Gabriel avait disparu du jour au lendemain, sans un mot, sans un
au-revoir. Alice l’avait-elle suivi ? Jérôme n’aurait su le dire. À bien y songer, il n’était sûr de rien, ne l’avait jamais été quand il s’agissait de Gabriel.
Ces prénoms à eux seuls sonnaient la charge ou sonnaient la déroute.
Gabriel, Hans, Formose, a-t-on idée d’une semblable trilogie quand on n’a rien de romanesque ! Qu’aurait-il pu dire si un importun était venu l’interroger à propos d’Alice et de Gabriel. Pas grand chose !... Qu’il n’était pas sûr que la première existât vraiment et que si elle avait existé, son prénom était
peut-être autre. Quant à celui qu’il présentait comme son ami et qui l’était sans doute, c’était à peine s’il se souvenait de ses traits à croire qu’il en changeait régulièrement. Et quand il s’y essayait, fouillant sa mémoire, il ne réussissait qu’à les entrevoir floutés au travers d’un miroir dépoli qui finissait toujours, insidieusement, par le renvoyer à lui-même, silhouette semblable à celle qui se dessine parfois sur un drap qui sèche au grand vent.
Gabriel était parti ! Avait-il rejoint son île ? Y vivait-il avec Alice ? Jérôme voulait le croire, l’espérait secrètement ! C’était la raison qui lui faisait aimer les atlas.