Non pas vraiment un ouvrage de recettes de cuisine !... Si on fait attention au titre, il s'agit d'étudier “les
propos de table” à travers les âges dans la littérature.
Un ouvrage universitaire collectif , une presse de spécialistes , pas forcément clair les universitaires mais passionnant ! et bien fait , une table des matières parfaite, des notes abondantes en bas de page, plus un résumé de chaque chapitre. Il ne s'agit pas vraiment du repas de cantine mais plutôt des célébrités et c'est parfois comique.
Ce livre débute cinq siècles avant JC , le fameux banquet de
Platon, lequel met l'accent sur les discours au détriment de la nourriture et de la boisson… dans le Trimalcion de
Pétrone , auteur Romain, le festin donne lieu à des scénarios, un spectacle avec chaque service: comme ce fameux “porc à la Troyenne” du troisième service d'où s'échappent des grives vivantes sur le modèle des guerriers s'échappant du cheval de Troie. Nous parlons ici du Satiricon. “Pains blancs en forme de grives farcis de raisins secs et de noix, coings piqués d'épines simulant des oursons, oie grasse entourée de poissons et d'oiseaux, le tout fait de viande de porc". le service se fera en chantant…
Beaucoup plus protestant en 1530 “Les
propos de table” de
Martin Luther, le Réformateur se sert des réalités familiales pour parler de Dieu. Il se plaignit des enfants corrompus par l'indulgence coupable de leurs parents, il préférait dit-il un fils mort que mal élevé… Tous les propos de Luther étaient soigneusement notés, un étudiant transcrivait les propos de Luther dans une taverne, Luther s'approcha et lui jeta une poignée de gruau et dit en riant :”Tiens tu peux y mettre aussi cela.”
Brillat Savarin homme de
lettres et homme de goût est évidemment à l'honneur, son célèbre “
Physiologie du goût” publié en 1826 a pour ambition de poser les bases théoriques afin que la gastronomie” puisse se placer, parmi les sciences, au rang qui lui est incontestablement dû”. ”Restituer leur importance et leur dignité à des fonctions aussi essentielles…qui influent d'une manière si directe sur la santé, sur le bonheur, et même sur les affaires” .”La gourmandise est le lien commun qui unit les peuples…C'est elle qui fait voyager d'un pôle à l'autre, les vins, les eaux-de-vie, les sucres, les épiceries, les marinades, les salaisons” etc…
Propos de table en 1791 la veille de la guillotine chez un groupe de députés, chez
Proust , chez
Virginia Woolf , puis aujourd'hui chez
Annie Ernaux, là on touche au vulgaire: les tablées de bourgeois éduqués et celles des modestes. Ernaux se situe hors de la fête, pour elle les
propos de table mènent à l'écriture. Finalement
Annie Ernaux tient à perpétuer ces repas du Dimanche avec ses enfants…
14 auteurs se partagent cette somme se terminant par les repas chic chez
Pierre Assouline invitant de Villepin et enfin la conversation de bistrots…
Quelle conclusion , “banquet philosophique ou républicain, toast académique ou poétique, récit ou dialogue, les
propos de table sont toujours affaire de règles et de principes…”
Je regrette un peu l'absence du dernier repas de
Jésus-Christ, sans doute un manque d'archives solides pour ces brillants universitaires.