Ce livre à la thématique riche et complexe traite du vieillissement, de la perte, de la maladie et de la mort, non seulement des personnages et des hommes en général, mais aussi des sociétés et particulièrement de la société britannique, Ce dernier revient fréquemment chez les romanciers britanniques contemporains, ainsi dans le récent
le royaume désuni de
Jonathan Coe, un chef d'oeuvre par parenthèse, dont j'ai déjà parlé sur le site.
Est aussi particulièrement prégnant le thème du Brexit, qui sous-tend l'ensemble du livre, et que l'on peut voir à la fois comme le dernier sursaut d'un pays qui ne veut pas mourir et comme la première convulsion de son agonir, mis également en scène au niveau des protagonistes,
A ce sujet, il est dommage que le traducteur ou l'éditeur n'ait pas cru devoir rester plus proche du titre original , « Should we stay or shall we go ? » dot le titre français fait perdre une partie du sel en faisant disparaître la référence au référendum du Brexit,
Et donc, de quoi s'agit-il ? Kay et Cyril, couple de trentenaire appartenant à la middle class (je garde le terme anglais, dont « classe moyenne « n'est pas tout à fait synonyme) rentrent chez eux après l'enterrement du père de Kay, décédé après avoir souffert pendant une dizaine d'années de la maladie d'Alzheimer, et en avoir fait souffrir involontairement son entourage.
Comme tout le monde, Kay et Cyril veulent éviter de finir ainsi, Ils concluent donc un pacte de suicide, exécutable à leur quatre-vingtième anniversaire. Les trente ans se passent avec des fortunes diverses. Et le terme arrive, à notre époque, après le Brexit. Finalement Kay et Cyril ne se portent pas si mal. Que vont-ils faire ?
L'auteur nous donne douze réponses, douze scénarios différents selon ce que les personnages font ou ne font pas, selon ce qui se passe ou pas dans le monde extérieur. Il n'est pas question de les dévoiler ici. Disons seulement que, dans aucun des douze, le pacte n'est exécuté tel quel. Il s'en suit des conséquences diverses. Certains des scénarios se terminent dans un futur plus ou moins lointain, et on pourrait parler d'incursion dans le domaine de la SF, bien que cela n'en soit ps tout à fait,
L'auteur a déjà fait une incursion assez dystopique dans ce domaine, avec son livre Les Mandible, dont le scénario est assez proche de notre variation N°10 (une apocalypse post-covid, qui a entraine une crise financière catastrophique, et où des migrations incontrôlées ont totalement submergé la Grande Bretagne ) qui y fait d'ailleurs allusion (je donne le texte en citation)
La plupart de ces variations sont assez terrifiantes. Mais ces variations, que sont-elles en réalité ?
Parce qu'il n'y a pas douze variations, il y en a une treizième, qui présente une différence avec toutes les autres. Je vous laisse la découvrir. Et dès lors on peut se demander si la treizième ne correspond pas à la réalité objective du récit, les autres n'étant finalement que des fantasmes des personnages. On serait d'autant plus amené à le penser en raison du caractère profondément irréaliste de certaines des versions, qui les apparentent à des rêves, ou à des cauchemars pour la plupart
Si c'est le cas, que penser du livre et du propos de l'auteur ? Je ne peux répondre à cette question qu'en ce qui me concerne, en espérant que ma réponse ne déflorera pas trop l'intrigue
Dés l'abord, j'ai été révulsé par le principe même du pacte de suicide. Je ne dirai jamais que le suicide est une lâcheté, sachant bien que le courage physique me manquerait pour ce faire. Mais je dis que c'est une démission, surtout dans les conditions où les protagonistes l'envisagent comme refus d'un risque éventuel, presque un déshonneur métaphysique C'est le refus du devoir de l'homme, qui est de vivre chaque jour comme s'il était immortel. Et cela n'est pas difficile, parce que c'est en réalité ce que nous faisons tous
Et tout cela fait un bon livre