AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Jean-Pierre Carasso (Traducteur)
EAN : 9782020826556
94 pages
Seuil (26/08/2005)
3.86/5   50 notes
Résumé :
Dans un camp de concentration, Rosa cache Magda, son bébé, dans les plis d'un châle. Mais une jeune fille de quatorze ans, rongée par le froid, s'empare du châle qui dissimule l'enfant. Alors survient l'innommable: un nazi découvre le bébé et le jette contre les barbelés électrifiés du camp. Trente ans plus tard, on retrouve Rosa à Miami. Sa fureur et sa mémoire sont intactes. Jusqu'au jour où un paquet arrive par la poste. C'est le châle. La sobriété de ce récit et... >Voir plus
Que lire après Le châleVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (10) Voir plus Ajouter une critique
3,86

sur 50 notes
5
2 avis
4
3 avis
3
3 avis
2
0 avis
1
1 avis
Née dans le Bronx, Cynthia Ozick est une écrivaine juive, d'origine russe, vivant toujours à New York. Lauréate de la fondation Guggenheim, de l'American Academy and National Institute of Arts and Letters, elle est considérée comme une « sorte de Flannery O'Connor juive ».

« le Châle » débute dans un camp de concentration où Rosa cache son bébé, Magda, dans les plis d'un châle. Un bébé qui, à peine née, n'a pas d'espoir, ni de vie et encore moins de pleurs et passe ses journées à sucer ce bout de chiffon pour étancher sa soif et oublier sa faim. Lorsqu'une pensionnaire, morte de froid, lui arrache le châle, le bébé est découvert et l'atrocité est inévitable : un nazi s'en empare et le jette contre les barbelés.
Trente ans après ces évènements, succinctement mais intensivement retracés en une dizaine de page seulement, Rosa est à Miami. Elle vit seule, est toujours en colère contre le monde, la rage au ventre, l'esprit là-bas.

Lorsqu'elle retrouve son châle qui a gardé le goût d'amande et de cannelle de la salive de Magda, Rosa semble toujours plus perdue et désemparée. Elle ne se considère pas comme une survivante, sorte de super-héros ayant réussi à passer à travers les mailles nazies du filet qui retinrent tant de ses compatriotes. Il n'est toujours pas question de faire le deuil de ce bébé tuée. D'ailleurs, Magda est vivante, elle est même médecin dans l'imagination de Rosa. Impossible d'oublier. Rosa n'est pas folle même si c'est l'impression qu'elle donne aux autres. Ce roman est là pour cette raison : témoigner de cette époque. Rosa n'a pas le droit d'oublier, le lecteur non plus…
Lien : http://leranchsansnom.free.fr/
Commenter  J’apprécie          205
J'ai lu avant celui-ci un livre qui s'appelait le chagrin des vivants dans lequel au bout du compte je n'ai trouvé ni vrai chagrin, ni vrais vivants. Tout juste des ombres de personnages peu crédibles et peu profonds flottant dans un après-guerre vaguement constellé de tranchées et de jambes de bois. de cette lecture j'ai déjà presque tout oublié - reste le titre. Plutôt joli, plutôt percutant, mais tellement peu adapté. C'est dommage, il faudrait peut-être faire quelque chose avec ce titre.
Et si je le donnais à ce livre là ? Parce que c'est vrai que le châle de Cynthia Ozick est capable de recouvrir pas mal de choses. Indéniablement. Mais le chagrin ? Les vivants ? On pourrait croire que ça colle hein ? Bah zut non en fait, j'ai beau retourner le problème dans ma tête, je crois que ça ne va pas aller non plus...
Ah bon ? Quoi mais pourquoi ? du chagrin on en a pourtant en veux-tu en voilà dans ces pages n'est-ce pas ? Une mère dont on tue l'enfant, pensez-vous, si c'est pas du chagrin ça, et bien sûr, le camp de concentration n'en parlons même pas. Une abomination. Forcément du chagrin donc. Et pis des vivants, il y a bien des vivants dans cette histoire non ? Rosa est vivante, Stella est vivante. Oui je sais mais oui mais non.
Pour le chagrin déjà ça va pas, le mot est trop faible, ici on est au-delà du chagrin, il n'y a pas de mots pour dire où on est d'ailleurs, mais cela se situe bien au-delà croyez-moi. Inqualifiable, indicible, ça c'est des mots, mais est-ce que ça suffit ? Est-ce que ça peut dire tout ce qu'il faudrait dire ? Pas sûr. Ensuite, concernant les vivants, ben pareil, on ne va pas pouvoir dire ça, parce que tout simplement on est très très au-delà du vivant. En effet, ici on n'a pas de vivants mais des survivants. Et le truc, c'est qu'il ne faut surtout pas croire que survivre c'est vivre, ne pas présumer que les survivants sont des vivants. Même rien qu'à regarder les synonymes on se rend compte que ça va pas, indemne, qui est indemne ici ? miraculé ? quelqu'un a vu un miracle ? sain et sauf, tiré d'affaire ? sans déconner on n'y croit pas cinq minutes. Non définitivement, survivre ce n'est plus vivre.

Alors voilà, on va garder le titre de Cynthia Ozick et basta. C'est vrai puisqu'au final elle ne nous parle ni de chagrin ni de vivants, de quoi peut-elle bien nous parler ? Bonne question. le châle, un châle… Mais oui bien sûr, de mode, elle parle de mode, quoi d'autre ? le châle, un accessoire fantastique - quasi magique- qui permet de rester vivant, il réchauffe bien sûr, il cache et dissimule ce que l'on veut protéger, il peut même nourrir si on le suce à la place du sein maternel desséché, il délivre un jus composé de rien si ce n'est de particules d'illusion et d'espérance. Mais ce châle est aussi un linceul, une créature tentaculaire qui a envahi l'esprit de Rosa la séparant du monde des vivants sans toutefois lui permettre de rejoindre celui des disparus, il la maintient dans son rôle de survivante, le seul qu'on lui concède dans cette société dégénérée.
D'autres accessoires vestimentaires vont s'en mêler au fil des pages. Survivante. Stella lui offre une robe. Rayée. Des rayures pour une réchappée des camps ? Vraiment ? Survivante mais élégante. Elle flotte Rosa, elle flotte dans son entre-monde, elle flotte et elle sème des morceaux de tissus comme un tragique Petit Poucet, une culotte par ci, ses bonnes chaussures par là, et puis cette robe rayée. Survivante. Rosa ne peut pas oublier, c'est son drame. Les autres ont déjà oublié, elle n'est plus qu'une survivante. Pas une personne, pas un être humain. Elle est une survivante et elle n'a pas le droit d'être autre chose.

Mais heureusement, un beau jour de lessive, par un accroc du châle, un petit yiddish se faufile et vient à rencontre de Rosa. Fabricant de boutons c'est son métier -humour yiddish ça, typique - un bouton pour réparer le châle. Persky, c'est son nom, est un charmant vieux schnock et il est surtout le seul qui voit en Rosa juste une femme, pas une survivante. Il va essayer de la ramener sur le sunny side of the street. Pas facile, mais après tout ça se passe à Miami et du soleil, y'en a par là-bas alors faudra voir... J'ai bien aimé ce vieux polak, j'adore sa façon de parler et il m'a rappelé de bons souvenirs, mais stop ça suffit maintenant, il est temps pour moi de rabattre le châle sur cette histoire.
Lien : https://tracesdelire.blogspo..
Commenter  J’apprécie          100
Il y a toujours de belle rencontre littéraire, des moments rares perdus dans le spectre de notre regard où défilent la prose d'une lecture nouvelle, une histoire venant croiser votre vie pour l'enrichir de ces lettres de noblesse mais aussi malheureusement des livres s'étirent dans une abime nébuleuse, laissant inerte votre émotion pour vous laissant dans une lassitude froide, voir une déception de n'avoir pas pu pénétrer le voile de l'auteur.
Le châle de Cynthia Ozick me laisse une amertume tendre, les mots sont devenus petit à petit sourds, les phrases sans saveurs, un brouillard abscond épaississant le fil de ma lecture pour être soudainement soulager du point final du roman.
Cynthia Ozick est américaine, originaire russe, ses parents fuyant les pogroms, ouvrirent une pharmacie dans le Bronx, jeune fille notre futur femme de lettre, écoutée les anecdotes des clients, lui donnant l'envie d'écrire. Femme de lettre, elle fera une thèse sur Henry James, son père spirituel, nouvelliste avec, le Rabbi païen en 1988, Lévitation en 1993, et le Châle en 1991, puis romancière aussi avec le Messie de Stockholm en 1988, Points en et La Galaxie cannibale en, 1997.Essayiste, poétesse, critique littéraire aussi, cette femme aime la plume, les mots et de sa condition Juive se fait diplomate Juive de sa prose.
Ce roman est un cri d'une femme, d'une mère prisonnière de son passé, celui de son enfant mort tragiquement dans un camp de concentration, balancé contre les barbelés électriques. Mais une onde fantastique enveloppe ce court roman, celui du châle, au pouvoir magique, celui de protéger Magda, l'enfant de la narratrice, Rosa Lublin, accouchant en captivité, rendant sa fille invisible grâce au châle, devenu le Graal, source de nourriture virtuelle pour le nourrisson, au ventre gonflé d'air. La mort tragique de Magda semble être la faute de la nièce de Rosa, Stella, jeune fille de treize ans, volant le châle de l'enfant de treize mois, marchant depuis peu sur ces crayons, servant de jambes, une jalousie enfantine innocente, tuant Magda, laissant sa tante dans la colère sourde mais sauvant sa nièce tout même pour l'amener en Amérique.
Trente plus tard, Rosa vit toujours de ce drame, enfantant sa Magda dans la virtualité de ce châle pour la faire vivre de nouveau, comme un miracle d'oublier sa mort et vivre dans ce déni. Rosa semble vouloir s'enfermer dans la noirceur de son passé, se suicidant encore une fois en détruisant sa brocante, une folie hystérique la ramenant à survivre encore dans sa prison mentale, s'isolant encore et encore, traitant sa Nièce d'Ange de la mort qui subvient au besoin toujours de sa tante Rosa. Ce leitmotiv d'Ange de la mort consume de plus en plus Rosa perdu dans une rupture existentialiste.
L'écriture n'est pas fluide, la résonance se trouble, comme l'esprit de Rosa, nous sommes dans un tourbillon d'émotion hermétique à ma sensibilité, comme la rencontre avec cet homme Simon Persky, un homme plus âgé, immigré bien avant Rosa, lui répétant sans cesse.
« Votre Varsovie n'est pas ma Varsovie. »
Mais comme un miracle, cette rencontre perturbe l'émotion de cette Vieille femme, attendant le colis de sa nièce, le châle de sa fille morte trente plus tôt. Rosa fait revivre sa fille et meurt petit à petit, lui écrivant en polonais des lettres chaque jours, sa chambre devenu un capharnaüm.
Une scène troublante, celle de Rosa perdue sur une plage privée d'un hôtel, se retrouve enfermée, prisonnière d'un grillage surmonté de barbelé comme dans un camp de concentration nazi, cette vison la rendant triste pour venir s'insurger de ces fils barbelés au directeur, la considérant comme folle, comme sa nièce !
Rosa semble être sous l'emprise de cette Floride, du temps, des personnes l'entourant, de ce médecin Buisson, le harcelant pour son étude, Rosa résiste.
Même si je n'ai pas trop aimé me perdre dans cette histoire, je pense que beaucoup aimeront, ces mots, cette femme Rosa survivante de l'insondable, mais morte de l'intérieur.
Commenter  J’apprécie          30
« Elle tourna et retourna la boîte – c'était une boîte rectangulaire. le châle de Magda ! le lange de Magda. le linceul de Magda. le souvenir de l'odeur de Magda, parfum sacré du nourrisson perdu. Assassiné. Jeté contre la clôture, barbelée, griffée d'épines, électrifiée ; gril et grille ; fournaise, une enfant incendiée ! »

Magda, l'enfant, le nourrisson, tenant à peine sur ses jambes, n'est pas légitime dans le camp de concentration dans lequel elle se trouve. Alors quand elle se retrouve sans son châle, elle est vite repérée puis effroyablement exécutée.

Rosa, la mère, ne s'en remettra jamais. A jamais bouleversée, elle erre. Elle erre dans ses pensées, dans sa vie. Elle n'oublie pas, elle construit sa réalité.

« - Madame ? dit le directeur.
- Monsieur, vous avez des barbelés autour de votre plage.
- Vous avez une chambre ici?
- Non, ailleurs.
- Alors en quoi cela vous regarde-t-il ?
- Vous avez des barbelés.
- Pour empêcher la racaille d'entrer.
- En Amérique, ce n'est pas le lieu du barbelé en haut des clôtures !
Le directeur abandonna la rédaction de ses notes
- Veuillez vous retirer, dit-il Retirez-vous, je vous en prie.
- Il n'y a que les nazis qui attrapent les innocents derrière des barbelés, dit Rosa. »

Elle ne parvient pas à trouver une raison d'être comme tout le monde : dans les normes du quotidien. le pauvre Persky tente bien de la ramener à la réalité en lui offrant des séances de drague mémorable [extrait] :

« - Qu'est-ce que vous voulez ?
Il découvrit ses dents.
- Un rendez-vous.
- Vous êtes marié.
- Marié mais sans femme.
- Vous en avez une.
- C'est une façon de parler. Elle est folle.
Rosa dit :
- Je suis folle aussi.
- Qui le dit ?
- Ma nièce.
- Qu'est-ce qu'une inconnue peut en savoir ?
- Une nièce n'est pas une inconnue.
- Mon propre fils est un inconnu. Une nièce sans aucun doute. Venez, j'ai ma voiture tout près. Climatisée, on fera un tour.
- Vous n'êtes pas un gamin, je ne suis pas une gamine, dit Rosa.
- Ce n'est pas à moi que vous le prouverez, dit Persky.
- Je suis quelqu'un de sérieux, dit Rosa. Ce n'est pas mon genre de vie^de me promener pour aller nulle part.
- Qui a dit nulle part ? Je pensais aller quelque part.
Il réfléchit.
« Mon club du troisième âge. Très sympathique belote.
- M'intéresse pas, dit Rosa. J'en ai rien à faire des nouveaux gens.
- Alors, au cinéma. Vous n'aimez pas les nouveaux, on vous en trouvera des morts. Clark Gable, Jean Harlow.
- M'intéresse pas.
- Une promenade à la plage. Marcher au bord de l'eau, ça vous dit?
- Je l'ai déjà fait, dit Rosa.
- Quand ?
- Ce soir. A l'instant.
- Seule ?
Rosa dit :
- Je cherchais quelque chose que j'ai perdu.
- Pauvre Lublin, qu'est-ce que vous avez perdu ?
- Ma vie. »

…même si, malgré elle, des soupçons de réalité la gagnent : « Un fil de gratitude se tendit dans sa gorge. Il comprenait presque ce qu'elle était : pas un bouton ordinaire. »

Ce livre est troublant. le premier passage, celui du camp, est effroyablement génialement écrit. J'ai eu froid dans le dos. La suite de la lecture me parut ensuite relativement plus fade même si forte en réflexion.

A vous de me dire

Finem Spicere,

Monsieur Touki.
Lien : http://monsieurtouki.wordpre..
Commenter  J’apprécie          50
Cynthia Ozick est née en 1928 à New York de parents juifs-biélorusses., elle est américaine, d'origine russe. Ses parents ont quitté la Russie au lendemain de la vague de pogroms qui a succédé à l'assassinat du tsar Alexandre II, en mars 1881. Ils ont ouvert une pharmacie dans le quartier de Pelham bay Park, où ils travaillent avec acharnement. La jeune Cynthia écoute les histoires des clientes de sa mère, et dévore des livres.. Et là, nait sa vocation d'écrivaine.
Le châle est un diptyque composé de deux nouvelles.
« 𝑳𝒆 𝒄𝒉â𝒍𝒆 ». Une jeune polonaise, Rosa Lublin, et sa nièce Stella marchent vers un camp de concentration. Aucun nom de lieu n'est donné. Elle dissimule son bébé Magda, dans son châle ; Rosa n'a plus de lait, Magda, silencieuse et squelettique tête le châle. le bébé va faire un avec ce châle, va grandir tant bien que mal, jusqu'à environ quinze mois... Stella la nièce de Rosa, 14 ans, vole le châle parce qu'elle a froid et parce qu'elle envie cette enfant... Et l'innommable va alors se produire.
Cette première nouvelle est pudique, ne s'attarde pas trop sur l'atrocité de la vie dans le camp mais centre beaucoup sur l'amour maternel et la jalousie. Elle est quasi insoutenable. le moment le plus choquant de l'histoire, est la description de la façon que l'un des officiers nazis ramasse Magda… alors qu'elle crie « maman ».
« Rosa ». Quarante ans plus tard, Rosa, survivante du camp, vit – si l'on peut dire – dans une maison de retraite, entretenue par Stella, en Floride. Rosa ne peut et surtout ne veut pas oublier. Un jour, elle reçoit un paquet. A l'intérieur : le châle dans lequel, elle cachait sa petite fille, Magda.
Cette partie m'a paru relativement plus fade, l'écriture n'est pas fluide et m'a gênée, même si elle est forte en réflexions.
Un choc pour la première nouvelle et une lecture en demi-teinte pour la seconde..
Lien : https://www.plkdenoetique.co..
Commenter  J’apprécie          60

Citations et extraits (27) Voir plus Ajouter une citation
Je te scandaliserais si je te parlais ne fût-ce que d'un seul des jeux horribles que je suis contrainte de jouer avec elle. Pour apaiser sa démence, pour la faire taire, je fais comme si tu étais morte. Si! c'est vrai! il n'est rien, pas une folie, que je ne dirais pour l'obliger à tenir sa langue. C'est une calomniatrice. Partout il y a des calomnies, et parfois - mes lèvres éclatantes, ma chérie! - les calomnies touchent jusqu'à toi. Ma pureté, ma reine des neiges!
J'ai honte de donner un exemple. Pornographie. Ce que Stella, cette pornographe, a fait de ton père. Elle vole toute la vérité, elle la dérobe, elle la subtilise. Le vol demeure impuni. Elle ment, et c'est le mensonge qui est récompensé. Le Nouveau Monde! C'est pourquoi j'ai démoli ma boutique! Parce qu'ici on fabrique des théories mensongères. Les gens de l'université en font autant : ils prennent les êtres humains pour des spécimens. En Pologne il y avait la justice ; ici ils ont des théories sociales. Leur système n'a presque rien hérité des Romains, c'est la raison. Faut-il s'étonner que les avocats ne soient que des charognards qui se nourrissent des excréments des voleurs et des menteurs ? Dieu merci tu as suivi le penchant de ton grand-père et étudié la philosophie et non le droit.
Commenter  J’apprécie          180
- Ma nièce Stella, énonça lentement Rosa, dit qu’en Amérique les chats ont neuf vies, mais nous – nous sommes moins que les chats, alors nous en avons trois. La vie avant, la vie pendant, la vie après.
Elle vit que Persky ne suivait pas. Elle dit :
- La vie après c’est maintenant. La vie avant c’est notre vraie vie, chez nous, où nous sommes nés.
- Et pendant ?
- ça c’était Hitler.
Commenter  J’apprécie          60
- Qu'est-ce que vous voulez ?
Il découvrit ses dents.
- Un rendez-vous.
- Vous êtes marié.
- Marié mais sans femme.
- Vous en avez une.
- C'est une façon de parler. Elle est folle.
Rosa dit :
- Je suis folle aussi.
- Qui le dit ?
- Ma nièce.
- Qu'est-ce qu'une inconnue peut en savoir ?
- Une nièce n'est pas une inconnue.
- Mon propre fils est un inconnu. Une nièce sans aucun doute. Venez, j'ai ma voiture tout près. Climatisée, on fera un tour.
- Vous n'êtes pas un gamin, je ne suis pas une gamine, dit Rosa.
- Ce n'est pas à moi que vous le prouverez, dit Persky.
- Je suis quelqu'un de sérieux, dit Rosa. Ce n'est pas mon genre de vie^de me promener pour aller nulle part.
- Qui a dit nulle part ? Je pensais aller quelque part.
Il réfléchit.
"Mon club du troisième âge. Très sympathique belote.
- M'intéresse pas, dit Rosa. J'en ai rien à faire des nouveaux gens.
- Alors, au cinéma. Vous n'aimez pas les nouveaux, on vous en trouvera des morts. Clark Gable, Jean Harlow.
- M'intéresse pas.
- Une promenade à la plage. Marcher au bord de l'eau, ça vous dit?
- Je l'ai déjà fait, dit Rosa.
- Quand ?
- Ce soir. A l'instant.
- Seule ?
Rosa dit :
- Je cherchais quelque chose que j'ai perdu.
- Pauvre Lublin, qu'est-ce que vous avez perdu ?
- Ma vie.
Commenter  J’apprécie          10
- Je vous accompagne.
- Non, non, il arrive qu'une personne ait besoin d'être seule.
- Quand on est trop seule, dit Persky, on pense trop.
- Quand on n'as pas de vie, répondit Rosa, on vit où on peut. Quand tout ce qu'on a c'est la pensée, c'est là qu'on vit.
Commenter  J’apprécie          70
Autrefois je pensais que le pire était le pire, après ça rien ne pouvait être le pire. Mais maintenant je vois que même après le pire il y a encore plus.
Commenter  J’apprécie          123

Videos de Cynthia Ozick (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Cynthia Ozick
Vendredi 18 septembre 2020 / 11 h 30
Écrivaine, traductrice de l'anglais. Elle a reçu en 2007 le prix Maurice-Edgar Coindreau et le prix Laure-Bataillon pour Les Papiers de Puttermesser de Cynthia Ozick. Un secret sans importance (prix du Livre Inter 1996), Dans la nuit brune (prix Renaudot des lycéens 2010. Elle est également l'autrice d'un essai consacré à Virginia Woolf avec Geneviève Brisac, V.W. le mélange des genres ? Ce coeur changeant (L'Olivier, 2015) Prix Littéraire du Monde. Son dernier roman La Chance de leur vie (L'Olivier, 2018) a connu un beau succès de librairie.
autres livres classés : camps de concentrationVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (122) Voir plus



Quiz Voir plus

Quelle guerre ?

Autant en emporte le vent, de Margaret Mitchell

la guerre hispano américaine
la guerre d'indépendance américaine
la guerre de sécession
la guerre des pâtissiers

12 questions
3204 lecteurs ont répondu
Thèmes : guerre , histoire militaire , histoireCréer un quiz sur ce livre

{* *}