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sur 2476 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
La littérature classique est morte. Vive la littérature classique !

Certes vous ne la retrouverez pas au sommet des ventes littéraires à frotter ses pages contre celles des derniers auteurs à succès. Non. Elle sait se faire discrète. Il vous faudra enjamber un labyrinthe de livres aux couleurs criardes et vous retrouver au fond de la librairie, le yeux rivés sur l'étagère, où s'aligne une rangée de textes plus connus les uns que les autres. Cela fait belle lurette que leurs auteurs ont mis la clé sous la porte et repose entre six planches (dans le meilleur des cas) mais leurs classiques continuent de balayer les modes et les époques afin de se retrouver dans notre mémoire collective. Il suffit de demander au premier clampin venu ce que lui évoque “les fleurs du mal”, et il y a de grandes chances qu'il vous réponde, Ô Miracle, qu'il s'agisse d'un livre. Mieux, il se pourrait qu'il vous dise, Ô Exploit, que cela parle de poésie. Et si vous avez affaire à un génie, alors il vous crachera le nom de l'auteur en plein visage. Telle est la force évocatrice des classiques. Ils laissent une trace, aussi infime soit-elle, dans l'esprit de personnes qui n'ouvrent jamais un livre.

La Guerre et la Paix est un de ces monuments de la littérature qui n'échappe pas à sa réputation. Rien que la taille du roman, plus de mille cinq cents pages, a le pouvoir d'effrayer plus d'un lecteur qui poserait le regard sur cette brique. Veuillez prévoir un treuil pour tourner les pages (ou une carte mémoire supplémentaire pour votre liseuse). le titre fait aussi partie de la notoriété du livre, La Guerre et la paix. Est-ce une réponse à une question bête dans un concours de Miss? Quel manichéisme en tout cas ! L'auteur a la barbe blanche aurait pu trouver un titre plus vendeur.

Trêve d'ironie. Si il y a un peu de vrai dans ce qui précède, l'intérêt principal du roman de Tolstoï se trouve en dehors de ces préjugés éculés et je vous propose une courte immersion dans ce classique de la littérature russe. Analyse.

La Guerre et la Paix est, en premier lieu, une esquisse de roman publié entre 1865 et 1866 sous forme d'un feuilleton dans le périodique “Le Messager russe” (Русский вестник). le nom même du roman n'était pas encore celui que l'on connaît puisque le titre de cet ensemble de textes était sobrement intitulé L'année 1805. A cette époque, il était de bon ton de publier les oeuvres littéraires dans des revues spécialisées avant de les éditer individuellement. Et c'est ce que Tolstoï fit. Par le suite, il n'aura de cesse de réviser son roman, toujours bien aidé par une Sophie Tolstoï qui jouait le rôle de secrétaire copiste … voire peut-être plus. Au total, l'auteur russe aura publié six versions de la Guerre et la Paix. Et il est sans doute un des livres les plus connus dans le monde.

L'histoire est celle d'une poignée d'aristocrates russes du XIXème siècle qui partagent leur vie entre Saint-Pétersbourg et Moscou. Certains administrent leur domaine, d'autres sont des plus oisifs tandis que quelques-uns se préparent à la guerre. Car c'est bien l'affrontement entre l'Empire russe et son ami-ennemi français qui viendra dynamiter l'existence bien rangée de tout ce petit monde.

“ le salon d'Anna Pavlovna commençait à se remplir quelque peu. La haute noblesse de Pétersbourg était venue, des gens très disparates par leur âge et leur caractère, mais semblable par la société dans laquelle ils vivaient tous : le comte Z. était là, un diplomate couvert de médailles et de décorations de toutes les cours étrangères, ainsi que la princesse L., beauté fanée, épouse d'un ambassadeur […] ainsi que la fille du prince Vassili, la belle Hélène, qui était passée chercher son père afin de se rendre en sa compagnie au raout du ministre d'Angleterre. Elle était vêtue de sa robe de bal ornée du chiffre de Sa Majesté l'impératrice. Était arrivée également la jeune et petit princesse Bolkonskaïa, qui avait la réputation d'être la femme la plus séduisante de Pétersbourg : elle s'était mariée l'hiver dernier et ne sortait plus dans le grande monde désormais à cause de sa grossesse, mais elle se rendait encore aux petites soirées. ” (2)

Le roman de Tolstoï est une épopée qui fait la part belle à quatre familles principales: les Bolkonski, Rostov, Kouraguine et Bezoukhov. Tel un maître d'orchestre, l'auteur russe met en relation ces personnages qui n'échapperont ni aux succès ni aux déboires de la vie. Malgré leur condition aisée, ils se feront toujours rattraper par la logique tragique et implacable de la vie. Comme le veut le dicton populaire … toutes les bonnes choses ont une fin.

Et puis, sans crier gare, nous voilà immergée au coeur dans la bataille d'Austerlitz. Les boulets de canons sifflent au dessus des têtes et ont remplacé les circonvolutions de ces familles aristocrates russes. Fini les robes de bal et les petits problèmes du quotidien. Certains membres de ces familles se retrouvent au front, les pieds dans la neige boueuse. Léon Tolstoï nous fait vivre crescendo les différentes batailles qui mèneront Napoléon Bonaparte à Moscou avant sa fameuse retraite. Les descriptions vacillent entre pure fiction et véracité historique pour le plus grand plaisir de nos yeux de lecteurs puisque l'on se retrouve au milieu des champs de bataille qui ont marqué l'Europe, et plus particulièrement la France.

“ Des cosaques, s'amusant comme de joyeux drilles, voulurent se moquer des ordonnances qui dormaient dans les chariots, et crièrent: “Les Français!”, puis ils galopèrent plus loin. le cri “Les Français”, telle une boule de neige de plus en plus grosse, parcourut la colonne : tout le monde se précipita en s'écrasant et en se dépassant, et on entendit même des déflagrations et le feu roulant de l'infanterie, qui ne savait elle-même contre qui elle tirait. Ce n'est guère qu'au bout d'un quart d'heure que les officiers qui commandaient le mouvement des troupes purent faire cesser cette pagaille qui coûta la vie à plusieurs hommes qui furent écrasés et à un soldat qui fut atteint par une balle. (3) “

L'originalité de cette partie du roman est d'être baigné dans le camp des russes lors des guerres napoléoniennes. On se surprend à voir comment Napoléon était vu autant comme un ennemi de la nation russe mais aussi comme un génie de la stratégie reconnu de tous. le succès de la Guerre et la Paix réside notamment aussi dans le fait que Tolstoï a intégré des personnages historiques comme Bonaparte, le tsar Alexandre ou le général Koutouzov, en les mélangeant à ses personnages fictifs … sans pour autant réécrire L Histoire.


Épistolaire, romanesque, philosophique, historique, guerrier, … Il est difficile d'énumérer la multitude d'adjectifs que l'on pourrait attribuer au livre de Tolstoï tellement le chantier est vaste. L'auteur russe fut le premier à écrire ce que l'on nomme maintenant un roman total. Son style et sa manière de nous conter une histoire, en faisant intervenir plusieurs éléments totalement différents les uns des autres, ont modifié la manière d'écrire de toute une génération d'auteurs qui lui ont succédé. A ce titre, si l'on place La Guerre et la paix sur la ligne du temps mondiale, il apparaît clairement qu'il est impossible de le rattacher à un style littéraire particulier. Est-ce du romantisme, du réalisme, du symbolisme?

Non, c'est du Tolstoï !

Enfin, il y a aussi le titre du livre tellement simple et manichéen qu'il en finirait par en être déroutant. Et si la guerre et la paix n'était que l'avers et le revers d'une même médaille tel un être humain qui se situe entre la vie et la mort, capable d'éprouver tantôt de l'amour tantôt de la haine, composé d'une part de féminin et de masculin. Qu'il soit tel un équilibriste, toujours sur le fil, cherchant à garder son équilibre afin de ne pas chuter. 😉
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Les grands classiques impressionnent toujours, et celui-ci est longtemps resté dans ma liste « pense-bête », puis dans ma pile à lire. Et il aurait pu y rester encore longtemps si je m'étais aperçu avant la fin du livre que ce que j'avais en main était seulement le tome 1, et pas la version intégrale !

Les évènements se déroulent pendant les guerres napoléoniennes : Tolstoï passe à la loupe quelques personnages représentatifs de la société russe de l'époque.

Les Bolkonsky tout d'abord : le prince André, le héros le plus complexe du roman, ambitieux et tenté par la gloire des armes, mais qui cherche désespérément une paix intérieure qui lui glisse toujours entre les doigts ; sa soeur, la princesse Marie, réputée dans le monde pour sa laideur, a décidé de sacrifier tout son bonheur pour s'occuper de son père, qui, loin de lui en être reconnaissant, la tyrannise toujours plus.

La famille Rostov ensuite, dans laquelle se nouent toutes les intrigues amoureuses du roman. Nicolas est un fervent admirateur de l'empereur et s'engage enthousiaste, et un peu désinvolte, dans l'armée. Il sera déchiré entre Sonia, son amour de jeunesse, et un mariage d'intérêt qui permettra à sa famille de rembourser ses dettes.

Pierre Bézoukhof est le dernier personnage principal du roman. Noceur invétéré, et fils illégitime d'un comte richissime, il prend possession du titre et de la fortune de son père grâce à des manoeuvres souterraines de gens qui espèrent obtenir ses faveurs. On lui force la main pour qu'il se marie avec Hélène, femme mondaine mais un peu sotte. Leur union prendra rapidement l'eau. Pierre tente de devenir meilleur et pendant la guerre, sera persuadé d'avoir un rôle crucial à jouer dans l'histoire de son pays.

Tous ces personnages, et beaucoup d'autres plus secondaires, vont s'influencer, évoluer, prendre des directions différentes au cours des évènements. Mais malgré, on a l'impression que Tolstoï prend cette histoire comme prétexte (colossal et extrêmement détaillé, mais prétexte tout de même) pour exposer ses idées sur la guerre et l'histoire.

Il prend à de nombreuses reprises la parole pour contester le point de vue des historiens. Il nie fermement que les «grands personnages de l'histoire» ou les «héros» aient la moindre influence sur les évènements, mais ne font que la subir, entraînés de la même façon que les soldats par des grands courants contre lesquels on ne peut lutter. Sa vision des batailles tranche aussi singulièrement avec le point de vue traditionnel : au lieu de voir des manoeuvres géniales imaginées par les généraux et exécutées minutieusement par les troupes, Tolstoï voit plutôt une grande pagaille, dans laquelle personne n'a la moindre idée de ce qu'il se passe exactement, et où le sort de la bataille se joue principalement sur la motivation et le patriotisme des soldats qui prennent part aux combats. Son point de vue est intéressant, mais il est trop répété sans fournir d'arguments supplémentaires, et dans l'épilogue, il devient même franchement agaçant.

L'oeuvre est colossale, mais même si elle fait un peu peur quand on la voit la première fois, elle vaut largement le détour !
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Aaaah, « Guerre et paix » ! L'un des grands échecs de mon adolescence. J'étais motivée, j'y croyais à mort, j'avais même acheté les deux tomes d'un seul coup… J'avais terminé les neuf dixièmes du roman quand celui-ci m'est tombé des mains. Ce n'était pas chiant, ni mal écrit, au contraire, mais les personnages m'agaçaient monstrueusement ! J'avais envie de tous les baffer ou de les secouer comme des pruniers jusqu'à que leurs dents s'entrechoquent, particulièrement cet arrogant cul serré de Prince André et cet ahuri de Pierre. C'est, je crois, le seul bouquin que j'ai abandonné parce qu'il m'énervait trop.

Mais je n'aime pas rester sur une défaite et, alléchée par des critiques lues récemment, je me suis décidée à tenter de nouveau l'aventure. Quinze ans plus tard et un peu de plomb dans la cervelle en plus, je porte un regard plus indulgent et presque affectueux sur le bon gros Pierre. Certes, le bonhomme, constamment englué dans l'indécision et l'hésitation, peut taper sur les nerfs mais il est si dépourvu de toute vanité ou malveillance, si franc et si ouvert, qu'il force la sympathie. On apprécie Pierre comme on apprécierait un bon gros cousin, affable et toujours à l'écoute malgré ses défauts. Quant à Natacha – charmante, insouciante, fantasque Natacha ! – ce n'est qu'une enfant que les autres ont la sottise de traiter en adulte. Il ne faut pas lui en vouloir si elle n'est pas à la hauteur de leurs attentes, si elle commet des erreurs, des bêtises. Les enfants sont ainsi et on ne peut rien y faire. André, c'est une autre affaire… Je persiste et je signe, ce type est un connard arrogant, toujours à toiser son entourage du haut de sa vertu outragé, donneur de leçon insupportable et qui mérite à mes yeux ses propres malheurs. Agaçants, déraisonnables, têtes à vent, tous trois en sont d'autant plus humains et leur caractérisation est impeccable.

Agaçants et humains, les personnages qui gravitent autour d'eux. Agaçant et humain, le monde qui les entoure, un monde sur le déclin que la tempête napoléonienne menace de ravager. Ce monde-là c'est celui de l'aristocratie russe du début du XIXe siècle dont Tolstoï excelle à raconter les tares, les hésitations et les vanités. Pour ceux que la comédie de moeurs lasserait d'avance, rassurez-vous ! Si la plume de Tolstoï est vive et habile quand il s'agit d'épingler ses compatriotes, elle n'est pas moins brillante pour décrire des scènes de la vie militaire, batailles épiques et affrontements dantesques compris. Pour qui s'intéresse un tant soit peu aux guerres napoléoniennes, la lecture de « Guerre et paix » est incontournable : rarement la démence belliciste aura été peinte avec autant de panache et de sens de la tragédie !

Pourquoi seulement un petit quatre étoiles sur cinq alors ? Eh bien, parce que, avec tout le respect considérable que je lui dois, je n'adhère pas complétement aux thèses historiques de Tolstoï, ni à sa ferveur patriotarde un peu trop poussée à mon goût. Cette ferveur patriotarde pousse Tolstoï à reprendre en partie la propagande de son pays, notamment en attribuant aux français l'incendie de Moscou et en présentant la bataille de Borodino comme une victoire russe. Loin de moi l'envie d'attirer sur ma tête les foudres des fans du roman, mais quand une armée perd davantage d'hommes que son adversaire et lui abandonne le terrain, c'est une défaite – bien que l'on puisse parler plutôt de massacre pour les deux camps dans ce cas précis. Quant à la vision de l'Histoire de Tolstoï, elle est trop entachée de déterminisme chrétien pour convaincre l'athée que je suis et me rappelle celle de Victor Hugo – qui ne m'avait guère convaincue non plus.

Qu'on ne m'accuse pas de cracher dans la soupe : malgré ces quelques bémols très personnels, je ne dénie pas à « Guerre et paix » le titre de chef d'oeuvre. On peut apprécier énormément une oeuvre sans adhérer sur tous les points aux opinions de l'auteur et j'ai sacrément pris mon pied en lisant celle-ci ! Un livre grandiose assurément et dont je ne regrette pas la lecture. Prochaine étape : « Anna Karénine » ! (mais pas tout de suite, car il est très ventripotent également et j'ai besoin de souffler un peu)
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Fresque historique et romanesque, alternant entre descriptions de la vie aristocratique de l'époque et batailles napoléoniennes. À travers cinq familles aristocratiques nous assistons à des bals, des liaisons, des problèmes financiers, des jeunes filles qui fréquentent le monde à la recherche d'un mari, des hommes aux prises avec le jeu, l'alcool, des vies désincarnées ou au contraire, très riches.
J'ai souvent eu hâte que le récit des batailles se termine, pour retrouver certains personnages très attachants, comme Pierre, le plus sensible de tous, bien que naïf .
En résumé, malgré la lecture ardue concernant certains passages de batailles ou de descriptions de quelques personnages moins intéressants, j'ai beaucoup aimé suivre les états d'âme de Pierre Bezoukhov et du Prince Nicolas Andreyevich.
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(...)
(...) Et je dois dire que j'ai été agréablement surprise, car j'ai trouvé que c'était très accessible, finalement. Alors oui, il y a foison de personnages, dont beaucoup ont un nom à coucher dehors (du point de vue d'un lecteur non-russe, s'entend ^^), mais si je compare au Trône de Fer, par exemple, c'était parfaitement jouable 😆

Des descriptions, il y en a aussi, mais la plume est agréable, alors ça passe plutôt bien. Même les récits de campagnes militaires ne sont pas trop indigestes et il y en a moins que ce que j'aurais cru. Il n'y a finalement que 2 passages que je n'ai pas aimés (et sur 668 pages, c'est peu): l'un concerne la franc-maçonnerie et m'a ennuyée à mourir; l'autre une chasse à courre qui m'a révulsée, bien que ce ne soit pas trop explicite.

Pour ce qui est de l'histoire, j'ai eu l'impression qu'elle racontait à la fois rien et beaucoup de choses ^^ Oui je sais, c'est paradoxal, mais je ne saurais pas mieux exprimer ce que j'ai ressenti pendant ma lecture. Les personnages sont très nuancés, comme dans la vie, ce qui fait qu'on s'attache à eux pour certains aspects de leur personnalité, mais qu'on les déteste pour certains autres. Il n'y a pas de héros à proprement parler, mais des protagonistes dont l'intérêt repose sur les relations qu'ils ont entre eux, sur leurs réflexions et leurs actes plus que sur eux-mêmes.

De cet auteur, je n'avais lu qu'une nouvelle présente dans un recueil sur le thème des vampires et je l'avais énormément aimée. Ce 1er tome de la Guerre et la Paix a su également me convaincre, même si c'est une lecture plus exigeante, je l'ai trouvé aussi très addictive. S'il m'a fallu plus d'un mois pour en venir à bout, c'est essentiellement parce que mon édition propose une mise en page très dense: c'est écrit tout petit et les interlignes sont minuscules, ce qui est très fatigant visuellement. Si vous avez envie de vous lancer dans ce livre, je vous conseille de choisir une édition avec un meilleur confort de lecture ^^

Ce livre me faisait très peur, mais il était beaucoup plus accessible et addictif que je l'imaginais. Au final ç'a été une bonne lecture et j'espère lire le tome 2 très bientôt 🙂
Lien : https://bienvenueducotedeche..
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J'étais trop impressionnée par ce monument de la littérature russe pour imaginer le lire un jour jusqu'à ce j'en découvre une adaptation pour la télévision. L'intrigue m'a beaucoup plu, au point de me donner envie de me lancer dans l'aventure de plus de 900 pages.
Et je n'ai pas regretté, la lecture de cette magnifique fresque historique même si certains passages consacrés aux réflexions politiques ou philosophiques m'ont paru parfois un peu ardus.
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La mise en place des personnages et du contexte historique prend plusieurs centaines de pages, pas désagréables par ailleurs. La force du roman m'est apparue à la description de la bataille d'Austerlitz. le cadre est tantôt posé sur les états majors avançant leurs pions et dressant des stratégies, tantôt sur la mise en mouvement de l'armée à travers tous ses corps intermédiaires où l'on finit par plonger dans le combat avec une caméra subjective, accompagnant les pas d'un homme dans le carnage et la débâcle. Ce changement constant de point de vue me semble être le réel tour de force.

N'en reste pas moins que le livre n'est pas un document d'histoire -ni une fiction complète- mais une sorte de docu-fiction constituée d'épisodes pareils à ceux que l'on trouve dans les séries d'aujourd'hui. On y traverse tous les milieux, en temps de guerre ou de paix, sur 15 années. Une source d'étonnement et d'intérêt pour la Russie, la France, et plus largement l'Europe de 1805.

On sent un certain nombre de fois dans le récit, le besoin porté par Tolstoï et sans doute partagé par ses contemporains, de régler 40 ans plus tard des comptes avec les conquêtes napoléoniennes, et avec ce que ses historiens en conservent.

Un livre bien difficile à noter. Plus proche de 5 que de 4 étoiles, mais qui me semble pouvoir être substitué par la lecture d'autres romans russes plus abordables -ou courts. Je m'étonne toujours autant en ayant lu seulement Dostoïevski, Tchekhov ou Tolstoï, de leur incomparable talent à poser clairement et sans esprit de chapelle, les problèmes liés au matérialisme, au sens de l'existence et à la morale.
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Le tome 1 de cette collection ne couvre que les 2 premiers livres de cette oeuvre immense, et pourtant c'est déjà un roman historique à lui seul. On y découvre les moeurs de l'aristocratie russe du tout début du 19ème siècle, dans un période de confrontation guerrière avec la France de Napoléon §1er ; on y vit par exemple la bataille d'Austerlitz et la défaite des Russes. La France qui, malgré un sentiment de défiance d'une partie de l'aristocratie, reste une « passion » des russes, employant par exemple le Français comme une langue sophistiquée.

J'ai particulièrement apprécié le récit de la bataille d'Austerlitz, même si on peut se perdre dans les descriptions très détaillées qu'en fait Tolstoï. J'ai aussi apprécié le passage de la chasse à courre des Rostov, là aussi très descriptive, on s'y croirait. Et puis dans la même veine que « Orgueil et Préjugés » de Jane Austen ou encore « Les Buddenbrook » de Thomas Mann, on retrouve ici le récit des histoires sentimentales du milieu aristocratique du 19ème siècle, cercles fermés, pudiques, mais des histoires pleines de passion.

Dans ce type d'oeuvre, ces romans fleuves où fourmillent des dizaines de protagonistes, on se plait à découvrir ces personnages, à les connaitre petit à petit comme de vraies personnes (grâce aussi à la richesse et au réalisme des détails et aux descriptions psychologiques que Tolstoï fait de ces personnages), à les aimer ou les détester, à être peiné pour leurs malheurs et heureux pour leurs instants de bonheur. Personnellement c'est le prince André Bolkonsky qui m'a le plus marqué, incarnant des valeurs morales, libérales et le héros romantique par excellence.

Même après près de 1000 pages parcourues assez vite finalement, et sans me lasser, je n'ai qu'une hâte, c'est d'ouvrir le volume suivant pour continuer cette fresque historique et romanesque. Alors chut… pas de « spoil » merci 😉
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Un excellent livre si il en est jamais ennuyé malgré les nombreux dezoom sur nos personnages pour nous offrir un tableau xde L Histoire plutôt que des histoires qui la font.

Sauf peut-être en vérité dans la longue dissertation de l'épilogue, car pour être honnête je ne me sentais plus trop "dedans" surtout que la lecture en italique est une peine pour les yeux.

Mais sinon splendide, mêlant la joie, la tristesse avec délicatesse, nous dressant des portraits si plein de vie qu'il me semble pouvoir voir sortir Natacha des pages du livre. Et non seulement plein de vie mais aussi plein de finesse, encore une fois comme dans Anna Karennine, Tolstoï démontre d'une vraie connaissance de la nature humaine. Et aussi lorsque l'un d'entre eux doit nous quitter se sont des flots de larmes qui coulent, et une poignante compassion lorsque le malheur les frappent.

Le style est fluide, rien à redire à son niveau.

Or les digression d'historien de fin de livre mon seul reproche serait le côté très pro empereur et anti-napoléon qui perce assez souvent, Tolstoï n'étant absolument pas neutre ni prétendant à vrai dire l'être. Ce ne sont plus quelques pointes aiguisée mais une véritable mitraille contre ce général français impudent. ;)
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Comment critiquer une oeuvre qu'on ne présente plus, de près de 2000 pages dans sa version en deux tomes chez Folio, et qui nous conte les aventures de plusieurs familles nobles de la Russie ?

Cette Russie qui fait face au début du XVIIIème siècle à l'appétit insatiable de Napoléon, que beaucoup abhorrent pour son arrogance roturière, tandis que d'autres ne peuvent s'empêcher de l'admirer profondément pour ses faits guerriers et sa maîtrise de la stratégie guerrière.

La première partie du roman se dévore, on y suit une kyrielle de personnages difficiles à distinguer les uns des autres au tout début du roman ; Tolstoï n'est d'ailleurs pas tendre avec eux et les afflige de nombreux défauts et vices. On y découvre les salons pétersbourgeois et moscovites, et l'hypocrisie qui y règne, ainsi que les préoccupations de chacun : amourettes d'adolescent, grandes ambitions maternelles pour leur fils, appropriation de l'héritage d'un jeune bâtard menaçant ou mariages ratés d'où tout bonheur semble absent. Et au-delà des portes de ces salons, la guerre et la Grande Armée, menaçante…

Il est difficile d'être exhaustif quant aux thèmes abordés : on y trouve bien sûr les moeurs de la société russe, les rapports et qualités des hommes et des femmes (bien souvent les défauts pour ces dernières…Tolstoï me semble bien misogyne, à quelques exceptions près), une description des domaines paysans, qui semblent être un terrain de jeux pour les jeunes nobles qui doivent y prouver la bonne gestion de leurs affaires, et de la fidélité, ou la sournoiserie des domestiques.

Guerre et Paix est également un roman initiatique, où la plupart des personnages cherchent un but à leur existence : bravoure et gloire à la Guerre pour les hommes, ou au contraire poursuite de la connaissance et du bien commun au sein de sociétés secrètes ; amour passionné et fidèle, mariage réussi ou sacrifice à la religion pour les femmes. On ne peut s'empêcher d'enrager devant certaines décisions ou apathie notoire des personnages, inconstants ou au contraire d'une fidélité butée insupportable…Pierre Bezoukhov et la Princesse Marie mériteraient selon moi d'être secoués plus d'une fois ! Quête initiatique solitaire ou à deux, avec ces désillusions ou de nouveaux émerveillements !

Et bien sûr, les trois autres grands protagonistes de cette longue oeuvre : la Guerre, l'Histoire et Tolstoi lui-même : les batailles et stratégies des belligérants sont minutieusement détaillées par l'auteur, et malgré les conseils de guerre et sempiternelles discussions des généraux, l'Histoire et son déroulement inexorable écrase toutes les prédictions, tandis que les protagonistes disparaissent ou ressortent grandis de leur expérience de la guerre et de la mort : là encore, les illusions se brisent. Tolstoï ne se contente d'ailleurs pas de décrire les bataille de Schongraben, d'Austerlitz et de Borodino : il les analyse, les décortique, les juge sans pondération ; il réécrit les rencontres entre Napoléon et Alexandre III, déversant au passage sa verve et son opinion tranchée sur les récits historiques de l'époque (et notamment celui de Thiers).

J'ai dévoré presque d'une traite les trois quarts du roman, jusqu'à la disparition de l'un des personnages qui m'a profondément attristée, et qui m'a fait perdre en grande partie mon intérêt pour l'histoire : les protagonistes ne m'étaient pas sympathiques, de l'écervelée et grande séductrice malgré elle Natacha à la Princesse Marie, illuminée et soumise…Du côté des hommes, l'incapacité d'agir de Pierre m'a plus d'une fois agacée, tout comme l'amour larmoyant que porte Nicolas et Pétia à l'empereur…Ma préférence va bien sûr au Prince André, à Denissov et à Dolokhov, si sûrs de leurs sentiments quand ces derniers éclosent.

Si l'analyse précise des scènes de bataille et de l'histoire est très intéressante, ainsi que le paradoxe entre la guerre franco-russe et la francophilie de l'aristocratie, j'ai trouvé certains passages très perturbants par le jugement qui n'admet aucune argumentation de Tolstoï, que ce soit par la réécriture de certains évènements ou l'agressivité qu'il affiche pour Saint-Pétersbourg et ses salons en comparaison de la patriotique et martyre ville de Moscou, ou des grands domaines campagnards du Prince André et des Rostov. On sent au fil des pages une certaine rancoeur envers les femmes et leur manière d'être, et une glorification de la camaraderie fraternelle des soldats. Et puis, alors que l'on atteint la fin du roman, l'on passe sans crier gare à l'épilogue et à une démonstration philosophique de près de 200 pages, bien argumentée et tout à fait pertinente, bien qu'assenée un peu rageusement.

Je demeure donc très mitigée en repensant à ma lecture de Guerre et Paix, qui m'a certes emportée par sa richesse et dont j'ai apprécié les enchevêtrements narratifs au travers des différents personnages, des descriptions des batailles ou encore des écrits des personnages mêmes qui parsèment le roman (les journaux de Pierre et de Marie, les lettres entre cette dernière et Julie, mais aussi les écrits dont on parle sans qu'ils ne soient dévoilés, comme par exemple les mémoire du Prince Bolkonski), mais qui me laisse surprise par l'écriture guerrière et agressive de Tolstoï, que je n'ai pas trouvée particulièrement soignée en comparaison des très belles scènes dont je me rappelle dans ces autres livres. Je n'en sors donc pas indemne, mais pas transcendée comme lorsque j'avais lu Anna Karénine ou deux autres de ses ouvrages moins connus, les Cosaques et Hadji Mourad.

Le mot de la fin : j'aurais véritablement adoré étudier cette oeuvre en cours !
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