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Citations de Anne-Marie Garat (317)


(...) l'air est froid, on dirait l'haleine des crêtes enneigées soupirée sur nos épaules.
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Nous allions quitter cet étrange chemin au milieu de nulle part qu’avaient foulé nos pas, déjà à l’imparfait l’instant s’éloignait et, convalescents, nous nous regardions, traits défaits – ce matin, je suis tombée, dis-je sans raison. Je suis tombée sur la plage et c’était un peu comme maintenant.
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Heureux ? Plutôt. Selon ce que l’on estime l’être. Selon que l’on sait trouver son contentement.
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Mieux qu'au bord du lac quand le renard m'a reconnue renard, j'apprends que je ne suis pas une mais nombreuse, appariée à une communauté d'êtres qui m'incorpore et m'adopte, hybride et singulière à la fois; immunisée. Cela se dit en pensée, sans besoin des mots d'une langue ou d'une autre, par simple télépathie imagée.
Alors, comète propulsée sur mon orbite céleste je survole le spectacle de K'àä Män tel qu'en lui-même enneigé, je vois avec des yeux neufs le plumet des épinettes hachurer ses berges au fusain, l'empreinte fraîche de sabots, de pattes palmées, écrire sur la neige le pas prudent de l'élan, du petit colvert, un escadron d'oies sauvages tracer un grand V à l'encre de Chine sur la page du ciel, autant de chiffres calligraphiés noir sur blanc qu'articule mon esprit délié. Planant en lévitation dans l'éther telle une grenouille ailée je vois que l'unité du monde existe tel qu'en lui-même transformé, qu'Herman et Kaska existent tels qu'en eux-mêmes incarnés. Onayepa en soi-même accouchée comme dans son rêve et ce n'est pas un rêve, c'est la réalité unique et multiple à moi révélée.
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Dans les maisons dont j'aperçois les toits, les femmes gèrent la vie, l'argent, la nourriture. Elles sont avisées, tenaces, fantasques et cramponnées aux choses matérielles, savantes de la main, de la langue, de l'œil. La mort laisse le veuf dépouillé, nu, grelottant dans sa chemise froide, devant l'assiette vide.
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Mais celle-là, au milieu du wagon, la vraie pauvresse qui pue des nippes, de la crinière embroussaillée sur des croûtes réelles, et du corps avachi, elle ne demande rien à personne. Pas un ne s'approche, la place est vide autour d'elle, elle intime le respect. Un côté de sa mâchoire porte une ecchymose violacée qui soulève la lèvre, elle manque de dents. Elle regarde droit devant, sans souci d'avenir.
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Une première lecture baptise. Si nombreuses soient celles qui la recouvrent au fil du temps, quelque chose de souterrain résiste au labourage des relectures, une sorte d'archive mentale en palimpseste de toutes les autres comme si cette invention première du texte ainsi que d'un site révélait, en sa puérile lumière des commencements, certaine matière brute.
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Ce qui peut se prouver n'est pas nécessairement vrai et ce qui est vrai n'est pas forcément démontrable.
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On sait, à la manière dont marchent les gens, beaucoup de choses d'eux, de quoi sont fait leur être, leur caractère ou leurs sentiments, mieux parfois que d'un regard échangé, et même de dos, surtout de dos, peut-être, par cet angle où l'on s'ignore soi-même.
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On ne connaît que de soi-même. De ce qui vous arrive et de l'expérience qu'on en fait.
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Rien ne sert de s'affoler, décréta Mme Victor, quand on ne sait même pas de quoi. Et servons-nous de notre courage avant qu'il nous manque.
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Prestement, elle a dépouillé sa peau d'ours et m'a roulée très serrée dedans, un etau de chaleur si intense que, suffoquee, je me suis tue, écoutant les surpuissantes ondes animales de l'ours se propager au tréfonds de mon être et délier l'angoisse mortelle, puis tenant mon menton tremblant dans sa main elle a chante une mélopée douce, envoûtante ; cette fois, exténuée, j'ai dormi d'un long trait, enfin aneantie d'amour et de paix nonpareille.
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Se souvenir et inventer, raisonner et rêver n'ont pas beaucoup de différence
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A force de trafiquer mon ordinateur, de circuler à tout va dans ses arborescences, ses couloirs occultes, d'y stationner des heures durant, j'ai dû détraquer le programme, l'infecter d'un virus personnel. A force, j'ai dû archiver ces images-là. Elles me sont propres. Elles me reviennent, modélisées par le système expert de ma mémoire lente.
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LA MADONNA DEL PARTO


Extrait 2

Le peu de recul qu’offraient la pièce exigüe et l’éclairage en veilleuse qui, autant qu’il épargne les pigments, confère à la fresque son aura magique, me firent paraître la Vierge telle une géante en sa robe bleue, encadrée d’anges jumeaux soutenant son dais d’or, une des rares œuvres qui représentât la Vierge enceinte. Encore que souvent elle y couvre son ventre du manteau virginal ou le ceint d’un ruban marial, quand ici elle expose avec orgueil et souveraineté le dôme renflant sa robe dont, d’un doigt paradoxal, elle écarte et referme à la fois la fente par laquelle il saille. Geste sans pareil qui fit couler bien d’encre et par lequel elle désigne le lieu de la conception – devant lequel nous sommes comme les petits enfants posant avec l’avidité ingénue de leur faim de connaissance la question la plus vieille et la plus brûlante de notre jeune humanité : d’où viennent les enfants ? Si nous spéculons sous des formes dissidentes de la raison, de la science ou de la philosophie, généticiens ni astrophysiciens n’en résolvent l’énigme, et si toute mère désigne en son ventre personnel l’origine du monde, la paternité reste sans solution, invaincu le mystère de la conception et des voies spirituelles par lesquelles s’accomplit celle-ci. C’est le génie de Piero d’avoir résumé ce que toute vie s’épuise à formuler en une création qui, comme toute œuvre d’art, n’est que la place où s’absente le monde pour se représenter, et il m’a fallu si longtemps pour déchiffrer ce que j’appris ce jour-là de la Madonna del Parto
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LA MADONNA DEL PARTO


Extrait 1

Mêmement les images, les films, et les tableaux, et non, mon si cher ami Enzo Battistini n’avait pas ignoré qui j’étais le jour d’hiver où il me conduisit au village de Monterchi voir la Madonna del Parto que dit-on y peignit Piero della Francesca en mémoire de sa mère native du village, longtemps reléguée puis oubliée dans une chapelle du cimetière où celle-ci reposait, fresque ruinée de moisissures et d’eaux de ruissellement avant qu’elle ne fût sauvée, restaurée puis exposée dans l’ancienne école, petite bâtisse en contrebas du village où nous l’avions visitée au soir tombant, par un détour que j’imputais à sa mélancolie et dont ma compagnie lui donnait l’alibi, quand aujourd’hui je crois qu’il ne m’y conduisit que parce que, ayant perçu ma détresse la veille quand j’avais subitement fondu en larmes dans son imprimerie, il avait pensé, avec la discrétion et le tact dont il était capable et sans montrer d’émotion, que ce tableau donnerait quelque réponse occulte à mon tourment.
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D'autorité, je me versai ce qui restait de café et m'assis à la table en face d'elle : votre peur d'être quittée est-elle aussi grande que la mienne que, pour ne pas l'être, vous préférez la première congédier qui vous aime ?
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Filles, séparez-vous de vos mères avant qu'elles ne vous sacrifient, gardez-vous de vous sacrifier à elles. Enfants, rouges enfants, gardez-vous de la souffrance et de la jouissance qu'il y a à sauver vos mères d'elles-mêmes, elles ont la dent si longue...
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Ce conte est d'une barbarie unique, sans pareille dans le répertoire. D'une sauvagerie totale, et d'une science parfaite.
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Car la dent ne mange pas, elle mord, elle est morsure cannibale, et dans ce raccourci fulgurant le Loup passe de l'attribut à l'acte, évacuant de manière saisissante et l'adverbe mieux, et les aménagements doucereux, ma fille, mon enfant... La réplique finale, acte en parole, marque une superbe rupture : C'est pour te manger ; il est bien dommage que nombre de versions n'en respectent pas la forme abrupte et lapidaire.
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