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Marie-Odile Delacour (Éditeur scientifique)Jean-René Huleu (Éditeur scientifique)Martine Reid (Éditeur scientifique)
EAN : 9782070349098
144 pages
Gallimard (28/02/2008)
3.87/5   42 notes
Résumé :
«Tous les matins, à l'heure où le soleil se levait,
je venais m'asseoir sous le porche de la zaouïa Sidi Abd er Rahman, à Alger. J'ai ressenti là, à l'ombre antique de cette mosquée sainte de l'islam, des émotions ineffables au son de la voix haute et forte de l'imam psalmodiant ces vieilles paroles de la foi musulmane en cette belle langue arabe, sonore et virile, musicale et puissante comme le vent du désert où elle est née...»
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Amours nomades, comme si l'amour pouvait se contenter d'un point fixe et s'y arrimer...
Il fallait une voyageuse infatigable comme Isabelle Eberhardt pour dire la ligne de fuite, la quête, l'errance, l'exil, dans ces histoires d'amours impossibles, souvent contrariées par le destin mais aussi par la loi implacable des traditions.
Ici nous traversons l'Algérie, le Maroc, la Tunisie, nous vagabondons sur un territoire qu'a étreint de son regard et de sa fougue Isabelle Eberhardt.
Le printemps parfumé d'Oran, les rues blanches d'Alger, Tlemcen, Constantine, les souks de Tunis... Plus loin, au bord des oueds paisibles, nous guettons l'or du ciel qui illumine les vallées et les montagnes. Plus loin encore vient le sirocco du soir qui nous raconte ces histoires venues du tréfonds du désert. Dans ce paysage immuable, nous venons à la rencontre de femmes et d'hommes de la fin du XIXème siècle.
Chaque nouvelle est une histoire d'amour qui nous est contée dans l'affolement d'un coeur qui bat, qui doute, qui espère. L'auteure nous dit la joie de la transgression, l'étonnement voluptueux, la chair d'amoureuse révoltée qui repousse une nuit encore, une nuit plus tard, un peu comme Shéhérazade, l'instant fatidique, la prison du couple, l'enfermement qui viendra à jamais.
Elles s'appellent Achoura, Tatani, Taalith, Melika... Elles tentent de fuir le chemin qui les conduit vers un destin tracé d'avance pour elles. Ceux qui les aiment sont touchants, fragiles, désarmés, quelquefois leur pas vacille au moment où il faudrait qu'il soit ferme. Nous découvrons ce qui n'a guère changé plus d'un siècle plus tard, le mariage forcé des jeunes filles que leur religion impose, une religion inventée par des hommes et pour des hommes...
Ce n'est pas par plaisir que vient la transgression, c'est par un puissant désir de liberté, celui de survivre. D'imaginer la vraie vie.
L'écriture est belle, poétique, sensuelle. Dès les premières pages, j'ai eu l'impression que j'entrais dans un paysage flamboyant de couleurs et d'odeurs. Des myrtes verts, des thuyas, des lauriers-roses étoilés, ici l'eucalyptus déploie ses branches et ses feuilles dans la lumière mauresque, plus loin la fleur chatoyante d'un camphrier nous enivre de ses parfums.
Monter un escalier bleu tandis que la ville dort, franchir un seuil en écartant le rideau qui mène au bonheur, sont des gestes épris d'un effleurement érotique que l'on devine derrière chaque mot, chaque image, chaque pas...
Les Amours nomades sont clandestines, rebelles, éphémères... Interdites, inavouées, folles surtout car il faut de la folie pour braver les murs. Parfois ce sont des rendez-vous manqués...
Les Amours nomades se nourrissent de sables émouvants, le désert ardent qui effleure la peau, chavire les corps et les âmes de ces amoureux naufragés éperdus d'azur.
La mort n'est jamais loin, elle vient comme un malheureux présage poser son ombre sur le texte de ces nouvelles. Elle vient nous rappeler qu'Isabelle Eberhardt mourut tragiquement à l'âge de vingt-sept ans en 1904 dans ce désert qu'elle aimait par-dessus tout.
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Il existe des livres féeriques : quand on les ouvre des senteurs s'en échappent, des couleurs s'en irisent, des musiques s'en murmurent.

Ce petit recueil est tout cela, feuilletez-le et les magnolias, les eucalyptus, le romarin sauvage et la lavande, le benjoin s'éventeront autour de vous, le chatoiement des étoffes vous fera plisser les yeux et l'or et l'étincelant des parures, colliers et bracelets, vous aveuglera tandis que les tambourins et autres instruments de musique traditionnels tintinnabuleront à vos oreilles.

C'est un voyage comme un rêve au pays du soleil et des déserts, de l'âpreté et de la volupté.

Des amours folles, inavouées, défendues et déçues sont le feu de la vie des personnages de ces nouvelles.
Les femmes ont un destin décidé pour elles et le transgressent le temps d'une passion, ou en croyant encore que la liberté leur est permise.
Les hommes se croient libres de vivre sans attaches.
Et un regard, un geste, un visage qui se dissimule embrase les coeurs et les âmes de ceux qui n'étaient pas destinés à se croiser et s'aimer.
La mort est là, toujours tapie, qui attend de sermonner ceux qui ont transgressé les lois culturelles.


Un recueil qui permet la rencontre d'êtres fiers et farouches.
Ils ont choisi de prendre dans le quotidien les joies qui sont offertes, en toute simplicité, toujours spectateurs admiratifs et contemplatifs des paysages dans lesquels ils se fondent.
Toujours en harmonie avec ce qui les entoure, ils reçoivent autant qu'ils vénèrent.
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Écriture bouleversante. Écriture aimante, passionnante comme la caresse d'un peintre. Tout est étoffes, couleurs, carnations, Odeurs. Bruits, souffles, musique. Parfums. Matières, lumières. Isabelle Eberhardt était une infante des sables. Elle la vagabonde, l'étrangère, l'imparfaite, la rebelle, la réfractaire, l'aventurière ,la sans patrie, la libre. Elle, qui, avec et par amour a tout bravé, son époque, ses interdits. Elle a aimé et l'a écrit avec passion, de tous ses sens. Algérie, Maroc, Tunisie. Des nouvelles comme des contes pour rendre un visage à mille et une vies.
Berbères, bédouins , elle a su les regarder à taille humaine. A la hauteur de l'âme là où le coeur est le plus vrai, le plus juste. Avec bonheur, avec jeunesse, avec extase, avec ivresse, avec poésie, mais surtout avec un talent incroyable. le désert fut sa dernière et unique demeure. «  la nuit d'été, sombre et étoilée, tomba sur le désert ». Elle avait 27 ans. Nous étions en 1904.
« C'était une route qui n'avait pas de fin, car elle était plus longue que la vie humaine. » Désert, Le Clézio.
Astrid Shriqui Garain

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Isabelle Eberhardt est une femme exceptionnelle. Je l'ai découverte il y a peu à travers ses Notes de route:Maroc-Algérie-Tunisie rééditées aux éditions Aquilon cela a été une révélation. Amours nomades m'a été suggéré par la critique d'Isanne je suis ravie.
12 nouvelles parues entre 1900 et 19O4, 12 textes pleins d'amour, de joie et de drame, 12 textes pleins de la beauté de ces terres ensoleillées, 12 textes qui nous parlent de ces hommes et de ces femmes qu'isabelle Eberhardt a pris le temps de découvrir, de connaitre et d'apprécier.
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4ème de couverture: Tous les matins, à l'heure où le soleil se levait, je venais m'asseoir sous le porche de la zaouïa Sidi Abd er Rahman, à Alger.
J'ai ressenti là, à l'ombre antique de cette mosquée sainte de l'islam, des émotions ineffables au son de la voix haute et forte de l'iman psalmodiant ces vieilles paroles de la foi musulmane en cette belle langue arabe, sonore et virile, musicale et puissante comme le vent du désert où elle est née.


Mon opinion: Je découvre cet auteur avec ce recueil de nouvelles et je dois dire que je ne suis pas déçue. La vie très courte (morte noyée à 27 ans) de cette femme est marquée par le désir de liberté, le voyage et surtout par son amour des pays du Maghreb auxquels elle a voué une véritable passion et leur a consacré sa vie littéraire. Une vie mouvementée, d'exil qui marque l'amour d'une femme pour une culture à laquelle elle rend hommage par l'écriture.

Dans ce recueil de nouvelles, l'auteur nous décrit le Maghreb du XIX°siècle: sa culture, ses paysages... Elle nous conte des amours impossibles, contrariées par les événements, les traditions dans une langue douce, poétique.

Un très bon moment de lecture à accompagner d'un délicieux thé à la menthe!

PS: cette édition est composée d'une présentation de la vie de l'auteur en début de recueil, très intéressante pour découvrir l'histoire de cette femme.

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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Un peu par nécessité, un peu par goût, j'étudiais alors les moeurs des populations maritimes des ports du Midi et de l'Algérie.
Un jour, je m'embarquai à bord du Félix Touache, en partance pour Philippeville.
Humble passager du pont, vêtu de toile bleue et coiffé d'une casquette, je n'attirais l'attention de personne. Mes compagnons de voyage, sans méfiance, ne changeaient rien à leur manière d'être ordinaire.
C'est une grave erreur, en effet, que de croire que l'on peut faire des études de moeurs populaires sans se mêler aux milieux que l'on étudie, sans vivre de leur vie...
C'était par un clair après-midi de mai, ce départ, joyeux pour moi, comme tous les départs pour la terre aimée d'Afrique.
On terminait le chargement du Touache et, une fois de plus, j'assistais au grand va-et-vient des heures d'embarquement.
Sur le pont, quelques passagers attendaient déjà le départ, ceux qui, comme moi, n'avaient point d'adieux à faire, point de parents à embrasser...
Quelques soldats, en groupes indifférents... Un jeune caporal de zouaves, ivre mort, qui, aussitôt embarqué, était tombé de tout son long sur les planches humides et qui restait là, sans mouvement, comme sans vie...
A l'écart, assis sur des cordages, je remarquai un tout jeune homme qui attira mon attention par l'étrangeté de toute sa personne.
Très maigre, au visage bronzé, imberbe, aux traits anguleux, il portait un pantalon de toile trop court, des espadrilles, un sorte de gilet de chasse rayé s'ouvrant sur sa poitrine osseuse, et un mauvais chapeau de paille. Ses yeux caves, d'une teinte fauve changeante, avaient un regard étrange : un mélange de crainte et de méfiance farouche s'y lisait.
M'ayant entendu parler arabe avec un maquignon bônois, l'homme au chapeau de paille, après de longues hésitations, vint s'asseoir à côté de moi.
- D'où viens-tu? me dit-il, avec un accent qui ne me laissa plus aucun doute sur ses origines.
Je lui racontai une histoire quelconque, lui disant que je revenais d'avoir travaillé en France.
- Loue Dieu, si tu as travaillé en liberté et non en prison, me dit-il.
-Et toi, tu sors de prison?
- Oui. J'ai fait huit ans à Chiavari, en Corse.
(...)

(Amara le forçat)
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Mais dans la griserie de l'heure présente, j'oubliais tout et surtout l'avenir. Ou plutôt cet avenir m'apparaissait comme une continuation indéfinie du présent... C'était une ivresse sans fin. Tantôt l'ivresse de mon âme dans ce pays merveilleux, sous ce soleil unique et les envolées sublimes de la pensée vers les régions calmes de la spéculation, tantôt les douces extases toujours mêlées à de la mélancolie, les extases de l'art, cette quintessentielle et mystérieuse jouissance des jouissances.
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Il comprit l'inanité de notre vouloir et la folie funeste de notre coeur avide qui nous fait chercher la plus impossible des choses : le recommencement des heures mortes.
Si Abderrahmane quitta ses vêtements de soie de citadin et s'enveloppa de laine grossière. Il laissa pousser ses cheveux et s'en alla dans la montagne, (...) Il vivait dans la prière et la contemplation, si doux et si pacifique que les bêtes craintives des bois se couchaient à ses pieds, confiantes.
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La mer scintillait à la lumière, opaline et claire, encore rosée des reflets du ciel matinal. Le port s'animait, et en bas, à Bab Azoun, sur le boulevard de la République et sur la jetée Kheïr ed Dine, une foule bariolée se mouvait en deux torrents roulant en sens inverse.

Je me reposais à cette heure si douce et étonnamment joyeuse. Mon âme semblait flotter dans le vide charmeur de ce ciel inondé de lumière, de vie.
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Comme il arrive pour toutes les créatures d’amour, Achoura se sentit naître à une vie nouvelle. Il lui sembla n’avoir jamais vu le soleil dorer la crête azurée des montagnes et la lumière se jouer capricieusement dans les arbres touffus de la montagne. Parce que la joie était en elle, elle sentait une joie monter de la terre, comme elle alanguie en un éternel amour.
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Videos de Isabelle Eberhardt (10) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Isabelle Eberhardt
Rencontre avec Leïla Sebbar & Manon Paillot animée par Patrice Rötig Lecture par Frédéric Mitterrand
Après Je ne parle pas la langue de mon père et L'arabe comme un chant secret, Lettre à mon père est le dernier volet, le plus tendre et le plus violent, de la trilogie autobiographique de Leïla Sebbar. Pour la première fois, elle ose, outre-mort, une adresse directe à son père Mohamed dont le silence l'a tenue loin de son roman familial, qu'elle écrit dans la langue de sa mère, le français. Sans fin elle l'interroge, et il ne parle guère. Au cours de cette soirée nous évoquerons également un recueil de récits et nouvelles où Leïla Sebbar nomadise avec Isabelle, son héroïne, sa muse, Isabelle Eberhardt ; un ouvrage préfacé et édité par Manon Paillot. Enfin, par la voix de Frédéric Mitterrand, nous entendrons différents extraits.
À lire – aux éd. Bleu autour : Leïla Sebbar, Lettre à mon père – Leïla Sebbar & Isabelle Eberhardt (nouvelles), préface de Manon Paillot, 2021.
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