J'ai entendu et lu beaucoup d'avis divergents sur
Barbara Pym. Certains l'adorent, d'autres la détestent. Apparemment, d'après mes listes de lectures d'adolescente que j'ai retrouvées il y a quelques mois, j'avais lu un roman d'elle vers l'âge de 14-15 ans ("
Une demoiselle comme il faut") et j'avais détesté. C'est donc avec beaucoup de curiosité que j'ai sorti cette "Douce colombe" de ma PAL.
J'ai profité de la météo clémente (mais pas trop chaude) de ce vendredi 31 juillet. Je me suis installée au jardin avec un chapeau, un thé glacé, le chat des voisins sur les genoux et j'ai ouvert ce roman. Je ne l'ai plus lâché avant de l'avoir terminé !
Chose étonnante, j'ai trouvé une certaine sorte d'ironie dans la plume de
Barbara Pym. Etant donné qu'elle fait partie de ces auteurs que l'on peut considérer comme "classiques", je ne m'y attendais pas du tout. Et, au début, on ne s'en rend pas compte. Mais au fil des pages, quand on avance dans le récit, on comprend que la dame fait preuve d'un certain humour (assez noir) lorsqu'elle compare la situation de départ qu'elle nous décrit, et celle qui s'installe aux environs de la page 100.
En effet, au début du roman, Léonora se moque quelques peu d'une de ses "amies", Meg. Cette dernière est attachée à une jeune homme, Colin, auquel elle sert de mère de substitution, mais dont elle espère plus (une relation amoureuse). Léonora trouve cette situation ridicule et pathétique... jusqu'au moment où elle ressent les mêmes sentiments envers son propre protégé, James.
Léonora n'est pas une héroïne sympathique. Elle est froide et n'aime que les choses parfaites. Il faut être bien habillé, bien coiffée et, pour les dames, parfaitement maquillées. Il faut se conduire décemment en toute situation, s'intéresser à l'époque victorienne, faire preuve de "bon goût"... Léonora est en fait légèrement tyrannique, puisqu'elle a tendance à imposer son mode de vie aux autres. Elle est aussi intolérante, car elle ne supporte pas que l'on vive autrement qu'elle-même. Léonora recherche la perfection dans tous les domaines et elle paraît considérer avoir trouvé cette perfection : tout le monde devrait donc s'inspirer d'elle. Elle se montre donc parfaitement condescendante avec ses "amies" et méprise les jeunes gens dont nous faisons la connaissance au fil des pages (Phoebe, en particulier, avec le peu de soin qu'elle met à s'habiller, ne plaît pas du tout à Léonora).
Mais malgré ce côté antipathique de l'héroïne, on ne peut s'empêcher d'être fasciné par cette histoire. Car, ce que Pym nous décrit, c'est une sorte de déchéance. le vernis de perfection qui recouvre toutes les facettes de l'existence de Léonora se fissure petit à petit et, finalement, cette femme nous est révélée comme faisant elle aussi partie du genre humain (ce qu'elle voulait apparemment éviter). C'est fascinant et assez plaisant aussi, étant donné que Léonora n'est pas de ces personnages que l'on apprécie. La voir tomber du piédestal sur lequel elle s'est elle-même placée et se retrouver quelque peu démunie et isolée est donc très agréable.
Je ne me suis pas ennuyée une seule seconde avec ce roman. J'ai même hâte de découvrir le reste de l'oeuvre de
Barbara Pym. Si, comme moi, vous faites parties des lecteurs qui hésitait à découvrir ses oeuvres, n'hésitez plus et lancez-vous !
Petite info : le titre vient d'un poème de Keats dont voici un extrait :
"J'avais une colombe et
la douce colombe est morte,
Et j'ai pensé que c'était de chagrin
Oh d'où pouvait lui venir ce chagrin? Elle avait les
pieds attachés
D'un fil de soi tissé de ma propre main."
Ce poème va jouer un grand rôle dans la "déchéance" de Léonora...