, de calculs, de trahisons, de sollicitations, de manigances savantes ou d'infâmes flagorneries, pratiques regroupées de nos jours sous le nom d'arrivisme, lui semble misérable. » Rien a changé sous notre ciel ma pov'Lucette ! Un lien efficace vers notre époque actuelle tout pareil à celle de Quichotte

C'est cela le ton du livre, où Lydie Salvayre fait des retours sur la vie de sa famille comme le sabir de sa mère. Et puis, comme Quichotte, elle a la liberté chevillée au corps, son écriture généreuse doit lui ressembler et je comprends sa grande admiration pour Cervantès et son héros. D'ailleurs, elle écrit « J'ai en effet le sentiment que vous lui (Quichotte) faites endosser tout ce que vous ne pouvez formuler ouvertement ; et que vous l'amenez adroitement à dire à votre place vos quatre vérités » comme Molière le fait avec ses pièces de théâtre

Un bel hommage au chasseur de moulins à vent qui fait montre de sa générosité, de son amour du prochain, du plus pauvre, de ses distances avec le pouvoir qu'il soit civil ou religieux. le Quichotte est un utopiste qui ose et qui échoue, c'est ce que l'autrice nous explique dans le paragraphe 5.

« Face à ces temps sauvages, nous espérons toujours que des don Quichotte nouveaux tournent enfin leur colère contre nos dieux de plâtre, et nous ouvrent la marche ». Il ne reste qu'à trouver cette perle rare !

Quelle lecture, quel plaisir. Un livre où l'indignation et l'hommage se mêlent. Un très bel hommage à don Quichotte et son auteur. Tout au long de cette lecture, j'avais « L'homme de la Mancha » dans la tête « Un mec très bien, incroyablement minoritaire -Jacques Brel)

« Celui qui ne sait pas saisir le bonheur quand il vient ne doit pas se plaindre quand il passe. » Phrase d'une grande sagesse que l'autrice a mis dans la bouche de Sancho, le sage, l'homme des réalités.

Un coup de coeur
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Rêver debout est un roman épistolaire de Lydie Salvayre, adressé à Miguel de Cervantès Saavedra qui traite de son livre Don Quichotte. Rêver debout est un livre éblouissant, sarcastique, humoristique, incisif, dans lequel l'écrivaine appose ses idées à travers le personnage de Quichotte, fait un parallèle avec l'époque de ce personnage et notre époque.
1605 / 2022 qu'est-ce qui lie les deux années, les deux époques ? L'aveuglement ? « La servitude volontaire » ?
L'incipit nous amène à nous questionner sur le rôle de la littérature qui doit rester lettre morte ou sortir des conventions, des droits chemins. À quoi sert la littérature ? Doit-elle reposer froidement sur des étagères ou être transposée dans la réalité ? Qu'est-ce qu'écrire ?
Don Quichotte, l'homme des songes essaye de transposer ses rêves dans la réalité. Est-ce une utopie ? Que sont les utopistes sinon des personnes qui corrigent « leur vision en quelque sorte, la myopie dont nous sommes atteints. Don Quichotte est passionné par la littérature des chevaliers qu'il veut transposer dans la réalité. Il va oser. Oser être différent des autres. Par folie, par utopie ?
Don Quichotte est maltraité par Cervantès d'après l'auteur, elle va constamment remettre en cause les intentions de l'auteur de faire d'un homme qui ose, un homme rejeté par la société. Don Quichotte est un homme qui ose aller au bout de ses rêves malgré le regard des autres. Personne ne reste insensible à lui, « il délie des langues, mobilise les affects, déstabilise les routines » et pour tout cela d'après l'auteur, il est heureux qu'il existe. Il n'a laissé personne indifférent durant les siècles passés, beaucoup ont rendu hommage à son tempérament, à son courage et à son tour, Lydie Salvayre ne tarit pas d'éloges sur ce personnage.
Et que dire de la plume de l'auteur, une plume vraie qui ne se cache pas, qui ne tempère pas, avec un vocabulaire soutenu et plaisant. Les lettres se succèdent, la voix va crescendo jusqu'à aboutir à l'éloge final. La voix est colérique, revendicatrice, donneuse de leçons pour s'affiner de lettre en lettre et justifier cet envoi.
Lydie Salvayre semble vouloir nous dire de croire en nos rêves, d'oser vivre nos rêves, d'être fou et de n'être surtout pas de gentils citoyens lustrés.
Pensée donquichottesque !
A lire sans modération !!! A vivre sans modération !
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Lydie SALVAYRE. Rêver debout.

Lydie SALVAYRE avec beaucoup d'habileté, de verve, de connaissances, écrit à Miguel de CERVANTES, auteur de Don Quichotte, ouvrage paru en 1605. Lydie manie la langue et analyse le récit des aventures de Don Quichotte avec beaucoup d'ironie, d'éloquence, d'esprit parfois malicieux, de connaissances, d'humour noir, de véracité. le livre original de CERVANTES, bien qu'édité il y a plus de quatre siècles retrace les travers de la civilisation, travers qui persistent encore et que nous ne parviendrons pas à abolir, tel que la justice ou plus précisément l'injustice, la ségrégation, la liberté , etc.… Les principaux thèmes retenus par l'auteure sont entre autres la folie, la violence, les échecs, le temps, le pouvoir, l'amitié, l'amour, la religion, etc ….. Nous trouvons également les trois critères de la devise de la France : Liberté, Egalité, Fraternité.

Ces quinze lettres adressées à Cervantès révèle le caractère intemporel des écrits de CERVANTES qui peut même être considéré comme un visionnaire. de nombreuses allusions à des faits contemporains nous prouvent l'universalité et la vaticination des dires, sous forme de conte de Miguel de CERVANTES. Je vais de ce pas relire ce magnifique ouvrage remis à l'honneur par Lydie. Pour ma part, je ne classerai pas « Rêver debout », dans la catégorie roman mais il aurait sa place dans les essais. Je vous invite fortement à le lire . Il y a une grande richesse de vocabulaire, de terminologie. DE plus Lydie écrit de façon très simple, très lisible et accessible à tous. J'ai lu en 2015 « Faut pas pleurer », et j'ai adoré ce livre et bien sûr, contrairement au titre, j'ai pleuré. Merci beaucoup pour cette dernière oeuvre et je vous quitte pour aujourd'hui mais je vous joins le texte de la chanson de jacques BREL qui a trotté dans ma tête tout au long de mon lecture. Je vous souhaite une belle journée et de très belles approches littéraires. (06/09/2021)
La Quête
Jacques Brel
Rêver un impossible rêve
Porter le chagrin des départs
Brûler d'une possible fièvre
Partir où personne ne part

Aimer jusqu'à la déchirure
Aimer, même trop, même mal
Tenter, sans force et sans armure
D'atteindre l'inaccessible étoile

Telle est ma quête
Suivre l'étoile
Peu m'importent mes chances
Peu m'importe le temps
Ou ma désespérance
Et puis lutter toujours
Sans questions ni repos
Se damner
Pour l'or d'un mot d'amour

Je ne sais si je serai ce héros
Mais mon coeur serait tranquille
Et les villes s'éclabousseraient de bleu
Parce qu'un malheureux

Brûle encore, bien qu'ayant tout brûlé
Brûle encore, même trop, même mal
Pour atteindre à s'en écarteler
Pour atteindre l'inaccessible étoile

Paroliers : Jacques Brel / Mitch Leigh / Joe Darion
Paroles de la Quête © Helena Music Company, Helena Music Corp., Andrew Scott Inc
Lien : https://lucette.dutour@orang..
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La légende -que je termine par une boutade- veut qu'un beau matin, le roi Philippe III, penché au balcon de son palais, vit un jeune étudiant qui, assis sur un banc, à l'ombre d'un chêne, lisait un livre et n'arrêtait pas de s'esclaffer. le roi fit alors observer que soit l'étudiant était fou, soit il lisait Don Quichotte. Il manda un de ses serviteurs s'en assurer. Lorsqu'il revint, tout ébahi, il dit au roi : « comme c'est étrange, il ne lit pas Don Quichotte mais Rêver debout, un livre qui ne sera écrit que dans 400 ans ! Quelque enchanteur a dû passer par là ! » Il est vrai, après tout, que « dans ce bas monde, tout n'est qu'apparence et illusions contradictoires » (Le Quichotte,II, 29).
Et, en effet, comment aurait-il pu rire du livre de Cervantès dont les deux parties sont un vrai florilège de la cruauté humaine. C'est ce que souligne admirablement Lydie Salvayre qui nous dit,  en parlant du héros éponyme : « on le bastonne, on l'écrabouille, on l'aplat[it], on l'assomme, on le rosse, on le perfore, on l'égorge, on le bafoue, on lui casse les dents, on lui lance des pierres, on le met[…] en morceaux, on le lynche, on le conspue , on lui crache sur l'âme, on le tourmente, on le violente pour mieux lui écraser le nez sur la réalité et lui apprendre à vivre ...en un mot vous le martyrisez » Tout Salvayre est dans cette phrase. Tout en reprochant à Cervantès de se complaire à faire du mal à son héros, on sent, dans son écriture, dans sa façon de s'adresser à lui, qu'elle se force à « faire sa méchante » et que finalement, on sent qu' elle éprouve une véritable empathie, un véritable amour pour l'auteur. Et si Don Quichotte, aujourd'hui, ne saurait plus guère susciter l'hilarité, en revanche Rêver debout, par sa drôlerie, sa cocasserie, son aspect jubilatoire amène sur nos lèvres un sourire constant.
L. Salvayre, écrivaine intelligente et talentueuse, férue de culture hispanique, nous livre avec l'humour et la truculence qui la caractérisent la lecture toute personnelle qu'elle fait du Quichotte, et c'est un éblouissement.
Elle ne cesse d'en souligner la modernité, elle en fait, tour à tour, une figure christique, un anar, un militant féministe... et j'en passe. Pourquoi pas après tout. Avant elle on en a bien fait le sauveur de l'Espagne, un simulateur, un antidote de Faust, un paria, une parabole de l'homosexualité, la figure de l'incompris, le père d'Emma Bovary, le héros de la résistance anti-impérialiste, un juif masqué, un prophète d'Israël, la mascotte des pamphlétaires etc...etc...Il est le personnage de la littérature universelle qui a donné lieu aux plus grand nombre d'interprétations et de jugements. le Don Quichotte illustre à merveille ces propos de l'écrivain et essayiste espagnol Azorín à propos des auteurs classiques : « Les oeuvres classiques n'ont pas été écrites par leurs auteurs, c'est la postérité qui les écrit. Cervantès n'a pas écrit Don Quichotte...ce sont les hommes divers qui, au cours du temps, ont vu se refléter dans cette oeuvre leur sensibilité qui l'ont écrite. » (M.Mbougar Sarr devrait adorer!) le bougre, il avait oublié les femmes, au risque de se faire trucider par le chevalier de la Manche, féministe avant l'heure...heureusement que Rêver debout et Lydie Salvayre sont là pour y remédier.

PS- Après le livre de Salvayre, si vous souhaitez lire ou relire Don Quichotte faites le dans la traduction d'Aline Schulman qui privilégie l'oralité, la modernité et la lisibilité du roman cervantin.
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Il s'agit d'une lettre, d'une longue lettre de reproches, que l'autrice adresse à Cervantes, l'accusant de maltraiter (avec jubilation ?) le personnage de Don Quichotte, de rire des idéalistes, des effrontés, de ceux qui ne tolèrent pas l'injustice. le lecteur n'est pas dupe : Lydie Salvayre révère Cervantes et son oeuvre, et ses accusations ne sont que prétexte à dévoiler mieux encore le fond de sa pensée.

C'est un bijou que cette relecture de Don Quichotte, dont elle souligne la grâce, le courage inébranlable, et surtout les convictions, qu'aucune bastonnade, qu'aucune humiliation ne saurait effriter. En décortiquant ce qui fait le sel de ce personnage, mais aussi de son acolyte Panza, en se remémorant différentes scènes du livre et surtout en rappelant, inlassablement, le contexte dans lequel il a été écrit, elle en réactualise la lecture, sa profondeur, son sens caché. Cervantes attribue à son héros ce qu'il ne peut lui-même dire tout haut, et l'en punit afin d'échapper aux mailles de la censure. Lydie Salvayre, de chapitre en chapitre, s'intéresse aux différents sujets qu'aborde Don Quichotte, comme le courage, l'engagement, l'amitié, la résistance à l'oppression, et chacune de ses lignes soulignent la modernité de l'oeuvre. Mais Rêver debout, au delà de l'hommage, est un brûlot politique, vibrant de sincérité : l'autrice ne cache pas ses convictions, et le livre débute et se termine par un chant d'amour pour ses semblables, et d'indignation pour les exploiteurs, les faiseurs de guerre, les manipulateurs en tout genre.

Enfin, qu'on ne s'y trompe pas : c'est un livre irrésistiblement drôle. La forme épistolaire donne à l'autrice une merveilleuse liberté de ton, dont elle s'empare allégrement, exagérant sur tel point puis s'en excusant expliquant qu'elle est agacée, utilisant des termes fleuris que l'on imagine bien dans la bouche de Sancho Panza, et use quand il le faut d'une mauvaise foi jubilatoire.

Lydie Salvayre, enfin, félicite Cervantes de nous faire rire tout en faisant philosopher : et c'est précisement ce qu'elle fait à son tour, avec brio, pour notre plus grand plaisir.
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Il s'agit de quinze lettres que Lydie Salvayre adresse à l'écrivain espagnol Cervantes, l'auteur de Don Quichotte.
Dans ses lettres, elle exprime son admiration pour l'auteur de Don Quichotte, pour son génie.
Elle défend aussi le personnage de Don Quichotte, ses rêves.
Ces lettres posent une multitude de questions passionnantes, notamment sur les mésaventures du chevalier errant, et aussi sur le sens de la littérature.
De belles "louanges" à ce couple "mythique" Don Quichotte /Sancho.
Original, intéressant.
Un véritable coup de coeur.
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