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Yvonne Davet (Traducteur)
EAN : 9782070770854
252 pages
Gallimard (02/09/2004)
3.84/5   129 notes
Résumé :
La créole Antoinette Cosway raconte son enfance au domaine Coulibri, à la Jamaïque. Entre l'indifférence de sa mère et les révoltes des esclaves, son destin bascule : elle est envoyée dans un couvent qu'elle quittera à l'âge de dix-sept ans pour se voir épouser un Anglais, distant, égoïste et arrogant. Poussée par la haine qu'il lui porte, elle sombrera dans l'alcoolisme et la folie meurtrière. Il fallut neuf ans à Jean Rhys pour écrire La prisonnière des Sargasses ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (26) Voir plus Ajouter une critique
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La prisonnière des Sargasses est un roman de Jean Rhys publié en 1966 à 76 ans. Récompensé par la Royal Society Littérature Award ce roman mit en lumière une auteure restée dans l'ombre. Jean Rhys s'est surement inspirée de sa vie pour créer le personnage d'Antoinette. Comme elle elle est la fille d'un anglais marié à une créole blanche. Bercée dans la culture de la communauté noire de la Jamaïque, Antoinette suite à la maladie de sa mère est mise en pension chez des religieuses. Elle ne sort du pensionnat que pour être "vendue" à un gentleman anglais. Elle en tombe amoureuse mais lui , satisfait d'avoir fait une bonne opération financière en l'épousant , va vite la prendre en grippe. Les rumeurs courent ici et là , folie , comme sa mère, prête à s'abandonner dans les bras du premier venu.La cohabitation devient vite insupportable , l'alcool coule à flots, la tension dans le couple vire à l'affrontement et ils quittent la Jamaïque direction l'Angleterre.
Ce roman est féroce, l'atmosphère étouffante je dirais même suffocante. Malgré ou à cause de la magnificence des paysages, de la beauté des îles l'exacerbation des uns vis ) vis des autres arrive bien vite à un paroxysme délétère. Les représentants blancs du colonialisme anglais méprisent ces créoles blancs . Quelle différence peut il y avoir à leurs yeux entre les nègres blancs et les nègres noirs....Jean Rhys raconte ...
Et bien sur ce roman a une autre facette. J'avoue humblement que si je n'étais pas allée fureter ici ou là je serai passée à côté . Et si Antoinette était la femme cachée de Rochester? et si La prisonnière des Sargasses était le prologue de Jane Eyre de Charlotte Bronte? Ce roman est présent dans la "sélection des 1001 livres à avoir lus avant de mourir" j'avoue ma perplexité de non-britannique.
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Quelle claque! Quelle beauté! Quel malaise aussi doublé d'une violente sensation d'étouffement...
J'ai adoré "La Prisonnière des Sargasses".
J'ai tout aimé dans ce roman étrange et singulier, aux parfums moites et capiteux. Dans ce roman triste et sombre, à la lisière du désespoir et de la folie qui emprunte autant à la tradition des romans gothiques et victoriens qu'aux tourments de son autrice dont j'ai lu ça et là qu'elle avait mis dans sa prisonnière beaucoup d'elle-même et de sa vie, de son enfance antillaise à ses souffrances et ses déboires.

L'héroïne tragique de cette histoire est une "créole blanche", Antoinette Cosway, qui grandit à la Jamaïque dans les années 1830, peu de temps après l'abolition de l'esclavage, dans un climat aussi fiévreux que survolté. Son père, marchand d'esclaves ruiné, n'est plus, et la petite fille est élevée en compagnie de son petit frère dans le luxuriant domaine familial par sa mère, seule, indifférente et désoeuvrée. Après l'abolition, seuls quelques domestiques sont restés dans cette famille solitaire,décimée et détestée. Antoinette grandit en fleur sauvage entre un frère handicapé et une mère absente, angoissée et malheureuse. Une mère dont on sent qu'elle danse sans cesse au bord du précipice. Dehors, il y a la haine et la colère. le sang et le feu. le désir de vengeance des anciens esclaves.
Le mariage de sa mère avec le riche Mr.Mason apporte cependant un regain de sérénité chez les Cosway jusqu'à l'incendie volontaire et meurtrier de leur demeure. C'est là que la mère d'Antoinette perd pied. C'est là que son frère disparaît et pour la petite fille, tout devient encore plus noir, encore plus sombre, qu'elle s'enfonce dans une mélancolie tenace et tragique. Son beau-père l'envoie au couvent dont elle ne ressortira qu'à l'âge de dix-sept ans pour être mariée par son beau frère, Richard Mason, au fils cadet et désargenté d'une noble famille anglaise, un certain Mr. Rochester... Celui-là même qui, des années plus tard, tombera amoureux d'une certaine Jane Eyre...
Car en effet, ce roman aussi sombre que mélancolique et publié en 1966 se propose d'imaginer et de raconter la vie de Bertha, personnage secondaire mais non moins marquant du roman de Charlotte Brontë, première épouse de Rochester. C'est un choix curieux, singulier mais également très ingénieux, passionnant et qui donne lieu à un ouvrage extrêmement prenant, d'une puissance assez folle. Un roman qui m'a complètement happée, hypnotisée, renversée.

"La Prisonnière des Sargasses", c'est d'abord un roman d'atmosphère et cette dernière est oppressante, un peu comme si le parfum capiteux des fleurs qui peuplent l'île nous prenait à la gorge, qu'il se muait en poison... Les personnages, tragiques et englués dans un mariage de convention, se confrontent dans une lune de miel devenue un huis-clos angoissant qui vire au cauchemar, à la haine. L'écriture, volontairement heurtée et presque hallucinatoire, alterne les points de vue, donnant ainsi à voir au lecteur l'incompréhension mutuelle des deux époux, leurs souffrances respectives, leurs colères, leurs frustrations jusqu'à ce que la tension décrite et accumulé atteigne son paroxysme, de déploie et éclate...
D'un côté, l'épouse en proie à de violentes crises de mélancolie, pleine des langueurs du climat, affamée d'amour et d'attentions qui ne se sait choisi que pour un argent qu'on lui prend.
De l'autre un époux frustré, effrayé, à la vanité blessée. Un époux qui se persuade d'avoir été dupé, qui croit en la rumeur comme d'autre croient en dieu.
Un époux de plus en plus cruel poussant chaque jour un peu plus sa femme au bord du précipice, vers la folie.
Et puis, le soleil et son implacable chaleur et le bruit entêtant des vagues.
Et puis les serviteurs plus ou moins bien intentionnés (moins plus souvent que bien).
Et puis l'obi, ses croyances, ses rituels.
Et puis la rumeur, les mensonges, la manipulation...
Tout cela concourt à la création d'un cadre inquiétant, violent...
On ne peut que se prendre de pitié et d'affection pour Antoinette. On ne peut que détester Rochester... On en peut que s'attacher à Christophine, qui m'a parfois rappelée Tituba.
On ne peut qu'adhérer à cette écriture magnifique bien que tourmentée. A cette écriture poétique malgré sa crudité, sa cruauté. Cette écriture blessée mais opulente et soyeuse, lourde se couleurs, de parfums, de texture.

Et en creux de ce récit, un tableau saisissant du monde post-colonial jamaïquain. Et une autre, plus saisissant encore, de la folie et de la place des femmes aliénées aux hommes, de ces femmes qu'on coupait de leurs racines, qu'on n'écoutait pas et qu'on traitait si mal. de ces femmes qui sombraient parce que le sort qui leu était fait était bien trop cruel. J'ai d'ailleurs trouvé un peu de l'"Adèle H."de Confiant et de Truffaut dans Antoinette, que dans un dernier élan de férocité son mari rebaptisera Bertha, jusqu'à la fin que l'on sait.



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Hasard de pêche dans ma vertigineuse PAL qui m'a fait lire La prisonnière des Sargasses de Jean Rhys juste avant L'île sous la mer d'Isabel Allende.

Les deux romans se passent aux Antilles, au moment de la libération des esclaves. Pour Allende, c'est Saint-Domingue qui après une révolution violente deviendra Haïti; alors que Rhys situe son roman dans la Jamaïque des années 1830.

Le point de vue est également différent. Jean Rhys nous emmène auprès d'une famille créole ruinée, mais qui essaie de sauver les apparences et de ne pas se mélanger, aussi bien aux Anglais que des anciens esclaves noirs qui observent leur déchéance avec hostilité, si ce n'est haine. le vieux propriétaire de la plantation tant détesté étant mort, laissant une jeune et jolie veuve d'origine martiniquaise, un fils débile et Antoinette, une petite fille laissée à elle-même.

La mère se remarie avec un riche Anglais, mais l'incendie de la maison familiale entraine la mort du frère et la folie de la mère. Antoinette est placée chez les Ursulines et ne sort que pour se marier avec un Anglais récemment débarqué, attiré par sa dot.

Pendant leur voyage de noce à la Dominique, Antoinette commence à présenter également des signes de folie. Son mari l'emmène en Angleterre où elle sombre rapidement loin de tout ce qui faisait son univers.

Ecrit en 1966, ce roman raconte l'histoire de l'épouse de Rochester dans le roman Jane Eyre de Charlotte Brontë. Jean Rhys elle-même originaire de la Dominique, décrit merveilleusement bien les rapports entre les créoles d'origine anglaise. L'Océan Atlantique sépare deux mondes très différents, même si la misère ouvrière de l'Angleterre industrielle et minière ne devait pas être très différente de celle des esclaves affranchis de la Jamaïque.
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Ce roman est véritablement surprenant. Je ne m'attendais pas à être tellement emportée par ce récit et à le lire quasiment d'une traite. J'ai eu un peu de mal avec les premières pages mais très vite, je me suis retrouvée aux côtés d'Antoinette pour suivre sa triste vie. C'est une vraie tragédie et on comprend dès les premières pages que ceci ne peut pas bien finir. D'autant plus quand on sait que ce livre veut offrir au lecteur un autre point de vue sur la première femme de Rochester dans Jane Eyre, dont on sait qu'elle vit enfermée car devenue folle.

Le lecteur suit donc la vie tragique d'Antoinette, créole blanche descendante de propriétaires d'esclaves qui grandit à la Jamaïque. C'est une jeune personne qui n'a pas été préparée à la dureté du monde et qui n'a jamais su trouver sa place dans la société. Rejetée et méprisée de partout, elle n'est ni vraiment de la Jamaïque, ni vraiment Anglaise. Grandissant dans l'insécurité et un état de quasi abandon, elle n'a pas pu surmonter les traumatismes de l'enfance : un père alcoolique décédé rapidement, une mère devenue folle suite à l'incendie de leur domaine lors de la révolte des esclaves et qui a entraîné la mort de son petit frère.

Devenue un poids dont on cherche à se débarrasser, elle est mariée à dix-sept ans avec un Anglais venu spécialement aux Antilles pour ce mariage. Antoinette croit trouver un temps le bonheur dans cette union mais celle-ci va très vite tourner au cauchemar et précipiter sa descente en enfer. Car cet homme se révèle froid, vaniteux, égoïste et il a juste réalisé une affaire financière avec ce mariage dont la dot était généreuse. Mais on lui a caché le passé et les scandales de la famille d'Antoinette et il ne supporte pas de faire pitié à des gens qu'il méprise, lui qui considère les Noirs comme les Blancs des Antilles comme inférieurs. Se sentant trahi et bloqué dans cette union, il retourne sa colère contre sa femme.

C'est cette haine qui est au coeur du roman. L'auteure maîtrise parfaitement la narration à deux voix qui alterne celle d'Antoinette et celle de son mari et qui permet de comprendre comment leur haine mutuelle grandit à chaque jour. C'est une incroyable montée en puissance de ce sentiment qui se voit nourri par les commérages, les rumeurs, les vieilles rancoeurs, et est encore renforcé par le poids des convenances et des apparences à sauvegarder. Un gouffre s'installe entre eux et c'est à qui haïra le mieux mais pour Antoinette, plus fragile et torturée, ce sera le point de non-retour. Tout ça est vécu dans une ambiance pesante où la nature omniprésente et luxuriante peut aussi se faire étouffante. Cela donne l'impression d'un monde en vase clos où des gens qui se détestent continuent de vivre côte à côte et se vengent par la société en utilisant les ragots. Sans oublier la sorcellerie, les superstitions et les peurs qui y sont liées qui ajoutent au sentiment de suffocation. L'auteure connait les Antilles de cette époque pour y avoir aussi vécu et est influencée par la langue et la culture de ces îles dont elle sait montrer la beauté et la tragédie. Elle a créé avec une grande justesse des personnages complexes et ambigus. Son écriture est à la fois puissante et subtile. Au final, c'est un roman envoutant, violent, cruel à la construction splendide qu'elle nous offre sur la destinée de cette femme qui n'aura jamais eu les commandes de sa vie.
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Impressionnant faux roman victorien, invention d'un prélude à "Jane Eyre" aux Antilles.

Publié en 1966, le livre le plus connu de l' Anglo-Dominicaine Jean Rhys étonne. Conçu ouvertement comme un prélude au "Jane Eyre" de Charlotte Brontë, il retrace le destin d'Antoinette / Bertha, l'épouse réputée malade / folle de Rochester, avant sa rencontre avec Jane Eyre.

Antoinette raconte son enfance à la Jamaïque à partir de 1833 et de la libération des esclaves qui y prend place. Sa mère, veuve ruinée d'un gros planteur esclavagiste, glisse lentement dans la folie lorsqu'elle réalise que, faute de fortune et de situation, la bonne société bourgeoise blanche post-esclavagiste la rejette, tandis que le profond et brutal ressentiment des ex-esclaves rôde comme une sourde menace autour de la famille... Après l'incendie criminel de leur manoir déliquescent dans une flambée de violence, et la mort du jeune frère simple d'esprit, la mère d'Antoinette parvient de justesse à les hisser hors de l'abîme social et financier en se remariant à un riche Anglais sans préjugés.

A la mort de celui-ci, sa mère devenue authentiquement folle, Antoinette entre dans un mariage arrangé par son beau-frère, et épouse le jeune Rochester (le futur protagoniste de "Jane Eyre", donc), en échange d'une confortable dot qui remet celui-ci "à flot" financièrement. Les jeunes époux quittent la Jamaïque chargée de souvenirs risqués pour s'installer à la Dominique, dans une vieille propriété de famille juste remise en état. Alors que le mariage aurait - peut-être - pu évoluer favorablement, une succession d'insidieux coups du sort et de remontées du passé, malgré les efforts protecteurs de la vieille gouvernante martiniquaise d'Antoinette, quimboiseuse à ses heures, va le diriger vers l'échec, la folie et le semi-internement en Angleterre que l'on connaît à travers le roman de Charlotte Brontë.

Roman captivant, dans son ambiguïté de faux récit victorien et de vraie narration hallucinée, à plusieurs voix subtilement agencées, sur le poids du passé, l'impossibilité de l'intégration sociale, le pouvoir des préjugés, dans cette Angleterre coloniale du XIXème siècle qui se découvre, très péniblement, comme multi-raciale, et qui ne sait trop que penser de son comportement des siècles précédents...
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Je la regardais d'un œil scrutateur. Elle portait un tricorne qui lui allait bien. En tout cas, il faisait de l'ombre sur ses yeux qui sont trop grands et parfois déconcertants. Je crois bien qu'elle ne bat jamais des paupières. Des yeux en amande, tristes, sombres, étrangers.
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- Alors je ferai venir la police, je vous avertis. Un tant soit peu de loi et d'ordre doit exister, même dans cette île abandonnée de Dieu!
- Pas de police ici, dit-elle. Pas de cadène, pas de moulin de discipline, pas de sombre cachot non plus. C'est un pays libre et je suis une femme libre.
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La maison brûlait, le ciel jaune-rouge était comme un coucher de soleil et je compris que je ne reverrais jamais Coulibri. Il ne resterait rien de tout cela : les fougères dorées et les fougères argentées, les orchidées, les lys roux et les roses, les fauteuils à bascule et le sofa bleu, le jasmin et le chèvrefeuille, et le tableau de la Fille du Meunier.
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Puis j'écoutais la pluie, chanson somnolente qui semblait ne devoir jamais finir... La pluie, la pluie à jamais. Noie-moi dans le sommeil. Et vite.

Le lendemain matin, il ne restait que très peu de signes de ces averses. Si certaines fleurs étaient meurtries, les autres avaient un odeur plus suave, l'air était plus bleu et d'une scintillante pureté.
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Elle était assise dans un fauteuil à bascule, la t^te penchée. Ses cheveux lui pendaient par-dessus les épaules en deux longues nattes. D'une petite distance, je lui parlai avec douceur.
- Qu'est-ce qu'il y a, Antoinette ? Qu'ai-je fait ?
Elle ne dit mot.
- Vous ne voulez pas m'épouser ?
- Non. Elle parlait à voix très basse.
- Mais pourquoi ?
- J'ai peur de ce qui peut arriver.
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Book Review | Wide Sargasso Sea by Jean Rhys.
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