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Critiques de J.M.G. Le Clézio (1109)
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Ritournelle de la faim

Un livre magnifique et mélancolique qui raconte la ruine d'une famille et l'intromission de la deuxième guerre par le point de vue d'une jeune fille puis femme que la vie endurcit. Les générations s'égrènent dans une ambiance mélancolique, dans un monde régi essentiellement par les fatalités et la mort, la mort des sentiments comme des gens.
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Bitna, sous le ciel de Séoul

Le Clézio, il sait écrire et j'ai lu une critique disant "pas fluide". S'il y a bien un auteur qui dispose d'une fluidité d'écriture, c'est lui.



Ce livre m'a plu, le style est justement fluide, simple sans être banal, et l'histoire en Corée m'a intéressé. Bon, je n'ai pas été transporté ou remué, je ne le lirai pas une autre fois, mais cela reste un très bon livre.



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Ballaciner

🎬 « Lorsque j’ai commencé à fréquenter les salles de cinéma, à l’âge de seize ou dix-sept ans, je suis entré dans un cycle qui m’a apporté beaucoup de plaisir et d’émotions. C’était à Nice, qui à l’époque s’enorgueillissait de posséder cinquante salles de cinéma. Il y en avait pour tous les goûts, pour tous les prix, pour tous les quartiers. J’allais au cinéma jusqu’à deux ou trois fois par jour. On m’objectera qu’il fallait avoir les moyens. C’était une autre époque. »



"Ballaciner" est l'un des textes les plus personnels de Jean-Marie Le Clézio. Un essai solaire sur son rapport au cinéma et son initiation niçoise au 7e art. Hélas introuvable en poche, ce texte a injustement déserté nos librairies.
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Hasard, suivi de

Première lecture de cet auteur qui, prix Nobel oblige, me semblait difficile. A tort. Le récit correspond à l'image de JMG Le Clezio, un voyage. Pour la première nouvelle, à travers les océans et pour la seconde à travers la jungle sud américaine. Les deux histoires sont sombres et pessimistes quant à la nature humaine, empreinte d'un certain mystère. Cette "initiation" à l'écriture de JMG Le Clezio m'invite à lire d'autres de ses romans.
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Le Chercheur d'or

Le roman commence ainsi: « du plus loin que je me souvienne, j'ai entendu la mer ». D'emblée, Le Clézio écrit un hymne à la mer, limpide dans les lagons, d'un bleu sombre en haute mer et déchaînée dans la tempête. Alexis, le héros, l'a presque toujours sous les yeux... ainsi que le ciel des tropiques et la terre des îles parsemant l'Océan Indien, aussi, bien sûr.

La première partie est particulièrement fascinante, comme toute évocation d'une enfance libre, dans des lieux extraordinaires, où le temps passe très très lentement. L'auteur nous fait partager le vécu intense d'Alexis et de sa soeur Laure (8 et 9 ans, respectivement), dans un "enfoncement" de l'île Maurice. Leur père, un doux rêveur, se dirige droit à sa ruine; la mère va tomber malade. Mais cela n'empêche pas les enfants de connaitre le bonheur. Devenu jeune adulte, Alexis part à l'île Rodrigues où, d'après des documents hérités de son père, un trésor a été caché par un corsaire. Alexis est le seul à y croire. Sa recherche du trésor se révèle être comme une ascèse dans un paradis sauvage. Il finit par y rencontrer une mystérieuse jeune fille, Ouma, qui vit dans une simplicité et une liberté idéales. Hélas, nous sommes en Août 1914. Alexis se porte volontaire pour faire la guerre en Europe. Il arrive brusquement dans un enfer: ces pages sont aussi dures que celles écrites par E.-M. Remarque. Alexis survit, par hasard. Mais il faut que la boucle soit bouclée: il revient sur l'île Rodrigues, puis sur le lieu de son enfance, où il trouve une liberté nouvelle.

Le plan du roman semble parfait. Tous les personnages sont extrêmement attachants. L'écrivain sait bien rendre les ressentis intenses du jeune héros. Il me semble probable que la première partie du livre soit directement inspirée par l'expérience personnelle de l'auteur. Le rythme du récit est généralement lent, mais il y a un parfum d'aventures sur l'île Rodrigues. Quant à la prose de le Clézio, elle est à la fois simple et somptueuse. Lors de ma lecture, je suis resté concentré pour apprécier à sa juste valeur cette magnifique écriture. "Le chercheur d'or" est, à mes yeux, l'un des plus beaux romans que j'aie lu.

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Poisson d'or

Un vrai délice.. On s'installe et on lit, comme assise à côté d'un conteur.. Et l' histoire se déroule, à la première personne, comme une odyssée, un flux d'expériences de vie, à mesure que la protagoniste grandit, de petits boulots d'enfant brutalement enlevée dans sa petite enfance, jusqu'à la jeune femme aux multiples boulots, qui s'installe successivement dans des taudis sordides ou la solidarité joue à plein, ou dans des appartements plus "bourgeois" d'où, invariablement, elle finit par devoir partir vite... Pour se sauver. On passe du Maroc à la France, puis aux Etats-unis : les mille vies d'une très jeune femme, autodidacte, musicienne... Sourde...

Une très belle technique narrative, avec des phrases simples qui, mine de rien, annoncent les grands tournants/retournements dans la vie de l'enfant, la jeune fille, de la jeune femme. Avec comme une soif de vivre inextinguible qui coule de chapitre en chapitre, malgré la violence, la convoitise des hommes, le racisme latent. Mais aussi de belles rencontres, comme des jalons de terre ferme dans le flot de cette poussée en avant.



Un très beau conte emporté par l'écriture enchantetesse d'un Le Clezio inspiré... Et inspirant. Merci Monsieur J. M. G!
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Le Procès-verbal

Le procès-verbal/J.M.G.Le Clezio/Prix Renaudot 1963.



« Il y avait une petite fois, pendant la canicule, un type qui était assis devant une fenêtre ouverte. »

C’est un début curieux pour un roman et de suite on se demande si Adam Pollo sort de l’armée ou de l’asile psychiatrique, car on découvre au fil des pages un récit bizarre, déroutant, riche d’incohérences et d’absurdités.

Adam, la trentaine, est un solitaire plutôt marginal qui veut d’une certaine manière s’évader du monde qui l’entoure et vivre en toute indépendance. Il vit seul dans une maison abandonnée dans le Sud de la France. Contemplatif.

Les cahiers d’Adam sont le procès verbal de cette expérience vécue par un individu soit fou soit lucide, en tout cas intelligent et cultivé qui observe le monde. On peut tout supposer d’autant plus que l’on ne sait rien du passé d’Adam.

Ce roman, le premier de Le Clezio surprit les lecteurs à sa publication en 1963. Les œuvres à venir seront très différentes.

La seule constante : le style de qualité que l’on retrouvera dans « Désert », « Poisson d’or », ‘Le Chercheur d’or », « Raga », « Cœur brûlé », « Tempête » etc… Un style très poétique et coloré.

On peut considérer ce roman comme une œuvre de jeunesse.

J’y ai senti quelques longueurs induisant un certain ennui à la lecture. Un roman assez déroutant.

J’ai nettement préféré les ouvrages postérieurs de J.M.G.Le Clezio que j’ai cités.



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Coeur brûle et autres romances

Cœur brûlé. / J.M.G. Le Clézio

Ce poétique recueil de nouvelles qui abordent une fois encore les thèmes récurrents chers à J.M.G. Le Clézio, c’est-à-dire l’enfance qui souffre, les minorités exploitées, la douleur et les angoisses existentielles, m’a ravi comme m’ont ravi autrefois « Désert », « Poisson d’or » et « Le chercheur d’or », par le lyrisme latent qui émane des ces lignes souvent très camusiennes. La brutalité de la société qui entre en conflit permanent avec l’individu est le trait dominant de ces sept romances.

Ces textes magnifiques sont empreints de nostalgie, de mélancolie et même de tristesse. Les personnages semblent se résigner à leur sort, à leur destin, victimes d’une fatalité inexorable.

Dans « Cœur brûlé », Pervenche se demande ainsi « Est-ce qu’on peut faire vraiment quelque chose de sa vie ? » Dans « Kalima » également, une tristessesourd du personnage principal comme s’il était condamné dès le départ. Dans « Trésor », on a affaire à un texte plus allégorique, et dans « Vent du Sud « », souffle un exotisme polynésien très « fiu ».

Langueur, érotisme discret, solitude, malaise et mal-être existentiels habitent les personnages principaux qui semblent en perdition, ballottés et secoués par les vicissitudes de la vie, constamment sur la brèche, prêts au naufrage. On assiste de façon récurrente à une incommunicabilité des consciences.

En résumé, un recueil extrêmement travaillé, ciselé : comme dit un lecteur, de la poésie en prose ; mais dépressifs, s’abstenir !!

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Tempête : Deux novellas

Tempête/Deux novellas/J.M.G.Le Clezio/Prix Nobel de littérature 2008

Une fois de plus on est emporté par l’immense talent de conteur de J.M.G. Le Clézio. Cette « cuvée » est exceptionnelle, fruit d’une imagination et d’un style inimitable, tout en finesse, sensibilité et légèreté pour conter des faits dramatiques sinon tragiques. Les mots défilent rapides, comme éthérés, et pourtant puissants et bouleversants. Pas un mot inutile pour narrer les tourments de chacune de ses héroïnes. Tout est dans la sobriété, la concision pour une plus grande force évocatrice. Une œuvre majeure.

L’action de la première novella , intitulée Tempête, sorte de roman bref, se passe dans l’île d’Udo au large du sud de la Corée du Sud, là où les femmes plongent depuis toujours, en apnée, pour récolter les ormeaux. Une tempête fait alors rage sur l’île.

Philip Kyo, écrivain et journaliste, rongé par un passé tourmenté, revient des décennies plus tard dans cette île où il a connu l’amour avec Mary Song.

Il va y faire la rencontre d’une adolescente intelligente et très critique du monde qui l’entoure, June, un rayon de soleil dans sa vie de réminiscences chargée de mélancolie. June qui va croire avoir trouver en lui un père qu’elle n’a jamais connu, et puis sans se l’avouer, s’éprendre de cet homme assez froid, encore hanté par un passé diversement dramatique, et en quête d’on ne sait quoi exactement. Kyo se livre alors :

« Le hasard a mis sur mon chemin un ange, une enfant innocente et drôle. Pour la première fois depuis longtemps j’ai rencontré un être humain. »

Les monologues de June sont d’une beauté absolue, petite de treize ans qui va faire l’apprentissage de la vie, ne comprenant pas que cet amour inavoué pour M. Kyo est impossible, un amour qui va la laisser désaxée, blessée, déprimée, laminée.

Et on vit et on souffre avec les personnages, et notamment avec June qui découvre la vie et ses vicissitudes, elle qui n’a dans la vie que sa mère, pêcheuse d’ormeaux souvent absente. Une mère qui d’unique naturellement va devenir essentielle.

« Que signifie les mots quand on ne se reverra jamais ? Je hais les politesses et les bonnes manières. Je hais les discours politiques et les leçons de morale. » (June)

La seconde novella intitulée « Une femme sans identité », est toute dans le même style d’une grande fraicheur et d’une grande sensibilité, un style d’enfant adapté aux circonstances. Un style qui évolue avec l’âge de son héroïne.

Rachel comme June va faire l’apprentissage de la vie, d’une vie dont elle ne sait d’où elle lui vient. Déracinée, sans passé ni avenir, sans nom, sans but, sans souvenir, sa quête d’identité est pathétique, dramatique, livrée à la débrouille, à la déréliction, partie à la dérive et l’errance dans une totale solitude morale. Au point de dire : « Quand les gens ont peur de vous, c’est qu’ils vous voient. Vous existez. »

Née en Côte d’Ivoire et vivant dans cette famille qui ne lui semble pas être la sienne, Rachel va vivre les disputes entre son père et sa belle-mère, une femme qui n’a de cesse de lui dire qu’elle est l’enfant du démon, et qu’elle va haïr au point de se dire à partir de cet instant : « J’avais grandi d’un coup et jamais plus je ne serais une enfant. »

Les tribulations qui suivent le départ de Côte d’Ivoire pour la région parisienne vont être douloureuses pour Rachel. La descente aux enfers et la destruction vont lui faire toucher le fond à un tel point qu’il semble impossible de remonter la pente, quand on a perdu toute illusion :

« Il convient de rester modeste sur la capacité des autres à vous comprendre. Je ne parle même pas d’amour, mais juste de tolérance, c’est peut-être la leçon de toute cette histoire. S’il doit absolument y avoir une leçon aux histoires, ce qui n’est pas certain non plus. »

Au travers de ces deux novellas, Le Clézio maîtrise de façon parfaite son sujet ; et son talent pour mettre en scène deux jeunes adolescentes, June puis Rachel, est sans égal ; il est un observateur attentif de notre société et de ses souffrances.



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Désert

Il y a en effet dans Désert à la fois la question des origines et cette part d'imagination propre à l'enfance : je me représente très bien le petit garçon qu'il a été rêver lors de sa vie en Afrique à ces destins des peuples du Sahara. Même si ce n'est probablement qu'une extrapolation infondée de ma part, Lalla et Nour sont exactement le genre de personnages que je créais gamine en pensée avant de m'endormir et dont la vie et les péripéties pouvaient s'accélérer dans un espace-temps improbable.

Quoiqu'il en soit ce livre surprenant mêle romantisme et fantastique, nous fait voyager et se révèle entre les lignes le miroir du décalage entre la société d'aujourd'hui et celle de nos racines ancestrales. Un roman qui n'a rien perdu de sa modernité 40 ans plus tard!
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Ritournelle de la faim

Les années folles s'éteignent, on fait encore illusion dans le cercle d'Alexandre Brun. La jeune héroïne Ethel qui assiste aux réceptions de son père perçoit confusément les changements autour d'elle: la fin de la grandeur familiale, sa spoliation d'héritage et le basculement politique. A l'âge où les amitiés ont l'intensité des coups de foudre (tous les passages qui décrivent sa relation à son amie Xenia sont d'une justesse inouïe), Le Clézio nous parle avant tout de cette jeune femme attachante à travers laquelle on retrouve sa mère. La Seconde Guerre mondiale signe son entrée brutale dans le monde des adultes.

La fluidité du récit porté par le personnage d'Ethel nous happe dès le début sans être alourdie par la complexité narrative pourtant brillante. A travers le destin d'Ethel, l'auteur nous questionne sur les thèmes qui font sa signature: la faim de vivre, la frustration et l'insatisfaction face à la douce quiétude, le désir de tempête et d'ailleurs, le renoncement aussi...

La grande subtilité de Le Clézio qui ouvre et ferme ce roman avec des éléments personnels donne à cette lecture, une fois terminée, une portée bien plus profonde qu'il n'y parait.
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La Quarantaine

Un récit dense et inspiré de l'histoire familiale de Le Clezio. Dans un contexte de patrimoine confisqué, le narrateur est à la recherche d'un "ailleurs" et il est guidé dans sa quête de sens par des figures féminines fortes et spirituelles, presque magiques (on pense à des fées philosophiques).

Dans La Quarantaine, j'ai particulièrement aimé le fil invisible rimbaldien.

Au delà de la grande maîtrise narrative qui entremêle les dimensions historiques, psychologiques et fantastiques, je suis encore une fois séduite par la capacité de Le Clezio à rendre vivant un paysage ou une atmosphère: la nature devient un personnage à part entière. Cet éloge de la beauté du monde, étonnant de modernité et d'actualité, nous invite en permanence à la contemplation.

La complexité des passages descriptifs, loin de lasser, nous incite souvent à relire des paragraphes entiers pour en saisir la subtilité.
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Le Chercheur d'or

Un récit dense et inspiré de l'histoire familiale de Le Clezio. Dans un contexte de patrimoine confisqué, le narrateur est à la recherche d'un "ailleurs" et il est guidé dans sa quête de sens par des figures féminines fortes et spirituelles, presque magiques (on pense à des fées philosophiques).

Dans Le chercheur d'or, la métaphore du mythe d'Orphée et Eurydice est filée jusqu'à la chute.

Au delà de la grande maîtrise narrative qui entremêle les dimensions historiques, psychologiques et fantastiques, je suis encore une fois séduite par la capacité de Le Clezio à rendre vivant un paysage ou une atmosphère: la nature devient un personnage à part entière. Cet éloge de la beauté du monde, étonnant de modernité et d'actualité, nous invite en permanence à la contemplation.

La complexité des passages descriptifs, loin de lasser, nous incite souvent à relire des paragraphes entiers pour en saisir la subtilité.
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Chanson bretonne - L'enfant et la guerre : ..

On retrouve l'écriture élégante de l'auteur et surtout ces récits laissent une trace durable dans nos pensées tant il parvient à travers son histoire à nous interroger sur les premières années de nos vies, sur ces souvenirs qui se mélangent dans nos têtes entre rêve et réalité.

Au fond, il est question de l'importance de consoler l'enfant qui reste en nous pour conquérir son futur.
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Révolutions

Saga familiale sur fond de Révolutions. Celle de l'ancêtre Jean Eudes Marro, un Breton qui s'engage dans les troupes révolutionnaires, celle de Jean Marro en pleine guerre d'Algérie. Des récits qui se croisent, un style à l'ancienne, fluide, documenté, précis, qui emporte. Ce roman raconte la perte et la lutte pour un certain idéal humaniste à deux siècles de distance.
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Chanson bretonne - L'enfant et la guerre : ..

Chanson bretonne suivi de L’enfant et la guerre : Deux contes. J. M. G. Le Clezio

C’est la Bretagne de son enfance que Le Clezio nous « chante » dans ce premier bref récit qui se prolonge dans le second conte en arrière-pays niçois, là où il est né. Pas de plaintes nostalgiques dans les mots choisis par l’écrivain qui bien que né en 1940, a quelques souvenirs de la fin de la guerre. Témoin d’une époque révolue, Le Clezio quoique ne parlant pas couramment le breton, se plait à user de mots de la langue de ses aïeux pour exprimer le fond de sa pensée et la douceur pastorale des images des moissons à l’ancienne et des fêtes villageoises à Sainte Marine près de Quimper. Comme il le dit si bien, tout est à la même place dans le petit village, mais quelque chose a changé, le temps a usé et repeint, modifié l’échelle surtout et modernisé le paysage. Et l’auteur de se poser la question pour connaître les raisons du manque de résistance des bretons pour pérenniser leur idiome. Pourquoi ont-ils cru que la langue bretonne les rejetait dans une catégorie inférieure et les condamnerait à la misère ou à l’ignorance ?

Le Clezio se souvient de la violence des tempêtes marines et aussi de la brûlure du soleil certains jours, la solitude des criques encombrées de galets géants où venaient exploser les vagues. La culture du terroir est omniprésente dans cet hymne à la Bretagne de ses lointains ancêtres.

C’est le 28 juillet 1488 que la Bretagne a perdu son indépendance. Vaincues par le roi de France à Saint Aubin du Cormier près de Rennes, les troupes du duc François II et de la duchesse Anne se rendirent et se soumirent à la suzeraineté de la France pour toujours. Faisant partie du butin, la duchesse Anne dut épouser le roi de France Charles VIII.

Dans ces deux contes, l’enfance est au cœur du récit et connaissant bien moi-même la Bretagne pour y avoir passé toutes les vacances de mon enfance chez ma tante dans le Morbihan à partir de 1950, j’ai retrouvé ses sensations, des sentiments que j’avais ressentis jadis. Mes souvenirs ont repris de la couleur en lisant la Bretagne de Le Clezio. Par contre étant né quatre années après l’auteur, je n’ai pas de souvenirs de la guerre. Mes plus anciens souvenirs, je les date à l’été 1947, l’un des plus chauds du siècle. Pour l’auteur la mémoire aussi commence vers trois ans. Les moissons manuelles à Roquebillière et glaner les épis perdus, ce geste très ancien, restent à jamais gravées dans sa mémoire, car après la guerre, tout changera avec la mécanisation des travaux agrestes. Mais comme dit bien l’auteur, la mémoire est un tissu fragile, facilement rompu, contaminé, un mélange confus et contradictoire. On ne peut pas toujours mettre des mots sur ce que l’on ressent à cet âge.

La guerre, ce fut aussi la faim, une faim permanente que décrit bien l’auteur, un vide au centre du corps. Ce fut également la famille Le Clézio coupée en deux au début de la guerre, avec un père mauricien en mission en Afrique équatoriale et sa mère française dans la France occupée, un retour du père impossible durant sept ans, une séparation dont a beaucoup souffert l’enfant. Puis ce sera le départ pour l’Afrique en 1947 où il va découvrir la liberté, le plaisir des sens et l’abondance de la nature. Mais aussi l’injustice fondamentale de la colonie et l’arrogance des administrateurs coloniaux. Cela est une autre histoire…

L’auteur nous donne aussi l’origine de son nom, Ar Kleziou, qui décrit un lieu dit « Le grand talus ». Deux contes à connotation autobiographique, tout simples mais prenants et émouvants, grâce à une belle écriture, plutôt onirique et insouciant pour le premier et plus douloureux pour le second : l’enfant né en 1940 n’a jamais connu la paix lorsqu’il commence à avoir des souvenirs…

Deux textes magnifiques.

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Le flot de la poésie continuera de couler

Ce livre est comme une promenade que l'on ferait avec J.M.G. Le Clézio: il nous raconte l'histoire de la poésie sous la dynastie Tang bien sûr mais aussi sa rencontre avec la littérature chinoise et avec un esthétisme, qui, loin d'être superficiel, nous renvoie à une perception du monde empreinte d'authenticité. C'est un voyage dans le sensible et, avec son ami Dong Qiang, il relie les civilisations et les siècles et nous ouvre au sublime. Il y a dans la simplicité des vers qu'ils nous proposent une profondeur qui me semble essentielle et qui réunit ce qui nous manque tant aujourd'hui dans nos vies, l'audace et l'émotion : "dans cette itinérance, tous inventent une liberté".

La délicatesse du Flot de la poésie continuera de couler tient autant aux mots de Le Clézio et au choix des extraits de poésie qu'aux calligraphies et aux illustrations qui accompagnent la lecture.
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Poisson d'or

JMG Le Clezio est un auteur à lire absolument: la simplicité des textes le rend très accessible, son écriture soignée en fait un ambassadeur indéniable de la langue française et le voyage un thème omniprésent dans ses romans.

Dans Poisson d'or, la fuite et la recherche d'un ailleurs rythment la vie de Laïla depuis qu'elle a été volée et revendue enfant, quelque part en Afrique subsaharienne. Le mouvement se confond avec l'errance : faut-il savoir d'où l'on vient pour goûter à la vraie liberté ? Un roman magistral et éclairant - encore terriblement actuel - sur le déracinement et la condition de migrant, tout en portant une réflexion plus intime sur l'identité et le sentiment d'être en exil de soi.
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Poisson d'or

Poisson d’or

J. M. G. Le Clezio (né en 1940)

Prix Nobel 2008

Elle avait six ou sept ans, elle ne sait plus au juste, mais elle sait qu’à cette époque elle a été volée à sa famille, un cauchemar lointain et terrible qui revient souvent hanter ses nuits. Saisie tout à coup par des mains d’homme et jetée au fond d’un sac où elle étouffait, elle revit le jour chez Lalla Asma, une vielle juive espagnole du Mellah (quartier juif au Maroc) qui l’avait achetée. Elle ne se souvient plus non plus de son vrai nom, celui que sa mère lui a donné à sa naissance, ni du nom de son père, ni du lieu où elle est née. Lalla Asma l’appelle Laïla, la nuit en hébreu. Elle sait qu’elle vient du Sud car elle a la peau sombre.

Lalla Asma considère Laïla comme sa fille et lui fait l’école.

Lalla Asma a un fils, Abel qui est marié à Zohra, une belle fille qui déteste Laïla tandis que Abel se livre en cachette à des attouchements sur la jeune Laïla.

Huit années on passé, et à la mort de Lalla Asma tombée malade, Laïla âgée de quinze ans n’a d’autre choix que de s’échapper pour ne pas tomber aux mains de Zohra et d’Abel. Elle se réfugie chez Jamila, l’accoucheuse du village, à la tête d’une maison de six « princesses » entourées d’un tourbillon d’hommes riches arrivant dans de belles voitures américaines et emmenant les filles en vadrouille…

Laïla connaît des jours de bonheur et de liberté jusqu’au jour où elle commence à voler par jeu, suivant en cela le mauvais chemin de Selima. Peu à peu elle perd le sens de la mesure et n’accepte aucune autorité. Durant cette époque de sa vie, elle forme son caractère et devient inapte à toute forme de discipline, encline à ne suivre que ses désirs. Elle connaît les postes de police et les juges.

Finalement elle trouve un emploi chez les Delahaye et revoit Zohra qui décide de la fiancer contre son gré. Il lui faut à nouveau fuir et rejoint le port de Melilla, puis l’Espagne et la France où elle va se cacher à Paris dans un abri où vivent des sans papiers, sous la terre comme des cafards, pour ne sortir que la nuit. Le jour elle lit, la nuit elle rode. Elle trouve des emplois précaires et va de galère en galère, évite les loubards et les flics. Elle se fait des relations et obtient un passeport. Elle rêve de partir au loin, mais elle est persuadée qu’il n’y a pas un seul endroit au monde pour elle, et que partout où elle ira, on lui dira qu’elle n’est pas chez elle et qu’il faut qu’elle aille voir ailleurs.

Nice, Paris, Boston, Chicago : elle bourlingue de squats en hôpitaux, chante, joue du piano, fait de bonnes et de mauvaises rencontres, et sombre dans une instabilité chronique. Jusqu’au jour où elle entrevoit où peut se trouver le havre de paix…

On ne vante plus le beau style de le Clezio qui réussit le tour de force de se mettre dans la peau de Laïla qui est la narratrice.

Un très beau roman : l’histoire d’une fillette noire volée, battue, rendue à moitié sourde à l’âge de six ans, et qui va courir le monde en quête de son identité, d’amour et de famille. Le credo de Laïla : ne jamais subir pour éviter les pièges !

Un roman initiatique pour une inlassable quête d’identité.







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Diego et Frida

Cette double biographie sur un couple mythique, c’était une lecture que j’appréhendais un peu, ayant une connaissance très limitée de ces deux peintres. Finalement, ce qui m’a le plus gêné c’est ma méconnaissance de l’histoire du Mexique. Quelques notes auraient été bienvenues. Par moment aussi j’ai eu quelques difficultés avec la chronologie, car l’auteur fait à plusieurs reprises de légers écarts vers le passé ou le futur, ce qui n’est pas en soi désagréable mais qui aurait là aussi nécessité une meilleure connaissance du Mexique. Passé ces quelques remarques c’est un livre assez envoûtant, ou tout au moins prenant. Il faut dire que la plume de Le Clézio est belle, qu’il équilibre bien la place consacrée à Frida et celle consacrée à Diego. J’ai découvert un couple fascinant, énigmatique, improbable, «l’union de l’éléphant et de la colombe ». Tenter de comprendre ce couple énigmatique est une motivation efficace pour le lecteur. Malheureusement, contrairement à Diego, le personnage de Frieda est resté pour moi assez énigmatique, avec sa forte personnalité, exigeante, et en même temps soumise. Je suis restée un peu sur ma faim même si Le Clézio a parfaitement réussi à me communiquer ce qui fascinait Diego chez Frida. Une histoire d’amour complexe qui fut pour moi une totale découverte. Ce livre est aussi une plongée dans l’histoire du Mexique dans la première moitié du XXème siècle et dans les cultures indiennes préhispaniques. Une lecture très dépaysante !
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