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Critiques de Alain Vircondelet (126)
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Et nos pleurs seront des chants

Alain Vircondelet a écrit énormément, parmi sa centaine de livres, une majorité de biographies, sur Marguerite Duras, Rimbaud, Saint-Exupéry, Camus, tous des exilés... on trouve aussi des ouvrages sur Alger, où l’auteur est né, a grandi, et qu’il a dû quitter, forcé, un matin de 1962, sa valise pleine de livres sur les bras.

Pour la première fois, après ses milliers de pages écrites, en voici enfin 234 autobiographiques, sur la cicatrice jamais refermée de cet été 62, il y a 62 ans... il aura fallu toutes ces années à Alain Vircondelet pour transformer toutes les larmes versées en chant poétique. Ce livre est de ceux qui marquent.

Ses pages sont rythmées, version slam, aérées, le lecteur doit encaisser et digérer, le contenu sans concession, cru, vrai, dérangeant peut-être pour certains, nécessaire pour d’autres, j’espère les plus nombreux.

Voici la guerre d’Algérie et ses horreurs vécues par un gamin de sept à quinze ans et raconté par un amoureux de ce pays, malgré tout.



Juin 1962, c’est le départ en paquebot, l’aller sans retour vers la France pour les français d’Algérie qui y sont nés, ceux qu'on appelle les « pieds-noirs », qui doivent fuir parce qu’on les chasse sous peine de mort. Ça avait commencé sept ans avant, les menaces, les jets de cailloux sur les fenêtres et puis, les assassinats immondes, odieux, les « youyou » pour les fêter, et en réponse les concerts de casseroles, frappées cinq fois pour les cinq syllabes d’Al-gé-rie-fran-çaise, pour montrer qu’on est là, terrés la nuit parce que dehors on risque de se faire égorger, mais toujours là. Alain enfant trouve la paix dans les livres, et auprès de sa mère, lumineuse, extraordinaire de bienveillance, d’amour, de douceur, qui fait des gâteaux pour faire comme si rien n’avait changé... jusqu’au printemps 1962, les arabes vendent aux français des valises sur les trottoirs sous les graffitis « la valise ou le cercueil ». Il faut partir.

Et voilà ceux qu’on appelle en France les « patosses », les « rastaquouères », les « bons à rien », les « exploiteurs qui ont fait suer le burnous », les « bâtards », accueillis sur le port de Marseille par des « Retournez d’où vous venez » ... Et à partir de toute cette fange, Alain Vircondelet s’est construit intellectuellement, culturellement, s’est reconstruit petit à petit sans oublier cette « histoire dont on ne se remet pas ».



Ce récit puissant, vraiment très puissant, c’est l’histoire de ses ancêtres, les « premiers hommes » arrivés d’Alsace pour s’installer dans une contrée en friche, où tout était possible, qui se télescope avec l’histoire de leurs descendants, cent trente ans plus tard, qui seront les « derniers », Alain est de ceux-là. Exilés forcés.

« 1840, date des premiers vrais colons. Les premiers hommes. 1962, date du départ de leurs fils. Les derniers hommes. »



À travers ces vers d’Alain Vircondelet qui prennent à la gorge, en plus de sa « Nostalgérie », de ces infamies, de cette violence et de cette blessure, c’est aussi la trahison qu’on prend en pleine face : celle du gouvernement français, des politiques, des intellectuels même qui ont purement et simplement abandonné ces français d’Algérie.

Et malgré tout cela, transparaît dans ce récit un amour fou pour Alger, et pour ce pays, « une terre impitoyable de vérité et de clarté, un émerveillement continu, une évidence d’abondance » ...

Et son histoire jamais finie : l’arrivée de ces français et leurs familles en 1840, accompagnée des exactions des soldats français, qui ont tué, volé, violé... et voilà les descendants de ces algériens qui ont subi, et qui font subir à leur tour aux algériens français, les tuant, violant, s’appropriant leurs biens une fois chassés vers la France... et les descendants de ces assassins aujourd’hui, que font-ils ? ils rêvent de la France et fuient l’Algérie... triste ironie.



Après la lecture de ce livre, vous n’écouterez plus « Bésame mucho » de la même façon, après la lecture de ce livre, vous n’entendrez plus un « youyou » de la même façon. Après la lecture de ce livre, vous aurez envie et besoin de le faire lire, au plus grand nombre.

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Albert Camus : Fils d'Alger

Albert Camus et l'Algérie : une histoire d'amour, tellement intense qu'elle lui inspire ce pressentiment : "Ma terre perdue, je ne vaudrais plus rien" (Carnets III 1951-1962)... Source majeure de son inspiration, l'Algérie est en effet le théâtre de deux de ses principaux ouvrages, celui qui ouvre son oeuvre littéraire, Noces, écrit en 1936 et 1937, et celui qui la clôture, dont le manuscrit est retrouvé dans sa sacoche lors de l'accident qui lui coûte la vie en 1960, le premier homme ; le premier homme, comme une inlassable quête des "premiers jours du monde" (page 212), du "premier sourire du monde" (page 200), et finalement, de la splendeur originelle de la Création. J'ai spontanément pensé aux magnifiques vers de Charles Péguy, évoquant dans "Ève" le paradis terrestre :

"Et la vasque et la source, et la haute terrasse / Et le premier soleil sur le premier matin".



Admirer et aimer, deux des principes qui lui sont chers, Albert Camus va justement trouver dans son pays natal, auquel le lie un attachement charnel, le cadre pour les mettre en pratique.

Admirer les sites romains de Tipasa et de Djemila, dont il fait le thème de deux des quatre chapitres de Noces, ou la baie d'Alger et son anse parfaite, à partir des hauteurs d'El Biar, du Télemly, ou de la terrasse de la "Maison devant le Monde" (page 162). Tipasa, que les premières lignes de Noces décrivent ainsi : "Au printemps, Tipasa est habité par les dieux et les dieux parlent dans le soleil et l'odeur des absinthes". Tout à son admiration, Camus précise que "la terre, au matin du monde, a dû surgir dans une lumière semblable". Ce site romain a été pour Albert Camus source d'émerveillement, de bonheur et de paix. Une stèle y est d'ailleurs gravée avec d'autres mots de Noces : "Je comprends ici ce qu'on appelle gloire : le droit d'aimer sans mesure", une pensée directement inspirée de Saint-Augustin, autre grande figure de l'Afrique du Nord, qui disait que la mesure de l'amour, c'est d'aimer sans mesure...



Aimer les humbles, ceux qui sont de la même extraction que lui, au premier rang desquels sa mère, tous les damnés de la terre, notamment ceux dont il dénonce le sort dans Misère de la Kabylie dès 1939. Aimer les femmes aussi, auprès de qui son charme opère naturellement et parmi lesquelles il multiplie les conquêtes : Simone Hié, dont il divorce peu de temps après le mariage, Christiane Galindo, Blanche Balain, Francine Faure, l'épouse avec qui il aura ses enfants, Yvonne Ducailar, et celles qu'il rencontre après la seconde guerre mondiale, Maria Casarès, Catherine Sellers, Mette Ivers, et d'autres peut-être... Conscient de son donjuanisme, il s'interroge d'ailleurs dans ses Carnets 1935-1942 sur la manière de "renoncer à cette servitude qu'est l'attirance féminine" et invoque la chasteté : "Chasteté, ô liberté" (Cahiers). Aimer enfin le théâtre, dont il apprécie le travail collectif des répétitions, et où ses pensées prennent vie, cette vie solidaire qui l'épanouit.



Dans les années 1950, Albert Camus s'inquiète de la montée des revendications des Arabes et, par contraste, de l'inaction persistante de la France. Par voie de presse, il alerte sur la nécessité d'agir pour davantage de justice en Algérie, pour le bien des deux communautés. Après avoir quitté le parti communiste parce que ce dernier prend fait et cause pour une communauté contre l'autre, Albert Camus s'éloigne aussi de Jean-Paul Sartre, très critique lors de la parution de l'homme révolté et méprisant sa "sensibilité" méditerranéenne (page 332).



Grâce à cette biographie lumineuse et chaleureuse qu'Alain Vircondelet, autre fils d'Alger, a consacrée à Albert Camus, le lecteur reçoit une sorte d'invitation, d'une part au voyage sur les terres de l'écrivain et d'autre part à la découverte de son oeuvre littéraire. Il peut aussi et surtout faire sien l'hommage rendu par René Char lors de la mort d'Albert Camus : "Avec celui que nous aimons, nous avons cessé de parler, et ce n'est pas le silence". Paradoxe de l'Histoire, c'est sur la route de Sens que le philosophe de l'absurde a trouvé la mort.
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Et nos pleurs seront des chants

En un mot : superbe. Cette écriture, le ton, les mots. Et surtout cette émotion à toutes les pages, toutes les phrases : c'est puissant, exceptionnel. Sous forme d'énumération, presque de liste, notre narrateur se souvient de se jour si particulier où sa mère et lui sont montés au bord de "Ville d'Alger", expulsés comme d'autres de leur pays natal, la "Barbarie", pour éviter les violences, partir en exil vers la France, désillusionnés à babord, sans grand espoir à tribord : quand on n'est plus les bienvenus ni d'un côté, ni de l'autre. Un bateau pour trait d'union, ceux qui ont glissé vers le Sud la valise pleine de projets, sur cette même mer, et ceux qui reviennent la valise pleine de rejets un siècle après. Un retour forcé, les larmes roulant sans cesse comme ce bateau qui vogue, mélancolique, chargé, lui permet aussi de revenir sur le départ de ses ancêtres, des promesses faites d'un Eldorado escroqué, du courage de quitter les campagnes pour des déserts. Les mots répétés pour rappeler la répétition des exactions. Je n'ai jamais lu un livre aussi intense sur cet épisode sombre de notre histoire. Chaque page est une brise marine qui fait frissonner. L'auteur nous embarque pour un voyage inoubliable, à fleur de peau, des "derniers hommes". Magnifique.
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Et nos pleurs seront des chants

" J'ai 15 ans et je ne veux pas m'avouer vaincu.

Je regarde Alger qui s'efface peu à peu,

je la regarde droit dans les yeux,

Je serre les dents,

je ne veux pas pleurer.

Je fais un serment : je raconterai cela un jour,

ce que veut dire la perte de sa terre natale,ce qu'elle porte en elle,cette perte, de malheur mais aussi de promesse. "

Cela Alain Vircondelet vient de le réaliser avec ce livre. C'est l'histoire d'un exil qui se poursuit avec la mélancolie et la difficulté d'exister. Il a transformé sa souffrance en chant poétique,rytmé comme une litanie.

C'est aussi l'histoire de ses ancêtres alsaciens arrivé en Algérie en 1848 et de leurs descendants parti le 3 juillet 1962 avec chacun une grosse valise. Ce livre est composé de différents flashback, l'été au cap Caxine, l'enseignement de la diction et de la poésie française aux Beaux-Arts d'Alger, les assassinats dans les fermes,les attentats à la bombe,le voyage du retour à bord du paquebot.

On est du pays de son enfance disait Saint Exupéry, Alain Vircondelet nous dit dans ce livre qu'il est de l'Algérie.

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De l'or dans la nuit de Vienne selon Klimt

De l’or dans la nuit de Vienne selon Klimt

Alain Vircondelet



Dans le livre lu précédemment, une scène nous amenait dans l’atelier du peintre Gustave Klimt, visite furtive et ô combien énigmatique. Grâce à l’initiative des éditions Ateliers Henry Dougier et leur étonnante collection Le roman d’un chef d’œuvre, la possibilité d’en savoir plus est donnée.

Il est question ici du célèbre tableau « Le baiser ». Une toile hors norme qui rencontra le succès lors de l’exposition viennoise du Kuntschau en 1908. C’est avec moult détails qu’Alain Vircondelet replace l’œuvre dans son contexte.

Une époque fantasque où Vienne ploie sous le faste, les ors, les bals, le champagne, la sécession viennoise courant artistique d’où émergea l’Art Nouveau a bousculé les mentalités.

L’auteur nous dépeint un peintre aussi flamboyant que son époque, l’artiste est hors norme, un faune plantureux qui dévore la vie, les femmes, celles qui passent dans son atelier mais les autres également, prostitués, peu importe. Il a des amitiés fidèles, le jeune Egon Schiele fait partie du sérail et il s’est entouré de chats qu’il balade dans ses bras vigoureux.

L’homme est empreint de mysticisme et de sacré, mais c’est en Italie qu’il a eu une révélation, il tombe dans l’or et en recouvrira ses toiles. Symbolisme, art du détail, les commandes affluent, le succès est là, enfin et dans l’atelier de l’ogre les femmes de la haute se succèdent telle Adèle Bloch-Bauer qui deviendra une de ses plus célèbres maitresses. Et cela, sans que sa muse, sa favorite n’en prenne ombrage, il voue à la stylite-couturière Emilie Flöge une fascination et une passion sans mesure et sans sexualité.

L’auteur nous entraine dans le sillage d’un peintre qui a déjà bien vécu, il décortique cette œuvre magistrale, emblématique et surnaturelle. Une œuvre jugée trop kitch, qui rencontra une renommée posthume. Ce livret, entre roman et documentaire est envoûtant, il y a du rêve, de la poésie dans les mots d’Alain Vircondelet.

Un voyage artistique dans la vienne de Klimt et de Malher.







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Guernica : 1937

Un 5/5 pour ce bouquin qui n'a pas fait long feu. On y découvre la relation qui liait Dora Maar et Pablo Picasso, les débuts et la fin, mais surtout l'influence de Dora dans la création de cette oeuvre Guernica et dans la vie de l'artiste peintre en général. On y lit aussi l'histoire de l'oeuvre, les messages dissimulés et l’universalisme que Picasso s'est évertué à représenter, quand on a tendance à penser que le tableau ne montre "que" Guernica. Plus largement, on découvre aussi la vie artistique de cette époque, dans les rues de Paris et aux abords du Bateau-Lavoir sur la butte Montmartre, les copains de Pablo, ses moments de création, de doute, d'euphorie et de rare fierté pour sa belle Dora, artiste elle aussi : « Il y avait là quelque chose de profondément érotique, et plus simplement encore, de sexuel. Elle photographiait et c'était comme si elle écartait de ses doigts un sexe de femme, pétale après pétale pour arriver au coeur vibrant des choses. »
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Sagan : Un charmant petit monstre

Une autre biographie qui dévoile une Françoise Sagan "un charmant petit monstre" (Mauriac) , femme fragile, instinctive, souvent scandaleuse, attachante et douloureuse.

L'écriture est belle, mais j'ai préféré la spontanéité de la biographie de Geneviève Moll.

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Moi, Icare

Comme tout le monde je pense, je connaissais surtout les épisodes du Minotaure et du labyrinthe, ainsi que la fuite tragique d'Icare et de son père. J'ai donc apprécié en apprendre plus ici sur l'histoire de Dédale et de Talos, mais aussi sur toute la vie de Dédale après la mort d'Icare : je ne savais pas du tout que l'histoire de Dédale se poursuivait après la mort de son fils et qu'il accomplissait d'autres exploits architecturaux en Italie, cela m'a donc plu de découvrir ces événements.



Plus globalement, j'ai beaucoup la manière dont l'auteur traite ce mythe : sous sa plume, Icare devient un jeune homme la tête emplie d'histoires et des succès de son père, épris de liberté et qui rêve de vivre sa propre vie, ce qui causera sa chute (dans tous les sens du terme !). Dédale quant à lui semble s'inscrire dans la longue liste des savants et artistes qui ont été trop sûrs d'eux et de leur talent et qui paieront le prix fort pour avoir manqué d'humilité : c'est un discours très intéressant et qui fait qu'on referme ce Moi, Icare... avec plein de réflexions sur ce qu'aurait dû faire Dédale, ce qu'aurait été sa vie si les événements s'étaient déroulés différemment...



Enfin, et c'est là une des particularités et un des gros attraits de cette collection "Autobiographie d'un mythe", la sélection d'œuvres d'art est variée et intéressante (j'ai découvert quelques tableaux sur le mythe d'Icare que je ne connaissais pas du tout avant cette lecture) et les reproductions sont de très bonne qualité.
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Moi, Icare

« La mer et l’air étaient mes amis, et tous ceux qui les peuplaient. J'enviais la liberté des dauphins que l'on voyait là-bas sauter au-dessus des vagues, jongler avec l'écume; j'aspirais au vol des grands oiseaux qui planaient au-dessus de la mer et puis s'en éloignaient jusqu'à ce que je les perde de vue.

Au palais, l'on me connaissait pour mes rêves impossibles. J'essayais de donner à mon corps la fluidité des oiseaux et la souplesse des poissons, je rivalisais avec les meilleurs jeunes danseurs de la cité : « Il ne lui manque plus que des ailes », disaient certains, tant je réalisais des bonds gracieux. C'était là mon occupation favorite; à ces moments précis, je me sentais libre, capable de régner dans les airs et sur le monde. »



Moi, Icare… Autobiographie d’un mythe, Alain Vircondelet @alainvircondelet @ateliershenrydougier



Que connaissez-vous d’Icare? ce jeune homme qui s’approcha trop près du soleil, et de son rayonnement, qui lui « brûla les ailes » ou plutôt fit fondre la cire de celles-ci et le précipita dans la mer où il mourut…



Savez-vous qui fut son père? Le brillant Dédale qui construisit le labyrinthe où fut enfermé le Minotaure, né des amours de la reine Pasiphaé de Cnossos avec un puissant taureau blanc… le Minotaure qui fut occis par Thésée!



« Mais tandis qu'il bramait comme un cerf qu'on écorche, Thésée en profita pour lui planter son épée droit dans le cœur. Dans un jaillissement de sang, le monstre sentit son corps s'affaisser, s'appesantir et enfin le quitter.

Thésée avait tué le Minotaure. »



Que de personnages, que de mythes qui s’entrecroisent…



Connaissez-vous le lien entre Icare et Thésée?



Avez-vous eu vent des recommandations de son père avant de prendre leur envol?



« Vers midi, quand le soleil sera à son zénith, veille à ne pas aller trop haut : la chaleur des rayons risquerait de faire fondre la cire de tes ailes et tu serais irrémédiablement perdu. La mer serait alors ton linceul. »



Non?! eh bien tournez la première page de ce livre, somptueusement illustré, et plongez à votre tour dans ce mythe fascinant…



Belle découverte 🌟
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Albert Camus : Fils d'Alger

Un assez bon livre qui montre bien la relation particulière d'Albert Camus avec sa ville, Alger, et avec l'Algérie. Ce lien avec la ville où il est né, la nature, le soleil et la mer, ou encore le site antique de Tipasa; lui a permis de développer toute une esthétique et même une spiritualité.

C'est un bon début pour découvrir qui était Albert Camus. Il convient évidemment ensuite, de se plonger dans son œuvre.
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Moi, Icare

Dans ce "Dédale" que peut sembler être la mythologie, si il y a bien un mythe bien un mythe bien ou mieux connu que les autres c'est bien celui d'Icare...

Alors en lisant, ce nouvel opus de cette collection "autobiographie d'un mythe", vous ne risquez pas de "vous brûler les ailes"....

Tant l'écriture d'Alain Vircondelet vous servira de "Fil d'Ariane"....



Après avoir magnifiquement remonter le fil du destin de Dédale - Daidalon -  "l'astucieux", "le rusé", celui à qui on ne l'a fait pas (architecte, inventeur, bref une sorte de Léonard de Vinci de la mythologie)

Rien ne lui résiste, mais comme tout le monde il n'est pas exempt de défauts : il est jaloux, envieux, ne supporte pas que quelqu’un soit plus astucieux que lui.

Le Mythographe Apollodore nous apprend qu’il a été chassé d’Athènes pour y avoir commis, lui aussi, un crime particulièrement abominable, un meurtre qui fait de lui un être peu aimable, bien que d’une intelligence à nulle autre pareille – corruptio optimi pessima dit l’adage : la corruption des meilleurs est la pire.

Diodore de Sicile, nous dit que Dédale prend son neveu Talos comme apprenti. Mais l'élève dépasse le maître, et le maître décide de se débarrasser de l'élève....

Exilé à Cnossos, il entre au service de Minos. Il construit le fameux labyrinthe pour y enfermer le Minotaure.

Ce monstre mi homme-mi taureau, qui attend tous les 9 ans le tribut que les Athéniens doivent livrer : sept garçons et sept filles dont il se repaîtra. Jusqu'à ce  que Thesee aidé d'Ariane, tué le monstre du labyrinthe.

Fou de rage Minos enferme père et fils dans le labyrinthe. Et voilà, l'inventeur prisonnier de sa propre invention à chacun d'y voir quelque interprétation moderne....



Mais en bon inventeur, Dédale trouve la solution pour s'échapper avec son fils : Avec de la cire et des plumes, il fabrique deux magnifiques paires d’ailes, une pour lui et une autre pour son fils, et d'expliquer à Icare :

"Suis mon conseil, Icare,

Tiens-toi à mi-hauteur. L’eau plombera tes ailes

Si tu descends trop bas, trop haut tu grilleras,

Donc vole entre les deux. Tu ne dois jamais voir

Le Bouvier, Hélicé ni l’épée nue d’Orion,

Prends-moi pour guide. Il lui apprend comment voler,

Lui fixe à chaque épaule un prototype d’aile,

Et, parlant, s’affairant, la main de ce vieux père

Tremble, et sa joue s’humecte. Il embrasse l’enfant

Qu’il n’embrassera plus, s’élève d’un coup d’aile,

Prend la tête, apeuré pour son fils tel l’oiseau

Poussant du haut du nid ses oisillons novices,

L’exhorte à suivre, lui apprend son art funeste,

Et se tourne en volant pour voir comme il s’y prend."

Pour citer Ovide dans ses Métamorphoses (Traduction Olivier Sers - Édition du Centenaire Les Belles Lettres)



" Ainsi parlait Icare.

Il se préparait à la grande aventure de sa vie la seule qui lui permettrait d'oser contrarier son destin, de franchir les limites de son humanité, de se soustraire aux décisions des dieux."



Icare acquiesce, affirme qu’il a bien compris, mais une fois dans le ciel, il perd toute mesure. Il cède à l’hybris. Grisé par ses nouveaux pouvoirs, il se prend pour un oiseau, peut-être même pour un dieu. Il néglige toutes les recommandations de son père. Il ne peut résister au plaisir de s’élever dans les cieux aussi haut qu’il peut. Mais le soleil brille et, à force de s’en approcher, la cire qui maintient les ailes se met à fondre. Tout d’un coup, elles se détachent et tombent dans la mer. Lui aussi, et il s’y noie sous les yeux de Dédale qui ne peut rien faire d’autre que pleurer la mort de son enfant. Depuis lors, cette mer a pris, comme dans le cas d’Égée, le nom du disparu : on l’appelle la mer Icarienne.



La chute est sublimée sous la plume de l'auteur, qui a su magnifiquement bien se glisser dans les interstices du mythe, comme dans les anfractuosités du mur de ce labyrinthe, pour magnifier sentiments, pensées, bref la quintessence du mythe

"Le jour, implacable, n'en finissait pas d'atteindre son zénith. Pour Icare, c'en était fini de cette existence lestée par le destin. Il éprouvait une émotion inconnue, celle d'un vertige qui se serait installé dans son corps même, il chutait, chutait, traversait des sortes de paliers, crevait des couches de nuages, forait des brumes épaisses puis retrouvait la clarté bleue du ciel, et toujours, dans sa chute, il été capable que de percevoir l'émotion profonde, inconsciente de se sentir éclaté, comme pulvérisé, devenant le foyer d'un milliard de cellules affolées qui se répandraient en gouttelettes dans l'air. Il était Icare et il n'était plus Icare, car seule son énergie désormais ouvrait la voie, cette énergie qui le ferait exploser en ondes multiples dans la mer s'ouvrant comme la mer d'Égypte aux prières de Moïse. C'était une chute qui n'avait pas de fin, dont il n'avait plus idée ni conscience. Il allait, seulement, il n'avait pas la sensation de tomber, car même dans le sens de sa chute, il avait l'impression de s'élargir, de rejoindre une vastitude originelle, semblable à celle d'avant la création du monde, dans une aube éternelle."



Et comme toujours peintures et sculptures viennent illustrer le mythe, cette collection est décidément d'une richesse qui va bien au-delà de la simple explication ou réécriture.

Ces livres portent tellement bien leur nom, ce sont les mythes qui s'adressent à nous....



Pour les plus curieux au sujet du labyrinthe, je ne peux que faire référence à la page 139 du livre d'Andrea Marcolongo version papier (ou 121 de la version numérique) "La part du héros", il y est représenté tel qu’il figure sur l’une des trente-trois pièces de monnaie retrouvées sur l’île de Crète et remontant à l’époque minoenne.

À vous de trouver la sortie.... Car le labyrinthe ne serait-il pas plus que ce que l'on voit....
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Séraphine : De la peinture à la folie

Séraphine - de la peinture à la folie ( Alain Vircondelet) 2008



Vous ne la connaissez peut-être pas ?

Et pourtant tous les grands artistes surréalistes du XXe siècle ont admiré ses œuvres.



Séraphine est née en 1864 dans l'Oise. Issue d'une famille pauvre, elle devient femme de ménage. Mais elle a une passion. Ou plutôt un besoin vital, presque métaphysique : celui de peindre. Fervente croyante ( elle voulait, étant jeune, devenir religieuse, mais sa pauvreté l'en a empêchée), elle se laisse guider par "son ange" dans ses œuvres. Elle n'a aucune technique et n'appartient à aucune Ecole.

Habitée par une sorte de folie mystique, elle est considérée comme simple d'esprit.

Cependant, grâce à Wilhelm Uhde ( galeriste et critique d'art allemand), les peintures de Séraphine sont exposées.

Mais la crise des années 30, puis l'arrivée de la guerre accentuent les difficultés et la santé mentale de Séraphine décline vertigineusement. L'internement en hôpital psychiatrique est inévitable : viennent alors les délires hallucinatoires, les crises d'hystérie, le sentiment de persécution...

Et la peinture dans tout ça ?



Cette lecture m'a marquée et bouleversée. On ne peut s'empêcher de faire le parallèle avec Camille Claudel, sa contemporaine, qui a connu sensiblement le même parcours, la notoriété en plus.

La solitude de cette artiste, sa souffrance mentale et plus tard physique m'ont beaucoup émue.



Un film a été réalisé en 2008. Séraphine y est interprétée par l'incroyable Yolande Moreau. Un magnifique hommage.
Lien : https://www.instagram.com/lo..
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Les couples mythiques de l'histoire de l'art

J'ai beaucoup aimé ce livre bien documenté, très abordable, très agréable à lire. L'auteur nous présente 32 couples de l'histoire de l'art regroupés en quatre catégories : les histoires d'amour entre scandale et passion, les relations entre deux artistes qui ont chacun leur carrière, les relations plus sereines dans lesquelles on retrouve souvent un peintre et son modèle, et pour finir les destins tragiques. J'ai trouvé que les illustrations sont pertinentes et de qualité, comme par exemple dans le chapitre consacré à Raphael et la Fornarina où est présentée la version de l'histoire qu'en a faite Ingres.
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La cathédrale

Compendium assez fastidieux sur la symbolique architecturale (mettant en lumière la différence entre le roman et le gothique, l’art mystique et l’art religieux). Après on ne lit pas Huysmans pour le sujet mais pour l’écriture elle-même. C’est un professeur d’écriture. On lit Huysmans pour apprendre la langue française.
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Albert Camus et la guerre d'Algérie

Passionnant.

Albert Camus et la guerre d'Algérie : deux histoires tragiques, la seconde alimentant la première. L'ouvrage est en effet le récit d'un véritable écartèlement. Enfant des quartiers pauvres d'Alger, devenu philosophe, Albert Camus est écartelé entre d'une part son attachement à la terre qui l'a vu naître, et d'autre part son humanisme qui l'a conduit, dès 1939, à dénoncer la misère de la Kabylie, et à refuser le statu quo en Algérie. Lui qui, ébloui par le site des ruines romaines de Tipasa, sur fond de mer et de ciel bleus, a magnifié les noces de l'homme et de la nature, est horrifié par celles, sanglantes, du terrorisme et de la répression (page 116). Il va donc, tout au long du conflit, imaginer une troisième voie qui préserve les intérêts des deux communautés : le troisième tome de ses Chroniques algériennes, qui paraissent peu après le 13 mai 1958, en définissent le cadre. Ses efforts seront vains, mais non pas absurdes comme l'illustre le mythe de Sisyphe. L'ouvrage d'Alain Vircondelet met ainsi en évidence combien les efforts d'Albert Camus vont solliciter son énergie, au point de miner sa santé et d'affecter son équilibre conjugal.



On en tirera un plus grand profit, si on a pu lire au préalable le chef-d'oeuvre posthume d'Albert Camus, le premier homme, que domine la figure de sa mère, et auquel l'auteur fait référence tout au long du récit. Orphelin de père, Albert Camus voue en effet un amour inconditionnel à sa mère. Sa mère, qui vit sur place, devient le symbole de toutes les mères d'Algérie, dont certaines payent le prix fort de la haine et du fanatisme. "Dans son for intérieur, Camus pense à sa mère : elle aurait pu, elle aussi, innocente passante dans la rue, se trouver face aux tueurs" (page 97). Elle survivra pourtant de quelques mois à son fils, s'éteignant le 20 septembre 1960. Mais son prénom perdurera avec la fille d'Albert Camus, aussi appelée Catherine...



Entre la rébellion et la répression, Albert Camus va chercher à tracer un chemin étroit. Il condamne la répression de toutes ses forces, mais place toujours avant elle "les débordements de la rébellion". Il dénonce ainsi la "gauche femelle", celle qui se couche aux pieds de la rébellion (pages 115-116). "Les indignations de ceux qui font la guerre depuis Saint-Germain-des-Prés, bien calés dans les banquettes de velours ou de moleskine de Lipp ou des Deux Magots" le conduisent donc à mépriser ces combattants de salon (page 176).

En parallèle, et à l'inverse, il refuse de signer l'appel de Jacques Soustelle, qui crée en mars 1956 l'Union pour le Salut et le Renouveau de l'Algérie Française (USRAF). Dans l'ombre, il intervient fréquemment en faveur de prisonniers Arabes internés en Algérie, ou pire, condamnés à mort. Car, à cette époque, l'Algérie se compose de trois départements, Oran, Alger et Constantine, non pas d'outre-mer, mais bien partie intégrante de la France. Les attentats sont donc passibles de la peine de mort et la guillotine fonctionne à plein régime (cf. François Mitterrand et la guerre d'Algérie). C'est à ce titre qu'hostile à la peine de mort, Albert Camus publie en 1957 ses Réflexions sur la peine capitale, qu'il co-signe avec Arthur Koestler.



Sa vision n'est que de relier les hommes entre eux et d'assurer une protection absolue aux civils. "Aucune cause ne justifie la mort de l'innocent" (page 122). Une trêve s'impose donc à lui. Mais il est sommé de choisir son camp, ce qu'il ne fera pas. Dès lors, les pieds-noirs ne le reconnaissent plus comme l'un des leurs. D'ailleurs, il n'utilise pas l'expression "pied-noir". Il parle des Arabes, jamais des Algériens, car l'Algérie n'est pas une nation et n'a donc pas de nationaux (page 119). Il ne parle pas de colonisation ou d'indépendance, il parle de la terre chère à son coeur. Peu à peu, il s'isole et se tait. Il peut compter sur un ami fidèle, le poète de l'Isle-sur-la-Sorgue, René Char. Il joue surtout de ses talents de séducteur, qui s'exercent notamment dans le cadre du théâtre, et qui révèlent en creux une vraie instabilité amoureuse. A l'actrice Maria Casarès, rencontrée en 1944 et devenue sa maîtresse (cf. Correspondance (1944-1959) : Albert Camus / Maria Casarès), il ajoute à son "tableau de chasse" l'actrice Catherine Sellers en avril 1956, le mannequin danois Mette Ivers en février 1957, et la liste n'est pas close. La culpabilité qu'il ressent à l'égard de Francine, sa femme, se double de la difficulté de ménager les jalousies réciproques de ses admiratrices. Comme si le conflit armé n'était pas suffisant et qu'il fallait en ajouter un second, amoureux...



En plein désarroi affectif, et sceptique sur le résultat de ses efforts de paix, Albert Camus publie en 1957 L'exil et le royaume, dont le titre révélateur reflète "la douleur secrète du manque et l'aspiration à l'idéal" (page 172). le 16 octobre, il apprend qu'il vient d'obtenir le Prix Nobel de littérature. A Stockholm, le 12 décembre, il accepte un débat avec les étudiants suédois, nourris de l'air du temps. Pris à partie, il argumente sa position et prononce la phrase désormais célèbre : "J'ai toujours condamné la terreur. Je dois condamner aussi un terrorisme qui s'exerce aveuglément dans les rues d'Alger, par exemple, et qui un jour peut frapper ma mère ou ma famille. Je crois à la justice, mais je défendrai ma mère avant la justice" (page 197). Avec la somme perçue au titre du prix Nobel, il acquiert une magnanerie à Lourmarin dans le Lubéron, près de son ami René Char. Cette maison sera pour lui, l'homme des deux rives de la Méditerranée, à la fois l'exil et le royaume...

Et c'est de Lourmarin, le 4 janvier 1960, qu'il entamera son ultime et funeste voyage. Il ne connaîtra pas l'issue de la guerre.



Albert Camus et la guerre d'Algérie : un récit émouvant qui rend Albert Camus attachant et qui donne envie d'approfondir son oeuvre, à laquelle il constitue une superbe introduction. Je conclurai par une citation de Jean Daniel, qui résume bien le drame d'Albert Camus : que devient une patrie quand elle cesse de l'être ?



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Les derniers jours de Casanova

L'agonie de Casanova dans laquelle Alain Vircondelet évoque d'une manière romancée la longue et tumultueuse vie de celui-ci durant les quelques jours précédant son décès.



Cela se présente plutôt comme une série de réflexions servant à Casanova à se justifier sur son comportement envers les autres ou lui-même, ses idées qui l'ont accompagné tout au longe de son parcours "chaotique" que l'on apprécié ou non le "bonhomme".



Un ouvrage qui a été lu en diagonale en ce qui me concerne, et, cela même si il possède de nombreuses qualités au point de vue du styles ainsi qu'au niveau des recherches historiques autour de la personne même de Casanova. Il est vrai que j'ai quelques à priori concernant l'individu, peut-être dû à sa réputation de libertin.



Pour la petite histoire, Casanova a finit ses jours au château de Dux (République Tchèque) en tant que bibliothécaire.

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De l'or dans la nuit de Vienne selon Klimt

Quelle belle collection : "le roman d'un chef-d'œuvre". aimant la peinture et tout particulièrement ce tableau, je me suis régalée en lisant ce livre. et d'avoir le tableau sous les yeux (en 2 ème de couverture). quelle belle idée. Alain Vircondelet m'a enchantée et Klimt aussi.
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Albert Camus et la guerre d'Algérie

J’attendais le livre d’Alain Vircondelet : « Albert Camus et la guerre d’Algérie. Histoire d’un malentendu » avec un grand intérêt. Je connaissais ses livres sur l’ Algérie : Alger l’amour , Maman la blanche et Albert Camus fils d’Alger et j’ai toujours apprécié à la fois son style littéraire et ce qu’il disait de l’amour de son pays, de sa nostalgie, sentiment que j’éprouvais moi-même et qu’il savait écrire.



Concernant ce rapport de Camus avec la guerre d’Algérie c’est , évidemment , une question absolument centrale et elle a été tout a fait centrale pour Albert Camus comme il le montre bien.



Je dirai d’abord que ce livre est écrit par un écrivain et le lecteur aimera la façon dont Alain Vircondelet se saisit de cette question mêlant des faits historiques, les analyses de Camus et sa propre analyse dont la dominante me semble littéraire plus que politique. Ce n’est donc pas un livre d’historien même si l’histoire n’est pas du tout négligée et qu'elle est, au contraire décrite dans le détail.



Ce mélange d’histoire et d’analyse littéraire rend le livre parfois complexe mais permet de voir, si je puis dire, se créer et évoluer la pensée de Camus sur cette guerre. Alain Vircondelet cherche à aller au plus profond de ce que ressent Albert Camus.



Il analyse évidement la position de Camus en face de la question de l’indépendance du pays. Comme beaucoup il montre que Camus ne pouvait envisager de quitter ce pays mais il le fait de manière très approfondi en remontant à toute l’histoire personnelle de cet écrivain.



C’est presque à une psychanalyse qu’il se livre en insistant , par exemple, sur tout ce qu’il a vécu à Tipaza, sur les leçons de Tipaza et sur les leçons de son père avec sa maxime : « un homme ça s’empêche » leçons qui sont à la source de sa position si controversée.



Il montre longuement comment Camus dès ses débuts, très jeune encore critique fortement les méthodes du pouvoir colonial.



Amour de cette terre : oui, lutte contre le pouvoir colonial :oui.



Mais par contre Albert Camus ne peut accepter le terrorisme qui s’attaque aux victimes innocentes.



Alain Vircondelet montre très bien ce terrorisme du FLN, il décrit ces actes odieux comme les attentats dans les bars du Centre d’Alger (p.155) et il montre comme d’autres l’ont fait avant lui les positions opposées de Sartre (et sa phrase odieuse) et de Camus sur ce thème du terrorisme qu’il ne peut absolument pas accepter.



D’ailleurs en ouverture du livre Alain Vircondelet rappelle cette phrase de Camus : « Ghandi a prouvé qu’on pouvait lutter pour son peuple et vaincre, sans cesser, un seul jour de rester estimable. Quelle que soit la cause que l’on défend, elle restera toujours déshonorée par le massacre aveugle d’une foule innocente où le tuer sait d’avance qu’il atteindra la femme et l’enfant. » Chroniques Algériennes. Avant-propos.



Le livre nous montre cette violence aveugle et complétement barbare et, évidemment, l’enchaînement de violence qui s’en suit. (p 179 et s.)



Camus voit aussi au delà il : « voit au contraire l’ombre inquiétante de la Russie soviétique recouvrir lentement sa terre natale. A qui, en effet, sinon à elle, les nouveaux chefs de l’Algérie nouvelle vont-ils se livrer eux-mêmes ne serait-ce que pour reconstruire le pays et l’administrer autrement ? » (p. 223)



Je trouve Alain Vircondelet un peu sévère à l’égard de Macron et ses tentatives d’apaiser le climat franco-algérien ainsi qu’à l’égard de Benjamin Stora mais je suis d’accord sur le fait que le pouvoir Algérien et une partie des élites liés à ce pouvoir continuent de ne voir qu’un côté des crimes !



En définitive un livre dense, complet, qui va au fond des questions , qui le fait, non pas en universitaire, mais en écrivain et qui rend justice à Albert Camus à un moment où l’on peut dire que sa pensée a triomphé et commence même à être apprécié en Algérie.
Lien : http://jpryf-actualitsvoyage..
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De l'or dans la nuit de Vienne selon Klimt

Un récit original et prenant pour plonger dans l'histoire d'une oeuvre et de l'artiste qui en est à l'origine. Malgré quelques longueurs, on ne peut qu'être happé par l'histoire. Amoureux de Klimt ou de l'art d'une façon générale, ce récit oscillant avec brio entre romanesque et enquête historique nous offre un autre regard sur un tableau connu de tous
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Albert Camus et la guerre d'Algérie

Les lecteurs français, du moins ceux qui s’intéressent à l’histoire de la guerre d’Algérie, à ses causes lointaines, seront bien inspirés de lire l’ouvrage d’Alain Vircondelet : Albert Camus et la guerre d’Algérie, histoire d’un malentendu. Cette dernière indication complémentaire est capitale car le rapport qu’a vécu Camus avec le conflit algérien est empreint de ce malentendu. Pourtant , la publication de nombreux articles dans Alger Républicain entre novembre 1938 et novembre 1939 , sous la direction de Pascal Pia range Camus dans le camp des dénonciateurs du colonialisme , et ils ne sont pas légion à cette époque à aborder le thème de la misère de la Kabylie , titre de l’une de ses chroniques , ou le thème de la clochardisation des populations arabes , constat qui sera fait plus tard par des appelés français en Algérie , en plein bled , dans « l’intérieur » , selon l’expression employée pour désigner l’au-delà du littoral algérien .

Alain Vircondelet prend une précaution décisive :il admet très clairement que Camus a été porteur , ou victime, d’une mythologie de l’Algérie : «C’était toujours ainsi sur cette terre , où, il y a cinquante, soixante-dix ans, des hommes et des femmes étaient venus, avaient labouré, creusé des sillons de plus en profonds ou au contraire de plus en plus tremblés, jusqu’à ce qu’une terre légère les recouvre et ils avaient procréé puis disparu (…) et les fils de ceux-ci s’étaient retrouvés sur cette terre, sans passé et sans morale . »

L’attachement charnel et affectif de Camus a-t-il pu l’empêcher de manifester davantage de clairvoyance dans le conflit algérien ?

Alain Vircondelet l’admet en citant Camus lui-même : « J’ai ainsi avec l’Algérie une longue liaison qui sans doute n’en finira jamais, et qui m’empêche d’être tout à fait clairvoyant à son égard. »

Alain Vircondelet souligne à de nombreuses reprises le déchirement de Camus lors des différentes étapes du conflit. Il est révulsé par les attentats à la bombe, les exactions commises par le FLN contre les populations civiles, notamment lors des massacres de Philippeville et de Mélouza. Il ne se range pas non plus du côté des ultras, de ceux qui prônent une répression encore plus intense, plus aveugle, plus cruelle. Non, il pense, et d’aucuns y voient alors une grande naïveté, ou au mieux de l’opportunisme et de la lâcheté, que la seule voie est de sauver des vies innocentes, européennes comme arabes : il soutient ainsi la démarche de Germaine Tillion conduite pendant la bataille d’Alger pour obtenir une trêve entre les parties en présence .La fameuse phrase sur la mère préférée à la justice prononcée lors de la remise de son prix Nobel en 1957 est resituée dans son contexte et son énoncé intégral : « Je me suis tu depuis un an et huit mois, ce qui ne signifia pas que j’ai cessé d’agir. J’ai été et je suis partisan d’une Algérie juste, où les deux populations doivent vivre en paix et dans l’égalité. J’ai dit et répété qu’il fallait faire justice au peuple algérien et lui accorder un régime pleinement démocratique jusqu’à ce que la haine de part et d’autre soit devenue telle qu’il n’appartient plus à un intellectuel d’intervenir, ses déclarations risquant d’aggraver la terreur. »



Alain Vircondelet souligne l’importance prise dans la vie de Camus par son épouse, Francine, ses amis Jean Grenier, René Char, ses maîtres parmi lesquelles Catherine Sellers et bien sûr la grande Maria Casarès, actrice hautement célèbre à l’époque. Cette biographie thématique sera vue comme un excellent complément à celles déjà existantes écrites par Olivier Todd ou Michel Onfray. À recommander, pour clarifier les débats actuels sur le passé colonial de la France.

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