"'il ne faut rien vouloir de ce que l'on veut quand on écrit. Il ne faut rien chercher de ce que l'on cherche quand on relit"
Frappée par cette phrase.
Lâcher son vouloir, ses attentes, se laisser surprendre, saisir par l'inattendu, pour laisser grandir en soi une audace que l'on n'aurait jamais eue sans cet abandon (mais on ne le sait qu'après, quand les autres nous vérifient)
C'est une dimension mystique qui se révèle là.
Puissante.
Comme si le sang gitan des ancêtres de l'auteur flamboyait dans ses veines, lui permettant, à la lumière du suicide de Guillaume, de contempler l'au-delà de la mort.
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Tu ne sais plus quoi faire de ta tristesse, de ton angoisse, et de ta douleur, tu ne sais plus quoi produire avec, tu n'en vois même plus l'intérêt.
A quoi bon ?
A quoi bon, oui.
C'est compliqué, je sais.
Ce qui va mener certains à l'amour ou au sublime dans la création, va emmener d'autres à la mort.
"J’adore quand les montagnes sont comme ça. – Comment ? Plus grandes, plus proches. Regarde, la plupart du temps elles sont toutes petites, au lointain, parfois comme ce matin on pourrait les toucher. On dit que c’est signe de mauvais temps, il va faire moche demain. Non, répondit Guillaume, il a fait moche hier, c’est ça que ça veut dire. – Comment ça ? – La pluie a nettoyé l’atmosphère des poussières et autres saloperies, c’est pour ça qu’on voit mieux et que ça donne cette impression de rapprochement. – Donc le rapprochement n’est qu’une illusion ? – Non, c’est l’éloignement qui en était une, là on voit les montagnes telles qu’elles sont, brillantes et proches. Pourquoi l’amour de Guillaume m’a semblé si différent des autres ? Que s’est-il passé ? Quelle est l’histoire ? Une histoire de Guillaume et de moi ? Ou une histoire sans Guillaume sans moi ? Quand le metteur en scène avait un problème avec une scène, qu’il ne savait pas la monter, il se concentrait sur l’idée d’un point d’entrée et d’un point de sortie. Tu trouves un point d’entrée, puis un point de sortie, c’est-à-dire que tu choisis, tu inventes, entre les deux c’est le texte, le corps, tu restes au plus près des visages et des corps. Tu écoutes les mots, leur silence, tu cherches le sens, tu le fuis quand il faut, tu travailles, tu construis. De toute façon tu travailles, tu ne t’arrêtes jamais. Tu travailles à ne pas t’arrêter de travailler. On a souvent dit que le metteur en scène était une sorte de spécialiste du chaos magnifique mais il savait simplifier pour mieux avancer, il savait « tracer », dédramatiser. Ce conseil concernant la création et le travail, je l’ai toujours entendu comme un conseil pouvant concerner la vie, vivre, le fait de vivre. Point d’entrée, donc, point de sortie. C’est là. Comme un jour ce garçon fut là, d’un coup complètement là. Entre le point d’entrée et le point de sortie : la vie, se promener, tâcher de rester libre."
p. 85-86. La première fois, quelque chose a eu lieu qui aurait pu être encore plus beau avec du temps. C e temps qui a manqué, manque. Son corps que j'ai perdu sans l'avoir jamais trouvé. La peau. Il avait la peau douce. C'est quelque chose la douceur d'une peau de garçon dur. Je ne dis pas qu'il était dur dans la vie, sa vie, mais je crois qu'il pouvait l'être avec lui-même / j'en ai eu la preuve. La première fois, pendant le plan, il l'était, dur, cadenassé. Retranché dans ses veines. Sous la peau.
le suicide est aussi le meurtre de l’autre par l’intermédiaire de son propre corps. Il y a une dimension de violence dans le suicide.
Car il y eut un premier silence. Avant le premier son émis dans l’univers, il y eut un premier silence.
« LE VERTIGE MARILYN » PAR ISABELLE ADJANI
Conception : Olivier Steiner – Installation, scénographie, musique : Emmanuel Lagarrigue
Une femme, Isabelle Adjani, blonde, au centre du plateau. Robe Dior à traîne noire, dos dénudé. Cette même robe portée par Marilyn Monroe lors de ce qu'on a appelé « la dernière séance » photo de Bert Stern. Au-dessus de cette femme en robe noire s'élève une haute structure sur laquelle sont installés vingt-quatre projecteurs, vingt-quatre heures dans la vie d'une femme, un jour et une nuit. La structure s'élève comme une tour de Babel, oeil du cyclone d'un monologue encore à venir : monologue intérieur et extérieur, la voix de Marilyn, d'Isabelle, laquelle ? Les deux. Olivier Steiner est allé puiser dans la dernière interview de Marilyn – donnée deux jours avant sa mort – et dans divers entretiens écrits d'Isabelle Adjani une matière à réflexion, des correspondances, un dialogue aussi inattendu qu'improbable, la possibilité d'une sororité, un ravissement.
À lire – Anne Gorouben & Olivier Steiner, le ravissement de Marilyn Monroe, éditions Metropolis, 2021.
Pour l'occasion la Maison Christian Dior a refait sur mesure pour Isabelle Adjani la robe iconique de Marilyn Monroe.
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