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sur 6470 notes
L'apocalypse a eu lieu. le monde est dévasté, couvert de cendres... Des cadavres s'amoncèlent sur le bord de la route. Quelques survivants s'épient, se guettent, s'attaquent, se mangent... Et parmi ces rescapés, un père et son fils errent sur la route. Ils fuient le froid et la neige des hautes montagnes. Ils veulent rejoindre la mer, et le temps plus clément pour survivre.

S'ensuit alors une longue odyssée de ce père avec son fils. Ils poussent un caddie rempli de victuailles et objets diverses trouvés par ci, par là, près des cadavres incendiés ou dans des maisons abandonnées. Et ils avancent coûte que coûte, sous la pluie, sous la neige, le jour jusqu'à la tombée de la nuit, toujours sur leurs gardes, toujours à l'affût des « méchants ». Ils ont froids, ils sont trempés, ils n'ont rien mangés depuis trois jours, mais font preuve d'abnégation et d'un courage à tout épreuve.

Je ne veux pas tomber dans l'excès de sensibilité, mais la lecture de ce roman de Cormac McCarthy m'a profondément ému. A chaque page, je sentais les larmes poindre le long de mes rides naissantes. Je suis bouleversé par cet univers décrit et par ce père qui, malgré tout, tente d'éduquer du mieux qu'il peut son fils, l'enfant. Pas facile de discerner le bien du mal dans ce chaos post-apocalyptique. Pourtant, la vie pourrait être plus facile, une balle de calibre 22 dans la tête et les voilà libérer de cet enfer. Mais le père a ce courage nécessaire pour inculquer à son fils le prix de la vie, même au milieu des cadavres brûlés, sous un paysage recouvert de cendres... Arriver à croire en un avenir, même incertain et espérer ; de toute façon, il ne reste que l'espoir pour survivre ; croire en la certitude que quelque part sur cette planète, il existe un autre enfant, un autre parent comme eux, qui font partie de la catégorie des « gentils » comme eux, pour partager ensemble le dessein des rescapés.

L'univers de ce roman est dépouillé à l'extrême. Il n'y a rien ou presque ; simplement la route, un enfant et son père, un caddie, de la cendre et toujours cette route vers le sud entourée de corps en décomposition. Pourtant avec si peu, cela donne un roman à la fois terrifiant et poignant. On ne saura rien de l'époque précédant l'apocalypse. de toute façon, on s'en balance un peu, on commence à connaître la folie et la barbarie des hommes, donc rien de bien surprenant à découvrir la planète sous le chaos... de courts chapitres, directs et uppercuts qui vous mettent en vrac tripes et intestins. le livre de l'année ? Sur le plan purement émotionnel, je vote « oui » les yeux fermés, d'ailleurs je n'ose plus les rouvrir, peur de l'avenir, peur du prochain.
Lien : http://leranchsansnom.free.f..
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Tout ça pour quoi ?
La route, prix Pulitzer 2007, adapté au cinéma en 2009, encensé par la critique. A lire donc ?

Lui, c'est Papa ou l'homme. L'autre c'est l'enfant ou le petit. Dans un monde post-apocalyptique, ils marchent vers le sud, poussant un caddie, survivant au jour le jour, à la recherche de nourriture et cherchant à échapper à une humanité retournée à la barbarie et au cannibalisme.

Première impression, ce n'est pas un roman, mais une trame, un synopsis, un ébauche de scénario ? Les bases sont posées, il n'y a plus qu'à développer.
Car c'est bien de cela qu'il manque le plus. Les personnages sont dépersonnalisés au point de n'avoir pas de nom. On ne sait rien sur eux, et par voie de conséquence ils nous restent étranger. le monde est mort et rempli de cendres (hiver nucléaire ? Supervolcan de Yellowstone ?) Des nuits obscures au delà de l'obscur, des jours sans soleil. Des cendres, du gris jusqu'à l'écoeurement, répété et décliné à l'infini. Mais encore ?
Les jours passent, les semaines passent. L'homme et l'enfant marchent depuis des années. Ils marchent ou plutôt ils fuient, ils ne restent jamais longtemps au même endroit, eux contre les méchants. Mais encore ?
Un road movie, mais sans passion, sans émotion, sans mouvement, dépouillé à l'extrême, tellement nu en fait que je n'ai pas pu ou n'ai pas su m'y impliquer.

Un style lapidaire, laconique, des dialogues monosyllabiques. Au moins, cela correspond à l'ambiance voulue par l'auteur mais n'apporte pas grand chose à l'histoire. Mais quelle histoire au final ?
Une survie improbable, livrée de façon presque clinique que l'auteur n'aura même pas la force de conclure d'une fin digne de son développement.

Il fallait transcender la forme sans chapitre, les dialogues creux, le style épuré à l'extrême, presque télégraphique, l'absence de descriptions pour partager l'émotion des protagonistes, réussir à aller au delà de la forme voire du fond pour éprouver de l'empathie pour eux ? Je n'ai pas réussi.
Peut-être aurait-il fallu voir le film avant pour pallier le manque de « visuel » du livre ?
A lire donc ? Non !
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Dans un univers dévasté, un homme et son fils marchent sur la route et j'ai marché avec eux.

J'ai vu le monde gris, sans oiseaux, ni verdure, avec un soleil voilé par le nuage de cendres, avec des ruines, des cadavres et des barbares cannibales.

J'ai ressenti la peur, la faim, le désespoir et aussi l'amour de ce père qui garde deux balles dans son revolver pour pouvoir mourir avec son fils.

J'ai pris "La route", un roman post-apocalyptique aux émotions intenses.
.
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Un homme et son fils sont sur La route. Il règne une atmosphère de fin du monde. Ils sont seuls. Chacun est tout l'univers de l'autre. Ils n'ont plus rien. Ils survivent en mangeant ce qu'ils trouvent dans les ruines de maisons abandonnées. Ils sont vêtus de haillons. Ils ont froid, ils ont faim, ils ont peur.

Tout au long de leur route, Ils préservent la part d'humanité, d'amour et de bonté qui est en eux. Leur bien le plus précieux. Sans cela, pourquoi survivre ? Ils veulent rester des hommes et « porter le feu ».
L'enfant est comme la parole de Dieu, un prophète. L'homme doit l'emmener quelque part, le plus au sud, vers la mer. Essayer de trouver de la chaleur et peut-être d'autres survivants qui ont gardé comme eux leur part d'humanité.

Les souvenirs du passé du père sont douloureux. Il ne faut pas se retourner sur eux. Se souvenir ce serait renoncer à lutter. L'enfant n'a pas connu la beauté et la bonté du monde passé. Il incarne l'espoir. Il se construit son monde, son culte, ses propres valeurs, guidé par l'amour que lui porte son père.

Peut-on réparer ce monde ? Demeure-t-il un espoir quelque part sur cette planète agonisante. ? Pourquoi continuer à avancer sur cette route de désespoir, de désolation, de ténèbres ?

C'est une longue route qui nous emmène au plus profond de nous-mêmes. Elle est douloureuse.
On garde espoir, car l'amour du père pour son fils ne vacille jamais. Il porte son fils et son fils le porte. Ensemble ils gardent espoir. Les dialogues sont courts mais intenses. Il faut peu de mots, car il reste peu de vie, peu de choses à transmettre. Il ne reste que le feu que le petit garçon porte en lui, l'essentiel, ce qui représente l'humanité.

Comment survivre sans espoir ? L'enfant représente le dernier éclat de lumière, la dernière lueur d'espoir. Et son père survit pour porter cette lumière, pour qu'elle ne vacille pas.
« l'homme levait les yeux en pleurant et il le voyait là debout sur La route qui le regardait du fond dont ne sait quel inconcevable avenir, étincelant dans ce désert comme un tabernacle. »
Le style est épuré, comme l'est cette vision d'un monde apocalyptique. La tension est constante. On tremble avec ce père et ce fils. On sombre aussi dans le désespoir. de ces dialogues courts et de ces descriptions de paysages sans vie, se dégagent de multiples réflexions philosophiques. La foi, l'espoir, le sens de la vie, l'homme, le bien et le mal.




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Devenue à présent un genre à part entière, la « post-apo » tient là son incontestable chef-d'oeuvre.
Son dépouillement à l'extrême n'empêche d'aucune façon sa terrifiante capacité à faire naitre un grand nombre d'images, d'un sombre néant où l'humain n'est plus que restes répugnants, n'en déplaise aux fans de « S-F militaire » pour qui l'absence de vaisseaux ne permette d'imaginer autre chose, comme ce à quoi pourrait ressembler de la gelée de chair humaine coulant d'une mauvaise dentition…
Je me sens bien obligé de ne rebondir que sur les critiques les plus visibles, n'allant bien-sûr pas parcourir l'impressionnante quantité d'avis sur ce best-seller, contrairement à mes habitudes (qui n'incluent que rarement des livres aussi lus, et cela n'a rien d'une volonté, consciente en tout cas…).

Je risque même d'être forcé de prendre le rôle ô combien ingrat, classique des réseaux sociaux ou des forums à présent moribonds, du correcteur d'orthographe pinailleur (voir « enlucqueur » de mouches, ne voulant Nullement choquer) , se plaignant de la qualité plus que douteuse de cette édition à la simple et fragile couverture blanche (chez Points), pour ajouter quelque chose de légèrement informatif à ce monceau d'opinions incluant sûrement tout le reste…
(Et puis il faut dire que ce livre m'a carrément foutu les jetons, donc autant rester un peu léger avec un propos digne des commentaires sous un article du Monde.fr)
Bref, quasiment une faute de typo à chaque page, cela est assez rare pour être noté… (et dire que les derniers mots du livres, laissés à son traducteur, remercient Nathalie Zberro pour sa « méticuleuse relecture ») à se demander ce qui a déraillé pour cette présente édition…

Sinon… mis à part ce signalement réclamatif, vaguement besogneux, assortie de sa petite pique… reste sans doute le besoin d'aligner des mots… tant cet effrayant livre sub-glacial vient rejoindre la catégorie des oeuvres pessimistes / réalistes (rayez la mention inutile) sur le possible avenir de l'humanité, tel ce film méconnu du misanthrope Michael Haneke — dont j'aime beaucoup détester la production en général, rivalisant avec celle de Lars von Trier, le cynisme et la noirceur érigés comme solution de facilité — « Le temps du loup », voyant Isabelle Huppert errer sur la route après une catastrophe indéterminée, moins ancienne que celle qui nous occupe ici, n'y laissant que cendres et maigre anthropophagie.
Je n'ai d'ailleurs aucune envie d'en voir l'adaptation cinématographique…

Sérieusement, il y a bien trois / quatre images qui vont me poursuivre un bon moment…
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Etrange, angoissant, apocalyptique…
Il n'y a pas vraiment de début à cette histoire. On suit cet homme et son fils sur cette route, tout est complétement détruit. Détruit depuis quand ? Pourquoi ? Dans quel pays sommes-nous ? On ne connais pas le prénom de ces deux personnages, ni leur âge. Vers où vont-ils ? le Sud. Ca, c'est dit.
Pourquoi ? Là, ce n'est pas dit !
C'est un livre noir, avec un espoir que le lecteur entretient. Mais il est bien le seul à entretenir cet espoir !!
Ce livre, c'est surtout l'énergie du désespoir, l'instinct de survie et de protection envers sa descendance, l'espoir qui survit malgré tout, qui permet à l'homme de s'accrocher coûte que coûte…
J'ai du m'accrocher à cette lecture moi aussi, mais j'ai persévéré, et finalement j'ai apprécié ce livre.
L'auteur nous décrit une situation désespérante, pas un seul moment d'éclaircie, rien de positif… et pourtant on arrive au bout de cette lecture. Pas de réponse, juste un peut-être… ou pas !
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De la surenchère américaine au sein même de l'épure ? Une question d'angle de vue…

C'est sans doute le roman post-apocalyptique le plus gris, le plus sombre que je n'ai jamais lu. Il a des points communs avec « Malevil » de Robert Merle ou avec « Et toujours les forêts » de Sandrine Collette car la catastrophe, dans tous les cas, est un feu. Nous retrouvons la terrible solitude et les conditions de survie précaires et minimales du beau livre « le mur invisible » de Marlen Haushofer. La présence salvatrice d'un chien qui m'avait émue aux larmes dans « La constellation du chien » a été remplacée par celle d'un petit garçon. Comme « Dans la forêt » de Jean Hegland, la foret est refuge, lieu où se cacher, mais ici elle ne constitue pas un berceau, aucun enracinement dans le beau n'est permis. Alors, certes, le livre de Sandrine Colette est également très sombre, c'est vrai. Mais il est teinté d'un espoir grandissant. Il comporte quelques taches de couleur salvatrices. Il déroule avec davantage de nuances son histoire depuis le début de la catastrophe jusqu'à la fin…

Ici le livre est d'une noirceur absolue. L'homme est devenu un loup pour l'homme. Et l'histoire est centrée sur l'errance. Uniquement l'errance aboutissant à une fin que nous devinons dès le début. Une errance qui semble, à raison, interminable et absurde. Et une fin que certains pourraient qualifier de facile. C'est donc essentiellement un roman d'ambiance. Une ambiance oppressante, sans espoir, apocalyptique, avec presque cette sensation physique que l'auteur nous maintient fermement la tête pour bien nous y plonger dans tout cet amas gluant de gris, à nous en étouffer, à nous faire boire la tasse avec cette eau granuleuse remplie de cendres et de sang séché. Ad nauseeum. Il rajoute, comme on rajouterait du piment dans un plat, de bonnes grosses louches de glauque lorsque cela tourne un peu en rond, en l'occurrence surtout dans la première partie, histoire de faire frémir le lecteur, avec par moment des ficelles relativement grosses de prime abord…Je pense notamment à cette cave sordide ou encore à la scène du rôtissoire en plein air. Non, non, non…Ce sont des éléments de ressort tellement évidents. A l'américaine. Pour impressionner, faire « de l'audimat », marquer les esprits. Qu'apportent ces scènes terrifiantes ? Sont-elles l'aveu d'un manque de profondeur du scénario ? Telles furent mes questionnements durant une bonne partie de ma lecture. Mais, par ailleurs la relation entre le père et son petit m'a beaucoup touchée et l'écriture, il faut le reconnaitre, capte, charme et vous maintient en éveil malgré tout. Bref, j'ai fini le coeur au bord des lèvres, non sans avoir pesté durant toute la lecture, étrange rencontre…J'ai aimé d'un côté, pas aimé de l'autre…

« Quand il fit assez clair pour se servir des jumelles ils inspecta la vallée au-dessous. Les contours de toute chose s'estompant dans la pénombre. La cendre molle tournoyant au-dessus du macadam en tourbillons incontrôlés. Il examinait attentivement ce qu'il pouvait voir. Les tronçons de route là-bas entre les arbres morts. Cherchant n'importe quoi qui eût une couleur ».

Que s'est-il passé ? Feu nucléaire ? Explosion volcanique ? Météorite ayant percuté la Terre ? Guerre mondiale ? Nous ne savons pas, ce qui est certain c'est que L'apocalypse a eu lieu, la terre a été mise à feu et à sang. Nous sommes environ six ans après, le monde est désormais totalement dévasté, couvert de cendres et de cadavres desséchés. Un monde sans aucune couleur, même le sang est brun. le seul rouge vif provient d'une canette de Coca Cola trouvée de façon quasi providentielle. Parmi les très rares survivants, un père et son fils errent sur une route, poussant un caddie rempli d'objets hétéroclites. Dans la pluie, la neige et le froid, ils avancent vers les côtes du Sud, la peur au ventre : des hordes de sauvages cannibales terrorisent ce qui reste de l'humanité. Survivront-ils à leur voyage ? Verront-ils enfin la mer ? Sera-t-elle bleue ? Comment un enfant peut-il survivre à cela, comment dépasser le traumatisme d'une telle errance et de ses visions cauchemardesque ? Quel est le sens de rester en vie lorsqu'ils n'y a quasiment pas de survivants et que le monde est devenu tellement sauvage qu'on ne peut compter que sur soi ? L'apocalypse serait-elle plus facile au sud alors que le soleil est à présent derrière un voile opaque quel que soit l'endroit où nous nous trouvons ?

Nous ne savons pas grand-chose sur ce père et son fils sur leur vie d'avant l'errance. Ils n'ont pas de prénom et les dialogues sont très courts. Nous devinons que le petit n'a jamais connu le monde d'avant l'apocalypse étant né alors que tout était déjà fini. Nous apprenons que la mère a choisi le suicide. Autant j'ai trouvé de la surenchère dans la première partie du livre afin d'éviter de nous ennuyer, autant l'épure choisie des personnages apporte beaucoup de charme au récit et m'a beaucoup touchée.

L'avantage d'une lecture commune, car nous l'avons lu à plusieurs et nos avis sont d'ailleurs assez divergents, c'est de nous permettre de prendre du recul via les échanges. de s'apercevoir qu'il y a différents angles de vue. Alors que je faisais part à mes comparses de mon dégout à propos de certaines scènes, j'ai pu reconsidérer ma position notamment grâce à @Yaena qui a beaucoup aimé ce livre…J'ai appréhendé la fameuse scène de la cave mentionnée précédemment comme étant une scène racoleuse de torture totalement inutile ayant pour objectif de rajouter du noir au gris, du glauque à l'horreur. Cette scène peut en réalité être perçue comme une scène mettant en valeur la chute d'un tabou à l'aune de la fin de l'humanité. Celle du cannibalisme. C'est une réflexion sur la fin de ce qui fonde notre humanité. le fait que le père et ce fils ne soient pas devenus cannibales mais qu'au contraire ils continuent à « porter le feu » est le signe que tous deux ne sont pas encore tombés de l'autre côté et qu'il reste un espoir, celui contenu dans ce petit être qui voudrait aider, rassurer, trouver des « gentils », s'inquiétant des déviances de son père qui ne fait que les défendre des autres devenus dangereux…Voilà une question d'angle de vue. C'est suffisamment passionnant pour être souligné même si l'impression de départ ne parvient pas totalement à se dissiper…Ma réaction n'est-elle pas instinctive, celle du rejet d'une part sombre possible de nous lorsqu'il n'y a plus d'espoir et que nous ne sommes plus des êtres humains ? Que ferions-nous, de notre côté, dans les mêmes conditions ultimes de survie ? Et finalement je crois que c'est l'enfant qui permet au père de ne pas sombrer. Ce petit garçon a même un côté christique au fur et à mesure de l'avancée du récit, il est celui qui peut, qui va sauver l'humanité. Au-delà du simple racolage ressenti au départ, j'ai pu finalement appréhender la philosophie, et surtout le côté quasi religieux, de ce texte.

La plume, je dois le reconnaitre également, m'a charmée. C'est une plume singulière, simple, directe, avec peu de virgules, sertissant le récit d'une certaine poésie, une poésie rythmée, en boucle. Les scènes au bord de mer sont d'une beauté de fin du monde qui restera longtemps gravée en moi.

« Là-bas c'était la plage grise avec les lents rouleaux des vagues mornes couleur de plomb et leur lointaine rumeur. Telle la désolation d'une mer extraterrestre se brisant sur les grèves d'un monde inconnu. Là-bas dans la zone des estrans un pétrolier à moitié couché sur le côté. Au-delà l'océan vaste et froid et si lourd dans ses mouvements comme une cuve de mâchefer lentement ballottée et plus loin le front froid de cendre grise. Il regardait le petit. Il voyait la déception sur son visage. Je te demande pardon, elle n'est pas bleue, dit-il. Tant pis, dit le petit.
Une heure plus tard ils étaient assis sur la plage et contemplaient le mur de brouillard qui barrait l'horizon. Les talons plantés dans le sable ils regardaient la mer couleur d'encre qui venait mourir à leurs pieds. Froide, désolée. Sans oiseaux. Il avait laissé le caddie dans les fougères de l'autre côté des dunes et ils avaient emporté avec eux les couvertures et enveloppés dedans ils s'abritaient du vent contre un énorme tronc de bois flotté ».

Au final, je ressors mitigée par cette lecture, d'un côté charmée par la plume épurée singulièrement poétique, très émue également par la relation entre le père et son fils dont la brièveté des échanges fait émerger quelque chose d'essentiel et de pur, plus circonspecte cependant devant l'horreur de certaines scènes que j'ai prise dans un premier temps pour une forme de racolage, au final cette horreur est plus profonde en termes symboliques qu'elle ne parait de prime abord, et devant le scénario dont la fin est devinée dès le départ et qui n'est centrée que sur l'errance apocalyptique sur la route.
Plusieurs jours après, il me reste surtout en tête cet oppressant camaïeu de gris et, au milieu de ces nuances moribondes, cette cannette rouge vif de soda, totalement hypnotique, faisant saliver même son lecteur. Alors, je me demande…Ce livre ne serait-il pas juste, simplement, une magnifique publicité ?


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Ayant vu le film il y a bien longtemps et apprécié l'interprétation de l'excellent Viggo Mortensen, j'ai souhaité lire le livre pour y rechercher davantage de profondeur, le cinéma ne restituant pas toujours au mieux l'ambiance d'un écrit.

J'ai trouvé cette lecture longue et laborieuse, la forme saccadée des événements vécus par "l'homme" et "le petit" ne m'a pas convaincu. Les dialogues m'ont vraiment lassé par leur répétitivité, je n'ai pas compté le nombre inouï d'emploi du mot "d'accord". Il m'a semblé que ce road-movie n'avançait vraiment pas, avec une fin beaucoup trop sèche à mon goût, même si elle évoque les truites des torrents de montagne.

Toutefois, je comprends la démarche de l'auteur et peut-être sa volonté d'avoir ôté toute forme d'espérance à travers cette succession de questionnements entre le père et le fils, d'avoir voulu traduire ainsi à la fois la désespérance et la volonté de survie.

C'est certainement un sujet difficile, Cormac McCarthy a sans doute voulu exprimer l'intériorité des deux personnages, de ce point de vue c'est alors réussi, peut-être pas assez concentré pour porter le vrai sens de cette marche sans but.

Je n'ai pas lu d'autre livre de cet auteur, je reviendrai vers lui probablement, même si, pour moi, cette route m'a paru moins que moyenne.
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Enfin, je viens de lire le roman post-apocalyptique de Cormac McCarthy. Depuis le temps que ce livre était dans mes étagères à prendre la poussière. Heureusement les critiques de Caro29 et Bartzella m'ont donné envie de lui donner sa chance, car ayant déjà vu le film, cet univers particulièrement sombre ne m'attirait pas vraiment.

*
Dans une Amérique ravagée par un immense feu, un homme et son enfant, tentent de survivre en marchant vers la côte, empruntant une route déserte, recouverte de cendre. Dans l'histoire, ils n'ont pas de nom, on les appelle simplement "l'homme" et "le petit".
Ils ne possèdent pratiquement rien. Leurs maigres possessions sont conservées dans un chariot.

Il n'y a pas vraiment d'intrigue, leur combat paraît vain dans un monde déjà mort, devenu un enfer pour une raison que l'on ignore. Un sentiment d'impuissance et d'absurdité m'a étreinte tout au long de ma lecture.
Peut-il y avoir un dénouement heureux dans un univers aussi morose et déprimant ?

« le froid et le silence. Les cendres du monde défunt emportées çà et là dans le vide sur les vents froids et profanes. Emportées au loin et dispersées et emportées encore plus loin. Toute chose coupée de son fondement. Sans support dans l'air chargé de cendre. Soutenue par un souffle, tremblante et brève. Si seulement mon coeur était de pierre. »

*
Cette longue route vers le sud est particulièrement angoissante.
Le monde est figé, immobile, brûlé, grisâtre, recouvert d'un dépôt cendreux que le vent emporte.
La race humaine a pratiquement disparu.
Le ciel est vide, la mer est vide, les forêts sont vides.
Tout est mort, l'herbe, les arbres, les champs, l'eau.
Tout est monochrome, exempte de couleurs.
La neige qui tombe est grise, le ciel est gris, l'océan est gris acier.

« le noir dans lequel il se réveillait ces nuits-là était aveugle et impénétrable. Un noir à se crever le tympan à force d'écouter. Il était souvent obligé de se lever. Pas d'autre bruit que le vent dans les arbres dépouillés et noircis. Il se levait et titubait dans cette froide obscurité autiste, les bras tendus devant lui pour trouver son équilibre tandis que les mécanismes vestibulaires faisaient leurs calculs dans son crâne. »

*
Cette route est d'une tristesse infinie.
Le désespoir et la solitude sont très présents, disséminés entre les lignes, mais les deux personnages avancent sans se retourner.
Affronter le froid, la pluie, l'épuisement, la faim, l'incertitude, le découragement, la peur.
Faire l'économie des mots, aller à l'essentiel.
Rester en vie et continuer à vivre coûte que coûte.
S'accrocher à la vie avec l'énergie du désespoir.

« Là où tout était brûlé et réduit en cendres devant eux il n'était pas question de faire du feu et les nuits étaient longues et sombres et froides plus que tout ce qu'ils avaient connu jusqu'à présent. Froides à faire éclater les pierres. A vous ôter la vie. Il serrait contre lui le petit qui grelottait et il comptait dans le noir chacune de ses fragiles respirations. »

*
Cette route est terrifiante, oppressante et même glauque.
Les dangers sont omniprésents. En la parcourant, ils sont à la merci de hordes qui n'hésitent pas à tuer .

« Il l'avait entraîné à rester tapi dans les bois comme un faon. »

*
Vous l'aurez compris, cette route est particulièrement terne, sinistre, étouffante, piégeuse. Pour eux qui rêvent d'un futur plus clément, cette route est symbole d'espoir.

Ce que je retiens également, c'est cette lumière que j'ai décelée au milieu de toute cette noirceur.
Cette lumière, c'est celle de cette magnifique relation père fils. Chacun soutient l'autre par la force de son amour.
L'amour de ce père pour son enfant n'a pas besoin de mots. Il a beaucoup de gestes tendres envers son fils. Loin d'être dépourvu de sensibilité, il est, malgré tout, prêt à recourir à la violence et à tuer pour protéger son enfant.
L'enfant m'a touchée aussi. Frêle et apeuré, il n'apparaît pas armé pour faire face à la violence de ce monde qui a perdu toute humanité. Il n'a connu que ce monde de désolation, et pourtant, il fait preuve de sensibilité, de générosité et de compassion.

« Tu voulais savoir à quoi ressemblent les méchants. Maintenant tu le sais. Ça pourrait se reproduire. Mon rôle c'est de prendre soin de toi. J'en ai été chargé par Dieu. Celui qui te touche je le tue. Tu comprends ?
Oui.
Il était assis, encapuchonné dans la couverture. Au bout d'un moment il leva la tête. On est encore les gentils ? dit-il.
Oui. On est encore les gentils.
Et on le sera toujours.
Oui. Toujours.
D'accord. »

*
Cormac McCarthy a une prose particulièrement originale.
J'ai aimé son écriture simple, très directe, épurée, économique en ponctuation. J'y ai même trouvé de la poésie.

Souvent intégrés dans la narration, les dialogues sont concis, vont à l'essentiel. Les propositions coordonnées sont comme des fragments de leur vie quotidienne, une juxtaposition de gestes mécaniques, répétitifs, d'une profonde monotonie, mais essentiels, vitaux.

Ce style d'écriture aurait pu amener une certaine lourdeur au texte, mais je l'ai perçu différemment. Il contribue, au contraire, à renforcer cette atmosphère lourde et oppressante. On ressent ce froid permanent, ce monde dépouillé et effrayant, et ces cendres qui se déposent partout.
Il marque aussi le courage, la persévérance et la ténacité des deux personnages.

« Les nuits étaient mortellement froides et d'un noir de cercueil et la lente venue du matin se chargeait d'un terrible silence. Comme une aube avant une bataille. La peau du petit était de la couleur d'une bougie et presque transparente. Avec ses grands yeux au regard fixe il avait l'air d'un extraterrestre. »

*
« La Route » est une histoire déprimante, certes, émotionnellement éprouvante, oui, j'en conviens. Mais elle est aussi profondément humaine, émouvante et poignante. J'en ressors particulièrement émue.

En créant un univers post-apocalyptique impressionnant, Cormac McCarthy a écrit une oeuvre très forte, certains diront un chef d'oeuvre. Je ne sais pas, mais ce qui est sûr, c'est qu'il ne faut pas hésiter à emprunter cette route et à vous faire votre propre avis.
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Homo homini lupus est !

"Les nuits obscures au-delà de l'obscur et les jours chaque jour plus gris que celui d'avant. Comme l'assaut d'on ne sait quel glaucome froid assombrissant le monde sous sa taie." (P9)

Toujours être sur ses gardes
Toujours regarder derrière soi
Toujours avoir peur
Toujours s'inquiéter
Toujours se méfier
Toujours continuer
Toujours marcher
Toujours y croire
Sans cela c'est la mort
D'accord !

Homo homini lupus est !

"Le froid et le silence. Les cendres du monde défunt emportées ça et là dans le vide sur les vents froids et profanes. Emportées au loin et dispersées et emportées encore plus loin. Toute chose coupée de son fondement. Sans support dans l'air chargé de cendre. Soutenue par un souffle, tremblante et brève. Si seulement mon coeur était de pierre." (P16)

Un monde sans règle
Devenu un état de nature
Atrocité
Barbarie
Bestialité
Cruauté
Insensibilité
Sauvagerie
Une humanité perdue
Celle qui reste à la dérive

Homo homini lupus est !

"Sur cette route il n'y a pas d'hommes du Verbe. Ils sont partis et m'ont laissé seul. Ils ont emportés le monde avec eux. Question : Quelle différence y a-t-il entre ne sera jamais et n'a jamais été ?" (P35)

Cormac McCarthy écrit
François Hirsch traduit
Une poésie sauvage
Une prose qui transpire la peur
Des paragraphes courts et oppressants 
Pour prendre aux tripes
Des dialogues minimalistes
Peut-être bien
Mais que dire quand il n'y a plus rien
Et que l'homme est devenu un loup pour lui-même ?
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