Samuel Titmarch, jeune provincial sans fortune, se voit offrir par sa tante Lady Hoggarty particulièrement fortunée, une épingle de cravate ornée d'un diamant, un cadeau pour encourager le début de carrière du jeune homme à Londres. Treizième clerc dans la compagnie d'assurances créée 4 ans plus tôt et gérée par son directeur Mr Brough, Samuel bénéficie de tout l'aura que procure l'illusion de la fortune potentielle que représente ce diamant, les portes s'ouvrent, les protections affluent si bien qu'il progresse très rapidement dans la société, sous la houlette du Directeur. Ce dernier compte sur sa jeune recrue pour capter et obtenir la gestion de l'immense fortune de Lady Hoggarty. Samuel se voit jouer le rôle de rabatteur, et va, bien malgré lui, alimenter le système mis au point par Mr Brough et qui s'apparente à une pyramide de Ponzi.
Le Grand diamant des Hoggarty , est un roman très enlevé de Thackeray , un roman dans lequel il s'approprie le milieu affairiste de la city de Londres en y plongeant un jeune provincial candide qui va vite se trouver propulsé bras droit du directeur, celui-ci le manipulant allègrement pour extorquer des fonds dans la famille proche de ses collaborateurs. Les combines décrites sont quelquefois difficiles à suivre, je n'ai pas toujours tout compris mais l'essentiel est là et s'est reproduit à l'identique récemment dans l'affaire Madoff avec l'appel de fonds constant pour verser des dividendes aux nouveaux investisseurs, spoliant ainsi les investisseurs historiques, un montage qui s'écroule dès que de trop nombreux investisseurs réclament ensemble leurs dividendes.
Thackeray y décrit également l'attitude servile d'une certaine partie de l'aristocratie ou de la bourgeoisie qui déroulent le tapis rouge et ouvrent facilement leurs portes, aveuglés par le moindre signe de richesse ostentatoire...
Le Grand diamant des Hoggarty est donc une lecture d'apparence légère mais très instructive sur le milieu affairiste du XIXème siècle, qui malheureusement perdure au XXIème siècle ; un roman qui m'a réconcilié avec Thackeray , après la lecture décevante de Barry Lyndon...
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- Belinda, ma chérie, dit son père, ce jeune homme est un de mes employés, qui assista à notre bal.
- Oh, vraiment ! fit Belinda, en hochant dédaigneusement la tête.
- Mais pas un employé ordinaire, mademoiselle Belinda - aussi, je vous prie, nous ne prendrons pas avec lui nos grands airs aristocratiques. C'est un neveu de la comtesse Drum, et bientôt, j'espère, il montera très haut dans notre établissement et dans la cité de Londres.
"Samuel, je t'ai promis un cadeau, et le voici. J'ai d'abord pensé te donner de l'argent, mais tu es un garçon rangé qui n'en a guère besoin. Tu es au-dessus de cela, mon cher Sam. Je te donne ce qui pour moi a le plus de valeur au monde : le po- le por- le po-ortrait de mon saint époux Hoggarty(larmes), monté dans le médaillon qui contient le précieux diamant dont tu m'as si souvent entendu parlé. Porte-le, cher Samuel, en souvenir de moi, et pense parfois à cet ange qui est aux cieux, et à ta chère tante Suzy."
Après s'être dévoué corps et âme dans les fins fonds de la campagne anglaise pour les bons soins de sa richissime tante, Samuel Titmarsh se voit doté d'une vulgaire épingle de cravate contenant le portrait de son oncle. Tout cela sans grande valeur. Au premier abord tout du moins.... Finalement trésors incontesté de la famille, ce dernier va propulsé ce jeune homme dans les hautes sphères de la société londonienne, lui ouvrant de multiples voies dans sa future et prometteuse carrière d'assureur. Prétexte à la satyre de la haute société bourgeoise du 19eme siècle, matérialiste et excessivement avide d'argent, l'auteur à travers son personne va côtoyer de drôles de personnages imbus de leur personne ou encore maladivement superficiels. Grâce à un œil vif et une histoire bourré d'humour et de caricature, Thackeray se place ici en fin observateur de son temps, démêlant les plus fins vices d'une société qui ne semble finalement pas si désuète que cela.
"La chance voulut, continua t-il, que Miss Brough se trouvât au salon en train d'écorcher une guitare en chantant atrocement faux ...elle ne fit toutefois semblant de rien et termina sa chanson sur une roulade traditionnelle".
Dès que les gens espèrent un grand profit, le jugement semble les abandonner, et parce qu'ils souhaitent ce profit, il leur paraît si sûr qu'ils méprisent tout avertissement et toute prudence.
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Vous connaissez, bien sûr, cette expression : la foire aux vanités. Mais savez-vous quel roman l'a popularisée, au 19ème siècle ?
« La foire aux vanités » de William Thackeray, c'est à lire en poche chez Folio.