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Critiques de Anthony Burgess (140)
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1984-85

La controverse autour de la sortie du roman de Houllebecq, Soumission, et la relation qui en est faite par le monde des livres du vendredi 9 janvier, m’a remis en mémoire ce roman de Burgess que j’ai lu à sa sortie en France en 1980 et que je n’avais jamais ouvert depuis.

Dans le monde des livres, Emmanuel Carrère, on croit rêver !, compare, pas moins pas plus, Houellebecq à Orwell (ce dernier doit se retourner dans sa tombe, lui qui s’est battu contre les franquistes en Espagne, a failli y laisser sa vie, et écrivit plus tard Vive la Catalogne !) et Huxley prétendant que Soumission appartient à la même famille que ces deux romans qui ont marqué le siècle ! Pincez-moi SVP !

Hors donc, curieux hasard, plaisante coïncidence, heureux déterminisme, collision inattendue, réminiscences cachées et oubliées, Burgess, a construit son roman 1984-1985, en deux parties ; 1984, une analyse critique du roman d‘Orwell 1984 et de ses impacts sur notre manière de penser et de vivre l'état, la société, la contrainte, la domination, l’aliénation, l’acceptation, la révolte ; 1985, la fiction d’un futur possible qu’il projette dans l'immédiat avenir de 1984, avec en toile de fonds le délitement de la société anglaise, la montée des corporatismes, et la tentation de l’islam qui s’impose comme une alternative crédible à la crise des valeurs.

Son analyse de 1984 est connue depuis, et partagé par grand nombre de lecteurs et de critiques.

Orwell se serait simplement inspiré de l'Angleterre de l’immédiat après-guerre et le roman n’aurait fait que décrire la réalité d’un pays encore traumatisé, dans lequel la reprise en mains des moyens de production du pays suppose d’imposer une discipline que les anglais avaient oublié pendant le conflit, ou du moins avaient remplacé par une empathie permanente transcendant les groupes sociaux et les individualités.

En quelque sorte une liberté menaçante pour tout Etat organisé quel qu’il soit.

Il analyse ensuite l’influence sur Orwell du roman de E.I Zamiatine Nous autres, (paru en 1923 et chroniqué par Orwell dans le journal la tribune en 1946).

Dans ce livre, le narrateur D-503, un ingénieur plein d’avenir, décrit un monde où l’état unique, le Bienfaiteur veille, impose aux citoyens de vivre dans des maisons de verre afin de pouvoir être surveillés en permanence et où même les relations amoureuses sont codifiées (l’heure d’amour est possible à condition d’utiliser les tickets roses de rationnement), des hauts parleurs beuglent en permanence l’hymne national.

In fine D-503 assiste sans réagir à la torture de son amie I-330 et accepte de subir le traitement qui va éradiquer toutes les mauvaises pensées de son esprit.

1984 s’inspire ou s’inscrit contre toutes les théories sur la relation entre le citoyen et l’Etat développées notamment par More, Wells, Thoreau, Bakounine, Pavlov, Huxley, utopies ou expériences, toutes reviennent à vouloir définir une relation harmonieuse entre l’individu et l’Etat ou l’autorité et posent la question : peut on sacrifier la liberté au bonheur ?

Bonheur dont le contour et les conditions seraient définis et codifiés par une entité supérieure, Etat, Religion, Guilde, pour le bienfait de tous.

On sait où ce type de raisonnement peut mener. « Nous ferons votre bonheur malgré-vous ! »

La limitation des libertés aujourd’hui n’est plus imposé par une idéologie philosophique ou religieuse, mais par une idéologie sanitaire rationnelle qui entend faire notre bonheur, ou faire notre santé malgré nous.

Les interdits se multiplient à l'égard du tabac de l’alcool de la drogue, du sexe, sans que leur existence économique et leur dimension profitable pour l’Etat et les entreprises, ne soient remise en cause.

La disparition du christianisme, de son système de valeurs, qui définissait de façon simple ce qu’il fallait aimer et haïr, s’accompagne de la glorification dans les médias de valeurs autrefois considérées comme des vices et devenues des vertus, orgueil, avidité, luxure, envie et gloutonnerie.

Cette véritable schizophrénie sociale conduit à des extrémismes que certains, rebutés par l’indifférence de l’autorité à leur égard, ulcérés par les attaques de leur système de valeurs jugé rétrograde et moqué, hésitent de moins en moins à choisir, le fondamentalisme religieux, quel qu’il soit, en est un.

Sa conclusion sur 1984 est monstrueuse de lucidité :

«Mais nous avons, oui, le devoir de ne pas faire d’abstractions telles que «classe» et «race», des mots d’ordre brandis d’intolérance de terreur et de haine. A nous de nous rappeler que nous sommes tous, hélas ! à peu près du même acabit, c’est à dire assez horribles.»

La première phrase de 1985 : «C’était la semaine d’avant Noël, un lundi doux et mou, midi tapant, et les muezzins de Londres-Ouest iodlaient qu’il n'est pas d’autre Dieu qu’Allah.» montre Bev Jones, le héros, un ex-enseignant devenu poseur de noisettes concassées sur crotte de chocolat, se frayer un chemin dans une ville multiraciale, où les agences de voyage proposent des pèlerinages pour La Mecque, où des bandes de jeunes sèment la terreur, où les grèves paralysent l’activité.

Les syndicats organisés imposent leur loi, Bev veut travailler mais ne le peut pas et il refuse de se syndiquer.

Les fêtes de fin d’année s’annoncent problématiques, sa femme meurt à l’hôpital, il est seul avec sa fille de 13 ans, Bessie, complètement accro aux feuilletons TV, Sex Boy, Pif et Paf, Ric Rac et Roc, et, pour couronner le tout, il est licencié le 27 décembre.

Il rejoint une bande d’anti-état, des anciens musiciens, professeurs et autres professions dévalorisées. Le CHAOS (Consortium pour hâter l’annihilation de l'organisme social) qui s’organisent en créant un nouveau magasin C&A (le Capel et l’Alpague) où ils stockent les produits de leurs larcins.

Mais Bev est un débutant enthousiaste, trop, il se fait pincer, est condamné et conduit vers un camp de rééducation où il rencontre Mavis, avec elle il parle librement, évoque Orwell, la guerre d’Espagne, l’oncle de Bev qui s’est battu aux côtés de l'écrivain, la prolétarisation de la classe moyenne, les échappatoires possibles, leur vie dans le camp des travailleurs, leur adhésion supposée ou feinte à la doctrine.

La dérive de Bev l’amène à rencontrer un islamiste en charge de la construction des mosquées dans le monde, après celle de Rome, via della conziliazone, il attaque un nouveau chantier Great Smith Street à Londres. Aux questions de Bev, il répond :

«La différence entre l’Islam et les états syndicalo-matérialistes est aussi vaste que celle entre et Dieu une canette de bière.»

Bev récupère sa fille qui conquiert les arabes présents dans le hall de l'hôtel où il a rendez-vous avec le colonel Lawrence (!) il s’avère que les islamistes recrutent des jaunes pour briser la grève sur le chantier de la mosquée, Bev est enrôlé comme journaliste.

Sa vie change, matériellement du moins. Sa fille Bessie est demandée en mariage par le Président de l’Union Pétrolière Islamique (UPI) qui a déjà quatre épouses.

Après avoir refusé la doctrine du camp, Bev cède à ses nouveaux employeurs, il déclare même lorsqu’il apprend que le bar de hôtel ne sert plus d’alcool :

-Tout bien réfléchi, non. J’ai du travail. Pour Allah et pour la Grande Bretagne libre.

Burgess a écrit cette phrase lourde des sens :

«Avec la mort du christianisme institutionnel on verra s’étendre l’Islam»

Pour en revenir à ce qui a suscité ma relecture de 1984-1985, et ma colère :

Ras-le-bol des individus, candidats lauréats, postulants au Goncourt et autres prix, récipiendaires littérateurs, ou supposés tels par d’éminents milieux autorisées, surfant sur les craintes réelles de nos sociétés, s’emparant de sujets fondamentaux et prétendant, sous couvert d’un vernis pseudo philosophique en faire une analyse pertinente et nous dire où se trouve la vérité.

D’autant plus lorsque leurs écrits révèlent des paternités cachées qui vont au delà de la simple coïncidence. Le plagiat n’est pas très loin !



A ceux-la, je les renvoie à cette citation de Burgess :

«Je crois que nous avons passé l’âge de la naïveté où l’on permet à de simples romanciers de jouer les prophètes. Ce sont là des fantaisistes qui n’examinent pas au fond les tendances profondes. Les avenirs qu’ils présentent n’auraient jamais pu prendre naissance dans le présent que nous connaissons.»
Lien : http://desecrits.blog.lemond..
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Au sujet de James Joyce : Une introduction ..

J’adore certains livres de James Joyce. J’ai adoré Orange Mécanique (le livre). Je me suis lancé confiant dans ce livre qui analyse les écrits du romancer « pour le lecteur ordinaire ».

Bien que rempli d’exemples et de décorticages profonds de la prose de Joyce, ce livre reste assez pointu.

De plus, il s’agit d’une traduction. Ce qui rend l’exercice encore plus abscons. Joyce jouait bien trop sur les mots. Leurs diverses traductions sont à la base déjà des approximations (celui qui le peut trouvera plus de plaisir à lire Joyce dans le texte, la musicalité lui apparaîtra directement. Cela demande un bon niveau malheureusement, ça limite par là les possibilités).
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Dernières nouvelles du monde

Entre les ferments du 20ème siècle et l'apocalypse qui pourrait bien le clore. Avec sa verve habituelle, Burgess ressuscite Freud et Trostsky pour les confronter à un devenir qu'ils n'avaient pas prévu. On passe de la montée du nazisme à un clair de "lynx" sur New York. Donc, une fantaisie débridée au service d'une interrogation majeure. D'où venons-nous? Qu'allons-nous devenir? Mais rien de didactique dans ce roman magistral, plein d'action et véritable galerie de portraits. Au centre de ceux-ci, une figure d'écrivain, poète reconverti à la science-fiction, un double ironique de l'auteur.
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Dernières nouvelles du monde

Un météore géant frôle la terre et emmène la lune. L'humanité devient folle. Un pasteur veut un accès à une navette spatiale qui va quitter la terre. Les politiciens laissent le monde partir en déliquescence. Karl Marx chante et Freud étale sa vie. Un roman de SF foutraque où tout s’entremêle sans qu'on ne comprenne où l'auteur veut en venir ... en tout cas jusqu'au dernières pages : Dernières Nouvelles du Monde n'est pas un ouvrage indispensable mais tout de même plaisant à lire.
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Du miel pour les ours

Dans ce livre Burgess nous donne un portrait de l'Angleterre et de la Russie. Une farce légère mais non dénuée de profondeur. Un livre à découvrir pour sa langue et sa sensibilité.
Lien : https://viduite.wordpress.co..
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Ferraille à vendre

Intéressante tranche de vie et un (seul) éclat de rire au milieu du bouquin.
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L'Homme de Nazareth

Un poil trop évangélique à mon gout d'athée total mais très agréable à lire. Fidèle aux quatre évangiles, Anthony Burgess comble les trous pour écrire un roman d'aventure, le long cheminement d'un homme, tant physique, vu les déplacements, que spirituel qui le mèneront au martyre. C'est souvent très drôle, le langage utilisé est celui de l'individu X du XXème siècle qui prend le métro, celui déjà utilisé pour l'empire des mécréants.

Petite remarque : Jésus est mort juif, pas chrétien, c'est juste pour ceux qui s'étripent au nom du vrai dieu, d'ailleurs l'islam puise aux mêmes racines. Autre détail, les romains n'utilisaient pas de croix mais un Tau, plus facile à construire et moins couteux en bois, mais bon, c'est un détail...

C'est du pur Burgess, on adore ou on déteste. A vous de voir.
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L'Homme de Nazareth

Livre impressionnant,deroutant.Des le debut,l'auteur nous informe qu'il a decide de faire de Jesus,un homme marie mais n'ayant jamais eu d'enfant,et un homme "hors norme" quant a sa stature et sa force physique.

Ce livre est rempli de citations de l'ancien testament, et sont interpretees au niveau de l'homme et non au niveau de Dieu.Un peu philosophiques,ces citations nous permettent d'y reflechir meme si ce n(est pas le but de cet ouvrage;on est amene a se remettre en question quant a la foi en l'homme.Ce livre est riche en enseignements d'amour en l'homme,nouvelle foi que Jesus donne aux hommes.

J'ai beaucoup aime et ai été ravie de pouvoir me remettre en question,de pouvoir reflechir et aborder la vie différemment;c'est aussi une nouvelle facon d'apprehender Jesus et d'accorder confiance en l'homme.
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L'Homme de Nazareth

Conclusion de la présentation du livre en quatrième de couverture, rédigée par l'auteur :

" Par dessus tout, j'ai voulu marquer qu'il n'est d'espoir pour l'homme que dans la régénération personnelle. La réforme politique est sans espoir. La croix est le symbole de l'Etat - l'Etat de César ou du président de la République française aussi bien. La voie du Christ - le chemin de croix - est la seule viable."
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L'Homme de Nazareth

Impossible de gâcher l'intrigue ! Travail encyclopédique sur les évangiles.

Au moins deux passages particulièrement bien romancés ont retenu mon attention par rapport à d'autres romans également inspirés des évangiles.

Salomé et la décapitation de Saint Jean. L'intrigue à la cour du roi : le rôle de la mère, sa fille, la situation familiale et politique, tout est particulièrement bien rendu.

La crucifixion enfin, la souffrance, humaine, malgré tout.
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L'orange mécanique

Alex, Notre Humble Narrateur, aime Ludwig van B. Et pour aller avec, vols, viols, bagarres... jusqu'au meurtre de trop.

Un récit sur le passage à l'âge adulte, un conte philosophique qui questionne sur la violence, le conditionnement. On en éprouve même de la sympathie pour le héros après son traitement. Qui sont les brutes quand les vieux crêvent de faim, les policiers bastonnent les passants, les scientifiques n'ont plus d'éthique, les politiciens ne pensent qu'à leurs intérêt. Beau travail sur le nasdat, l'argot de la jeunesse dépravée.
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L'orange mécanique

J'ai été emportée par la lecture de ce livre dont le langage m'a d'abord surprise. Mais l'auteur utilise les mots avec une habileté qui m'a conquise et je n'ai pu lâcher le roman. Cette histoire a été écrite il y a déjà soixante ans, et pourtant elle est tellement d'actualité. L'orange mécanique, en cockney, signifie bizarre. Un jeune à la tête d'une bande tue, torture et viole sans remords. En prison, il subit un traitement qui va le rendre doux. La suite? je ne vous le dis pas, ce serait dommage de gâcher votre plaisir. Je rends hommage aux traducteurs qui ont accompli une prouesse et vous le saurez en lisant le livre.
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L'orange mécanique

Un ouvrage difficile à lire en raison de son vocabulaire particulier (le lexique présent à la fin de l'ouvrage est bien nécessaire pour tout comprendre) mais intéressant tout de même.

Je conseille personnellement de lire l'Orange Mécanique avant de visionner le film adapté de cet ouvrage par Kubrik car on reste très imprégné des images violentes véhiculées par celui-ci en particulier pour toute la première partie du livre. La seconde et la dernière partie du livre restent selon moi les plus intéressantes. On y distingue un message clair et plein de bon sens que l'auteur fait passer au lecteur et qui passe inaperçue dans le film.
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L'orange mécanique

Un classique. Lu après avoir vu le film dans ma jeune adolescence. Relu pour le plaisir et le frisson de ses mots qui "gliffent" encore en moi.
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L'orange mécanique

Bon, alors, ça sera quoi, hein ? L'Orange Mécanique de Anthony Burgess est un livre oudzassny qui m'a laissé toute pleine de radotsie et un malenky eberloqué, Ô mes frères.

Beaucoup connaissent l'histoire d'Alex et de ses Drougs grâce au film tzarrible de Stanley Kubrick mais peu savent que c'est c'est ce vesche qui est à l'origine de tout.



Alex est un maltchick qui traîne la nuit avec Pierrot, Jo et Momo, ses trois Drougs. Ce qu'ils aiment le plus : drinker du moloko au Korovo Milkbar avant de s'offrir une tournée d'ultra-violence. Ça toltchocke, ça se skvate, ça craste, ça oubivate à coups de nodz ou de britva et ça joue au bon vieux dedans-dehors des familles avec des ptitsas qui ne sont pas d'accord. Mais un jour Alex tue une vieille devotchka et se retrouve enfermé à la Prita jusqu'à ce qu'on lui propose de prendre part au programme Ludovico...



L'Orange Mécanique est devenu culte parce que c'est un livre qui parle de plein de vesches tzarribles genre la violence, le mal ou encore le libre arbitre. Mais c'est surtout parce que Alex utilise des slovos étranges, une nouvelle langue inventée par Burgess : le nadsat. Au début, le lecteur se sent tout bezoumni, il est obligé de se creuser le rassoudok pour pommer tous ces slovos mais, au bout de quelques pages, ces nouveaux slovos deviennent ceux du lecteur qui ne se sent plus du tout gloopy. Alors le lecteur avale zoum le livre et le ferme tout bouhou-houant parce qu'il est déjà fini.



On ne peut pas dire que L'Orange Mécanique soit pour tous les devotchkas et les maltchicks parce que c'est un malenky peu spécial au niveau du style et de l'histoire. Et puis, Ô mes frères, il y un malenky beaucoup d'ultra-violent qui pourrait bien vous laisser bolnoï quand ce bratti d'Alex fait couler du krovvi rouge rouge. C'est possible que vous ayez besoin d'un écossais ou d'une cancerette pour vous remettre.



Encore un slovo et je vous laisse tranquille (toutes mes exqui cucuses usées si ça vous a semblé long) mais j'ai préféré la fin de Stanley Kubrick à celle de Burgess qui n'est pas aussi puissante dans ses slovos que celle du film. Mais ce n'est que l'avis de votre Humble Serviteur, mes frères.



L'Orange Mécanique est un des meilleurs livres que j'ai lu de toute ma jiznée, merci Anthony !
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L'orange mécanique

Vous connaissez forcément le film, sorti en 1971, qui a été tiré de ce livre. Le chef-d'œuvre de Stanley Kubrick est encore dans toutes les mémoires, autant pour la maîtrise parfaite du sujet et la perfection de la réalisation que pour le dérangement que constitue le thème même du film - et du roman, c'est à dire l'ultra-violence.

Au départ c'est du vécu : en 1944, la femme d'Anthony Burgess se fait agresser et violer par quatre soldats déserteurs. De ce drame, Burgess va tirer un roman à la fois éprouvant et profondément déroutant, L'Orange mécanique. Pourquoi "orange", pourquoi "mécanique" ? il semblerait qu'une expression d'argot "clockwork orange" qualifie quelque chose d'à la fois bizarre et inquiétant. Ces deux qualificatifs correspondent on ne peut mieux au roman - et au film.

L'Orange mécanique est un roman de science-fiction, bien que le propos dépasse largement ce cadre-là. Ecrit en 1962, il est encore aujourd'hui, 60 ans plus tard, d'une actualité brûlante.

Nous sommes donc à Londres dans un futur pas si éloigné. Une bande de voyous, dont la violence est la seule raison d'être, passe son temps à se battre, voler, violer, peut-être même tuer, à l'occasion. Leur chef Alex finit par être un jour trahi par ses copains, et arrêté. En prison, on lui fait subir une expérimentation destiné à l'éloigner des pulsions violentes. Mais une fois libéré et confronté à son ancienne vie, de bourreau il devient victime.

Les questions que posent le roman sont multiples. La violence, d'abord. Comment la combattre, la canaliser, est-elle parfois justifiée, quelles formes peut-elle revêtir ? L'expérimentation médicale ensuite. Quelle est sa légitimité ? Donne-t-elle le choix au "cobaye"? Enfin l'être humain garde-t-il son essence quand la science l'amène à devenir une machine ?

Ce roman, on le voit, donne à réfléchir. Mais l'autre intérêt, tout aussi remarquable consiste dans la forme : le narrateur, Alex, s'exprime dans un argot particulier le Nadsat, composé hétéroclite de russe, d'anglais et d'idiomes divers (un lexique est proposé à la fin de l'ouvrage). Ce parti-pris d'écriture donne au roman un aspect particulier : on est constamment sur le point de vue du narrateur (ce qui nous permet de constater son évolution) et en même temps le langage dessine l'atmosphère générale du roman (et du film), bizarre, déconnectée de la réalité, et au total beaucoup plus inquiétante que fantaisiste.

Un livre à lire, et un film à voir (même si tous les deux sont dérangeants), à la fois pour la forme et pour le fond

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L'orange mécanique

Un de ces livres que tout le monde croit connaître mais que peu ont lu. La faute au cinéma et à Stanley Kubrick. On pourrait dire la même chose du Vol au dessus d’un nid de coucou, qui est un excellent film de Milos Forman mais ne fait pas oublier le roman éponyme de Ken Kesey. Il y en aurait d’autres, Fahrenheit 451 peut-être…



Bref, L’orange mécanique, c’est l’histoire d’Alex (antihéros par excellence), adepte de l’ultra-violence gratuite et de Ludwig Van, qui sème la terreur avec ses potes (droogs) parmi les bandes rivales, les filles seules, les clochards mais aussi un couple de braves (?) intellectuels un soir de délire et d’abus de boissons sur-vitaminées ! Jusque là tout va bien (enfin, si l’on peut dire !) et on est quand même très en dessous d’un Tarentino en pleine forme ! C’est ensuite que ça se complique quand le jeune Alex est arrêté et pris comme cobaye pour une cure de désintoxication expérimentale (une sorte de thérapie fondée sur l’aversion) destinée à le libérer de ses pulsions violentes. On quitte alors le fait-divers pour entrer de plain-pied dans les questions de société et l’on est presque amené à s’apitoyer sur un Alex réduit à l’état de pantin par des individus peut-être pas au dessus de tout soupçon. La fin justifie-t-elle les moyens ? Décérébrer un individu est-il le remède que la société doit appliquer pour endiguer la violence ? Des questions pour un roman souvent considéré comme une simple apologie de la violence (rappelons que le film a été longtemps retiré des écrans au Royaume-Uni).



Dans ce thriller glaçant, Anthony Burgess a mis beaucoup de lui-même, de son histoire personnelle mais aussi de son amour des mots, de la langue et de la musique. Il a aussi réfléchi aux dérives des sociétés futures (cf. 1985). Un très grand livre sur un monde déshumanisé et déshumanisant dans lequel l’individu peine à se positionner. Une des brillantes dystopies du 20ème siècle.

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L'orange mécanique

Ce livre est un véritable coup de cœur pour moi. C'est un drame psychologique puisé d'un évènement marquant dans la vie de l'auteur. En effet, sa femme a été violée par des soldats désertant de la Seconde Guerre Mondiale. De ce fait, Burgess utilise ce roman comme une vengeance personnelle. Le thème est dur, on entre dans l'intériorité d'un adolescent, Alex, et nous sommes embarqués dans son jeu de délinquance. Très vite, nous nous retrouvons dans des situations malsaines qui paraissent cependant tout à fait normales et plaisante pour le jeune homme. Alors, une ambiance gênante s'installe entre notre morale qui nous dis que c'est mal et une forme de pitié pour Alex face à son esprit qui ne lui permet pas de voir qu'il fait du mal. Par toute une succession d'évènement, nous suivons son parcours et évoluons avec lui.

Le titre, L'orange mécanique, prends tout son sens à la fin du livre. Il faut savoir que Burgess a mis dans ce titre une symbolique importante à saisir. En effet, "orang" (en Malaisie) signifie "être humain". Remis dans son contexte tout le livre tourne autour de l'homme mécanique. Aussi, l'auteur va utiliser tout le long de son histoire un argot : le Nadsat. C'est un mélange de russe, de manouche et d'anglais. Mais pas d'inquiétude, un glossaire est présent en fin de livre pour vous aider à traduire les mots difficiles bien que mis dans le contexte il n'est pas très utile de se référer à ce glossaire.

Avec un aspect de la psychologie comportementale et une introspection constructive à vivre je vous conseille fortement ce livre.
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L'orange mécanique

C'est le récit d'un jeune homme qui s'intéresse essentiellement à la violence, qui tue et qui viole. Le livre va bien au-delà de ce raccourci rapide pour parler d'une société qui entend transformer chaque individu en agneau et le modeler à sa guise. Renvoyant dos à dos les extrêmes, Anthony Burgess n'est pas de ceux qui pense que le peuple vendra sa liberté pour une existence formatée. Place à l'homme capable de songer par lui-même, quitte à s'engouffrer dans le pire chemin ...
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L'orange mécanique

L'orange mécanique est un film que j'aime bien. J'avais bien accroché pendant ma période ado rebelle. Aujourd'hui je l'aime toujours autant, mais j'ai cessé de le regarder en boucle.



À l'époque, j'ai foncé sur ce livre avec beaucoup de curiosité. Je pensais que la langue bizarre du film avait était inventée par ce bon Stan. Que nenni ! C'est bien l'auteur qui a inventé une langue rien que pour nos héros, en en mélangeant 2. Je me souviens que c'était laborieux et que ça avait fortement ralenti ma lecture, au point de mettre plusieurs semaines à lire ces 214 pages. Le nadsat, c'est compliqué. Autant dire que j'allais vers cette relecture à reculons. Je pense que ces 10 bonnes années entre ces lectures m'ont permis d'acquérir un peu de sagesse. Ça a été une surprise de constater que passées les premières pages, et passées les premières lignes à chaque fois que je reprenais le livre, je n'y faisais plus attention. Comme lorsque je lis un livre en anglais, je me concentre sur le contexte et le sens général plutôt que de m'attacher au sens précis de chaque mot.



Aujourd'hui, je comprends mieux l'oeuvre (du moins, je pense). Je comprends que c'est une dystopie, et que c'est une histoire inventée (même si le monde actuel ne tourne pas beaucoup plus rond que celui inventé par Burgess). Ça explique aussi les fringues bizarres (celles qui ont fait une partie du succès du film ne figurent pas dans le livre). Et surtout, ça met de la distance entre le lecteur et la violence décrite. Je comprends aussi que ça parle de choix. Le choix d'être bon ou mauvais opposé au fait de forcer un être humain a être bon.



L'amour de ce héros pour la musique classique et ce bon vieux Ludwig van soi-même m'a beaucoup touchée. Le fait qu'on l'utilise contre lui aussi. J'ai fini par éprouver de l'empathie pour cet humain qui n'en porte que le nom. C'est un monstre et pourtant, je souffrais pour lui. Est-ce que ça veut dire que moi-même je suis humaine ?
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