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Jacques Van den Heuvel (Autre)
EAN : 9782073014221
128 pages
Gallimard (17/08/2023)
3.83/5   48 notes
Résumé :
Abbeville, 1765. Le chevalier de La Barre est accusé d'avoir profané une statue du Christ. Victime d'un règlement de comptes, condamné sans preuves et au mépris de la loi, le jeune homme est torturé, décapité et brûlé avec, entre les mains, un livre interdit, le Dictionnaire philosophique d'un certain Voltaire... Directement mis en cause dans cette affaire, Voltaire s'insurge et utilise sa meilleure arme pour dénoncer l'injustice : sa plume.
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Voila les ingrédients pour la recette de « l'homicide judiciaire » :
Prenez un pervers narcissique (non diagnostiqué à l'époque ). Son motif de vengeance est l'avidité pour le bourreau de Lally ; le refus d'une femme pour celui de de La Barre.
Ce gars a du pouvoir ( directeur de la Compagnie des Indes d'un côté ; maire d'Abbeville de l'autre ).
Il utilise des moyens non éthiques pour diffuser son « affaire » : concussion pour l'un, diffusion de monitoires pour l'autre.
Il fait chanter des « moutons » : subornation de témoins, faux témoignages acquis par l'argent ou la peur provoquée.
Des pages ( 6000 ) de procédure sont écrites, remplies d'inepties que les « moutons », faux témoins, population et juges incompétents gobent.
Et voila le travail :
4 innocents condamnés tous chauds, prêts à être passés à la moulinette :
Genoux broyés, langue et main coupées, corps passés au feu ou décollation :
Une bonne collation pour deux vrais malades !
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Voltaire parle des « singes qui deviennent tigres » ; moi je dis qu'ils sont « tigres cachés » depuis l'adolescence. Les pervers narcissiques sont des malades découverts depuis peu, mais j'en connais les caractéristiques et, sans être psychiatre, en ayant côtoyé plusieurs, je les connais, et sais qu'ils détruisent les gens, sont difficilement saisissables par l'hôpital comme par la justice, et sont irrecupérables.
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France, 1766. Selon les dires De Voltaire
En 1761, le chevalier de Lally, avec seulement 1000 hommes, capitule à Pondichéry devant les Anglais. C'est la fin ( ? ) de la Compagnie française des Indes Orientales. le directeur, les armateurs, marchands et actionnaires sont en colère. En plus, ils croyaient que Lally avait gagné des millions, or c'est faux.
Prisonnier des Anglais, il va s'expliquer devant la justice française. Mal lui en prend !
Pour « protéger » tous ces messieurs de la Compagnie des Indes, le ministre des finances le fait enfermer, et juger. On l'accuse de ne pas avoir pris la ville de Chétoupet. Existe-t-elle ? Les juges n'y connaissent rien ; un jury militaire eut mieux valu qu'un jury civil, qui l'a conduit à l'échafaud ; un jury militaire l'eût excusé, dit Voltaire, qui relève plein d'irrégularités et d'incohérences, préjugés, ainsi qu'un parti pris français qui se venge ainsi des défaites coloniales contre les Anglais.
De plus, Lally se défend mal, insultant tout le monde.
Voltaire écrit aux gens d'influence pour réhabiliter Lally. Ce n'est fait qu'en 1778, et Voltaire l'apprend donc 4 jours avant sa mort.
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Pour de la Barre, un gamin de 19 ans, c'est encore pire, et Voltaire est encore plus indigné.
Lisez-le si vous voulez,
c'est aussi indigne des êtres soit disant « humains » que le drame de Hautefaye raconté par Jean Teulé, ou l'histoire du condamné à mort de Victor Hugo… ou de l'injustice de l'affaire Calas.
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L'affaire de la Barre, c'est trois juges d'Abbeville, le bon, Villers, la brute, Broutel, et le pervers narcissique, organisateur de tout ça, le maire d'Abbeville, Duval de Soicourt.
Pourquoi, à mon avis, Duval est un PN, terme qui n'existait pas en 1766 ?
Parce qu'il a fait des avances insistantes à la respectable abbesse Feydeau de Brou, que celles-ci ont été refusées, et comme elle hébergeait son neveu de la Barre, ce « tigre » Duval s'est vengé sur ce dernier ( et deux autres jeunes gens ), amplifiant volontairement le drame de ne pas saluer une procession, mais aussi, leur faisant porter le chapeau des scarifications portées sur un calvaire. Il a ensuite persuadé la Brute et le Bon de l'assister dans ce procès monté de toutes pièces, avec des témoins subornés, mettant l'évêque d'Abbeville dans le coup, et celui-ci expédie des monitoires menaçant les fidèles de l'enfer.
Tout est manipulation ! ( d'après Voltaire, mais aussi des enquêtes sérieuses contemporaines, comme celle de Georges Bringuier, inspecteur de l'Education nationale ).
Voltaire écrit à ses relations, et au roi de France ( le cri du sang innocent ), mais rien n'y fait ! de la Barre sera réhabilité en 1788, dix ans après la mort De Voltaire.
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Aah la colère, la vengeance de ce que j'appelle un pervers narcissique, dont les avances , et le « moutonisme », quels mauvais conseillers…
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. Les enjeux philosophiques de ce livre sont, à mon avis, de plusieurs ordres.
Pour Voltaire :
1 ) La justice.
2 ) La religion.
3 ) le « moutonisme » de Villers et de 15 des 25 juges de Paris, qui ne se sont peut-être pas tapés les abondantes pages de procédure.
4 ) Et je pense qu'aujourd'hui, on peut ajouter cette maladie mentale pas encore assez reconnue et difficile à neutraliser par les médecins ou les juges : la perversion narcissique.
[ Excusez mon style, je suis en colère. Tous ces "tigres" provoquent les guerres. ]

.En 1766, François Jean de la Barre est décapité et brûlé pour ne pas avoir salué une procession religieuse à Abbeville. Une statue à son effigie est érigée devant l'église du Sacré Coeur à Paris en 1905 mais elle est déplacée en 1926 dans le square proche, place moins dérangeante pour les croyants. Fondue en 1941 sous Pétain, laissant le socle vide, la statue est de retour dans le square Nadar à Montmartre : son inauguration a eu lieu le 24 février 2001.
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Ce petit livre me permet d'appréhender Voltaire quand il enfile un nouveau costume assez tard dans sa vie, celui de redresseur de torts.

Deux affaires sont traitées. Tout d'abord l'affaire Lally. Lieutenant général des comptoirs de l'Inde pendant la guerre de Sept Ans, il dut capituler face aux Anglais. S'étant fait de nombreux ennemis à Pondichéry, il fut accusé de nombreux forfaits. Bien qu'à l'abri en Angleterre, Lally décida de venir se défendre en France. Il fut embastillé, condamné et décapité.
Pire est le cas du chevalier de la Barre. Accusé avec deux de ses amis de n'avoir pas salué une procession et d'avoir profané une statue du Christ à Abbeville, il fut supplicié, condamné, décapité et son corps jeté au bûcher (avec un exemplaire du Dictionnaire Philosophique de Voltaire pour que les flammes soient plus belles).

Voltaire entend parler de ces affaires et se démène par lettres et essais interposés pour démonter l'instruction à charge et obtenir la réhabilitation de ces hommes.

Si je n'écoutais que la douce voix du Cartésien toujours à l'affut en moi, je penserais qu'il n'est pas possible de juger cette affaire car nous n'en entendons qu'un son de cloche, celui de la Défense. Cependant je vais me laisser aller à la partialité et m'insurger comme Voltaire sur les méthodes iniques de l'accusation.

Il est clair que Lally sert avant tout de bouc émissaire pour la perte des Indes. Il faut un coupable. le lieutenant général, largement détesté à Pondichéry, en est un idéal.
Le cas de la Barre est encore plus révoltant. Non seulement l'un de ses ennemis se trouve parmi ses juges, mais encore l'accusation, s'appuyant sur les méthodes éprouvées du tribunal ecclésiastique, aligne les arguments qui feraient rire de nos jours mais qui à l'époque conduisaient à la mort. Les monitoires amènent des individus peu crédibles à venir déposer des rumeurs (« le sieur Alinet dépose avoir ouï dire qu'un nommé Bauvalet avait dit que le sieur d'Étallonde avait dit qu'il avait trouvé… »). La condamnation à avoir la langue tranchée, être pendu puis jeté au feu, est hors de proportion avec le sujet d'accusation : ne pas avoir salué une procession. Voltaire le répète, en aucun endroit sur Terre, en Russie ou chez les Algonquins, on ne condamne aussi durement alors que la condamnation n'est obtenue que par quelques voix d'avance sur l'acquittement.

C'est une désagréable surprise pour moi, qui ne connaît pas très bien ce 18ème siècle, de constater combien l'arbitraire religieux a encore de pouvoir. Mais c'est aussi la confirmation que les Lumières sont bien allumées. Par son action quasi-journalistique et sa ténacité, Voltaire refuse cet arbitraire, le combat, et gagne au final la réhabilitation posthume des condamnés. Il nous montre la voie : il ne faut pas faire une confiance aveugle à la justice d'état, surtout lorsqu'elle est dirigée par la religion. Il faut la contrebalancer par un autre pouvoir, celui de la presse par exemple.
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Après l'affaire Calas, Voltaire doit encore affûter sa plume pour combattre l'intolérance, pour un procès qui, indirectement, le concernait. le chevalier de la Barre qui fut supplicié à l'âge de dix-neuf ans pour ne pas avoir salué une procession possédait, en effet, un exemplaire du "Dictionnaire philosophique".
Voltaire use, dans cette affaire, d'un argument qui pourrait intéresser particulièrement les juristes sarkosistes qui s'acharnent à vouloir mettre sur un même plan les auteurs de délits, qu'ils soient de jeunes pré-adolescents impubères ou de vieux bougres cinquantenaires endurcis. Car pour le jeune chevalier, les juges ne tinrent aucun compte de l'âge de l'accusé.
Bien d'autres arguments nourrissent ce pamphlet contre une justice expéditive, partisane et intolérante. Une bonne lecture pour nous rappeler ce qui a pu changer en bien dans nos systèmes judiciaire et politique, mais aussi dans ce qui n'a pas changé, plus de deux-cents ans plus tard : le plaisir de nuire, l'abus de pouvoir, l'intolérance, l'absurdité, la vanité…
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Thomas-Arthur de Lally, décapité pour avoir capitulé à Pondichéry face aux troupes anglaises pendant la Guerre de Sept Ans ; le jeune chevalier de la Barre, torturé et décapité pour avoir omis de saluer une procession religieuse : deux jugements rendus ou confirmés par le Parlement de Paris en 1766. Louis XV refusera d'accorder sa grâce au chevalier et confirmera une sentence presque aussi sévère que celle qui fut réservée à Robert-François Damien qui tenta d'assassiner le roi moins de dix ans auparavant.
Voltaire dénonce dans les lettres ici rassemblées l'arbitraire de la justice, accomplie par des magistrats qui ont acheté des charges pour lesquelles ils n'ont aucune compétence, et la persistance des superstitions religieuses en cette fin du 18ème siècle. Ces affaires révèlent également les querelles qui divisent le royaume de France, au sein du clergé (entre jésuites et jansénistes), entre le roi et le Parlement de Paris.
Parmi les arguments que Voltaire avance pour dénoncer l'absurdité de la condamnation du chevalier de la Barre, il rappelle que Montesquieu, président à mortier du Parlement de Bordeaux, put se moquer dans ses Lettres persanes (1721) du pape, de la Trinité et de l'Eucharistie sans être inquiété ; et que le chevalier de la Barre ne provoqua aucun trouble à l'ordre public.
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Quand un jeune homme, le chevalier de la Barre, est supplicié sous de faux prétextes et pour des actes qui légalement ne méritent pas le sort qui lui est fait, Voltaire prend la plume. Il veut combattre la vindicte populaire, les signes d'une vengeance personnelle au mépris de la loi. Voici donc un dizaine de lettres adressées à M. le comte de Rochefort, à M. d'Etallonde Morival et au roi Frédéric II de Prusse notamment pour dénoncer l'abjecte décision prise à l'égard du chevalier de 19 ans.

Si bien évidemment je n'ai rien à dire sur l'écriture de Voltaire, je regrette toutefois que ces écrits n'aient pas été plus nombreux ou avec des réponses en retour. le format très bref de ces écrits ne rend pas assez compte, à mon avis, du ressenti de Voltaire et par ailleurs je n'ai pas réussi à être touchée par la colère ou l'émoi qu'a dû ressentir l'auteur.
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Citations et extraits (30) Voir plus Ajouter une citation
Il faut avouer, monsieur, que s'il y a quelques cas où un monitoire(*) est nécessaire, il y en a beaucoup d'autres où il est très dangereux. Il invite les gens de la lie du peuple à porter des accusations contre les personnes élevées au-dessus d'eux, dont ils sont toujours jaloux. C'est alors un ordre intimé par l’Église de faire le métier infâme de délateur. Vous êtes menacé de l'enfer si vous ne mettez pas votre prochain en péril de sa vie.

("L'affaire du Chevalier de La Barre")

(*) monitoire (cf. Larousse): avertissement public de l'autorité judiciaire ecclésiastique demandant, sous menace de peines canoniques, de lui faire connaître tout ce que l'on pourrait savoir à propos d'un délit.
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On faisait un crime à Lally de ne s'être pas emparé de ce poste, nommé Chétoupet, avant d'aller à Madras. Tous les maréchaux de France assemblés auraient bien eu de la peine à décider de si loin si on devait assiéger Chétoupet ou non : et on portait cette question à la grand'chambre ! Les accusations étaient si multipliées, qu'il n'était pas possible que, parmi tant de noms indiens, un juge de Paris ne prît souvent une ville pour un homme, et un homme pour une ville.

("L'Affaire Lally")
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Ce procès était si compliqué, il fallait faire venir tant de témoins, que le prisonnier resta quinze mois à la Bastille, sans être interrogé, et sans savoir devant quel tribunal il devait répondre. C'est là, disaient quelques jurisconsultes, le triste destin des citoyens d'un royaume célèbre par les armes et par les arts, mais qui manque encore de bonnes lois, ou plutôt chez qui les sages lois anciennes sont quelquefois oubliées.

("l'affaire Lally")
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Quelques autres juges et lui étaient persuadés de la nécessité des supplices dans les affaires les plus graciables ; on eût dit que c'était un plaisir pour eux. Leur maxime était qu'il faut toujours en croire les délateurs plus que les accusés ; et que s'il suffisait de nier, il n'y aurait jamais de coupables. Ils oubliaient cette réponse de l'empereur Julien le philosophe... : " S'il suffisait d'accuser, il n'y aurait jamais d'innocents."

("L'affaire Lally")
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On se dépêcha de dire que le marchand de bois avait "bien jugé", et ces deux mots suffirent pour briser les os de ces deux enfants, pour leur arracher la langue avec des tenailles, pour leur couper la main droite, pour jeter leur corps tout vivant dans un feu composé de deux voies de bois et de deux charrettes de fagots.

( l'affaire du chevalier de La Barre )
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