C'est un roman tardif de
Jules Vernes, publié en 1902 pour la première fois.
Il y a deux aspects dans ce roman, un aspect documentaire et un aspect policier.
Du documentaire, il ressort une vision très exhaustive de cette région du monde, d'un point de vue géographique, les reliefs sont détaillés, les distances entre les îles sont précisées, les climats, l'état de la mer… La navigation est racontée de manière très technique, comment passer tel cap, entrer dans telle baie, où se situent les risques de tempête, quelles voiles utiliser, quelle direction emprunter, comment prendre le vent… la faune et la flore de chaque île est présentée, avec les différences avec l'île voisine… Les populations indigènes, les colonies, leurs économies, leurs moeurs… et le colonialisme y est défendu avec conviction,
Jules Verne va même jusqu'à féliciter les anglais du génocide des autochtones de Tasmanie, se débarrasser des sauvages anthropophages est pour lui un bien fait. le colonialisme anglais, quand il s'agit de soumettre quelque peuplade à la peau trop brune, pas de soucis, par contre, lorsqu'il s'agit des irlandais, c'est une autre affaire. J'ai été parfois un peu gêné devant les idées véhiculées dans ce roman, alors qu'elles semblaient si naturelles à cette époque. Donc, on visite ces régions du Pacifique sud, de la Tasmanie aux îles Salomon, et cela nous donne une idée très précise de ces lieux, et des mentalités à cette époque. Tous ces détails rendent la lecture parfois assez fastidieuse, il y a des pages entières de noms de plantes, intéressant mais pas vraiment passionnant.
Et puis il y a l'intrigue policière, et là je suis encore moins convaincu, je pense qu'on écrit plus de romans policiers de cette manière aujourd'hui. On sait qui va commettre le meurtre dès le début, mais il faut attendre la moitié du roman pour qu'ils passent à l'action, et il n'y a pas vraiment de héros,
les frères Kip n'apparaissent quelques chapitres avant le meurtre, les caractères des personnages sont très stéréotypés, pas du tout approfondis, sans la moindre nuance, et ne ménagent pas la moindre surprise, on sait déjà ce qui va arriver dix chapitres plus loin, et la résolution de l'affaire est assez invraisemblable. le style d'écriture est soigné, mais, et c'est ce que j'ai toujours reproché à
Jules Verne, il est assez vieillot, très “troisième république”, c'est assez raide et appliqué, et ça manque de vie, les personnages sortent des répliques très pompeusement théâtrales et cela les rend parfois agaçants, mais jamais naturels.
Ados, le style de
Jules Verne ne m'attirait pas du tout, quarante ans après, ce style me parait encore plus démodé, et les faiblesses de l'histoire les mettent encore plus en évidence. Ce roman est intéressant comme témoin d'une époque dans un lieu donné, si l'aspect documentaire m'a retenu, son intrigue n'est pas d'un grand intérêt. Cet aspect démodé m'avait plutôt amusé dans des romans plus anciens, ici, on sent un usage plus poussé du détail technique documenté, un soucis de la vraisemblance, de réalisme, mais cette maturité nuit au plaisir, j'attendais, d'un récit en mer, un souffle épique chargé d'exotisme, d'action, de surprise, je n'ai rien ressenti de tout cela. J'ai eu surtout l'impression de faire un parcours d'étude, non dénué d'intérêt, mais pas particulièrement passionnant.