L'abandon. La pire des trahisons, les sentiments persistent mais la personne, le pilier, la colonne vertébrale de votre monde, disparue. En temps de guerre rien ne prépare à ce sentiment. Tout part et semble s'arrêter. le temps brisé, déchire tout notre être, nous voilà seul Atlas de notre monde. Frêle sur deux jambes, l'abandon envahit.
Avec énormément de pudeur
Dimitri Nasrallah dépeint l'histoire de
Niko, jeune libanais victime de la guerre. Son parcours torturé et tortueux va l'amener grâce à son père, à être recueilli par de la famille exilée au Canada. Sans mère, avec un père volontairement resté sur place,
Niko doit évoluer dans le monde occidental, apprendre une nouvelle langue, un nouveau comportement. S'adapter à un pays qui semble l'accueillir non par envie mais par devoir.
On suit donc l'évolution du père et du fils, l'intrigue bien construite nous tient en haleine jusqu'aux dernières pages. Odyssée moderne,
Niko propose une vision de l'immigration en plaçant les difficultés au centre du récit. le style poétique et très moderne de Dimitri confèrent au récit un modernisme glaçant. Pourtant les moments fugaces, poétiques, existent et il s'agit de les intercepter. Tout n'est pas abandon, calcul et froideur. La chaleur humaine réside dans ce récit et l'insouciance poétique sont des échappatoires nécessaires.
Nos deux protagonistes vont évoluer à leur rythme, au rythme du monde, pas toujours bienveillant, mais nécessaire à leur construction en tant qu'être.
Niko c'est la promesse que même si le monde va mal, même si tout est fichu, certains sentiments perdurent. Une lueur au loin, un simple grésillement lumineux semblent être une nouvelle porte à ouvrir. Une nouvelle étape dans la construction de ces sans pays, sans patrie.
L' abandon comme occasion de tout recommencer, préférer la douleur et l'échec pour mieux recommencer que l'abandon de soi.