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Critiques de August Strindberg (83)
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Le rêve de Torkel

Le rêve de Torkel, c'est l'île de Fagervik qu'il aperçoit depuis Skamsund, l'île où il vit. Tout oppose les deux îles. Skamsund (dont le nom évoque la honte) est un ilot aride où les habitants doivent trimer pour assurer leur survie ; l'autre, Fagervik (dont le nom évoque la beauté) est une île où se prélassent des vacanciers oisifs dans un cadre magnifique. On le voit d'emblée, on se trouve dans un univers dichotomique, proche du conte, de la parabole, impression que renforce la morale un peu trop clairement énoncée à la fin. Mais le charme de cette nouvelle tient plutôt au parcours de ce jeune garçon qui va apprendre que la vie, justement, n'est pas si simplement divisée entre bon et mauvais, beau et laid, et que trouver sa voie est un peu plus complexe. La morale, c'est celle qu'il s'est forgée, par son éducation et son expérience. On regrette presque que Strindberg n'ait pas développé son idée pour en faire un texte plus long.
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Mademoiselle Julie - Le Pélican

strindberg s'est levé un matin, et il a choisi la violence, big up à lui.



aucun personnage n'est attachant, tous sont détestables, pénibles ou terriblement stupides, et c'est ça que j'adore, c'est bien d'avoir des héros bêtes à manger du foin ou terriblement méchants, marre des protagonistes parfaits et attachants, on veut davantage de personnages comme ça, parce que c'est ça finalement l'humanité, de la bêtise et de la cruauté !!!
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Mademoiselle Julie

Mademoiselle Julie traîne après elle un parfum de scandale : sa rupture complètement inattendue avec le bailli qu'elle devait épouser et, bien avant cela, son éducation digne d'un garçon par une femme anticonformiste qui a refusé, même enceinte, d'épouser le Comte qui était amoureux d'elle, puis s'est résolue à régulariser secrètement tout cela. Pour Strindberg, misogyne même pour son époque, convaincu que son héroïne est : "Victime d'une croyance erronée (qui a saisi même des cerveaux plus forts) selon laquelle la femme, cette forme rabougrie de l'être humain, stade intermédiaire vers l'homme, le maître de la création, le créateur de la culture, serait égale à l'homme ou pourrait l'être, et se développerait en un effort déraisonnable qui la fait tomber. Déraisonnable car une forme rabougrie régie par les lois de la reproduction" ne peut prétendre à rattraper jamais l'homme. Il faut le citer pour le croire.



Pour ce naturaliste, le déterminisme éducatif, social, sexué qu'elle porte sur elle a la même tonalité tragique que chez Zola, par exemple : elle est condamnée pour ce qui serait permis à tout autre qu'elle. Ainsi par exemple, les amours ancillaires peuvent la faire déchoir...



Mademoiselle Julie est folle, la déclaration est sans appel, dans les bouches des domestiques. Elle tient mal son rang de fille de Comte, elle a des comportements libres qui sont déplacés, et elle est dans la provocation de celle qui croit se permettre tout à cause de son rang social, sans percevoir que la révérence qui lui est due l'oblige... Elle va tomber dans le piège que Strindberg croit inévitable chez une "demi-femme", l'incapacité à se dominer et à vouloir ce que son sexe veut et à déchoir... Piège aussi des poncifs du romantisme qui persistent et qui font rêver d'absolu pour se retrouver avec le prosaïsme, voire la souillure, le plus affreux. Sous la plume-pinceau de Strindberg, qui est aussi un peintre expressionniste, les images-symboles, parsèment la pièce et préviennent de son dénouement.



Évidemment, la pièce a tout pour me déplaire dans la thèse qu'elle véhicule, mais ces fameuses images proleptiques et cette version des maîtres-valets au théâtre qui, pour moi, renouvellent le thème, valait la peine d'être connue. J'ai irrésistiblement pensé, à cause de cette fascination, adulation-mépris, des serviteurs pour leurs maître, aux Bonnes.
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Le sacristain romantique de Ranö

Dans ce court mais étonnant roman, Strindberg nous narre la vie d'Alrik Lundstedt, un jeune homme pauvre, épris de musique, qui quitte son village et son père pour aller suivre les cours de l'Académie de musique à Stockholm. Il y découvre la beauté, tant sous sa forme artistique que sous les traits d'une mystérieuse jeune femme. Face à l'adversité, Alrik parvient à transcender la réalité en y juxtaposant une réalité parallèle, plus conforme à ses rêves. C'est ainsi qu'il parvient à supporter un quotidien décevant à bien des égards. Ou du moins le croit-on, jusqu'à cette phrase, lâchée mine de rien : "les voisins affirment qu'il n'a jamais étudié à l'Académie de musique, n'a jamais connu ses parents et n'a jamais été marié". Mais alors, Alrik se contente-t-il de se leurrer lui-même, ou le narrateur berne-t-il aussi le lecteur ? Les envolées de l'imagination d'Alrik nous valent quelques passages très jolis, notamment ceux où il juxtapose dans son esprit orgue d'église et orgues basaltiques grandioses. On retrouve condensés ici nombre des thèmes chers à Strindberg , notamment celui de l'artiste qui n'est pas reconnu, ou pire qui est jalousé, ainsi qu'il se voyait lui-même. C'est à ce titre une bonne entrée en matière pour découvrir Strindberg, même si ce n'est pas le titre que j'ai préféré.
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Théâtre complet, Tome 5 : La mariée couronnée, Bl..

En guise de préface, je refuse de prétendre avoir compris tout ce qui s'est passé dans Le Songe, un jeu de rêves d'August Strindberg.



Cependant, comme la plupart des lecteurs je n'avais pas la moindre idée de ce à quoi m' attendre. Le Songe, un jeu de rêves est une vision rafraîchissante des rêves qui prennent vie, et qui repousse les limites de son concept de narration.



Au fur et à mesure qu' Agnès, une fille des dieux passe plus de temps avec divers humains, tout ce qu'elle commence à voir, c'est la douleur, le chagrin et la souffrance de chacun. Le monde froid et morne dans lequel elle est arrivée est loin de ce à quoi elle s'attendait. Agnès en vient lentement à accepter que les humains ne sont qu'une répétition sans fin de devoirs, de péchés et de culpabilité jusqu'à ce qu'ils disparaissent.



Au fur et à mesure que Strindberg devenait plus connu, sa démence s'aggravait. Il est passé de pièces de théâtre de manière linéaire qui apaisent tous les membres du public à des spectacles qui repoussent les limites du temps, des performances et de la santé mentale du public à leurs limites.



Après avoir traversé une période d'épisodes psychotiques extrêmement graves, Strindberg a décidé de transformer ce qu'il ressentait en une grande performance. Le Songe, un jeu de rêves  a été créé comme un reflet fragmenté de la façon dont nous voyons nos rêves et sa tentative d'analyser sa signification. Si la pièce va délibérément à l'encontre des normes du théâtre, le résultat est tout simplement spectaculaire.



Tout comme un rêve est rempli d'objets et d'idées de sa vie, chaque ensemble contient des éléments thématiques répétitifs et des décors. La pièce récurrente la plus importante est une porte mystérieuse dont beaucoup sont curieux de savoir ce qui se cache derrière. Cette curiosité des personnages s'étend à l'ensemble des lecteurs, chacun suppliant d'explorer et de découvrir la vérité.



Ces aspects récurrents des différents moments de la pièce ressemblent aux rêves d'une personne et au symbolisme qui en découle lorsqu'ils sont disséqués à un niveau plus profond, nous conduisant à un état de confusion.

Mais c'est cette confusion que nos rêves nous donnent qui laisse quelque chose de plus beau que nous n'aurions jamais pu nous imaginer.
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Le Bouc émissaire

Excellent roman d'August Strindberg, son dernier, écrit 5 ans avant sa mort. En 150 pages, tout l'art de Strindberg. Certes, on le connait mieux comme dramaturge que comme romancier, mais les amateurs du théâtre de Strindberg devraient y trouver leur compte, tant tout dans ce petit roman rappel son théâtre : un petit nombre de personnages, une action dense qui avance essentiellement par les dialogues, et une unité de lieu qui ne s'encombre guère de descriptions lyriques. Le propos du roman n'a pas vieilli : la gentillesse, la droiture, l'honnêteté sont-elles récompensées ? Pourquoi ceux qui truandent, volent, filoutent s'en sortent-ils trop souvent indemnes ? On éprouve de la pitié pour ce pauvre homme, droit dans ses bottes, qui se mortifie lorsqu'il commet un petit pas de côté, mais qui voit prospérer ceux qui ne s'encombrent pas des bons sentiments. Le roman est suivi d'une excellente postface d'Elena Balzamo, la traductrice, spécialiste de Strindberg, qui redonne des éléments de contexte et un éclairage très intéressant.
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Mademoiselle Julie

C’est une pièce qui, dans un lieu commun et étroit -une cuisine-, développe un univers de sensibilités et d’émotions. Au-delà de l’histoire qui se construit sur le mépris, cette pièce permet une mise en abîme des luttes sociales: lutte de pouvoirs, lutte de classes, lutte pour l’amour.

J’ai beaucoup apprécié ce texte fort de ce dramaturge suédois.

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Le Fils de la servante

Je connais mal Strindberg. Peut-être ai-je vu autrefois une représentation de Mademoiselle Julie, mais sans même que je me souvienne pourquoi, je ne me rappelle de rien.



Peut-être que, comme pour Mulukuku il y a quelques jours, le boulevard qui m'est laissé en l'absence de précédente critique, l'ivresse d'être le premier rédacteur (je blague), me pousse à me lancer. J'y vais !



Je connais donc mal August Strindberg, mais je connais mieux désormais le jeune Strindberg, car c'est lui le fils de la servante dont il raconte les 18 premières années (1849-1867) à la troisième personne, choix singulier qui ajoute une distance dans le récit de ses souffrances et de ses frustrations, écho au sentiment d'étrangeté qu'il éprouve et de la solitude qu'il subit et subira : "Sa sympathie pour les hommes ne devait pas être payée de retour."



Le personnage, le sujet du livre, est donc le fils de la servante d'un bourgeois obtus, père taciturne remarié à la mort de la mère avec la gouvernante. "Toute sa vie, il aura ce regret de sa mère, il se sentira seul."



Le père est un obstacle avant de n'être plus rien, incapable de compréhension et plus encore d'amour pour son fils ainé, de surcroît accablé d'un petit frère. "Il resta comme le gui, qui ne peut pousser sans être soutenu par un arbre : il devint une plante grimpante qui devait se chercher un tuteur."



J'ai été impressionné par la puissance de ce personnage, ce qu'il parvient à devenir quand tout paraît devoir l'entraver, la famille, la société suédoise puritaine qui réprouve "son instinct sexuel", la religion qu'il affronte avec orgueil : "Sa chair était trop jeune et trop saine pour avoir le désir d'être cloué la croix."



Nous sommes encore sous les Lumières, au moment d'un compromis social profitable à la bourgeoisie qui "maintient une certaine apparence démocratique". Mais Strindberg n'est pas dupe et, dans sa solitude, il rêve avec confiance à l'avènement d'un monde heureux. Sa critique sociale est pleine d'espoir.



Mais ça c'est le jeune Strindberg, le fils de la servante. Plus tard il changera, abandonnera ses idéaux démocratiques, et l'éternel persécuté sera aussi victime du délire de la persécution. Mais ça, c'est une autre histoire.



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Au bord de la vaste mer

Qui lit encore August Strindberg de nos jours ? J'avoue qu'avant de découvrir ce roman paru en 1890, le nom de son auteur ne m'évoquait pas grand-chose, j'aurais même pu le prendre pour celui d'un coéquipier de Zlatan en équipe nationale. Direction la Scandinavie : la vaste mer du titre est la Baltique, pas si vaste que ça en réalité. C'est aussi une mer allégorique, ainsi que la fin du roman nous le suggérera.



L'histoire est centrée sur le personnage d'Axel Borg, fonctionnaire de l'État suédois, envoyé sur une île pour y superviser l'activité des pêcheurs locaux. À première vue, le sujet peut paraître assez austère... Et oui, ça l'est. Pas d'humour ou de légèreté ici, il s'agit d'un roman aussi riant et chaleureux que les paysages nordiques. Strindberg se plaît d'ailleurs à nous offrir de longues descriptions de la nature, ainsi que des développements scientifiques et philosophiques tel que cela se pratiquait au 19ème siècle. Cet aspect sert surtout à appuyer le caractère très intellectuel, réfléchi, introspectif de son personnage principal... qui, durant tout le roman, va contraster avec l'environnement fruste où il se trouve plongé dans le cadre de sa mission d'inspecteur des pêches.



Jamais Borg ne parviendra à s'intégrer à la population de l'île, il en est tout à fait incapable : il est l'archétype de ces individus intellectuellement supérieurs, mais handicapés par un manque criant d'intelligence sociale et émotionnelle. C'est un homme très (trop ?) conscient de ses qualités, et qui souffre de n'avoir jamais trouvé sa juste place dans la société, de tout temps persécuté "d'en bas par les inférieurs, d'en haut par les médiocres". Quand il demande pourquoi les habitants de l'île le haïssent et qu'on lui répond que c'est parce qu'il leur est supérieur, il dit : "Je ne le crois pas, car leur intelligence est insuffisante pour apprécier ma supériorité"... À ce stade, Borg a sans doute perdu la sympathie de pas mal de lecteurs, et il s'en fichera bien d'avoir gagné la mienne. Et que dire de sa vision des relations sociales, des femmes et de l'amour – ou plutôt de ces "instincts féroces qui se dissimulent sous le grand nom d'amour" !



Car le flot des sentiments vient chambouler le bel ordonnancement de la vie de notre scientifique, lorsqu'il rencontre Maria, jeune femme plus si jeune puisqu'elle a déjà trente-quatre ans, dont on apprendra plus tard qu'elle est de celles que "l'homme n'épouse pas", et qui en fin de compte ne semble pas du tout assortie à lui... Mais même la personne la plus rationnelle ne peut lutter face au court-circuitage des fonctions de son cortex préfrontal (voir ma récente critique sur "Les souffrances du jeune Werther"). Faute de pouvoir trouver une compagne à son niveau, Borg se résigne à s'abaisser à celui de la modeste Maria. C'est peine perdue, ils rompent presque aussi vite qu'ils se sont fiancés. La romance est donc courte, ce ne sont pas ses développements qui intéressent l'auteur, mais plutôt ses causes (s'étant longtemps préservé des sentiments, Borg y est d'autant plus vulnérable, de la même manière qu'un organisme surprotégé perd ses défenses immunitaires) et surtout les funestes conséquences de cette passion amoureuse : sans trop spoiler, on devine que tout cela ne se terminera pas par "Ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants".



Au-delà de la question de l'amour, les idées qui irriguent "Au bord de la vaste mer", telles que les inégalités fondamentales entre les différents groupes sociaux, devaient déjà faire grincer certaines dents en 1890, et ces pages sont teintées d'une misanthropie et surtout d'une forte misogynie. J'ignore si le personnage de Borg est un avatar de Strindberg ou si l'auteur a fait en sorte de pousser le curseur au maximum pour faire réagir son lectorat. En tout cas cela a fonctionné chez moi, songeant plusieurs fois "Non, il n'a quand même pas osé !" avec ce plaisir de l'enfant qui entend proférer des gros mots. Sans dire que j'adhère à tous les propos et analyses de Strindberg, je mentirais si je prétendais les rejeter totalement... Mais là encore, de nombreux lecteurs ne seront peut-être pas aussi réceptifs. À l'heure où on en est à caviarder Roald Dahl ou frapper J.K. Rowling de damnatio memoriae, il faudrait presque ajouter un trigger warning en tête de chaque chapitre. On peut imaginer ce qui arriverait à l'oeuvre de Strindberg si nos nouvelles Ligues de Vertu avaient la curiosité de se pencher sur elle...



En attendant, la lecture de "Au bord de la vaste mer" reste autorisée, et si ce n'est clairement pas un roman que je conseillerais à tout le monde, il mériterait néanmoins d'être un peu plus mis en lumière.
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Sensations détraquées

Un court récit autobiographique de la fin du 19eme siècle. Le narrateur auteur revient sur un épisode de sa vie où en arrivant sur Versailles, se promenant dans les rues connues de la ville, il perd le fil de sa mémoire et de ses sensations transformant l'expérience d'une simple balade en hallucinations qu'il essaye de décortiquer sous un angle scientifique. De très beaux passages oniriques richement illustrés par des ondées d'encres vibratoires.
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La Sonate des Spectres



La Sonate des Spectres est l'une des pièces de chambre de Strindberg, ainsi nommées pour leur intimité, leur lyrisme et la simplicité de leur thème. Comme la musique de chambre, les pièces de chambre ont été conçues pour un petit public, en particulier ceux du théâtre intime de Strindberg. La Sonate des Spectres est de forme abstraite, présentant une série d'images évoquant un rêve.

La conscience dominante de la pièce est un étudiant, Arkenholz, qui progresse à travers les épisodes symboliques du rêve jusqu'à ce qu'il acquière la compréhension, moment auquel le rêve se termine par son réveil. Pendant qu'il est dans le rêve, Arkenholz est poète-chercheur, possédant une acuité de perception exceptionnelle. Il est cependant limité par un vieil homme tout aussi puissant que maléfique (Hummel), qui guide Arkenholz dans une maison dans laquelle résident des personnages étranges et symboliques. Dans la pièce la plus à l'écart de la maison il y a la fille aux hyacinthes - vision de la beauté et de l'amour à laquelle l'étudiant ne peut résister. Je me pose une question, TS Eliot avait-il lu (ou vu) cette pièce avant d'écrire The Waste Land:

‘Tu m’as donné des hyacinthes pour le première fois il y a un an;

On m’appelait la fille aux hyacinthes.’



La quête mythique d'Arkenholz commence sur la façade du bâtiment, où il rencontre une laitière et Hummel, un vieil homme en fauteuil roulant qui lui dit qu'en assistant à la Walkyrie de Wagner, il entrera dans la maison. Hummel identifie alors ses habitants : le colonel qui bat sa femme ; la statue en marbre de la femme du colonel, devenue momie ; la Dame en noir; le consul mort; le fiancé décrépit, qui est fou ; la femme du gardien; et, dans la salle Hyacinthe, la fille.

Une fois à l'intérieur, l'étudiant observe la coterie contre nature dans la salle ronde, où il est témoin du traitement inhumain du colonel par Hummel et entend parler d'un réseau de relations sexuelles alors que les habitants de la maison se rassemblent pour leur souper rituel. L'étudiant s'arrête pour les présentations à la momie, qui sort de son placard en criant comme un perroquet, et à la statue de marbre de sa forme juvénile, tandis que Hummel, qui a engendré l'enfant de la femme, se pend dans le placard. Sans son guide, Arkenholz poursuit son voyage dans le monde intemporel de la salle Hyacinthe, dans laquelle l'horloge qui se dressait bien en évidence sur le manteau de la salle ronde et sonnait pour signaler les dernières minutes de la vie du vieil homme est remplacée par une statue du Bouddha.

Un monde d'intimations, invitant de manière suggestive ses lecteurs dans son paysage apparemment étrange mais curieusement familier, La Sonate des Spectres est une vision richement évocatrice de la culpabilité et de l'expiation, de l'innocence et du mal, qui s'étend à toute l'humanité.

Strindberg a dit que l'écriture de la pièce avait été une expérience douloureuse, qu'il savait à peine lui-même ce qu'il avait écrit, mais qu'il ressentait le sublime.
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Mademoiselle Julie

Julie: une enfant gâtée qui séduit le cocher ? Pas vraiment. Une princesse tout de même, qui va s’enflammer au contact d’un jardinier de la Saint-Jean. Belle histoire comme celle de l’amant de Lady Chatterley ? Pas vraiment. La belle vit une histoire qui la pousse au désespoir. Malgré la victoire de l’amour sur les conventions sociales, du corps sur l’esprit, du primitif sur la pensée trop réfléchie, l’explosion des conventions et la quête d’amour se font ...à coups de foudre qui tue.
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Le cabinet rouge

Je connaissais Strindberg pour avoir vu plusieurs de ces pièces de théâtre mais je ne l'avais jamais lu. le hasard a voulu que je tombe sur le cabinet rouge chez un brocanteur.

Strindberg avait trente ans lorsqu'il a écrit, dans une veine naturaliste, ce premier roman déjà très maîtrisé qui a connu un grand succès.

Il nous dépeint, dans cette oeuvre autobiographique, et au travers de quelques personnages, la Suède de la fin du XIXème siècle. C'est tout un petit monde composé d'artistes, de journalistes, de politiciens, de fonctionnaires, d'hommes d'affaires, d'éditeurs, qui s'anime sous nos yeux, en quelques saynètes qui permettent à l'auteur de planter le décor et de nous faire découvrir les dessous d'une société corsetée et pleine d'hypocrisie.

Le personnage principal Arvid Falk, en qui nous pensons reconnaître Strindberg, est un jeune écrivain qui hésite entre plusieurs métiers, ce qui l'amène à pénétrer dans différents milieux professionnels.

L'écrivain est caustique ; il a trempé sa plume dans le fiel. Personne ne semble trouver grâce à ses yeux. Doté d'une hypersensibilité et d'une grande culture, il analyse avec beaucoup d'acuité les relations humaines, les ressorts socio-économiques, ainsi que les rapports de classe.

Nous sommes stupéfaits par la modernité et la justesse des propos, sur les plans politique ou moral.

Intrigantes, manipulatrices, séductrices, les femmes ne sont pas épargnées dans ce livre et nous retrouvons bien là la misogynie de Strindberg.

Roman dense, touffu, bien écrit et remarquablement traduit en 1907 par Etienne Avenard, le cabinet rouge nous immerge dans les questionnements et les turbulences qui ont traversé l'Europe à cette époque.

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Le Bouc émissaire



C’est Fanny, une des héroïnes de Rue du bonheur d’Anna Fredriksson, qui m’a donné envie de relire du Strindberg. Le bouc émissaire est le dernier roman de Strindberg, et certains critiques le considèrent comme le plus important. Avec Strindberg , on sait qu’on va à la rencontre des destins, du duel entre classe supérieure et classe inférieure, des affrontements entre individus et des changements d’opinions et d’attitudes. Et aussi d’un regard déprimant sur l’homme et la société.





Ainsi Libotz, l’avocat qui vient de s’installer en ville, est « condamné à souffrir », c’est son destin. Ses propos sont souvent interprétés de travers et il est fréquemment considéré, à tort, coupable de mauvaises actions. Quoiqu’il fasse, cela a de grandes chances d’échouer et de se retourner contre lui. Tjarne, le procureur est d’une autre trempe. Il peut vite devenir arrogant, brutal et méchant. Il jouit de la souffrance d’autrui. Et on ne peut absolument pas lui faire confiance. Quant à Askanius, l’hôtelier, qui a - dans un premier temps - aidé Libotz pour son installation, tout d’un coup il s’en prend à lui et se montre froid à son égard. Askanius est orgueilleux et d’un avis changeant: il peut se métamorphoser en quelqu’un d’insupportable en un rien de temps! Quand Libotz se fait condamner pour quelque chose qu’il n’a pas commis, Askanius ricane et lui dit « Tu crois toujours à la justice et à la victoire des bons? » Et Tjarne, le procureur, ajoute: « C’est vrai, j’ai été déloyal, mais c’est mon métier ».





Strindberg a un style au rythme trépidant, précis et sans fioritures. Pas le temps de voir le paysage ou de s’attarder au temps qu’il fait. Il se concentre sur ses personnages. En conséquence, il faut de temps à autre poser le livre, pour souffler un peu et se récapituler tout ce qui vient de se passer en une seule page. Il a écrit ce roman comme une pièce de théâtre: peu de personnages, beaucoup de dialogues, et des descriptions d’attitudes ou de sentiments qui sont comme des indications pour le jeu des acteurs. Son talent tient d’abord dans la complexité de ses personnages, la façon qu’il a de leur donner vie et les retournements incessants de situation. C’est du grand art dans le genre roman de moeurs théâtral.
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Inferno

La folie est comme une île qui s'enfonce lentement dans la mer. Elle vous isole et vous noie. Et si Sartre déclarait "L'enfer c'est les autres ", August Strindberg témoigne que son enfer à lui est surtout la peur irraisonnée de l'autre, de tous les autres, même les plus proches, les plus chers. Cette constante méfiance fait d'un homme, pour sa plus grande souffrance, un damné, un maudit, un être voué à une douloureuse solitude.



Inferno est le récit autobiographique de cette "damnation". Entre 1894 et 1896, Strindberg va traverser une profonde crise intérieure. Malgré l'amour, le couple qu'il forme avec sa deuxième épouse, Frida Uhl, est devenu pour lui une véritable prison. Ils sont alors établis à Paris où le dramaturge jouit d'un certain succès. Pourtant, cette reconnaissance qui devrait le combler ne suffit pas à le rendre heureux. Strindberg aspire à un idéal bien plus haut et le couple se déchire sans fin. Une séparation provisoire est alors décidée. Frida repartie en Suède, Strindberg éprouve un immense soulagement. Il va enfin pouvoir se consacrer à l'alchimie, science obscure et mystérieuse pour laquelle il se sent appelé. Totalement seul, dédaignant les quelques amis qui le réclament encore, il travaille à ses expériences.

Pourtant il se sent mal, plus mal que jamais. Persuadé d'être constamment surveillé, il perd le sommeil. La nuit, des courants électriques lui traversent le corps, le laissant exsangue. Des puissances occultes voudraient le châtier et des gens qu'il n'arrive pas à nommer souhaitent sa mort. Tout lui devient symbole et signe funeste. Il s'essaye même à la magie noire. Strindberg est en train de perdre la raison.

C'est une perte qui vient logiquement s'ajouter à toutes les autres. Car Strindberg a déjà perdu sa femme, sa fille, son désir d'écrire et sa foi. Cela est plus que suffisant pour ébranler l'âme d'un homme. Malheureux, sans cesse tourmenté, il se console en buvant de l'absinthe, ce qui ne fait qu'aggraver ses hallucinations. Se sentant persécuté, il fuit d'un logement à l'autre et même d'un pays à l'autre, en proie à des délires paranoïaques de plus en plus grands. Sa solitude lui est alors comme un poison qui le ronge. "La terre c’est l’enfer, la prison construite avec une intelligence supérieure, de telle sorte que je ne puis faire un pas sans froisser le bonheur des autres, et que les autres ne peuvent rester heureux sans me faire souffrir." Il voudrait retrouver sa fille, conscient que cette enfant lui permet d'exprimer le meilleur de lui-même, mais il se défie de sa belle famille et de sa femme. Cette expérience douloureuse lui inspirera d'ailleurs l'une de ses meilleures pièces, "Père".

Puis, viendra la découverte de l'œuvre de son compatriote, Emanuel Swedenborg, scientifique et théologien dont les écrits feront basculer Strindberg dans le mysticisme et le repentir.



Durant cette période difficile pendant laquelle il faillit plusieurs fois être interné, August Strindberg tenait un journal. Inferno en serait, selon ses dires, une "reproduction". Il a choisi de l'écrire en français et bien qu'il ne possède pas parfaitement cette langue d'adoption, l'écriture est précise, fluide et le récit s'organise avec méthode, attestant probablement d'un travail de réécriture. Malgré toutes ces qualités, la lecture fut éprouvante parce que dérangeante. Plus le récit progresse vers un état de folie, plus les pauses deviennent nécessaires et j'ai dû souvent reprendre mon souffle pour venir à bout de ce récit oppressant. Car Strindberg ne nous épargne pas et  livre un vrai témoignage de ces années de souffrance psychique. On devine bien dans quel enfer il est descendu, dans quelle solitude il s'est enfoncé, poussé toujours plus loin par ses angoisses et ses peurs qui ont fini par le couper du monde.

Mais parallèlement au malaise, j'ai ressenti une profonde compassion pour cet homme qui se croit menacé de toutes parts et dont le pire ennemi n'est autre que lui-même. Durant ces années, Strindberg se détruit et fait le vide autour de lui. Ceux qui l'aiment encore n'ont d'autre choix que de le quitter, tant il leur fait du mal, sans toujours le vouloir. Et la conscience aiguë qu'il a de ce gâchis lui cause un chagrin profond. Il sait tout ce qu'il manque. Mais il est comme "à côté" des autres et les démons dont il sent sans cesse la présence autour de lui ne sont peut-être, au fond, que les tourments de sa culpabilité. 

Alors, bien sûr, il y a quelques considérations misogynes et aigrelettes qui parsèment le texte deci delà, fortifiant sa légende et faisant de lui un personnage parfois très irritant. Strindberg avait, semble-t-il, un don pour ne laisser personne indifférent, suscitant l'engouement ou le rejet. Mais lire Inferno nous le rend plus proche, presque plus "humain". C'est une vraie confession, que je pense sincère, et dont certains passages m'ont bouleversée car plus encore que la folie, l'enfer est peut-être la peur de devenir fou, la pleine conscience de ce lent enlisement. 





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Au bord de la vaste mer

Figure nietzschéenne scandinave, Axel Borg, intellectuel et touche-à-tout incompris, mis à l'écart par ses supérieurs hiérarchiques obtus, qui le cantonnent à des tâches subalternes en réponse à ses idées novatrices, demande son affectation dans une île comme inspecteur des pêcheries. Conscient de sa supériorité intellectuelle, il se trouve très vite en bute à l'hostilité des pêcheurs, dont il ne peut s'empêcher de mépriser la vulgarité, ses projets de réforme pour une meilleure gestion des ressources ichtyologiques rencontrant leur inertie foncière. Lors de l'une de ses coutumières sorties en mer, il fait la connaissance sur un ilot, d'une femme de trente-quatre ans, dont il s'avère qu'elle s'est installée avec sa mère dans une maison à proximité de ses quartiers, et qu'il convoite immédiatement, sans nourrir cependant d'illusions à son sujet, ayant déceler chez elle la fausseté, l'inconstance, la puérilité, pour tout dire un terrain propice à l'hystérie. L'homme se fait tout de même un peu violence pour combattre sa pente à l'isolement et répondre à leurs invitations.



Au bord de la vaste mer ménage de très belle description des richesses géologiques, de la faune et de la flore du pays chéri du très fameux dramaturge suédois. Il sourd de ses pages une indiscutable et très lourde misogynie, symptomatique d'une peur viscérale des femmes et d'une conception de l'amour fusionnel inatteignable et forcément déçu. À déposer sous le sapin de votre amie féministe pour égayer le réveillon.
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Inferno

Inferno (1897) est l’un des deux livres que le suédois August Strindberg a écrit en français, et si cet ouvrage est moins connu que ses œuvres théâtrales, il est central pour connaitre l’écrivain car c’est l’autobiographie, l’autoportrait puissant en forme de roman, d’un homme qui a beaucoup souffert de sa paranoïa. Il a aussi écrit des dizaines d’articles dans des revues françaises entre 1883 et 1911, et déclara d’ailleurs en 1894, «Écrire en français dans le Figaro fut la réalisation d’un rêve de jeunesse». Comme d’autres artistes de son époque, il rêvait de conquérir Paris.

Sa vie privée et ses écrits, notamment Mademoiselle Julie, ont suscité un tel scandale qu’il a été amené à quitter son pays. Et à l’hostilité réelle de la société suédoise conservatrice et pétrie de luthérianisme, s’est ajouté le harcèlement incessant de multiples ennemis imaginaires, sans compter l’échec de ses trois mariages, échec prévisible quand on sait qu’en 1895, il a écrit un article intitulé De l’infériorité de la femme. Ce délire paranoïaque de persécution se superpose à un fond d’instabilité qui l’ont conduit à être non seulement écrivain, mais aussi peintre, photographe, télégraphiste, chimiste, et même alchimiste. Il s’est installé à Paris et sa région (Versailles, Passy, Neuilly) en 1894, et a déménagé chaque fois qu’il croyait que ses ennemis avaient découvert son adresse, en partie - semble-il - intoxiqué par l’absinthe. Sa femme l’espionne, ses ennemis le jalousent et devinent ses pensées. Il même pensé qu’ils s’étaient installés dans une chambre voisine de la sienne pour le tuer avec une machine électrique. Comme ses ennemis arrivaient toujours à le retrouver, poursuivi par «les puissances», il a fui à Dieppe, puis est rentré en Suède chez un ami médecin qui l’a soigné un moment, et chez qui il a trouvé le réconfort, avant de s’en aller, persuadé que cet homme était jaloux de ses succès comme scientifique. Il part alors en Autriche, puis revient en Suède, et sa vie vagabonde l’a aussi amené à Berlin, en Suisse romande, au Danemark, et à Bruxelles.

C’est en Suède, et donc en français, qu’il a rédigé son autobiographie Inferno, présentée comme un journal, mais en réalité journal retravaillé, et cela après avoir déjà publié également en français, outre ses articles, Plaidoyer pour un fou (1887) où il avait décrit les déboires du premier de ses trois mariages. Inferno aborde son instabilité, qui conduit à l’échec de son deuxième mariage, et à sa grande crise psychologique, morale, spirituelle et artistique des années 1895-1897. Sa deuxième épouse le quitte lorsqu’il se lance dans des expériences de chimie, voulant trouver l’or des alchimistes, et prouver que le soufre n’est pas un corps simple. D’autres articles expliquent que l’iode est un dérivé de la houille et que la terre n’est pas ronde. De protestant, il devient un athée virulent, puis tombe à Paris dans la superstition et le mysticisme, sans oublier une brève phase de catholicisme, passant chaque fois d’une certitude à l’autre. Dans son enfance, il avait déjà eu une phase de ferveur religieuse intense. Il correspond avec Nietzsche, et finalement, il croira trouver son port d’attache et une explication à ses maux dans les théories de son compatriote Emmanuel Swedenborg (1688-1772), curieux mélange à la fois de vrai scientifique et de théologien mystique imprégné des thèses illuministes. Swedenborg influença les débuts de la psychologie, et semble lui-même avoir été atteint de troubles psychiatriques. Son œuvre, écrit-il, l’a été après dix-sept ans de conversations avec les anges. Il a été surnommé le Léonard de Vinci du Nord ainsi que l’Aristote de Suède. Strinberg a eu connaissance de ses travaux à la lecture à Paris de Seraphîta (1835), déconcertant récit de Balzac qui date de sa période gnostique, pas la meilleure !

Inferno commence par une introduction sous forme de courte pièce inspirée des théories de Swedenborg, qui annoncent la mort de l’Église, remplacée par une «Nouvelle Jérusalem» et un «Nouveau Ciel». Strindberg commence ainsi son autobiographie par planter le cadre mystique de sa crise et de ses croyances. Lucifer (étymologiquement porteur de lumière), y prend la tête d’une croisade contre Dieu, cruel manipulateur cynique, pour défendre les hommes, et cela sous le regard d’un esprit encore supérieur, l’Éternel. La «fin heureuse» de cette introduction, rassurante pour Strindberg, voit Dieu acculé à la repentance.

Le roman est ensuite divisé en une vingtaine de chapitres décrivant donc sa vie et sa paranoïa, les forces invisibles qui l’encerclent et décident de son destin, son obsession de trouver l’or des alchimistes, sa vaine recherche du sens des «signes» qu’il reçoit, sa peur d’être interné, son gout pour la liturgie, pour l’occultisme, son culte des symboles…



Plus tard, il écrira notamment La Danse de mort (1900), reprenant le thème du couple uni de manière inséparable, autant par la haine que par l’amour Pas découragé pour autant, semble—t-il, il se remariera encore en 1901.



Ne manquez pas de voir sa maison-musée si vous passez à Stockholm.

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Mademoiselle Julie

Ce grand classique de 1888 n'est pas de la veine de la comtesse de Ségur. Trois personnages, mais Christine, la cuisinière, n'a pas un rôle déterminant. Lors de la nuit de la St Jean, toujours fêtée dans les pays nordiques, la comtesse Julie profite de l'absence du comte et invite à danser son valet de chambre, Jean. Elle le provoque et se donne à lui. Dans la seconde partie, cet ignoble Jean tente de profiter de l'avantage, invite Julie à voler son père pour s'acheter un hôtel et fuir avec elle. Le comte revient. Jean tend un rasoir à Julie, qui sort en sachant ce que Jean attend d'elle. Dans une Suède très luthérienne, ce fut un vrai scandale, à l'image de la vie privée de Strindberg, trois fois marié et aux relations orageuses avec les femmes. Il s'exila en France un moment et écrivit même une oeuvre en français. Strindberg fut aussi un peintre apprécié. Sa maison à Stockholm est aujourd'hui un joli petit musée à ne pas manquer si vous passez par là, mais soyez prudent. C'est bientôt la St Jean.
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Le Pélican

Une pièce touchante qui nous met face à une mère démunie d'instinct maternel et d'empathie, responsable des problèmes sociaux et médicaux de ses enfants. Une ouverture pour certains personnages, une dégringolade pour d'autres le tout dans une ambiance glaciale, digne des auteurs de cette époque.
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La Sonate des Spectres

Après avoir hésité plusieurs fois à lire cette pièce qui semblait éloignée de ce à quoi nous avait habitués Strindberg, je me suis enfin lancée. Et je le dis tout de go : impossible pour moi de résumer même succinctement l'intrigue ; comme le dit un personnage de la pièce, "c'est un peu compliqué", et comme lui répond du tac au tac un autre, "c'est terriblement compliqué". C'est plein de personnages soit morts, soit bizarres d'une façon ou d'une autre. Au centre se trouve une maison typique du bonheur bourgeois, mais emplie de secrets et où quelqu'un vient de mourir. Un vieillard semble tramer une vengeance, tout au moins un plan en rapport avec les habitants de cette maison, tandis qu'un étudiant qui voit des apparitions, des fantômes, des revenants, des morts quoi, se trouve impliqué bien malgré lui dans les projets du vieillard.





Ce n'est pas tant ce qu'on découvre sur les habitants de la maison et d'autres leur étant liés qui provoque de l'étonnement - ils ont tous commis quelques turpitudes, d'autres plus que d'autres et plus infâmantes, comme des meurtres et ce genre de choses. C'est plutôt cette ronde de personnages qui intrigue, tellement ils paraissent pour la plupart interchangeables, chacun ou presque se dédoublant, parfois dans plusieurs autres personnages. Ainsi, La Cuisinière qui apparaît dans l'acte II commet les mêmes actions - affamer ses maîtres de diverses manières - qu'on avait mis sur le compte du Vieux plus tôt dans la pièce ; et c'est loin d'être le seul exemple. Ainsi également, un personnage qui était un maître de maison est devenu un domestique, et un autre dans le même temps est passé de domestique à maître. Tous se mentent, chacun se fait passer pour ce qu'il n'est pas, et le personnage qui incarne le mieux ce principe, visuellement et physiquement, c'est celui appelé La Momie - en fait l'épouse du maître de maison (si tant est qu'on sache qui est le maître de maison), dont la beauté et la jeunesse ont été figée bien des années plus tôt dans une statue qui ne lui ressemble plus en rien, au point que chacun est effaré de son apparence réelle.





Revient également un autre leitmotiv : celui de la confrontation des classes sociales. Vous aviez sans doute compris que dans ce jeu de chaises musicales pointait le bout de son nez une critique sociale qu'on avait déjà vu à l'oeuvre, au hasard, dans Mademoiselle Julie. Mais ici c'est traité de façon différente, d'une part à cause du style de la Sonate des spectres, d'autre part parce que, même s'il est fait quelques allusions, voire plus, à des mariages, des fiançailles et de relations amoureuses ratées, c'est peu de chose par rapport à la question des classes sociales. Ce n'est pas pour rien que La Cuisinière qu'on voit apparaître à la fin de l'acte II, alors que restent les deux derniers "maîtres de maison", leur dit : "Vous nous prenez tout notre suc et nous vous prenons le vôtre; nous suçons votre sang et vous recevez en échange de l'eau, avec du colorant."





Au milieu de cette corruption dont il est abondamment débattu et qui semble toucher tout le monde, restent deux personnages qui sont... comment les appeler... des âmes pures. L'Étudiant et La Jeune Fille trouvent l'amour et le réconfort l'un auprès de l'autre. Vous avouerez que ce n'est pas souvent chez Strindberg... Oui, mais La Jeune Fille a vécu trop longtemps dans cette maison corrompue, elle n'est pas de force à supporter tout ça. Elle est donc malade dès le début de la pièce et... elle meurt, allez hop ! Reste l'Étudiant, celui qui a le don de voir au-delà des apparences.





Pièce à la fois imprégnée de symbolisme et d'expressionnisme, on pourrait lui trouver une parenté avec certaines oeuvres de Munch et Ensor, notamment. Je pense par exemple à Soirée sur l'avenue Karl Johan de Munch, avec son défilé de passants qui ressemblent à des spectres, et vous n'aurez pas de mal à trouver un tableau d'Ensor qui convienne. Cela dit, La Sonate des spectres part un peu dans tous les sens, que ce soit complètement voulu ou pas (répétons-le, "c'est terriblement compliqué"), avec tous ses personnages grotesques - pourtant au sens noble du terme. Une seconde lecture permettrait peut-être de mieux cerner sa composition, pas évidente à déceler d'un seul coup d'œil. Pour ma part, j'ai pas plus envie que ça de la relire...


Lien : https://musardises-en-depit-..
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