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EAN : 9791037721440
116 pages
Le Lys Bleu Editions (25/01/2021)
5/5   2 notes
Résumé :
Scènes d’école, suivi de Photo de Classe, ce sont comme des petits tableaux poétiques d’enfants dans le quotidien d’une école maternelle, ici de banlieue parisienne. Les personnages sont les enfants, les ATSEM et la maîtresse et les parents.
Ces scénettes peuvent être oniriques, rêveuses, à hauteur d’enfants mais elles peuvent aussi toucher des mots les fragilités d’un système éducatif, les fragilités des enfants, un environnement parfois semé d’adversité. <... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
J'ai lu, à voix haute (c'est bien plus saisissant) et à quatre yeux (avec ma fille de 10 ans) ces « quelques instants d'enfance, dans une école maternelle ». La magie a opéré sur toutes les deux. Moi, j'ai adoré cette « petite fille qui voit des tacos » quand sa maîtresse dessine des triangles (p. 10) et ce « ils » qui « grattent la terre/ pour trouver des pierres/ autour du seul arbre/de la cour/les enfants des tours » (p. 15) quand ils n'utilisent pas « le crayon[qui] frotte/ crécelle d'Afrique » (p. 16) ou qu'ils ne redemandent pas des mouchoirs (« mouchoirs dans le mains/mouchoirs dans les poches/mouchoirs aux quatre coins/des boîtes de mouchoirs s'il vous plaît/d'été en hiver/toujours un nez/pour pleurer », p. 21), tandis que ma fille, a crié youpi face à ces « petits dragons/[qui]crachent le brouillard/d'hiver/étonnés de leur pouvoir/ Je tente une explication scientifique/sourds/ils préfèrent êtres magiques » (p. 19).

Il y a, page 27, un poème qui a été aussi le préféré de ma Linda et qui exprime si bien pourquoi les enfants aiment (ou pas) l'école : « je me demande pourquoi/ne pose pas la question/doux les moutons/qu'est-ce qu'on fait/on doit s'asseoir/on doit se taire/on doit écouter/on doit chanter/on doit lever le doigt/on doit jouer/on doit sourire/ on doit sortir/et puis quoi encore ».

On est en 2020 et à cause des « cas COVID camouflés/ cas contacts ignorés » (p.37) nous sommes tous masqués, « nous ne connaissons/plus que des yeux/des voix » (p.62), c'est terrible et indicible, mais il y a eu « un prof décapité dans les Yvelines » (p. 69) et « la télé déborde », « l'homme/est tué en toute impunité et regardé/cruauté décomplexée » (p.76) et les mères qui sont aussi maîtresses, « finalement elles n'ont pas tellement vu leur mari/finalement les maris n'ont pas tellement vu leurs/enfants » (p. 78).

Sur la photo de classe, « dans les yeux de ta maîtresse/ le plaisir de partager ton pas léger/et l'espoir que ton goût pour l'école/survivra aux montagnes et ses sentiers »(p. 81) et pas loin de l'ATSEM, « Ouayss et Issa/deux S jumeaux/séparent leurs lettres/se déclinent au tableau/ouvrent leurs mots/aux autres égaux/même si ces autres/n'ont jamais vu une baleine » (p. 93).

C'est le tableau complet « des enfances émerveillées », de cette « petite enfance en réflexion/[qui] vit dans la déraison/paradoxes et contradictions »(p. 55) et qui va, superbement en Grande-Section (p. 65).

C'est coloré, c'est beau et tendre, sensible et lumineux, même si « les rêves de bons sentiments/seront poivrés de la vie même/ celle qui dès le liquide amniotique/connaît les chaos de l'univers/les bouleversements identitaires/et oscille entre dynamite et âme résistante » (p. 109)
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Choses vues, choses vécues, le titre est explicite : nous voici plongés dans le quotidien d'une école maternelle en banlieue parisienne, grande section. Entrées, sorties, cour, classe, dortoir, cantine, enfants, parents, grands-parents, frères, soeurs, personnel enseignant, professeurs ou ATSEM (agent territorialisé d'école maternelle), c'est d'un univers complet dont il est question dans ces pages.

Chaque scène croque un moment, une situation, un fait, petits en soi mais grands par ce qu'ils donnent à voir de l'arrière-plan social et humain. C'est que l'école, ce lieu protégé, est un organisme relié à son quartier, à la ville, à la société, au monde tel qu'il est. Tout y entre de plain-pied ou par effraction, le travail, la pauvreté, le manque de repères, les familles séparées, le défaut de soin, l'habitat vétuste, la drogue, la violence, le terrorisme, sans oublier la pandémie… mais aussi les sourires, le plaisir d'apprendre, d'être ensemble, les petites attentions, gâteaux, objets faits main, cartes de remerciement, mots d'enfants, émotions, bons sentiments qui tiennent chaud au corps et à l'âme. Tout cohabite dans ce monde en réduction qu'est l'école, le laid, le beau, le lourd, le léger, les bobos, les petits bonheurs, les grandes douceurs, l'ennui, la joie, les pleurs, la solitude, les bagarres, l'entraide, les jolis gestes. En somme, une « vie à hauteur d'enfant », aussi diverse et mouvementée qu'un tambour de machine à laver.
« /…/
Ouverture de l'école
tous les coeurs sont déjà bien pleins
remplis de soucis bien plus tenaces
que le contenu de leur tube de colle
bien assis devant leur table
ils devront pour quelques heures
laisser au fond de leur gros cartable
les souvenirs du soir et du matin
pour certains c'est possible
pour d'autres moins. »

Malgré tout ce qu'ils charrient en eux du monde extérieur, les « enfants des tours » restent des enfants avec leurs jeux de rien, leurs babioles enfouies dans les poches, leurs désirs confus, leurs attentes, leurs remarques inattendues, « petits dragons magiques » qui s'étonnent de leur haleine dans le froid matinal, d'un « mouchoir en papier / blanc / givré » oublié sur le bitume. On suit leur apprentissage, chanter, danser, compter, modeler, semer, dessiner… tous uniques dans leur histoire, leur parcours, leur nom d'ici et d'ailleurs, unis dans un même lieu, une même activité, une même langue.
Couper les fruits
dire leurs noms
rêver en douce
d'un doux potager
pour y planter
toutes les graines
d'un alphabet de vie.

À ces scènes collectives et individuelles croquées sur le vif, s'ajoute une série de courts portraits très attachants : Imad, « fleur de lexique », Valida, fillette escargot « qui dort dans sa coquille », Yassine, « poisson rouge dans son bocal », Matala, « baoboab à palabres », Dounia, princesse des mille-et-une nuits au nez qui coule, Manelle à la « faim chagrine »… On les voit, on les sent, toutes et tous, habités de leur histoire et de leur devenir.
La maîtresse dans tout cela ? (Eh oui, 95 % de femmes dans le métier, jongleuses à plusieurs vies.) Elle est un repère, une présence qui rassure, qui aide aussi jusqu'à outrepasser parfois les limites de sa charge : « y'a des actes / on est obligé de les faire en cachette ». Comment ne pas vêtir un enfant démuni, comment ne pas lui donner les crayons de couleur dont il rêve ? Pourtant la vie la malmène elle aussi, parfois elle n'a plus envie de se lever, d'obéir mais elle y retourne, elle sait qu'on compte sur elle. Comme ses collègues, elle fait ce qu'elle peut sur le grand navire qui tangue, qu'elle essaie de maintenir à flots coûte que coûte. Tous sur le même bateau, dit-on. Heureusement la poésie sauve, qui, entre deux creux, donne à vivre les beautés essentielles :
Tout est grand
quand on est petit
même une coccinelle
qui se promène
le long de la fenêtre.

On l'aura compris, le regard est à la fois lucide et tendre, bienveillant dans son essence, même si « dans le ventre / la nausée du gâchis », tout finit par passer « jusqu'à la prochaine fuite ». Par chance, au-dessus des tours et de la cour de récré, « ça a des pieds les nuages ». Oui et même ils « prennent leur temps ». Confiance chevillée au corps. Simplicité, tendresse. Sens de ce qui compte. Mesure humaine.
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Un régal de lecture que ces “scènes d'école” d'Aline RECOURA.
On est saisi par la justesse et la générosité de l'observation,
régalé par l'humour, bouleversé par l'empathie qui se dégage de ces portraits, individuels ou de groupes.
La langue, fluide, rythmée y trouve son compte.
L'intelligence de l'autre, percute, enveloppe, embrasse tout en laissant partir.
Bref un petit chef d'oeuvre qui nous ferait reprendre le chemin de l'école, jambes sautant, coeur chantant.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Pas ce matin
ni demain matin
manteau trop petit
plus de fermeture
les deux côtés fâchés
ne se rapprochent plus
mal à la tête
mal au ventre
fatiguée
il pleut
il fait froid
elle a caché les clefs dans l’appartement
pour que personne ne les trouve
pour ne pas aller à l’école
pas ce matin
ni demain matin
je ne veux pas qu’elle reste devant la télé
vous avez tout à fait raison
dans sa maison
pas de jouets
un écran
un canapé
une cuisine garnie
plein de grands
frères et sœurs
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Jeux de terre
jusqu’au ciel
mains de boue
grattent encore
les ongles noirs
autour des arbres
batailles de bouquets
de feuilles mouillées
visages pleins de gouttes
et de grains de beauté
jusqu’au ciel
jeux de terre
s’amuser en récrée
les habits trempés
les habits noircis
fol amour
des flaques d’eau
de la boue
des feuilles d’automne
l’habit fait à saison
les jeux de cour oublient
les recommandations de maman

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Gorge à l'approche du feu
le froid grimpe dans le dos
enserre les épaules
Le corps tourne
va et vient sur le bitume
colorié par la pluie
toutes les heures sont à l'aube
Une enfant confie
hier dans ma maison les keufs sont venus avec le gros chien
qu'est-ce qu'ils sont venus chercher
des croquettes
Mains dans les poches
elle saute à cloche-pied
enfourche une trottinette
et s'élance
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