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EAN : 9782072973154
320 pages
Gallimard (10/03/2022)
3.81/5   39 notes
Résumé :
« Nad’a Zdražilova a une sueur froide. Quelque chose aussi se révolte en elle à l’idée qu’on puisse être l’otage des actes de ses parents. Que les erreurs supposées d’autrui puissent vous astreindre. Là, tout de suite, elle a envie de coller des baffes à ceux qui rendent sa trajectoire, sa liberté tributaires de ce qu’a pu faire son père pendant la guerre. »

Années 1990. Fille et fils d’un chef d’industrie tchécoslovaque, Nad’a et son frère Andel cher... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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En 1997, à Prague, une enseignante est vilipendée par des étudiants gauchistes qui, exhumant une photo de son père sur un panzer, manifestent pour exclure les « nazis » de l'université. Nad'a, aidé par son frère Andel, enquête alors sur leur passé familial et sur Fermak dont leur père était PDG durant la guerre.

Cette société Fermak, fondée par Viktor Jelinek et Viktor Ferman, est présente dans « Art Nouveau » le précédent roman de Paul Greveillac, à l'orée du siècle, quand l'usine « Europa » sort de terre… Nous la retrouvons ici, dans les années folles de l'entre guerres, et il est évident que Fermak c'est le masque de SKODA fondée par Vaclav Klement et Vaclav Laurin.

C'est l'époque où l'aviation civile décolle, où Guillaumet, Mermoz, Saint Exupéry développent l'Aéropostale, où Nungesser et Coli disparaissent, le 9 mai 1927, en essayant de traverser l'Atlantique, 12 jours avant que Charles Lindberg emporte le prix Orteig en volant de New York à Paris … la veille de la tentative de l'Alkonost conçu par Fermak.

Les fondateurs de Fermak / Skoda, laissent alors « Le Pape », brillant ingénieur, assumer la direction de l'entreprise, alors que la Tchécoslovaquie se désagrège sous les pressions du III Reich, et que la compagnie et ses produits (automobiles, avions, motos, side-cars) sont courtisés par la Wehrmacht qui lui commande des matériels.

L'étau se met alors en place et l'auteur se focalise plus particulièrement sur ses mâchoires, nazis et collaborateurs, qui serrent progressivement Fermak pour l'asservir au profit du Reich et produire des blindés. Reinhard Heydrich devient vice-gouverneur de Bohéme-Moravie jusqu'à son exécution le 4 juin 1942 par un commando parachuté par la RAF. Progressivement des prisonniers capturés sur le front de l'est sont mis en esclavage chez Fermak et les avions alliés ciblent l'usine pour annihiler son potentiel.

Quelle attitude adoptent, au fil des mois, les dirigeants, les ingénieurs, les travailleurs, les déportés de Fermak ? Paul Greveillac décrit les positions, les nuances, les évolutions, les dits et non dits, des mors et des condamnés à mort. Les frontières entre collabos et résistants sont poreuses ; les postures souvent mensongères car passer aux yeux des allemands pour un fidèle collaborateur aiguille vers des zones sensibles indispensables à la résistance …

L'originalité de ce récit est de se focaliser plus sur les salauds que sur les héros, sur les compromissions, sur les lâchetés, et ce dans un pays qui après le nazisme eut à subir le communisme sans jamais réécrire son histoire, sans juger les coupables ni réhabiliter vraiment les victimes des procès de Prague.

L'histoire est frôlée par les ombres rappelle l'auteur qui n'est pas dupe : accuser Fermak / Skoda de collaboration facilite sa nationalisation en 1945. Une étatisation synchrone à celle du groupe Renault, suite à l'inculpation et au décès de son fondateur en octobre 1944… En refermant ce livre, se pose la question : aujourd'hui dans quel étau serait pris un petit fils de Louis Renault à l'université de Nanterre ou de Vincennes ?

Un excellent roman où l'auteur oppose René Bondoux à Reinhard Heydrich dans une extraordinaire « Phrase d'armes ».

PS : ma lecture de « Phrase d'armes » :
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Prague dans les années 30, alors qu'Hitler part à la conquête du pouvoir en Allemagne, Viktor Jelinek et Viktor Forman sont à la tête de la société prospère Fernak qui fabrique des avions et des voitures. Ils nomment comme P.D.G. Bohus Zdrazil que l'on surnommera le pape. A la recherche de nouveaux marchés, les États-Unis ne s'avèrent pas un investissement rentable. Ils se tournent vers l'Allemagne en pleine expansion. L'Histoire va vite rattraper L'usine Fernak lorsque les nazis lancés dans une guerre totale en Europe obligent la société tchécoslovaque à fabriquer des tanks. Alors se dessinent deux camps, celui des collaborateurs et celui des résistants.
C'est cet étau qui se referme petit à petit sur les personnages du roman de Paul Greveillac que l'auteur décrit avec beaucoup de talent. Il mélange les acteurs de la seconde guerre mondiale avec les personnages de fiction issus de son imagination. Cela donne au récit toute la vraisemblance de son histoire. Comme la société Fernak, beaucoup de sociétés ont été contraintes d'adhérer au projet fanatique barbare nazi.
On comprend parfaitement le cheminement de chacun des personnages forcés pour les uns, endoctrinés pour les autres, ou tout simplement embarqués mal grès eux dans le projet d'une assemblée de fous, Hitler et ses sbires, ou motivés par une ambition égoïste et personnelle.
« L'étau » est un roman de plus sur la seconde guerre mondiale et sur le fascisme fanatique, pourrait-on dire, mais il a cette singularité qu'il se passe en Tchécoslovaquie et qu'il montre le cheminement qui conduit certains hommes à l'horreur. Il témoigne enfin des erreurs commises à la libération en jugeant coupables de collaboration des hommes et des femmes qui n'avaient pu qu'assister impuissants aux agissements de l'envahisseur. Cette injustice va jusqu'à condamner les enfants innocents, coupables des agissements présupposés de leurs parents.
Une lecture vraiment passionnante ! C'est presque un livre d'Histoire.
Editions Gallimard, coll. Blanche, 317 pages.
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L'Etau est le troisième roman de Paul Greveillac que je lis . Après Maitres et esclaves et Art Nouveau , on sent une continuité dans l'oeuvre de l'auteur.
D'abord le 20ème siècle , ensuite un sujet ancré dans la réalité de l'Histoire. Toujours un savant mélange de réel et de fiction.
Dans Maitres et esclaves qui se passe en Chine on retrouve l'idée de l' Etau : l'oppression, le régime totalitaire, le pouvoir
Dans Art Nouveau il est question de l'architecture de la MittelEuropa entre Hongrie, Autriche et Allemagne. Ce sujet revenant dans l'Etau avec l'architecte hongrois Aldor Erkan.

Etau : Presse formée par des mâchoires qu'on rapproche à volonté, de manière à tenir solidement les objets que l'on veut travailler . Au figuré : ce qui opprime.

L'ensemble des personnages du roman de Paul Greveillac seront au prise avec cet étau.
Courant sur la totalité du 20ème siècle l'Etau est une réflexion profonde sur le jugement que l'on porte sur les évènements et les hommes et les femmes qui les vivent.
Dans les années 1990 ,Nad'a Zdrazilova est exclue de l'Université de Prague. Elle est victime d'une campagne de délation concernant son père qui aurait été complice des nazis durant la Seconde Guerre Mondiale. Son père Bohus Zdrazil est devenu PDG de l'entreprise Fernak à force de travail, après avoir démarré apprenti dans l'entreprise.
Fernak est une entreprise créée en Tchécoslovaquie au début du 20ème siécle par deux doux dingues : Viktor Forman et Viktor Jelinek.
Leur rêve : traverser l'Atlantique à bord de leur avion , leur bébé : L'Alkonost.
Au delà du rêve Fernak produit des avions et des voitures et devient le fleuron industriel de la Tchécoslovaquie.
Les années 30 arrivent tout comme l'annexion de la Bohème Moravie par l'Allemagne hitlérienne.
Fernak passe sous la coupe de Reinhard Heydrich , redouté et zélé nazi alorq que Bohus Zdrazil en est devenu PDG.
L'usine est réquisitionnée pour participer à l'effort de guerre en fabricant avions et chars.
Bohus Zdrazil est dans l'Etau : collaboration, résistance , résistance passive ?

C'est le centre du roman de Paul Greveillac.
Cette époque terrible ne peut être résumé à des jugements manichéens , nommant les bons et les méchants.
comment se permettre de juger 50 ans après ?
Pire : comment est il possible de juger des enfants pour ce qu'aurait éventuellement fait le père ? Quelle responsabilité des enfants sur le parcours des parents ?
Et que dire de cette ville-usine où les machines jouxtent les baraquements des ouvriers-prisonniers, sur le chemin de fours crématoires.
Pendant ce temps là de petits SS font main basse sur les oeuvres d'art et trafiquent.
Terribles abymes. Que reste -il du destin de Bohus Zdrazil pris dans l'étau ?
Que découvrira Nad'a ?
Un roman, puissant, brutal, profond au service d'un monde non binaire.
Lien : http://auxventsdesmots.fr
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Tenter de se projeter dans la peau de descendants de nazis ou de collaborateurs de ce régime est un exercice troublant, teinté de répulsion et de compassion mêlés. On est bien conscient que ces adultes devenus portent injustement une histoire glauque qui n'est pas la leur.

Deux tchèques, ostracisés par la collaboration de leur père industriel pendant l'occupation allemande à Prague, constitue l'ouverture de ce roman social et historique, reprenant minutieusement la dérive imposée d'une usine d'aviation et d'automobiles devenue d'armement.
Prague est alors une ville sous la botte de l'occupant et sous gouvernance de fer de Heydrich. Chacun doit s'y plier, complaisant ou contraint, obséquieux ou résigné.
Et l'usine Fernak n'y échappe pas en dépit de résistance interne.
La suite de l'apocalypse rendra crédit aux justes.

Un passé reconstitué avec efficacité par la belle plume de Paul Greveillac, qui soigne ses personnages fictifs et la documentation du réel. L'ambiance mortifère de la période, la violence des êtres et le chaos industriel participent à une vision en noir et blanc très oppressante.
Une excellente lecture.

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Fernak, usine d'aviation née dans les années 20 de la volonté notamment de Viktor Forman. Fernak déroule son histoire en épousant totalement l'histoire de la Tchécoslovaquie de l'entre-guerre et de la IIème guerre mondiale.
Dans son antre, dans ses locaux se croisent des destins d'hommes et d'une femme: Bohus Zdrazil dit le Pape devenu PDG de l'usine, sa femme dite la Patronne Hedvika, ancienne ouvrière de l'usine, Aldor Elkan, sinistre architecte budapestois devenu le PDG à la fin de la Guerre, R. Heydrich, Adolf Mängl etc...

Entre les chapitres racontant tous ces destins, des inter-missions comme les appelle l'auteur, inter-missions qui présentent Prague à la fin des 90's et au début des 2000's durant lesquels Nad'a Zdrazilova et son frère Andel Zdrazil, fille et fils de Bouhs et Hedvika, sont devenus la cible d'une certaine presse et de groupes de pression dénonçant les enfants de nazis. Car Bohus est considéré comme un nazi.

C'est cette histoire, tirée de la réalité que nous raconte Paul Greveillac avec beaucoup de finesse, de l'humour, et un réel sens de l'histoire (histoire au sens sciences historiques et histoire au sens intrigue, roman).

Le tempo du roman peut paraître lent. Et pourtant on part bien de la disgrâce des enfants Zdrazil pour arriver à....chut ! je ne dévoile rien.
L'auteur ne délaye jamais son propos. Il passe très subtilement du destin d'un personnage à un autre. Quand un trépasse commeR. Heydrich il passe avec beaucoup de souplesse et de naturel au destin d'untel et d'untel.

Et l'usine reste toujours au centre de l'histoire, des passions, des drames, des réussites aussi.

Une très belle découverte ! A lire !
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critiques presse (1)
LaLibreBelgique
17 avril 2022
Un roman de Paul Greveillac confronte une nouvelle fois un individu à un pouvoir totalitaire.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
Citations et extraits (25) Voir plus Ajouter une citation
Reinhard Heydrich contint son énervement. Il allait prendre un malin plaisir à cribler son adversaire de touches. Le duel fut bref. À la régulière, sans esbroufe ni botte secrète, l'avocat battit le vice-gouvemeur par cinq touches à trois. Puis il partit enfiler sa robe, avant de retrouver le palais de justice.

Le SS-Obergruppenfûhrer fût froidement vexé. Pendant le vol de retour vers Prague, il refit mentalement le combat. Que s'était-il passé ? Ètait-il si rouillé ? S'était-il déconcentré ? Il n'avait plus perdu depuis tant d'années... Afin de la comprendre, il savait devoir analyser sa contre-performance avec pragmatisme et objectivité. Revoyant l'insupportable insolence du Français, il en était cependant bien incapable. De rage, il brisa la visière du képi qu'il tenait entre ses mains.

Le sabreur ignorait qu'il venait d'avoir affaire à René Bondoux. Ce dernier, s'il était bel et bien avocat, avait tout de même remporté l'or par équipes aux Jeux olympiques de Los Angeles. Puis l'argent, quatre ans plus tard, à Berlin.
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Winston Churchill avait besoin de pouvoir s'écouter penser. Il n'avait rien tant en horreur que le sifflotement trivial qui fait dérailler le raisonnement mieux que les bombes. Il exigeait le silence. D'un bout à l'autre de son bunker, on tapait les comptes rendus, les ordres, les rapports secrets, sur des Remington spécialement conçues dont les cliquetis étaient étouffés.

Dans un réceptacle verni de la taille d'une boîte à chaussures, une main glissa silencieusement un petit écriteau de bois sur lequel se détachaient cinq lettres noires. Windy. On attendait du vent. C'était ainsi qu'on annonçait les bombardements des Allemands. A Londres moins qu'ailleurs on n'oubliait que l'humour est le dernier rempart de la civilisation.
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Bientôt, dans un hangar sous étroite surveillance auquel n'avait accès qu'un club fermé d'individus, l'avion de la traversée fut prêt. C'était un monoplan à ailes hautes, petit mais puissant, un bimoteur court sur pattes à l’allure de bouledogue. Il se distinguait par sa rusticité. Son train d'atterrissage escamotable. L'habitacle était minimaliste, étroit : une banquette sur laquelle on tenait à peine à deux. Pour la navigation : un altimètre, un anémomètre, un compas magnétique à la fiabilité éprouvée. Bref, de l'indispensable uniquement. Pour seule coquetterie, de chaque côté du fuselage, on avait peint au pochoir un insigne représentant le même visage de femme au regard intransigeant, entouré de deux ailes touffues, qui agrémentait le pommeau de la canne de Viktor Jelinek. L’Alkonost, déité slave, donnait son nom à l'avion Fernak. Les semaines qui suivirent, les deux pilotes testèrent l'appareil. Ils le poussèrent jusque dans ses retranchements. L’Alkonost était solide. Rien à redire. Ou presque.
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Tous les chiffres du protectorat étaient au vert : presque plus du tout de Juifs, mais toujours davantage d'avions et de tanks.

Et quels tanks. Le verdict du général de Lattre, dont les forces furent pourtant équipées des légendaires Sherman américains, fut sans appel : « Nos engins sont nettement surclassés par les Jagdpanther et les Tigre. »
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À travers tout le Reich, c'était désormais la fuite en avant. Mais, face à la débandade qui s'annonçait, Aldor Elkân vacillait. Il y avait en lui un nain bourru qui voulait même freiner des quatre fers. Accepter le totalitarisme, c'était au contraire accélérer le mouvement. Et le PDG, n'y parvenait plus. Pour s'épanouir dans le totalitarisme, il fallait pouvoir courir quand on vous demandait de marcher.
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Videos de Paul Greveillac (6) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Paul Greveillac
Paul Greveillac vous présente son ouvrage "Phrases d'armes" aux éditions Gallimard. Rentrée littéraire automne 2023.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2887255/paul-greveillac-phrase-d-armes
Note de musique : © mollat Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
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