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EAN : 9782865891139
132 pages
Macula (01/11/2018)
3.9/5   5 notes
Résumé :
« C’est un poème culte, l’un de ces joyaux presque secrets, de ces curiosités qu’on se refile sous le manteau entre zélotes d’une ‹ étrange confrérie › ». Patrick Deville résume en ces quelques mots l’aura mystérieuse de ce texte, inventaire des suppôts de la tyrannie réunis là, sous la plume de Jorge Zalamea et sur la plus longue et la plus large avenue du monde, pour le dernier voyage du Grand Burundun-Burunda, celui dont la volonté les a tous réduits au mutisme.
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Il existe plusieurs niveaux de lectures de ce texte de Jorge Zalamea, publié la première fois en Argentine, alors que l'auteur fuyait son pays natal, la Colombie, suite au tristement célèbre 9 avril 1948, à propos duquel Gabriel Garcia Marquez écrivit un livre éponyme.

Il s'agit tout d'abord, d'un bel exercice de style mélangeant poésie, littérature et pamphlet. Les mots utilisés résonnent fortement. Chacun dessine petit à petit cet immense tableau que semble dessiner plus qu'écrire Zalamea. Pas étonnant en ce sens que ce livre ait été peint ! C'est le genre de lecture agréable, où l'on redécouvre des mots qui ne sont presque plus usités et qui pourtant correspondent précisément à ce qu'ils ont vocation à décrire.

Il s'agit ensuite d'une lecture historique et intemporelle. La description de la dictature mise en place par le Grand Burundun-Burunda n'est autre que celle de centaines qui ont précédé comme suivi la parution de ce livre. En parcourant ce court texte, l'on voit rejaillir la collaboration de l'Eglise catholique avec les franquistes ; les délires mégalomanes d'un Kadhafi, d'un Amin Dada ou d'un Bokassa ; la passivité coupable de la majorité en dépit de la prévisibilité des événements ; cette éternelle frustration qui conduit à la vilénie ; et, bien sûr, la grande débandade finale.

C'est enfin une critique acerbe de nos sociétés démocratiques actuelles où le monde de la finance joue les marionnettistes avec nos dirigeants, où la pauvreté des mots conduit à la pauvreté de l'esprit, et où l'on ne trouve de beau que ce qui nous est enseigné comme tel…

Le Grand Burundun-Burunda est mort est un texte déstabilisant mais instructif et source de réflexions !
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Tout d'abord, le parcours de ce livre n'est pas commun. En effet, c'est grâce à une jeune fille qui étudiait les littératures hispaniques à l'Université de Genève et qui se rendait très souvent à la librairie latino-américaine "Albatros de Rodrigo Diaz", que nous pouvons prendre connaissance de cette oeuvre aujourd'hui. C'est en 1997 qu'elle se rendit à Cuba et fit la découverte, à la Casa de las Américas, du poème de Zalamea dans la petite édition au format carré de 1968. Par la suite, elle ramena le livre au Venezuela et traversa l'Amazonie brésilienne. Ensuite, elle commença à en faire une nouvelle traduction et vingt ans plus tard, elle le fit découvrir dans le monde de l'édition.

D'ailleurs, voici les deux premiers paragraphes qui débutent ce célèbre poème qui vous mettront l'eau à la bouche et vous indiqueront la musicalité du texte :

Aucun récit de ses actes glorieux ne serait pour les générations à venir aussi convaincant que la minutieuse et véridique description du cortège qui célébra son pouvoir à l'heure de sa mort.
Car chacun des pas de cette fastueuse et funèbre procession fut l'oeuvre de son ingéniosité, l'image de ses desseins, l'écho de son insigne borborygme.

De plus, les expressions du Champ lexical du Dictateur sont très éloquentes et marquées :
... l'accoucheur de tant de cadavres, auteur de tant de grandeurs, l'inventeur d'artifices aussi stupéfiants, le Grand Réformateur, le Réformateur est l'enfant de ses propres vices, l'Eloquent, un scribouillard prolifique, ô sublime gobeur de choses immatérielles, sa rage bien plus dévastatrice que l'épée...

Par ailleurs, Jorge Zalamea était un poète originaire de Bogota en Colombie. Son magazine était sur le point d'être interdit à cause des conflits politiques alors il partit en Argentine . Et c'est en 1952 qu'il publia "El gran Burundun-Burnda ha muerto" à Buenos Aires.

Avec le temps, son oeuvre sera traduite d'abord en langue française, puis en langue grecque et en langue cubaine. de plus, le chilien Roberto Matta et le colombien Fernando Botero ont peint ce poème. Cette présente édition est bilingue français-espagnol ( El gran Burundun-Burunda ha muerto) et bénéficie d'un soutien de la Fondation Leenaards.

Zalamea dépeint les portraits du Dictateur et des personnalités présentes au cortège funèbre avec une écriture rythmée qui renforce la teneur du texte et la portée sur le lecteur. Les descriptions sont puissantes avec des enchaînements de mots qui se suivent et qui harmonisent le texte. "Le grand Burundun-Burunda est mort" est une oeuvre poétique à découvrir absolument ! J'ai adoré cette lecture !
Lien : http://larubriquedolivia.ove..
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Cette allégorie de la dictature faite par Jorge Zalamea est cinglante. Tout à la fois sans faux semblants mais tout en panache, l'auteur décrit la lente mais inéluctable progression du terrible Burundun-Burunda à la tête du pays.

Page après page, on sent la main-mise du dictateur, l'immense toile d'araignée qu'il a tissé sur les différentes castes de la société, afin de contrôler le peuple à tous les niveaux.

Puis au milieu d'envolées lyriques, on découvre l'indicible : la parole retirée. Et finalement on se dit que toutes les dictatures, peu importe les formes prises et les idéologies qu'elles véhiculent n'ont que ce but-là, enlevée la parole au peuple.

Parce que la parole est vectrice d'amour, de liberté, de résistance.

L'auteur nous fait alors découvrir tout ce que les mots (qu'ils soient parlés ou écrits) ont comme force, tout ce qu'ils transportent en eux et à travers eux, et on comprend que c'est une liberté fondamentale, la liberté d'expression.

A la fois poésie et pamphlet, ce récit dénonce sans ménagement les dérives autoritaires, les abus de pouvoir, l'utilisation de la terreur comme moyen de gouverner.

Un texte qui résonne longtemps en nous et qui incite à réfléchir, au passé mais surtout au présent et à l'avenir.

Lien : https://blog.wilena.fr/index..
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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
Comme il y en a qui détruisent avec une lime, avec une pioche, avec une torche, avec une lame de rasoir, Burundun détruisait avec les mots. Il détruisait de préférence, bien sûr, ce qui se forme et s'alimente avec les mots : l'honneur, la renommée, la réputation, le prestige. Toutes ces choses d'autant plus précieuses qu'elles sont vulnérables, toutes ces choses dont les hommes se nourrissent et se couvrent et sans lesquelles ils seraient comme de pauvres bêtes affamées et écorchées, toutes ces choses sur lesquelles s'édifie l'amour, se construit la paix, s'établit la justice et s'épanouit la vie, toutes ces choses qui, de par leur beauté même ne sont ni vérifiables, ni mesurables, ni comparables ni défendables, toutes ces choses...
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Alors tous prirent la fuite : les puissants et les humbles, les désarmés et les armés, les vieux et les jeunes, les sages et les sots, piteux comme les déchets dans la vague, comme les ordures au vent, comme les cendres dans la flamme, vers un horizon chaque fois plus bas de brume et de pluie, vers la campagne déserte où même les chiens ne hurlaient plus. (p. 67)
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Tous ces visages arboraient le teint de sérosité suante de ceux qui observent par le trou des serrures, de ceux qui cherchent dans le chatouillement érotique le chemin de la confidence fatale, de ceux qui passent leur langue squirrheuse sur la colle des lettres anonymes, de ceux qui boivent à la santé de l’ami condamné d’avance, de ceux qui reçoivent le pain encore chaud que la vieille mère pétrissait au moment où l’on est venu chez elle arrêter son fils caché dans le grenier. (p. 29)
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- À ceux qui méprisent l'intelligence, on répétait :
"Des mots, des mots, des mots !"
À ceux qui se préoccupent de leur intégrité, on répétait :
"Dans les bouches cousues, il n'entre pas de mouche."
Aux lâches et aux timides, on répétait :
"Le silence est d'or."
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Donc si on voulait les rendre bienheureux et paisibles, il était nécessaire d’extraire de leurs habitudes la plus vaine et la plus dangereuse : celle de parler entre eux, celle de communiquer leurs lâches peurs, leurs ridicules fantasmes, leurs basses idées, leurs pensées malsaines, leurs rêves trompeurs, leurs aspirations incertaines, leurs plaintes et protestations impardonnables, leur vile soif d’amour. (p. 40)
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