A la fois un livre d'histoire, un livre de sociologie et un livre sur la transmission. Un livre qui m'a fortement interpellé parce que mon frère a fait la guerre d'Algérie, qu'il ne veut pas en parler à ses enfants et que moi, j'étais le petit frère, trop jeune pour y aller (au moment de mon service militaire, c'était fini), mais suffisamment âgé pou avoir suivi les évènements et les échanges de courriers.
Un livre qui m'a interpellé, non seulement sur le sujet de l'Algérie, mais aussi sur la transmission familiale et plus précisément celle entre père et fils.
Je suis, moi aussi, un de ces retraités à qui les enfants, adultes aujourd'hui, demandent des histoires sur ma propre enfance (ce que j'ai fait lors du confinement : j'ai écrit un récit sur mon enfance).
Comment transmettre ? deux points m'ont marqué dans ce livre : d'abord la distinction entre relater et comprendre. Dire une histoire est une chose, la comprendre et en saisir le sens, c'est autre chose, parce que le monde a beaucoup changé et que mes enfants n'ont pas du tout vécu dans le même contexte que moi. Donc, parler à ses enfants, c'est aussi expliquer le contexte. Ce n'est pas simple à saisir. Sur le plan intellectuel, oui, mais sur le plan émotionnel, non. Lorsque j'ai écrit le récit de mon enfance, mon fils me l'a reproché : "tu nous racontes plein de détails sur la vie à l'époque (années 1950), parle nous plutôt de toi et de ce que tu ressentais ». Or pour moi les deux sont liés.
Le deuxième point qui m'a marqué, c'est une citation (p.415 du livre broché) : « la transmission est un rapport social périlleux à cause des doubles contraintes auxquelles sont soumis parents et enfants, qui doivent assumer à la fois la continuité et la rupture, l'identité et l'altérité ».
A la lecture de ce livre, mon frère a-t-il raison de se taire ? c'est son choix. Je ne me prononcerai pas, parce qu'il y a du pour et du contre.
En bref, un livre que tout adulte devrait lire sur le silence familial, hors du contexte de l'Algérie.
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La guerre d'Algérie, trop méconnue.
Ce livre est très intéressant et permet d'apprendre, de comprendre.
Des témoignages de jeunes gens, embarqués dans une guerre qu'ils ne comprenaient pas, comme c'est d'ailleurs souvent le cas en temps de guerre.
L'auteur nous offre une belle analyse des ressentis.
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La grande muette et les grands muets. À tous ceux qui ont croisé des appelés d'Algérie, aînés, parents d'amis , voisins... ce livre vous mettra sur de multiples pistes qui éclaireront ces rencontres. Et comme ces témoins sont touchés de plein fouet par la pandémie , il y a urgence à se plonger dans la vie de ces appelés à travers ce travail de recherche dense et poignant. À l'ombre de l'armée d'active , la vie de ces jeunes gens est saisie dans toute sa complexité pendant et après la guerre. Les derniers chapitres sur la transmission familiale , les séquelles de la guerre et les métamorphoses subies et transcendées (ou non) de la société française nous renvoient avec finesse à notre parcours personnel et la place de nos parents dans l'histoire récente.
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Les lettres des jeunes appelés qu’a retrouvées l’historienne Raphaëlle Branche pour son dernier livre, “Papa, qu’as-tu fait en Algérie ?”, le montrent : pour protéger leurs proches, ou par peur d’être jugés, beaucoup minimisaient les exactions.
Lire la critique sur le site : Telerama
Dans un ouvrage important, l'historienne Raphaëlle Branche raconte comment les anciens soldats ont caché la réalité d'une guerre officiellement déniée durant quatre décennies.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
Faire l’histoire d’un « silence familial », sous-titre du livre, avec ce que cela comporte d’incertitudes en termes de sources et de méthodes.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Le jeune instituteur a lu " la question " d’Henri Alleg ( publié en 1958 ) et n’ignore pas ce qu’il pourrait être amené à faire en Algérie. Une fois son sursis résilié à la fin de l’École normale, il refuse début 1961 de devenir sous-officier : " Je suis resté volontairement seconde classe jusqu'au bout, pour avoir la participation la moins active possible aux événements, fidèle en cela à ma ligne de conduite générale de résistance passive. "
( page 62 )
"Tout cela est fait pour faire peur, pour dégonfler les français. Et il y arrivent nous avons peur, une peur affreusement tomber entre leurs mains. On en rechappe pas. Cadavres mutilés affreusement, incroyable ! Nous ne savons où ils sont, si ceux qui nous regardent passer sont amis ou ennemis. Ce n’est même pas une guerre, c’est un cauchemar. " ( lettre de Jacques Carbonnel à Jeanne 17 juillet 1956 )
( page 180 )
" Je pense que son expérience en Algérie l’a beaucoup marqué, pas au sens où il aurait vécu des événements traumatisants mais au sens où cela l’à fait réfléchir comme expérience humaine [...] Le fait de pouvoir mourir où d’être contraint de donner la mort l’à beaucoup marqué. Il était à ce moment-là aussi rempli de questions existentielles, sur la vie et sur sa vie."
( page 433 )
La guerre les a confrontés aux manques affectifs et matériels, à la peur de mourir, à la vulnérabilité des adultes.
"la transmission est un rapport social périlleux à cause des doubles contraintes auxquelles sont soumis parents et enfants, qui doivent assumer à la fois la continuité et la rupture, l’identité et l’altérité"
C'est par le biais des témoignages que Rafael Lewandowski et Raphaëlle Branche ont choisi de revenir sur la guerre d'Algérie. Soixante ans après la signature des accords d'Evian en mars 1962, la série ARTE "En Guerre(s) pour l'Algérie" revient en six épisodes sur la guerre d'Algérie du point de vue de ceux qui l'ont vécue.
La professeure d'histoire contemporaine à l'Université de Paris Nanterre Raphaëlle Branche est notre invitée pour revenir sur cette série documentaire qui se penche sur des témoignages intimes pour raconter ce conflit à hauteur individuelle.
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