A Rome, les patriciens sont les descendants des membres du tout premier sénat, celui du fondateur Romulus (au sujet duquel je renvoie à l'excellent livre que l'épatant
Thierry Camous a consacré à cette figure légendaire). Tous les autres citoyens sont des plébéiens. La fortune n'a rien à voir dans cette distinction. On peut ainsi donc être un patricien sans le sesterce, tel un Sylla ou un César par exemple, ou être un plébéien fortuné. Avec la réforme du sixième roi, Servius Tullius, les citoyens sont répartis en cinq classes selon leur fortune. La classe confère un rôle dans l'armée et un droit de vote dans les comices. Pour faire simple, plus on est riche, plus on a un rôle important sur le champ de bataille comme dans les élections.
A Rome, un noble est par définition un citoyen qui compte au moins un consul parmi ses ancêtres.
Par ailleurs, dans la société romaine, chaque citoyen est le client d'un patron (sous l'Empire, seul "l'empereur" -je mets des guillemets car je n'aime pas cette appellation impropre - n'est le client de personne). Dans cette relation de subordination, le patron assure le client de son aide et de sa protection. En échange, le client s'engage par exemple à voter pour lui quand il se porte candidat à une élection. le matin des jours non consacrés à "l'otium", le client se rend chez son patron, c'est la "salutatio" au cours de laquelle il reçoit la "sportule" (quelques victuailles). Cette relation de subordination peut prendre de grandes proportions. Ainsi, si le tribun de la plèbe Drusus avait pu mener à bien son projet de faire de tous les Italiques des citoyens romains, ceux-ci seraient devenus ses clients, ce qui lui aurait donné une assise politique extraordinaire. Son assassinat en -91 plonge Rome dans les fameuses guerres "sociales" (socci = alliés).
La plèbe doit lutter et monter plusieurs fois sur son Aventin (elle fait sécession) pour obtenir plus de droits. En -494, cela aboutit à la création de deux tribuns de la plèbe. En -445, le mariage ente patriciens et plébéiens devient possible avec la lex cornelia et deux ans plus tard un collège de six tribuns militaires est ouvert aux plébéiens. Il faut attendre -367 pour que le consulat soit accessible à la plèbe. Rome ne s'est pas faite en un jour!
Enfin, les esclaves n'ont rien à voir dans tout cela. Ils ne sont pas des citoyens, ils ne sont que la propriété de leur maître. Il faut vraiment être dans la misère la plus noire pour ne pas posséder au moins un esclave. Et par citoyens, on entend les hommes ayant atteint leur majorité. Les femmes sont exclues.
Tous ces prolégomènes peuvent paraître longs et pontifiants, mais ils me semblent nécessaires pour justifier mon manque d'appétence pour ce livre qui s'aventure à des comparaisons que je trouve peu fondées, comme celle qui voit en la plèbe un ancêtre du Tiers-Etat dans la société de l'Ancien Régime. Comparaison n'est pas raison, tant les organisations diffèrent entre l'Antiquité romaine et les temps modernes. Même si les fondamentaux ne changent pas: il vaut toujours mieux être riche que pauvre!
Tout n'est pourtant pas à jeter dans ce livre qui pourra répondre aux attentes de qui veut se faire une première idée sur le sujet.