Le livre continue à produire son effet après l'avoir refermé. Les images fourmillent. Mais de quelle genre de cage s'agit-il exactement ?
A première vue, ce n'est rien d'autre qu'une cage de télégraphiste, comme on peut en trouver en ville, à l'époque de
Henry James.
Celle-ci est située dans un quartier aristocratique de Londres, et le contraste est forcément saisissant entre deux mondes que tout sépare : d'un côté l'opulence, et de l'autre, le monde étriqué des petits employés, etc…
Les images s'enchaînent inévitablement. Est-ce une histoire sur fond de lutte des classes ?
Pas vraiment. La jeune femme qui nous intéresse, semble en effet avoir dépassé l'horizon du travail contraignant de télégraphiste. Et en même temps, elle apparaît rapidement comme un extraordinaire prototype de sensibilité et de détermination. On ne connaîtra d'ailleurs jamais son nom.
La cage est bien un théâtre, mais un théâtre de signes. Sans que personne n'y prête attention, la jeune femme déchiffre, en effet, les signaux faibles contenus dans les télégrammes qui lui passent entre les mains.
Si bien que sa vie prend tout à coup un nouveau sens, lorsqu'elle s'aperçoit, parmi les expéditeurs et les destinataires, qu'il y a une personne en danger, un aristocrate. Elle décide alors de le sauver.
En l'écoutant déchiffrer, il y a toutes sortes d'images qui s'entre-choquent ; par moments on peut la croire en plein délire, ou au contraire espérer qu'une rencontre avec cet aristocrate, à l'extérieur de la cage, pourrait tout changer. Évidemment,
Henry James est depuis longtemps passé maître dans le contrepied.
On court dans tous les sens, alors que la jeune femme ne réserve pourtant aucun secret. Elle ne cache pas, en effet, qu'elle joue sa dernière carte. Si elle ne peut pas vivre cette aventure, il ne lui reste que le spectre d'un schéma familial autour d'un pavillon en banlieue, avec un mari dont elle n'est pas amoureuse.
On sait, de toutes façons, que même si elle doit se résigner, sa détermination et sa sensibilité lui permettront toujours de trouver les interstices pour exister.
Mais de là à penser qu'on peut transformer un monde désenchanté en jouant seul.e dans ses interstices, il faut encore beaucoup d'imagination.
Déjà un spectre rôde, venu des autres fictions de
Henry James. C'est le spectre du personnage qui fini par se figer dans une volonté de fer.