Tout y est intime et distancé, pensé dans la langue avec une mesure de poète, sobre, une mesure d’avance.
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L'Angleterre est belle et mélancolique. À vrai dire je ne connais pas beaucoup de pays ; mais j'ai comme une idée que l'Angleterre est le pays le plus mélancolique du monde.
C'est un pays hautement civilisé où se trouvent résolus, avec une grande sagesse, les problèmes de la vie, comme la maladie, la vieillesse, le chômage, et les impôts.
C'est un pays qui sait avoir, je crois, un bon gouvernement, et l'on s'en aperçoit dans les petits détails de la vie quotidienne.
C'est un pays où règne le plus grand respect et la plus grande volonté de respect de son prochain.
C'est un pays qui s'est toujours montré prêt à accueillir les étrangers, les populations les plus diverses, et, je crois, sans les opprimer.
C'est un pays où l'on sait construire les maisons. Le désir de l'homme de jouir d'une petite maison, pour lui seul et pour sa famille, avec un jardin qu'il peut lui-même cultiver, est considéré comme un désir légitime, et les villes sont donc composées de cette sorte de petites maisons.
Même les maisons les plus modestes peuvent avoir, à l'extérieur, un aspect plaisant.
Éloge et complainte de l'Angleterre - écrit à Londres au printemps 1961 et publié dans le Mondo - p. 31
En ce qui concerne l'éducation des enfants, je pense qu'on doit leur enseigner non pas les petites vertus, mais les grandes. Non pas l'épargne, mais la générosité et l'indifférence à l'argent ; non pas la prudence, mais le courage et le mépris du danger ; non pas l'astuce mais la franchise et l'amour de la vérité ; non pas la diplomatie, mais l'amour du prochain et le sacrifice ; non pas le désir du succès, mais le désir d'exister et de savoir.
(Les petites vertus)
Mon métier est d'écrire des histoires, des choses inventées ou des choses de ma vie dont je me souviens, mais, en tout cas, des histoires, des choses où n'entre pas la culture, mais seulement la mémoire et la fantaisie. C'est cela mon métier, et je le ferai jusqu'à la mort. Je suis très contente de ce métier, et je n'en changerai pour rien au monde ; j'ai compris, il y a très longtemps, que c'est cela mon métier.
Mon métier, p. 68
La ville que notre ami aimait est restée la même : il y a quelques changements, mais peu importants; on a mis des autobus à trolley, on a fait quelques passages souterrains. Il n’y a pas de nouveaux cinémas. Les vieux cinémas sont toujours là, avec les mêmes noms, qui réveillent en nous, en les redisant, notre enfance et notre jeunesse. Nous, à présent, nous habitons ailleurs, dans une autre ville, plus grande et très différente ; et si nous nous rencontrons et que nous parlions de notre ville, nous en parlons sans regrets de l’avoir quittée ; nous disons que maintenant, nous ne pourrions plus y vivre. Mais, lorsque nous y revenons, il nous suffit de traverser le hall de la gare et de marcher dans le brouillard des rues pour nous sentir vraiment chez nous; et la tristesse que nous inspire la ville, chaque fois que nous y revenons, c’est de nous sentir chez nous, et, en même temps, de sentir que nous, chez nous, n’avons plus de raisons d’y rester; car ici, chez nous, dans cette ville où s’est passée notre jeunesse, il ne nous reste désormais presque rien de vivant, et nous ne sommes accueillis que par une foule de souvenirs et de fantômes.
Du reste, jusqu'à présent, il m'est toujours arrivé d'écrire très rapidement, et des choses plutôt courtes ; et à un certain moment, j'ai cru comprendre pourquoi. Parce que j'ai des frères beaucoup plus âgés que moi, et lorsque j'étais petite, si je parlais à table ils médisaient toujours de me taire. Pour cette raison, j'avais pris l'habitude de toujours dire les choses à toute vitesse, à fond de train, et avec le moins de mots possible, toujours avec la crainte que les autres se remettent à parler entre eux et cessent de m'écouter. Il se peut que cette explication paraisse un peu stupide : pourtant cela a dû réellement se passer ainsi.
(Mon métier)
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