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Jean-Pierre Porret (Traducteur)
EAN : 9782825102602
L'Age d'Homme (01/03/1990)
3.9/5   67 notes
Résumé :
Les Physiciens se passe entièrement dans le salon d'une villa qu'on devine isolée, ancienne résidence d'été des von Zahnd, transformée en asile de fous... le mot est lâché. Précisons que Dürrenmatt maintient strictement l'unité de lieu, de temps et d'action. Une action qui se déroule chez les fous ne s'accommode que d'une forme classique.
Les fous sont au nombre de trois. Il faut dire que les malades de marque ont été transférés dans un bâtiment neuf et éléga... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Bienvenue chez les fous !
Voilà résumées les unités de temps, de lieu et même d’action puisqu’il s’agit d’une courte pièce de théâtre en deux actes, publiée en 1962 en pleine guerre froide, de l’auteur d’origine suisse Friedrich Dürrenmatt, qui se déroule exclusivement dans le salon d’une villa transformée en asile, au bord d’un lac sans histoire, quelque part en Europe.
Elle se dévore d’une traite, et si l’on accepte d’emblée l’absurdité totale de la situation, l’absence de repères traditionnels, c’est un petit bijou d’intrigue décalée à l’humour jubilatoire qui permet d’aborder légèrement en apparence des problèmes sérieux de l’humanité confrontée au progrès.

Jugez plutôt : au milieu de malades, spécimens issus de « l’élite mentalement dérangée de la moitié de l’Europe », un trio improbable de physiciens de renom, Einstein, Newton, Möbius, rien que cela, se trouve regroupé à l’écart des autres patients du fait, c’est évident n’est-ce pas, de la similitude de leurs mondes imaginaires respectifs. D’ordinaire très calmes, les deux premiers ont récemment étranglé leurs infirmières, quant au troisième qui obéit aux ordres du roi Salomon, il ne vaut guère mieux.
Inspecteur de police, infirmières, médecins vont et viennent, échangent, cherchent à comprendre, puis renoncent, manifestement déboussolés par l’attitude des physiciens qui donnent le change à merveille et finissent par les faire douter de leur propre santé mentale.

Qui est réellement fou dans cette histoire ?
Voilà en définitive LA véritable question. Les supposés scientifiques, les médecins ? Par extension, cette pièce soulève bien sûr le problème de la responsabilité des scientifiques directement impliqués dans le sort de l’humanité grâce à leurs découvertes. Serions-nous entre les mains de physiciens irresponsables ? Sommes-nous prisonniers ou eux-mêmes de leurs avancées ?
Impossible malheureusement de vous en dire davantage. Mais après avoir bousculé ses lecteurs et spectateurs, Dürrenmatt livre quelques pistes de réflexion regroupées à la fin de l'ouvrage : « La physique est l’affaire des physiciens, ses répercussions sont l’affaire de tous. » « Le drame peut duper le spectateur en le mettant face à la réalité, mais ne peut pas le contraindre à lui résister, et encore moins à la maitriser. "
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Voilà une petite pièce de théâtre qui semblait prometteuse, qui augurait d'un bel après-midi de lecture au soleil.
Pourtant ! ...
L'inspecteur de police Richard Voss a été appelé à la clinique privée "les Cerisiers".
Un crime y a été commis.
Une infirmière a été étranglée avec un cordon à rideaux.
Le coupable, enfin l'auteur de l'acte, est Einstein.
Enfin, un homme qui se prend pour Einstein !
Car "les Cerisiers" est un asile de fous et les trois hommes qui fréquentent son salon semblent être tous trois des physiciens dont la raison a vacillé ...
Ils se font appeler Newton, Einstein et Möbius ...
Bien sûr, On ne peut s'empêcher de penser à la pièce, "le docteur Goudron et le professeur Plume", qu'André de Lorde a, en 1903, adapté de la nouvelle d'Edgar Allan Poe pour le théâtre du Grand-Guignol.
Et l'on en a d'autant plus envie d'être happé et interpellé par "Les physiciens".
Mais au rendez-vous, il ne m'a semblé trouver qu'ennui et déception.
La lecture du morceau est rapide, facile et finalement sans aucun intérêt.
Les dialogues sont sans aspérités, les situations sans originalité.
Le style est banal et sans fantaisie.
Pourtant l'intention était louable car l'ensemble est tendu vers une grande question,
Malheureusement la mise en place est trop longue.
Et le coeur du sujet, abattu trop tard, est traité trop rapidement.
Voilà, en somme, une pièce à thèse dont la thèse est gâchée.
Voilà, en somme, une lecture qui sera aussi vite oubliée que terminée ...



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Les physiciens est une agréable découverte : une pièce de théâtre qui ne paie pas de mine mais qui se révèle d'une richesse littéraire plutôt surprenante.

Le format de la pièce, pour nous autres habitués aux canons de Racine, Corneille, Molière et autres grand classiques, est atypique. le propos tient en près de cent pages. Il n'y a que deux séquences : deux longues scènes coupées par l'arrivée ou le départ de certains personnages. de même, les descriptions et certains passages (notamment celui consacrés à Salomon) restent surprenants. le dénouement réservera également une surprise, difficile à mettre en oeuvre sur les planches.

La description de l'oeuvre, n'est, a priori, guère enthousiasmante. L'action se déroule dans un hôpital psychiatrique et le dramaturge nous propose de suivre trois malades. L'un se prend pour Einstein, l'autre pour Newton et le dernier croit être en contact avec le roi Salomon. le potentiel de l'oeuvre fera son chemin progressivement, sans laisser le temps à l'ennui de s'installer et mettant à mal les certitudes du lecteur. Les rôles s'embrouillent très rapidement et les péripéties, dramatiques ou verbales, s'enchaînent.

La pièce mêle tout à la fois une enquête policière, une intrigue empruntant à l'espionnage et une comédie franchement réussie. Les propos, les personnages, leurs échanges et surtout les critiques sous-jacentes sont drôles à souhait. Des nombreuses références sont faites, il y a du travail pour toutes les repérer et les apprécier.

Quelques évolutions prévisibles ou convenues peuvent être notées. En fonction des éditions, la quatrième de couverture pourra en révéler assez long, ce qui est toujours regrettable.

Les physiciens se révèle être une critique des temps modernes qui part dans toutes les directions : la Guerre Froide, les essais atomiques, l'utilisation des progrès scientifiques faite par les grandes puissances, la place de l'homme et du scientifique dans tout cela. L'humour est ici utilisé pour introduire une charge qui est tout aussi efficace qu'elle demeure plaisante.

Le contexte immédiat dans lequel cette pièce a été écrite (la crise des missiles de Cuba) donne à cette pièce un statut particulier : celui d'une oeuvre engagée. Si aujourd'hui le contexte à bien changé, la teneur des échanges, la substantifique moelle et le dénouement imprévu l'ancrent dans notre présent. Une oeuvre à découvrir de toute urgente, son potentiel vous le rendra bien…
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Le fou pense toujours que ce sont les autres qui sont fous; et dans cette pièce de théâtre aux allure de huis clos, on en a plus qu' un aperçu.
*
Trois hommes : Newton, Einstein et Möbius se succèdent devant un inspecteur de police, dans le salon d'un asile pour répondre de leurs actes.
Le personnel dudit asile fait son possible pour les dédouaner auprès de la maréchaussée.
Là ne s'arrête pas l'absurdité de la situation car les fous n'en sont pas, les physiciens non plus de même que les savants; mais la directrice de l'établissement pourrait bien avoir glisse dans un entre deux aliéné à force de ne fréquenter depuis des décennies que des situations absurdes.

Ironie de la situation, du récit et des différents acteurs, cette pièce est un petit bijou de l'auteur Suisse Friedrich Dürrenmatt.
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Les Physiciens de Dürrenmatt est une pièce peu jouée aujourd'hui en France alors qu'elle a connu un grand succès en Europe et particulièrement dans les pays germanophones dans les années qui ont suivi sa première en 1962. Elle est représentative d'un théâtre à thèse et engagé, dans l'esprit de celui de Brecht, qui n'est plus vraiment dans l'air du temps en ce début de XXIème siècle. Pourtant la pièce de Dürrenmatt me semble particulièrement d'actualité. Tout en développant une histoire avec des rebondissements et des situations comiques, son ambition, fort sérieuse, est de confronter le spectateur à la problématique de l'éthique dans la science et de le faire réfléchir à la possibilité d'un usage nocif des progrès scientifiques et à la façon dont il faut s'organiser collectivement pour empêcher les dérives. Certes le contexte n'est plus celui de 1962. La pièce fait référence aux éléments de l'époque : la menace s'appelait bombe atomique et le monde était déchiré entre deux blocs (USA contre URSS) qui utilisaient la science à des fins politiques ou idéologiques. Aujourd'hui, il faut lire la pièce en pensant aux biotechnologies ou à la capacité de traiter d'immenses quantités de données et aux changements que ceux-ci risquent d'introduire dans l'espèce humaine.

La force de la pièce est de poser ces questions philosophiques et politiques en se plaçant sur le terrain de la farce grotesque ou de l'absurde. Trois scientifiques sont internées dans une clinique psychiatrique. le premier se prend pour Einstein, le second pour Newton et le troisième du nom de Möbius s'entretient régulièrement avec le roi Salomon. Qui plus est, les trois malheureux commettent chacun un meurtre en étranglant leur infirmière attitrée (un parallèle est dressé avec les meurtres indirects dont la science et ses applications peuvent être l'origine). L'inspecteur de police Voss est présent sur place pour enquêter. La directrice de la clinique, l'héritière von Zahnd, règne sur son domaine.

En réalité, le savant Möbius n'a rien d'un fou. Il a découvert les lois de l'univers et pour ne pas que celles-ci soient mal utilisées et mettent en danger l'humanité, il a décidé de vivre coupé du monde dans un asile et de détruire ses travaux. Il réussit à convaincre ses deux collègues du bien-fondé de son approche. Ceux-ci, aussi peu fous que lui, viennent de deux puissances antagonistes et symbolisent deux attitudes possibles du scientifique, aussi peu satisfaisantes l'une que l'autre : se consacrer uniquement à la science pure sans se préoccuper de l'usage de son savoir ou se mettre au service du pouvoir politique en travaillant sur les applications de son savoir. Pourtant par le dénouement de la pièce, Dürrenmatt nous montre que le choix de Möbius n'est pas le bon. le savoir ne peut pas être mis sous clé et la politique de l'autruche n'empêche pas qu'il tombe en de mauvaises mains (politiques ou économiques). La pièce appelle à des choix faits de manière collective sur l'usage des avancées scientifiques.

Au-delà des trois physiciens, les autres personnages sont des archétypes de leur profession et en quelque sorte symbolisent chacun un corps social. le policier consciencieux du premier acte laisse couler au deuxième et peut être vu comme le symbole de la démission du pouvoir politique de nos sociétés européennes face aux enjeux fondamentaux. La directrice humaniste du premier acte devient une dingo prête à tout et avide de pouvoir et peut être vue comme le symbole de toutes les dérives mercantiles de certains acteurs de la société. Une de ses répliques à propos des fausses identités de ses patients fait directement référence à une phrase de Göring lorsqu'il disait ‘c'est moi qui décide qui est Juif'. L'ex-épouse de Möbius et son nouveau mari, un missionnaire sur le point de partir évangéliser les indigènes à l'autre bout du monde, sont des bien-pensants et des symboles de l'Eglise dont se moque Dürrenmatt.

En conclusion : une pièce qui recèle des possibilités de mise en scène intéressantes et qui gagne à être connue et à être vue sur scène plus souvent.

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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
L'INSPECTEUR
Deux meurtres....

LA DIRECTRICE
Inspecteur, je vous en prie!...

L'INSPECTEUR
Deux accidents. En trois mois. Vous admettrez que les mesures de sécurité sont insuffisantes dans votre établissement.

LA DIRECTRICE
Ces mesures de sécurité, comment les imaginez-vous? Je dirige une clinique, pas un pénitencier. Vous non plus, vous ne coffrez pas les assassins avant qu'ils aient tué.

L'INSPECTEUR
Il ne s'agit pas d'assassins, mais de fous, c'est à dire de gens qui peuvent tuer à n'importe quel moment.

LA DIRECTRICE
Les gens sains d'esprit aussi et ça leur arrive même plus souvent. Il suffit d'évoquer mon grand-père Léonidas von Zahnd, le maréchal qui a tué tant de gens pour perdre la guerre. [...]
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- Pourquoi avoir été si odieux ?
- Pa humanité ! Du moment qu'on se trouve dans une maison de fous, c'est encore de jouer au fou qui est la meilleure façon d'effacer le passé. Dorénavant ma famille peut m'oublier la conscience tranquille. La scène que je leur ai faite leur a ôté toute envie de revenir me voir. Pour moi c'est sans conséquence; il faut penser à ceux qui vivent hors de cet établissement, à eux seuls.
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Plus les hommes agissent de façon planifiée, plus le hasard est à même de les frapper efficacement.

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Des agents de la brigade criminelle en civil s'affairent autour du cadavre, braves garçons à l'âme sereine, qui ont déjà absorbé leur dose de vin blanc, que trahit leur haleine.
Ils prennent des mesures, des empreintes ...
Au milieu du salon se tient l'inspecteur Richard Voss, en chapeau et pardessus ; à gauche l'infirmière-major, qui a l'air aussi résolu que son nom et son aspect l'indiquent.
Sur le siège à l'extrême droite, un agent assis sténographie.
L'inspecteur tire un cigare d'un étui brun ...
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Celui qui est confronté au paradoxe s'expose à la réalité.
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Videos de Friedrich Dürrenmatt (6) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Friedrich Dürrenmatt
"Dans un bois des environs de Zurich, la petite Gretl Moser vient d'être assassinée à coups de rasoir. Confronté au terrible regard d'une mère dévastée, le commissaire Matthias promet de trouver le meurtrier. La police arrête un potentiel coupable, qui avoue avant de se suicider, mais Matthias est persuadé que le véritable tueur court toujours. Hanté par cette affaire, il décide de le traquer seul, en lui tendant un piège aux conséquences tragiques. Une promesse est une promesse, mais la fin justifie-t-elle toujours les moyens ?"
La Promesse de Friedrich Dürrenmatt, dans une nouvelle traduction d'Alexandre Pateau, à retrouver en librairie.
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