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EAN : 9782742776887
190 pages
Actes Sud (15/08/2008)
3.41/5   34 notes
Résumé :
Le jour où, récalcitrant, Jérôme Lafargue, tranquille professeur de littérature à la Sorbonne, accepte de rencontrer Johann Launer, il écrit dans son journal : "Un rendez-vous catastrophique ce matin avec un Allemand inconnu.
Ce n'est pas un fou, mais un homme profondément malheureux, car il pense avoir découvert qu'il est un autre, dont il ne sait même pas le nom. " De fait, c'est le mystère de sa propre identité que Launer espère dénouer en convainquant l'u... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Découverte d'un auteur avec lequel je pense demeurer car ce premier livre d'Eugène Green, tout en douceur et nuances qui épouse les couleurs sépia des photos vieillies, en faisant émerger le passé dans le présent, nous fait atteindre les profondeurs de nous-même et sait nous ramener à la lumière en compagnie de Jérôme Lafargue professeur de littérature à la Sorbonne. Contacté par un homme qu'il ne connaît pas, il va revivre des épisodes de son passé lié à celui de Johann Launer, cet allemand inconnu qui vient vers lui. Leur rencontre, cette confrontation avec le passé va les mener l'un et l'autre vers leur propre reconstruction. «Je suis heureux. J'ai retrouvé le bonheur de mon présent. En voulant chercher la réalité d'un autre homme, je me suis rendu vivant.» p 120
Leur expérience particulière menant à une réflexion sur le devenir de l'Europe après les horreurs qu'elle a traversée. Comment vivre avec la barbarie, la barbarie passée et celle qui subsiste actuellement ?
«Ainsi sommes-nous en marche vers notre avenir, vers celui de l'Allemagne, vers celui de l'Europe, en sachant qu'il partira de l'horreur, de la destruction, et d'une grande béance dans notre conscience morale, mais qu'il doit néanmoins aboutir à une reconstruction.» p 175
«Le pire n'était même pas la terre brûlée, les villes rasées, les monceaux de cadavres. le pire, c'était d'avoir éteint la lumière intérieure. (...) Dès qu'on fait taire la voix de la Raison, une autre voix s'élève, qui n'est ni confusion, ni obscurité, mais la pensée de la lumière. C'est la pensée du présent éternel, où coexistent le passé et l'avenir, l'oubli et la naissance, la mort et la résurrection.» p 183
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"Je suis le présent d'un autre homme , présent qui depuis trente-cinq ans vit à côté du mien, jusqu'à ce que, aujourd'hui, les deux ne fassent plus qu'un seul. Jusqu'à ce que , par la présence d'une voix, que les machines ont conservée au delà de la mort, par la présence de moments et de lieux qu'une opération chimique a fixés dans la matière, je retrouve aujourd'hui en moi la réalité de l'autre."

Eugène Green est cinéaste, et ça se sent dans son premier roman, par l'abondance des dialogues, la construction , et certaines scènes , notamment satiriques envers le milieu universitaire littéraire , qui ont peu être plus de mal à s'intégrer dans le genre " roman". Mais cela importe peu, finalement, car cela construit l'identité du personnage.
Donc, un universitaire parisien, raisonnablement heureux, notamment dans son couple. le roman s'ouvre quand même par une scène avec ses parents, et l'impossibilité complète de communiquer avec son père atteint d'une maladie d'Alzheimer. Avec son fils, la communication semble un peu difficile aussi, du moins au début.Avec son frère, également, ils ne parlent pas le même langage..
Sa tranquillité va être dérangée par un Allemand, venu lui demander des renseignements sur son père, après avoir découvert, après sa mort, des documents qui menaceraient totalement l'image identitaire de ce Munichois.
Oui, Jérôme est bien allé à Munich en 68..:

"Ce qui m'importait, c'était de savoir qui j'étais, et j'ai toujours su que j'étais européen. Etrangement, peut -être parce qu'ils gardaient le souvenir d'avoir assailli les murs de Rome, et que leur participation à la " communauté universelle" n'allait pas de soi, c'est avant tout chez des écrivains allemands que j'ai trouvé un sentiment d'appartenir, à travers la germanité, à quelque chose de plus large , qu'ils identifiaient à l'Europe. Goethe et Thomas Mann ,par exemple. Rilke, l'apatride. Kafka, homme entre plusieurs cultures. Plus tard, j'ai découvert le plus grand, Maître Eckhart, qui a fait le tour du continent, et qui est mort à Avignon.
Pessoa était européen sans quitter Lisbonne, parce que les Portugais sont naturellement universels. Mais les Allemands ne peuvent être ce qu'ils sont que par un effort et dans la souffrance. Moi, je me trouvais dans leur cas.
Au milieu du XXè siècle, quand je suis né, la civilisation européenne était un champ de ruines. En 1968, j'ai eu l'impression, à un certain moment, d'être moi-même une ville dévastée. J'ai senti alors, confusément, que le seul espoir se trouvait dans la voie propre à ma culture, qui était de s'ouvrir au souffle du monde, et de se laisser emporter par l'amour.
J'ai choisi donc l'Allemagne, parce que c'était le pays par excellence de la reconstruction. "

Et c'est même à Munich qu'il a rencontré sa femme qui, elle ,avait fui la Tchécoslovaquie. Ainsi qu'un autre personnage de cette histoire qui lui, venait, disait-il , d'Anatolie.On le retrouvera par la suite.
Et effectivement, il a connu le père de Johann Launer, car celui-ci l'a logé quelques nuits. Allemand de Bohême, juif, né autrichien, puis devenu citoyen tchécoslovaque après la Première Guerre mondiale.
Mais, la mémoire.. ce n'est que par l'écriture , dans son journal, que Jérôme va se souvenir. Et reconstruire l"histoire" de cet allemand. D'après les données qui lui reviennent en mémoire.
C'est un roman passionnant, émouvant, court mais assez dense et complexe, qui procède par couches, qui s'emmêlent très vite; Comme la mémoire..

Mémoire,transmission, identité ( l'identité me semble quand même le thème central ) , construction personnelle et construction de l'Europe , déconstruction, reconstruction.. jusqu'au pied de nez final qui me semble être une excellente définition de ce qu'est vraiment l'identité. Elle n'est en tout cas pas celle que l'on écrit pour vous. Ca, c'est de la littérature.


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Actes Sud)


La cinquantaine bien entamée, Jérôme Lafargue vit le quotidien tranquille et appréciable d'un universitaire parisien pétri de littérature européenne, partageant ses jours entre le bonheur serein d'un couple solide, les sourdes et rares joies de l'enseignement, les réunions ubuesques entre collègues, les visites à son père atteint de pertes de mémoires, les nouvelles épisodiques de son fils et de son frère, tous deux à leur façon avalés par une modernité à laquelle lui-même résiste avec une détermination non dénuée d'humour.
Le jour où, récalcitrant, il rencontre pour la première fois Johann Launer, sur l'insistance de ce dernier, il écrit dans son journal : « Un rendez-vous catastrophique ce matin avec un Allemand inconnu. Ce n'est pas un fou, mais un homme profondément malheureux, car il pense avoir découvert qu'il est un autre, dont il ne sait même pas le nom. »
De fait, c'est le mystère de sa propre identité que Johann Launer espère dénouer en fouillant les replis de la mémoire endormie de Jérôme Lafargue. Retrouvées dans les papiers de son père après sa mort, une carte postale signée de sa main et une vieille photographie en attestent : à Munich, en 1968, le Français a effectivement rencontré et séjourné chez un certain Wenzell Launer, déjà âgé à l'époque, veuf, habitant seul l'absence de son fils alors étudiant à Tübingen.
Mais aujourd'hui, l'Allemand – universitaire lui aussi, mais, ironie du destin pour un homme en délicatesse avec son propre passé, professeur d'histoire – n'est plus du tout certain d'être le fils de l'homme qui l'a élevé.
En quête de réponses sur les mystères d'un passé enfoui dans le coeur de l'Europe en guerre, réveillant chez Jérôme Lafargue les souvenirs occultés d'une déterminante escapade de jeunesse en terre européenne (parti pour noyer dans une expérience nouvelle les arrière-goûts rééducatifs de mai 68, le jeune homme rencontrera à Munich la jeune pragoise en fuite qui deviendra sa femme), la démarche inquiète et pleine d'espoirs de Johann Launer jette un éclairage entièrement nouveau sur le patient échafaudage de toute une vie.
Et si c'est son propre passé que Jérôme Lafargue se prend à réinvestir, si c'est sa propre présence au monde et au temps qui s'en trouve fondamentalement modifiée comme par un infime et néanmoins sensible changement d'angle, la reconstruction inattendue qu'il entreprend de lui-même, pour le compte d'un autre, ne s'accomplira que dans le glissement vers la réinvention de cet autre-là. Fiction de l'intériorité, exploration du temps et des infidélités de la mémoire, La Reconstruction devient alors l'impressionnant bréviaire d'un avènement à la verticalité du présent.
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Dans La reconstruction, il est question de mémoire...
Nous sommes à Paris, en 2003. Jérôme Lafargue, professeur de littérature française à la Sorbonne, est contacté par un inconnu à son domicile, un Allemand, lui-même professeur d'histoire. Ce dernier a découvert des documents chez son père qui remettent en cause son identité, le déclarant mort peu après sa naissance. Au milieu de ces papiers intimes, se trouvait également la photo de Jérôme et de sa femme Jana, prise trente-cinq ans plus tôt alors qu'ils venaient tout juste de se rencontrer. Jérôme se souvient avoir effectivement été hébergé quelques nuit par un dénommé Wenzel Launer, à Munich, en 1968. Pressé par ce fils en plein questionnement de découvrir dans sa mémoire le lien qui le lierait à eux, Jérôme mène une enquête au fond de ses souvenirs. Devenu père aujourd'hui d'un grand garçon indépendant et le fils d'un homme dont la mémoire est de plus en plus emmêlée, il constate très vite combien ce cheminement l'aide à mieux comprendre et apprécier son présent...

Eugène Green est habituellement metteur en scène et cinéaste, La Reconstruction est son premier roman. Et on reconnaît facilement cette patte là, indéniable, dans la focalisation choisie par le narrateur, distante et exterieure aux pensées des personnages. Cela aurait pû donner au texte beaucoup de froideur mais ce n'est pas le cas, juste un sentiment particulier d'étrangeté. Ce sentiment dépassé, et grâce aux morceaux du journal que Jérôme tient, on entre assez vite dans un récit bourré d'émotions. Il faut aller au bout de ce court roman pour en apprécier toute la richesse, mystique et romanesque. Un bien joli moment de lecture.


Lien : http://antigonehc.canalblog...
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Jérôme Lafargue, prof de littérature à la Sorbonne, mène une vie tranquille et tendre avec sa femme à Paris, jusqu'au jour où Johann Launer, un prof d'histoire allemand, demande à le rencontrer. En effet, il a découvert dans les effets de son père décédé un document remettant en cause son identité et sa filiation et des lettres et photos de Jérôme Lafargue. Il lui demande donc son aide pour reconstruire son passé.


Un roman, sur la guerre, la filiation, la mémoire, la recherche d'identité, le secret de famille.

J'ai vraiment été émue par ce roman tout en délicatesse qui fait le parallèle entre la reconstruction d'un pays et d'un homme.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Ce qui m'importait, c'était de savoir qui j'étais, et j'ai toujours su que j'étais européen. Etrangement, peut -être parce qu'ils gardaient le souvenir d'avoir assailli les murs de Rome, et que leur participation à la " communauté universelle" n'allait pas de soi, c'est avant tout chez des écrivains allemands que j'ai trouvé un sentiment d'appartenir, à travers la germanité, à quelque chose de plus large , qu'ils identifiaient à l'Europe. Goethe et Thomas Mann ,par exemple. Rilke, l'apatride. Kafka, homme entre plusieurs cultures. Plus tard, j'ai découvert le plus grand, Maître Eckhart, qui a fait le tour du continent, et qui est mort à Avignon.
Pessoa était européen sans quitter Lisbonne, parce que les Portugais sont naturellement universels. Mais les Allemands ne peuvent être ce qu'ils sont que par un effort et dans la souffrance. Moi, je me trouvais dans leur cas.
Au milieu du XXè siècle, quand je suis né, la civilisation européenne était un champ de ruines. En 1968, j'ai eu l'impression, à un certain moment, d'être moi-même une ville dévastée. J'ai senti alors, confusément, que le seul espoir se trouvait dans la voie propre à ma culture, qui était de s'ouvrir au souffle du monde, et de se laisser emporter par l'amour.
J'ai choisi donc l'Allemagne, parce que c'était le pays par excellence de la reconstruction.
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La soumission à la dictature peut être agréable, car elle crée un tissu social. Le sujet connaît la chaleur humaine, la camaraderie, et peut facilement se convaincre qu'il fait le bien-même dans les cas de mes contemporains, qu'il suit le chemin de la liberté-puisque tous les gens estimables, c'est-à-dire, avec qui il partage des liens, font la même chose. L'homme libre, en revanche, est toujours seul.
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-C'est très bien, dit le professeur. Pourriez-vous résumer le sens de ce poème?
Le garçon aux cheveux en bataille réfléchit un instant, puis il répond:
- C'est une expression de l'inutilité de ce que vous me demandez.
Le professeur sourit, et l'étudiant continue:
-Aucune analyse intellectuelle ne peut percer le mystère de la parole, de la poésie, et peut être de l'art en général. La seule métaphore qui puisse nous aider à la comprendre, c'est la beauté du monde naturel, résumée ici par les roses, et qui est, en principe, réelle, sans besoin de métaphore ni d'explication. La poésie est un passage entre la vie et la mort, une forme d'immortalité, qui en transgressant ce qui apparaît comme une loi de la nature, la respecte. C'est notre vision rationnelle du monde qui constitue une faute.
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J'ai signalé, ce matin, sur une des tours de Saint-Supplice, ce qui avait tout l'air d'un projet de suicide. Heureusement, son auteur a renoncé à le réaliser, car une intervention de la police aurait été trop tardive et sans effet. La grâce est un mystère imprévisible, mais elle est toujours efficace, tandis qu'il ne faut jamais trop compter sur l'aide des hommes.
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Aucune élément du monde n'est sans rapport avec les autres. Toute expérience humaine nous conduit vers notre présent. Le trouver, c'est se livrer au sens du monde.
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Vidéo de Eugène Green
#eugènegreen #langues #cultureprime
"De même qu'il faut protéger la terre, il faut protéger toutes les langues. Pas protéger dans un sens de les isoler mais au contraire il faut les faire rentrer dans la vie puisqu'elles constituent une part très importante de la vie." C'est ce que défend le cinéaste Eugène Green qui à l'occasion de la sortie de son dernier film, "Atarrabi et Mikelats", nous livre une tribune pour la défense des langues régionales.
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