Citations de Albert Camus (6762)
On peut savoir ce qu’est la souffrance d’amour, on ne sait pas ce qu’est l’amour.
(Carnets I, mai 1935 – février 1942)
Dans ce monde privé de sens, seul compte, l'effort des hommes à lui en donner un.
Ce n'est pas si facile de devenir ce que l'on est, de retrouver sa mesure profonde.
(" Noces")
Albert Camus à Maria Casarès, Jeudi 26 août 1948
J'ai retrouvé la phrase de Stendhal qui s'applique à toi : "Mais mon âme à moi est un feu qui souffre s'il ne flambe pas !" Flambe donc ! Moi, je brûlerai.
Plutôt mourir debout que de vivre à genoux.
N'avez-vous jamais eu subitement besoin de sympathie, de secours, d'amitié ? Oui, bien sûr. Moi, j'ai appris à me contenter de la sympathie. On la trouve plus facilement, et puis elle n'engage à rien. "Croyez à ma sympathie", dans le discours intérieur, précède immédiatement "et maintenant, occupons-nous d'autre chose". C'est un sentiment de président du conseil : on l'obtient à bon marché, après les catastrophes. L'amitié, c'est moins simple. Elle est longue et dure à obtenir, mais quand on l'a, plus moyen de s'en débarrasser, il faut faire face. Ne croyez surtout pas que vos amis vous téléphoneront tous les soirs, comme ils le devraient, pour savoir si ce n'est pas justement le soir où vous décidez de vous suicider, ou plus simplement si vous n'avez pas besoin de compagnie, si vous n'êtes pas en disposition de sortir. Mais non, s'ils téléphonent, soyez tranquille, ce sera le soir où vous n'êtes pas seul, et où la vie est belle.
Partout où l'on divinise un être ou une idée,cette idée ou cet être se retourne contre l'homme.
Si ce soir, c'est l'image d'une certaine enfance qui revient vers moi, comment ne pas accueillir la leçon d'amour et de pauvreté que je puis en tirer? Puisque cette heure est comme un intervalle entre oui et non, je laisse pour d'autres heures l'espoir ou le dégoût de vivre. Oui, recueillir seulement la transparence et la simplicité des paradis perdus : dans une image. Et c'est ainsi qu'il n'y a pas longtemps, dans une maison d'un vieux quartier, un fils est allé voir sa mère. Ils sont assis face à face, en silence. Mais leurs regards se rencontrent:
« Alors, maman.
-Alors, voilà.
-Tu t'ennuies? Je ne parle pas beaucoup?
-Oh, tu n'as jamais beaucoup parlé. »
Et un beau sourire sans lèvres se fond sur son visage. C'est vrai, il ne lui a jamais parlé. Mais quel besoin, en vérité? A se taire, la situation s'éclaircit. Il est son fils, elle est sa mère. Elle peut lui dire : « Tu sais. »
...le bonheur est la plus grande des conquêtes, celle qu'on fait contre le destin qui nous est imposé.
"Tu es entrée, par hasard, dans une vie dont je n'étais pas fier, et de ce jour-là quelque chose a commencé de changer. J'ai mieux respiré, j'ai détesté moins de choses, j'ai admiré librement ce qui méritait de l'être. Avant toi, hors de toi, je n'adhérais à rien. Cette force, dont tu te moquais quelquefois, n'a jamais été qu'une force solitaire, une force de refus. Avec toi, j'ai accepté plus de choses. J'ai appris à vivre. C'est pour cela sans doute qu'il s'est toujours mêlé à mon amour une gratitude immense."
Le mal qui est dans le monde vient presque toujours de l'ignorance, et la bonne volonté peut faire autant de dégâts que la méchanceté, si elle n'est pas éclairée. Les hommes sont plutôt bons que mauvais et en vérité ce n'est pas la question. Mais ils ignorent plus ou moins, et c'est ce qu'on appelle vertu ou vice, le vice le plus désespérant étant celui de l'ignorance qui croit tout savoir et qui s'autorise alors à tuer. L'âme du meurtrier est aveugle et il n'y a pas de vraie bonté ni de bel amour sans toute la clairvoyance possible.
Ceux qui s'aiment et qui sont séparés peuvent vivre dans la douleur, mais ce n'est pas le désespoir : ils savent que l'amour existe.
J’avais bien lu qu’on finissait par perdre la notion du temps en prison. Mais cela n’avait pas beaucoup de sens pour moi. Je n’avais pas compris à quel point les jours pouvaient être à la fois longs et courts. Longs à vivre sans doute, mais tellement distendus qu’ils finissaient par déborder les uns sur les autres. Ils y perdaient leur nom. Les mots hier et demain étaient les seuls qui gardaient un sens pour moi.
L'étranger.
Je crois à la justice, mais je défendrai ma mère avant la justice.
point d'amour sans un peu d'innocence.
L'été
J'ai répondu qu'on ne changeait jamais de vie, qu'en tout cas toutes se valaient et que la mienne ici ne me déplaisait pas du tout.
Il n'est guère de passion sans lutte.
STEPAN : Je n'aime pas la vie, mais la justice qui est au-dessus de la vie.
KALIAYEV : Chacun sert la justice comme il peut. Il faut accepter que nous soyons différents. Il faut nous aimer, si nous le pouvons.
STEPAN : Nous ne le pouvons pas.
Quelque chose ici n'était pas dans l'ordre naturel et, à vrai dire, il n'y avait pas d'ordre mais seulement folie et chaos là où le fils était plus âgé que le père. La suite du temps lui-même se fracassait autour de lui immobile, entre ces tombes, qu'il ne voyait plus, et les années cessaient de s'ordonner suivant ce grand fleuve qui coule vers sa fin.
J’ai toujours condamné la terreur. Je dois condamner aussi un terrorisme qui s’exerce aveuglément, dans les rues d’Alger par exemple, et qui un jour peut frapper ma mère ou ma famille. Je crois à la justice, mais je défendrai ma mère avant la justice.