Jacques Madelin a quitté la France, lorsqu'il était jeune pour tenter de retrouver la femme dont il était amoureux. Hélas, sa dulcinée ne l'avait pas attendu. le chagrin qui s'abat sur lui va très vite se trouver balayé, relativisé mais pas oublié, car survient le tremblement de terre. Il va alors porter secours aux victimes et fait la connaissance de Maurizio le propriétaire du café Nube qu'il va suivre et donc s'installer à Naples pour une nouvelle vie. Jacques constitue le fil rouge de cette série de sept nouvelles.
Autre fil rouge, bien sûr,
le café suspendu : lorsqu'un client commande un café, il peut en offrir un sur l'ardoise pour une personne qui n'a pas l'argent pour s'en offrir un. le café sospeso autant que le café Nube devient ainsi un lieu où les gens peuvent se rencontrer, vraiment, pas simplement se croiser pour s'oublier aussi vite.
On fait ainsi la connaissance de personnages attachants, des femmes de caractère, telle cette femme mariée qui propose un étrange marché à la maîtresse de son mari, l'argent permet tout n'est-ce pas ? Cette histoire est loin d'être banale, car elle est sous-tendue par une histoire de sac confectionné à partir de la peau d'un crocodile.
Certaines nouvelles m'ont plus intéressée que d'autres, telle l'histoire du Docteur Chen, qui a fui son pays natal, la Chine, caché dans la cale d'un bateau. Il exerce la médecine comme dans son pays, en privilégiant la prévention, l'alimentation, les différents équilibres, les pouls… et conseille aux patients d'aller le voir « avant d'être malade », ce qui les surprend parfois.
J'ai beaucoup aimé « L'écrivain sans visage » hommage à Naples et aussi à
Elena Ferrante dont on ne connaît pas l'identité et à son « Amie prodigieuse ». Au passage,
Amanda Sthers nous propose l'interprétation de l'amitié toxique qu'elle prête à l'auteure.
J'ai demandé à rester anonyme, et ça n'a pas l'air de poser de problème puisque tout le monde se fout de mes romans. J'écris quand même, je n'ai pas le choix. C'est en moi comme je respire. Mais c'est violent. Un livre qui n'est pas lu n'existe pas, il n'est même pas écrit. Il n'est pas un fantôme, il est le néant.
L'histoire d'Aldo, avec son insomnie rebelle, est intéressante aussi, car il attache tellement d'importance aux signes que lui envoie le destin, le numérologue qui meurt d'un infarctus lorsqu'il arrive à son rendez-vous, les rencontres ratées avec un mage, ou lorsqu'il quitte en courant le cabinet du Dr Chen (quelle idée de se faire soigner avant d'être malade ? Il est sûrement fou ce médecin !) tant et si bien qu'il passe à côté de tout, de la jolie brune qu'il côtoie sans la remarque alors qu'il cherche l'amour…
Se pourrait-il qu'il n'ait pas de destin ? Que rien ne soit inscrit pour lui ? Cela ferait-il de lui un homme libre ou, au contraire, abandonné par les dieux ?
Les récits s'étalent entre le début des années quatre-vingt-dix et l'époque actuelle, englobant les conflits sociaux, gilets jaunes en France, élections en Italie qui font cohabiter le mouvement cinq étoiles de Luigi di Maio et la Ligue du Nord de Matteo Salvini, sous fond d'immigration, de racisme, pour aboutir à la crise du Covid avec ses peurs, ses décès et ses confinements qui vont encore isoler, désocialiser davantage les gens.
Ceci nous donne un livre intéressant, sensible, très humain, où les personnages de fiction sont bien intégrés dans leur époque et donc une réflexion psycho-sociologique.
C'est le deuxième livre d'
Amanda Sthers que je lis, après l'avoir longtemps snobée, et il m'a permis de passer un bon moment, car elle sait bien raconter des histoires et on se laisse bercer par son écriture autant que par son propos. Elle fait une déclaration d'amour à la ville de Naples, et donne envie d'aller s'y promener.
Un grand merci à NetGalley et aux éditions qui m'ont permis de découvrir ce roman et de retrouver la plume de son auteure.
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Lecafésuspendu #NetGalleyFrance !
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