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Albert Bensoussan (Traducteur)
EAN : 9782070384686
278 pages
Gallimard (21/02/1992)
3.55/5   51 notes
Résumé :
A Florence, alors qu'il a le sentiment de se promener au coeur même du monde de la Renaissance, un touriste péruvien tombe en arrêt, à la faveur d'une exposition de photos, devant des images anciennes de son propre pays: sur l'une des photos, un homme debout parle au milieu d'un cercle d'Indiens accroupis et attentifs.
Et par la magie du souvenir ou d'une prodigieuse affabulation grâce à laquelle la mémoire personnelle ouvre ses vannes à une mémoire plus anci... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Vargas Llosa a L Academie Francaise! Bien qu'il parle un excellent francais il n'a jamais ecrit dans cette langue (peut-etre quelques lettres…). Mais c'est quand-meme une bonne nouvelle: c'est surement l'ecrivain le plus important a y sieger. Pour moi c'est surtout une bonne excuse pour que je rappelle un de ses livres les plus ignores en France et que j'aime le plus: L'homme qui parle. Je l'ai lu en v.o.: El Hablador.


La trame: pendant un sejour en Florence un ecrivain peruvien(en qui on peut voir Vargas Llosa) s'attarde, dans une exposition de photos, sur l'une d'elles, representant un homme debout qui parle devant une audience assise autour. Ca declenche des souvenirs, entremeles. D'un de ses amis a l'universite, un jeune juif, defigure par une enorme tache de vin qui lui bouffait la moitie du visage, et qu'on denommait Mascarita (= petit masque), qui portait un grand interet pour un peuple amazonien, les Machiguengas. Un ami qu'il n'a plus revu et qu'on a dit émigré en Israel. Des souvenirs aussi d'une autre époque, quand il avait fait pour la television un reportage sur ces Machiguengas, et avait decouvert l'existence d'un corps social singulier et mysterieux, parce que tenu secret: les "habladores", les "hommes qui parlent". Il se remet a des recherches sur le sujet et finira par croire comprendre ce que representent les habladores pour les machiguengas et etre persuade que Mascarita n'a pas quitte Lima pour Israel mais pour l'Amazonie peruvienne profonde, qu'il s'est rallie aux machiguengas, a integre leur ethnie et embrasse leur culture au point de devenir un de leurs habladores.


La construction du livre rappelle celle de la tante Julia et le scribouillard. Des chapitres ou le narrateur decrit ses souvenirs et ses recherches, et, intercales, des chapitres ou on entend un hablador raconter, dans son style particulier, les mythes, les histoires, les nouvelles de son peuple, un peuple errant parce que chasse continuellement d'un endroit a un autre, et qui a colle sur cette errance forcee ses mythes fondateurs: c'est le peuple qui marche, et c'est grace a cette marche continuelle que le monde continue d'exister. S'il s'arrete le soleil tombera et ne se relevera plus. Les tenebres detruiront toute vie. Ils errent donc par petits groupes familiaux, loin les uns des autres, et c'est l'hablador qui fait le lien, qui transmet la memoire collective ainsi que des nouvelles des autres familles, qui enseigne en fait les mythes et l'histoire, et truffe le tout de contes pour tenir l'audience en haleine. le passeur de la culture.
Des chapitres differents. Deux mondes differents de discours. Une chronique simple cote narrateur, et de l'autre un discours magique, legendaire, mythique, ou il n'existe pas d'espace/temps. Ou les espaces s'entrelacent et le temps est toujours un eternel present, engloutissant tout passe et tout futur.


Qu'est-ce que j'ai aime dans ce livre?

Tout d'abord la prouesse de l'ecrivain. La dychotomie ecriture/oralite est tres bien traduite dans les different registres stylistiques qu'il utilise.

J'ai aime sa facon discrete d'inciter le lecteur a reflechir sur l'importance de l'ecrivain dans la societe. L'ecrivain est producteur de fiction mais aussi analyste de sa societe. C'est un innovateur, enrichissant sa culture, mais peut etre aussi passeur, transmetteur de culture. le conteur oral traditionnel, jongle lui aussi avec l'innovation, d'une facon plus discrete, en s'en cachant presque. Comme l'hablador, l'homme qui parle, en qui nous lecteurs reconnaissons Mascarita quand il raconte l'histoire du peuple juif, cet autre peuple qui marche, assaisonee a la sauce machiguenga. J'ai eu l'impression que Vargas Llosa est un peu jaloux du conteur traditionnel. Qu'il se sent moins important pour sa societe que lui. Perdu dans sa condition d'homme de notre temps, il evoque en fait avec nostalgie le temps ou la parole nommait les choses et pouvait ainsi creer l'univers. Il connait le pouvoir de l'ecriture et admire le pouvoir de la voix. Mascarita est un peu dans ce sens le petit masque de l'ecrivain.

Vargas Llosa souleve aussi une reflexion sur le lien, ou la dychotomie, entre communaute et nation. Sur l'importance du territoire. Sur l'importance des marges pour l'entite hegemonique. Sur la tradition et la "modernite". L'homme qui parle est un roman critique quant aux possibilites de survie et de renovation de l'indigenisme, bien qu'empreint d'une grande empathie pour les indigenes amazoniens. Mais ce n'est pas un livre d'ethnologie. L'ethnologie, romancee, deformee, sert surtout a Vargas Llosa pour s'autoanalyser.


Pour moi donc un livre tres agreable a lire, tres bien ecrit, qui incite a reflechir en de nombreuses directions.
Bienvenu a L Academie Francaise, Vargas Llosa! C'est ta deuxieme, après l'espagnole! Qui sait? Jamais deux sans trois.

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L'écriture est fluide. L'histoire est prenante bien que cela soit rapidement évident qui est « L'homme qui parle ». Mais est ce vraiment le plus important ?

Le narrateur, en voyage à Florence, plonge dans son passé et ses souvenirs en découvrant une photo. Démarre alors un récit qui mixe réminiscences et extrapolations. Un mixte de la vie du narrateur et de celle de l'homme qui parle. Des chapitres sur la tribu des hommes qui marche s'entremêlent avec la vie du narrateur.

Cela parle du Pérou, d'une tribu qui va être confrontée à la civilisation, de la fascination du narrateur pour un de ses condisciples, de ses retours sur son passé et ses engagements.

C'est beau, c'est nostalgique, c'est triste comme le temps qui passe.

Je ne sais pas comment vraiment exprimé ce que je ressens ou alors peut être ainsi : est ce que la civilisation est toujours là où l'on pense… les soi disant primitifs / primaires ne sont pas toujours ceux que l'on pense.

C'est une belle histoire. J'ai vraiment beaucoup aimé. Les derniers chapitres sont consacrés à un parallèle entre le peuple juif et ce peuple amazonien (les Machiguengas). Ou comment l'exode permet de survivre.

Un petit extrait sur cet exode justement. J'aime beaucoup le long du temps. le long du monde, aussi.

Un bon cru ce Nobel 2010 !

"Tout comme le peuple qui marche, les familles durent se séparer les unes des autres pour être acceptées. S'ils étaient peu nombreux, s'ils ne faisaient pas d'ombre, les autres peuples leur laissaient un endroit pour semer, chasser et pécher. Parfois ils leur ordonnaient : « vous pouvez rester mais sans semer ou sans chasser. C'est la loi. » Ainsi duraient ils quelques lunes, parfois ; plusieurs, peut être. Mais cela finissait toujours mal. S'il pleuvait trop ou s'il y avait de la sécheresse, si quelques catastrophe survenait, on commençait à les haïr. « C'est votre faute, leur disait on. Dehors ! » On les expulsait à nouveau et ils semblaient sur le point de disparaitre.

Parce que l'histoire s'est répétée dans énormément d'endroits. Toujours la même comme un seripigari qui ne peut revenir d'un mauvais tournis et continue à tourner, désorienté, entre les nuages. Et cependant, en dépit de tant de malheurs, ce peuple n'a pas disparu. Malgré ses souffrances, il a survécu. Il n'était pas guerrier, il ne gagnait jamais les guerres et il est là. Il vivait dispersé, ses familles aux quatre coins du monde, et il a demeuré. Des peuples plus grands, de guerriers, des peuples forts, de Maschos, de Viracochas, de sages seripigaris, des peuples qui semblaient indestructibles, s'en allaient. Ils disparaissaient, donc. Il ne restait nulle trace d'eux dans ce monde ; personne ne s'en souvenait ensuite ? Eux en revanche, ils continuent. Ils voyagent vont et viennent, ils fuient. Vivants et errants, donc. le long du temps, le long du monde, aussi.

Et c'est que ; malgré tout ce qui lui est advenu, le peuple de Tasurinchi-Yahvé ne s'est pas séparé de son destin. Il a accompli son devoir toujours. En respectant les interdits, aussi….."
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L' HOMME QUI PARLE de MARIO VARGAS LLOSA
Un touriste péruvien se promène à Florence dans le but de revisiter les splendeurs de la Renaissance italienne. Dans une ruelle il est attiré par une exposition qui lui rappelle son pays, la forêt amazonienne. Un homme debout parle au milieu d'indiens assis qui l'écoutent. Cette photo le ramène des années en arrière, souvenir ou imagination? Il revoit son ami juif créole qui refusera une bourse pour l'Europe, (bourse rêvée pour tout étudiant péruvien de l'époque), qui restera à Lima pour son père âgé, puis qui disparaîtra, parti en Israël avec son père. Ce touriste ( Llosa?) va chercher à comprendre l'histoire de son ami disparu, pas en Israël mais peut être dans la forêt pour étudier ces peuples traqués en voie de disparition. Car enfin n'est ce pas lui l'homme qui parle au milieu des Machiguengas, l'homme debout avec ses cheveux roux et sa tâche lie de vin? Comment est ce possible?
Au travers de cette enquête Llosa nous immerge dans la complexité de notre relation avec les peuples premiers et nous fait pénétrer dans leur mythologie, le temps où la Lune était un homme sur terre qui courrait trop après les femmes…
A mi chemin entre ethnologie et mythologie, un livre difficile à suivre tant le foisonnement des histoires nous perd dans ses méandres, mais si la tragédie que vivent ces peuples vous intéresse, alors n'hésitez pas, même si Llosa n'a pas de solution à proposer.
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Une histoire fascinante sur un peuple de l'Amazonie au Pérou. Une réflexion sur ce qu'on a fait et ce qu'on fait encore pour assimiler des peuplades à notre mode de vie occidental.Les croyances millénaires, le sens des rituels du quotidien qu'on retrouve chez ces individus sont
riches de sens et c'est de cette façon dont l'auteur nous en révèle l'essence. Le protagoniste, un homme marginal et excentrique qui va jusqu'au bout de ses prises de conscience, m'a interpellé par ses convictions, mais surtout par sa sensibilité et sa soif du respect de l'humain dans sa différence, dans sa culture.
Magnifiquement écrit, d'une grande poésie où le réel se lie avec l'imaginaire : c'est à la fois, un récit, un essai ethnologique et un conte. Un grand romancier que j'aime beaucoup.
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À lire avant de visiter le Pérou et l'Amazonie! Excellent roman d'ethnologie précolombienne et réflexions très actuelles sur les peuples indigènes de l'Amazonie péruvienne en particulier sur le peuple machiguenga. L'auteur décrit sa vision de ces tribus persécutées, en perdition; il propose, à travers un personnage de fiction, ce qui lui semble la meilleure solution pour leur survie et leur «bonheur».
Quelques longueurs, mais lecture très enrichissante!
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Tout comme le peuple qui marche, les familles durent se séparer les unes des autres pour être acceptées. S’ils étaient peu nombreux, s’ils ne faisaient pas d’ombre, les autres peuples leur laissaient un endroit pour semer, chasser et pécher. Parfois ils leur ordonnaient : « vous pouvez rester mais sans semer ou sans chasser. C’est la loi. » Ainsi duraient ils quelques lunes, parfois ; plusieurs, peut être. Mais cela finissait toujours mal. S’il pleuvait trop ou s’il y avait de la sécheresse, si quelques catastrophe survenait, on commençait à les haïr. « C’est votre faute, leur disait on. Dehors ! » On les expulsait à nouveau et ils semblaient sur le point de disparaitre.

Parce que l’histoire s’est répétée dans énormément d’endroits. Toujours la même comme un seripigari qui ne peut revenir d’un mauvais tournis et continue à tourner, désorienté, entre les nuages. Et cependant, en dépit de tant de malheurs, ce peuple n’a pas disparu. Malgré ses souffrances, il a survécu. Il n’était pas guerrier, il ne gagnait jamais les guerres et il est là. Il vivait dispersé, ses familles aux quatre coins du monde, et il a demeuré. Des peuples plus grands, de guerriers, des peuples forts, de Maschos, de Viracochas, de sages seripigaris, des peuples qui semblaient indestructibles, s’en allaient. Ils disparaissaient, donc. Il ne restait nulle trace d’eux dans ce monde ; personne ne s’en souvenait ensuite ? Eux en revanche, ils continuent. Ils voyagent vont et viennent, ils fuient. Vivants et errants, donc. Le long du temps, le long du monde, aussi.

Et c’est que ; malgré tout ce qui lui est advenu, le peuple de Tasurinchi-Yahvé ne s’est pas séparé de son destin. Il a accompli son devoir toujours. En respectant les interdits, aussi…..
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Nous prétendions prouver aux téléspectateurs qu'une émission culturelle n'était pas forcément anesthésique, ésotérique ou pédante, mais qu'elle pouvait être amusante et à la porté de n'importe qui, car la «culture» n'était pas synonyme de science, littérature ou tout autre savoir spécialisé, mais plutôt une façon de s'approcher des choses, un point de vue susceptible d'aborder tous les sujets humains.
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L'homme qui parle, où les parleurs, devaient être quelque chose comme les courriers de la communauté. Les personnages qui se déplaçaient d'un hameau à l'autre, sur le vaste territoire ou s'éparpillaient les Machiguengas, rapportant aux uns ce que faisaient les autres, les informant réciproquement des événements, des aventures et des infortunes de ces frères qu'ils ne voyaient que rarement ou jamais. Le nom les définissait. Ils parlaient. Leur bouche était le lien et le ciment de cette société que la lutte pour la survie avait obligé à se fractionner et se disperser aux quatre vents. Grâce aux parleurs, les parents avaient des nouvelles de leurs enfants, les frères de leurs sœurs, et grâce à eux ils apprenaient les morts, naissances et autres accidents de la tribu. (98)
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Quelle illusion que de vouloir préserver ces tribus telles qu'elles étaient, telles qu'elles vivaient ! En premier lieu, ce n'était pas possible. Elles étaient toutes contaminées, les unes plus lentement, les autres plus rapidement, par des influences occidentales et métisses. De surcroît, fallait-il souhaiter cette préservation chimérique ? Quelle utilité que ces tribues continuent à vivre comme elles le faisaient et comme les anthropologues puristes du genre de Saúl le voulaient ! Les primitiviste les rendaient victimes, plutôt, des pires privations et cruautés. (79)
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Le spectacle de la foi solide, inébranlable, qui pousse un homme à lui consacrer sa vie et à accepter en son nom toutes sortes de sacrifice, m'a toujours à la fois ému et effrayé, car je lis dans cette attitude tout à la fois l'héroïsme et le fanatisme, l'altruisme et le crime
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Vidéo de Mario Vargas Llosa
Avril 2011 Mario Vargas Llosa parle de Pedro Camacho - "La tante Julia et le scribouillard"
>Littérature (Belles-lettres)>Littérature espagnole et portugaise>Romans, contes, nouvelles (822)
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