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Critiques de Barbara Pym (212)
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La douce colombe est morte

Léonora, une dame d'un âge incertain, plus jeune fille, mais pas encore vieille dame, croise lors d'une vente aux enchères James et son oncle Humphrey. Rapidement, elle est attirée par James, ce jeune et sémillant jeune homme, mais cette passion reste très "correcte". Rapidement, cette rencontre en amène d'autres et son attachement ne cesse de grandir. Cependant, James est indécis en ce qui concerne ses amours : après avoir eu une relation avec Phoebe, il s'éprend d'un américain du nom de Ned. Cette inconstance amoureuse brise le coeur de Léonora qui pourtant tente de faire face.💐





Ce livre m'a été conseillé et prêté par une amie qui avait apprécié cette auteur il y a des années. Ne connaissant pas cette auteur, je me suis laissé séduire et j'avoue me sentir un peu sur ma faim...

Bon soyons franc, je m'attendais à un roman dans le genre de Jane Eyre ou Orgueil et Préjugés avec une ambiance romantique, guindée et des calèches en pagaille. Eh non, dans ce livre les voitures avec le gros moteur sont présentes, les hommes sont des malotrus et .... l'homosexualité est même de la partie. Bref, vous pouvez imaginer le grand écart dans mon esprit.



Pour en revenir au livre, l'histoire manque cruellement de dynamisme. Barbara Pym nous relate l'amour impossible de Léonora pour James qui ne cesse de papillonner puisqu'il ne semble pas encore s'être décidé sur ses préférences. Les événements décrits, les relations entre les personnages manquent de charme, voire tout est décrit avec cynisme. Ainsi, Phoebe, la rivale de Léonora est présentée sous les traits d'une femme sans grand charme... Barbara Pym joue sur deux points de vue : celui de l'amour impossible en ce qui concerne Léonora... et le transfert psychologique de James sur Léonora vue par ce dernier comme une mère (la sienne étant décédée).





Pour conclure, La douce colombe est morte propose un récit désuet et pathétique par certains côtés d'un amour impossible. Le tout est poétique, mais manque cruellement de vitalité.💐

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Comme une gazelle apprivoisée

Vieilles dentelles sans arsenic! C’est peut-être d’ailleurs ce qui manque pour que Comme une gazelle apprivoisée soit inoubliable. En l’état, c’est un équivalent de Clochermerle, version british, avec les rideaux faits pour être soulevés lorsqu’un mouvement est détecté chez le voisin, l’oeil exercé à détailler la tenue vestimentaire des passants, les interprétations incessantes des faits et gestes de chacun avec beaucoup de suppositions (BFM TV avant l’heure).



C’est qu’il date ce roman qui brosse le portrait de deux soeurs matures, célibataires mais néanmoins convoitées (plusieurs demandes en mariage auront lieu), et qui font malgré tout les difficiles : trop mous, trop typés, trop laïcs… les prétextes sont multiples pour refuser les propositions.



L’ensemble manque de relief. Certes l’ambiance y est, mais le roman évoque plus une toile de fond, sur laquelle manque un événement marquant, un petit crime peut-être, ou un joli scandale, quelque chose qui apporte du piment dans la vie policée du village.



Le sentiment d’ennui est pardonné en raison de l’ancienneté de la publication princeps, en 1950, et on les excuse quand même ces demoiselles condamnées à vivre dans leur époque sans avoir l’audace de bousculer les lois qui gouvernant la bienséance.



Merci aux éditions Belfond.



#CommeUneGazelleApprivoisée #NetGalleyFrance


Lien : https://kittylamouette.blogs..
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Jane et Prudence

Il ne se passe pas grand chose dans les romans de Barbara Pym, pas de meurtres sanglants, pas de 50 nuances de gris , pas de grandes idées politiques ou sociales , mais c'est ça qui en fait le charme. Un charme un peu suranné, un peu désuet et la quintessence d'une Angleterre des années 50 entre deux périodes - pas toute à fait remise des privations de la guerre et à l'aube des grands changements des années 60. La jeunesse a envie de s'amuser , les plus âgés n'ont rien oublié…

Et l'on suit les petites vies de Jane et Prudence sur quelques mois, deux amies qui se sont connues à Oxford alors que Prudence y était étudiante et Jane, tutrice . A 41 ans, elle aurait pu être poète, professeure mais elle a choisi le mariage . Elle est une femme de pasteur nulle (parce que trop brouillonne mais très sympathique ) )et a une fille étudiante . Son mari est muté dans un petit village dans lequel vit un veuf , fort bien de sa personne et tout un tas de vieilles filles.

Prudence a atteint l'âge canonique de 29 ans ! Age où, d'après les mœurs de l'époque, elle devrait être mariée. Hélas , elle se meurt d'amour pour son patron , un historien marié ... mais Prudence habite à Londres et a une vie très agréable de célibataire .

Jane se met dans la tête de l'unir au veuf et l'invite au village..

Raconté comme ça, mon résumé laisse entendre qu'il y a bien plus d'action que ce qui existe réellement...

Le charme de l'écriture de Barbara Pym réside dans les détails… Un coup d'œil de l'amie mariée sur les dessous de l'amie célibataire, une tasse de thé par ci… Une réflexion sur les ongles peints de la coquette Prudence, une tasse de thé par là… La curiosité d'une vieille fille qui va fouiller la chambre de sa dame de compagnie… un thé sous un arbre …

L'auteur , l'air de ne pas y toucher brocarde ses contemporains et cette classe sociale "petite bourgeoisie de province des années 50 " , pas méchante mais pas non plus très gentille, un peu stupide parfois …

Les petits villages anglais dans toute leur splendeur , comme on peut les croiser dans les romans de Christie ou Wentworth avec leurs Miss Marple ou Miss Silver ( mais sans les meurtres ).



Il ne se passe pas grand chose dans les romans de Barbara Pym, quelques rencontres, quelques déceptions, quelques espoirs et le flegme anglais , galvanisé par quelques tasses de thé ..Mais ça a un charme fou, pour qui aurait envie de faire une pause de douceur dans un monde de brutes....
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Quatuor d'automne

Ouvrir un livre de Barbara Pym, c'est comme faire crisser le papier d'un bonbon au citron pour le mettre en bouche.

On se réjouit de ce qui nous attend entre plaisir et désagrément gustatif du piquant, entre amertume de l'acidité et douceur du sucre cuit, en se laissant enjôler par les arômes.



"Quatuor d'automne", ce sont quelques pages de la vie de quatre collègues de travail, en apparence aussi poussiéreux que le bureau qu'ils occupent, aussi ternes que les sujets de conversation qu'ils partagent, aussi transparents que les vies solitaires qui sont les leurs.

Deux hommes, Edwin, veuf, et Norman, célibataire, et deux femmes Marcia et Letty, toutes deux célibataires, qui tentent de vivre en embellissant la vie de visites d'églises et de présences régulières aux offices, en jetant un regard amer sur toute chose, le trait d'humour toujours incisif dans la conversation, l'observation critique un brin indélicate, en stockant tout et n'importe quoi, obsédée d'une éventuelle future pénurie d'on ne sait quelle denrée ou en jetant un regard toujours tolérant et conciliant sur toute chose ou toute attitude au risque de paraître effacée...



Dans les romans de Barbara Pym, il y a toujours des célibataires- pourquoi le sont-ils restés ? - des aigris – comment réagir face aux turpitudes de la vie ? - , des fidèles de la religion – il faut trouver un réconfort… -, ils espèrent sans réellement attendre, veulent croire que tout est encore possible mais refusent de bousculer leurs habitudes. La bienséance les obsède souvent au risque de les rendre rigides devant toute situation.

Les tasses de thé fument toujours dans un coin de page, sur le napperon du guéridon, à moins que ce ne soit une larme de Sherry qui ait la préférence, seuls intermèdes bienfaisants d'une vie qui s'engourdit, qui perd de son éclat, qui aurait pu être autre si…



Marcia et Letty vont bientôt quitter le bureau , prenant leur retraite quand les deux hommes les suivront bientôt.

Mais comment apprivoiser ce nouveau temps, qu'en faire, ils sont déjà tellement solitaires, ils le seront davantage et plus personne ne s'en souciera. Ils s'effaceront tout doucement de la vie...





Il n'y a pas vraiment de rebondissements dans les romans de Barbara Pym, mais une écriture rien qu'à elle, on ne peut s'empêcher de rire, de pouffer : c'est grinçant, c'est moqueur et les traits de caractère exacerbés nous interrogent forcément sur nos attitudes ou nos réactions. On devine où le récit nous emmène, un peu comme on glisserait une pente verglacée, blottis dans une luge, emmitouflés de nos certitudes, on n'en est pas moins mordu par le froid des réalités que doivent traverser ces quatre êtres qui s'évitent, comme ils s'attirent, qui se critiquent comme ils s'affectionnent. Finalement, déstabilisés quand ils ne partagent plus le quotidien.

Mais comme le bonbon acidulé qu'on croque sans y prendre garde, ça pique et les larmes montent aux yeux parce que Barbara Pym "écrit" aussi triste, mélancolique, nostalgie, et surtout regrets...





A la dernière page, le lecteur quitte, orphelin, ces vies dont il aurait aimé partager un peu plus, tout en introspection qu'il faut bien reconnaître qu'elles sont, pour peu qu'il accepte d'y voir en filigrane, ses propres faiblesses et quelques uns de ses travers !
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Les ingratitudes de l'amour

Conseiller un livre de Barbara Pym, née en 1913, est toujours délicat, ça passe ou ça casse.

Pour l' apprécier , il faut aimer la lenteur, sa façon de raconter en ayant l'air de ne pas y toucher. Ses romans ont tous un côté un peu démodé. Celui-ci bien que se passant dans les années 60, ne laisse rien entrevoir de la jeunesse des sixties, de l'apparition de groupes tels que les Beatles ou les Stones, On est a des années lumières ce cette Angleterre, et du Swiging London, presque plus près des romans de Jane Austen ou d'une Agatha Christie sans les crimes . On y croise beaucoup de professeurs, ou professions littéraires, des vieilles filles ( de trente ans !), des pasteurs, d'innombrables tasses de thé, des chambres à louer : un autre monde...

C'est ainsi que les éditions Belfond ont sorti ce roman, paru en 1961 , sous l'appellation " vintage".



Dulcie Mainwaring habite seule dans la maison de son enfance, ses parents sont décédés. Il y a peu fiancée, "son Maurice" ayant choisi de rompre , aussi pour se distraire a t-elle décidé d'aller à un colloque. Elle y rencontrera Viola qui a travaillé pour Aylwin Forbes , un rédacteur en chef d'une revue littéraire, très séduisant dont la femme est partie. Enamourées toutes les deux, elles décident d'en savoir plus sur sa situation maritale et ce qui avait commencé comme une vague question, devient presque une enquête, une traque , Dulcie étant plus motivée que Viola.



La façon dont Barbara Pym raconte cette histoire est très douce. Aucun suspens de dingue, mais plutôt des réflexions douces amères sur le statut de femme, de célibataire. On se sépare sans faire de scènes, on se fiance parce que c'est raisonnable...Et ce qui peut apparaître comme bizarre, pitoyable, désespéré ou glauque dans cette quête, n'est, ni plus ni moins, que ce que certaines personnes effectuent comme recherches sur Facebook ou autre.. (en distanciel, elles ;-).

Ce roman ne fait pas "beaucoup de bruit", mais il est efficace si vous aimez cette petite musique propre à Barbara Pym. C'est délicieux, souvent amusant, reposant...

Une petite parenthèse désuète et surannée, entre deux lectures plus noires ou plus speed...

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Quatuor d'automne

Envie d'un roman feel bad ? Ce texte est pour vous !

A vous donner un bourdon de deux jours.

Ambiance : quand le ciel bas et lourd pèse comme un tombeau...

Pire que Flaubert.

Le temps s'en va, la vie file vite, oups à peine jeune on est vieux, oups on est tout seul, oups on va mourir.

En plus, on est bête à manger du foin. On met un talent fou à gâcher sa vie, sauf que personne ne regarde et tout le monde s'en fiche.

Bref, quatre employés de bureau, la soixantaine, travaillent ensemble depuis des années. Ils n'ont quasiment pas tissé de liens, car ils en sont plus ou moins incapables. Ils sont enfermés dans une solitude effrayante dont, étrangement, ils refusent de sortir-ils ont peur de sortir. Ils ont peur de voir les choses en face. Ils vieillissent, et le monde se raréfie de plus en plus autour d'eux. Leur travail ne sert à rien (ils ne seront pas remplacés à la retraite), ils viennent d'un monde (ils sont nés avant 1914)qui, dans les années 1970, a disparu comme l'Atlantide...Ils n'ont plus de place...

Quand sonne l'heure de la retraite pour Marcia et Letty, les deux femmes du groupe, un petit séisme minuscule va les secouer : que faire de ce temps qui reste ? Comment l'occuper ? Comment vaincre le désespoir qui menace à chaque instant ?

Bien sûr, les choses ne sont pas formulées ainsi dans le roman de Barbara Pym. Jamais les mots malheur ou désespoir ne sont prononcés, ce n'est pas correct, les personnages ne le comprendraient même pas. Vies ratées, gâchées, inutiles non plus. On entasse des conserves - mais on est dangereusement anorexique (tabou !) ; on n'a qu'une seule amie -et elle nous trahit (chuuut) ; on passe sa vie à sa paroisse-on ne sert à rien ...

Barbara Pym est connue pour ses atmosphères douces-amères, mélancoliques et parfois très drôles...Rien de semblable ici. C'est un testament qui dit crûment la cruauté des vies perdues, la solitude des vieux et l'indifférence des jeunes, le temps qui passe à la vitesse de la lumière...Ouh là là c'est très beau mais ça m'a flingué le moral...A lire entre deux Gaston Lagaffe...

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Des femmes remarquables

Des Femmes Remarquables comme Mildred , il en existe des tonnes dans l' Angleterre des années 50.

Fille de pasteur , ayant perdu ses parents depuis des années , elle a la trentaine , pas vraiment moche mais pas vraiment belle non plus, la société est impitoyable et l'a catalogué "vieille fille ". Elle travaille à mi-temps dans un centre d'aide aux nécessiteuses. Dans sa vie , rien de remarquable, si ce n'est qu'elle passe ses journées à aider les autres . Pilier de la paroisse, elle est de toutes les ventes de charité : Youpi ! Sa vie est foutrement funky !

L' aménagement d'un couple atypique au dessus de chez elle, viendra faire de petites vaguelettes dans sa vie si lisse . L'épouse, Hélèna, est anthropologue dans une société où les femmes sont rarement surdiplômées, elle a une phobie pour les choses ménagères , son mari , officier de marine , est très séduisant .

Ça aurait pu s'appeler "les tribulations de Mildred ", car nous suivons ses petits tracas , ses réflexions douces amères sur la vie, , sur son entourage . Très représentatif de l'Angleterre des années 50, de la middle class, d'une certaine façon de penser assez étriquée.

C'est qu'elle donne beaucoup , Mildred ,et elle reçoit peu . Les hommes de cette époque avaient le beau rôle et les femmes seules comme elle , subissaient gentiment , avec dignité, avec abnégation , avec générosité aussi et toujours mues par une excellente éducation .

Ce petit roman qui dâte de 1952, publié dans la collection vintage de Belfond, est un témoignage intéressant sur une Angleterre qui se remet au ralenti de la 2° guerre mondiale . [ Les locataires qui partagent la même salle de bain , les veuves qui louent une chambre dans un presbytère ] .Témoignage aussi sur la condition de la femme et plus particulièrement sur celles qui sont seules , sans protection masculine qu'elle vienne d'un père ou d'un mari ... Femmes remarquables , rendant services sur services , mais femmes anonymes et pour certains hommes assez insipides et donc, presque invisibles .
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Des femmes remarquables

La guerre est à peine finie, Londres se relève tout doucement de ses ruines…grâce aux femmes remarquables. Vous savez, ces femmes tout entières dévouées à leur paroisse, leurs bonnes œuvres, leurs ventes de charité, leurs hommes (du pasteur au bedeau).



Mildred en est une. Célibataire, ayant déjà dépassé de peu la trentaine, on peut donc l’appeler « vieille fille ». Dévouée, elle l’est, quitte à négliger sa propre vie. Toujours à préparer une bonne tasse de thé bouillant, ou de faire la médiatrice entre les membres d’un couple en dérive, ou encore de recueillir des bonnes âmes en déroute.



Voilà. Ma patience a été mise à rude épreuve, j’ai trouvé cette vie insipide, ou du moins les personnes entourant Mildred insipides. Car je ne pense pas que Mildred le soit, elle est même spirituelle et pleine d’humour à certains moments. Mais bon, ceci n’excuse pas l’ennui abyssal que j’ai ressenti face aux conversations nombreuses émaillant ce livre, dont je ne pourrais même plus donner les sujets. Ah si : la prochaine vente de charité, les petits-fours sur lesquels les hommes se jettent les premiers, le pasteur qui va se fiancer, les voisins qui se disputent, les humeurs du pasteur…



Une petite tasse de thé, peut-être ? Ce n’est pas moi qui vous l’offrirai, je ne suis pas une femme remarquable, moi.

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Quatuor d'automne

Envie d’un roman au charme désuet comme un napperon en dentelle un peu défraîchi ?

Barbara Pym éprouve une tendresse certaine pour ses personnages,tout en s’en moquant avec malice.

Dans cette histoire qui se passe à Londres dans les années 70, nous suivons le quotidien de quatre personnes, deux hommes et deux femmes, travaillant tous dans le même bureau et approchant tous de l’âge de la retraite.

Ils sont tous les quatre seuls (célibataires ou veufs) et vivent leur solitude de façon bien différente.

Sans avoir de relation réellement profonde, le départ en retraite des deux femmes, Letty et Marcia, va bouleverser l’équilibre de ce petit groupe et pousser chacun à faire des choix pour la suite de leur vie.

J’adore l’écriture délicate et sensible de Barbara Pym. On sent qu’elle a de la compassion pour les personnages qu’elle crée, aussi pénibles, ridicules ou énervants qu’ils soient.

Elle nous dévoile les occupations et les pensées de ceux qui vivent seuls, un peu en marge d’une société où le mariage est la norme.

Elle nous parle aussi de la vieillesse, même si pour elle, la vieillesse commençait visiblement à 60 ans !

Je me suis régalée à suivre ces quatre personnes durant quelques mois, même si dans les faits, il ne se passe pas grand-chose de notable, comme dans la vie parfois.

Le passage où chacun explique ses raisons de fréquenter les bibliothèques est hilarant !
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Un brin de verdure

Quand une jeune anthropologue vient s’installer dans un petit village anglais, c’est toute la communauté qui passe sous le microscope.

Les relations des uns avec les autres vont être décortiquées, Emma, l’héroïne de ce roman va tenter de décrire ce qu’est la vie au sein d’un village où tout le monde se connaît et a un rôle bien précis à jouer : que ce soit le pasteur, les deux médecins, l’ex-pasteur devenu critique gastronomique, la cohorte de veuves et de vieilles demoiselles qui semblent pulluler au sein de chaque village, le couple de professeurs d’université, un ancien collègue et ex-amant d’Emma….

Emma va devoir assister à des kermesses, à des ventes de charité, à des repas pris chez les uns ou les autres mais toujours arrosés de thé ou de sherry, elle va se rendre à la messe pour écouter des sermons, elle va aller se promener dans la forêt voisine, lieu de toutes les rencontres, elle va devoir écouter des potins…..

Mais la brillante anthropologue sera prise à son propre jeu quand elle comprendra qu’elle ne peut pas se contenter d’observer le village sans y avoir elle aussi son propre rôle à jouer.

Une écriture délicate, des réparties caustiques, des personnages aussi attachants qu’énervants, voici les ingrédients des romans de Barbara Pym dans lesquels il ne se passe jamais grand-chose mais où la vie a une saveur bien particulière.

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Des femmes remarquables

Dans les années 50, en Angleterre, les femmes non mariées étaient considérées comme des vieilles filles et faisaient pitié.

Mildred Lathbury, fille d'un pasteur décédé, bien qu'âgée d'une trentaine d'années seulement, vit seule, travaille à mi-temps dans un centre d'aide aux femmes en difficultés, et passe beaucoup de temps à oeuvrer pour la paroisse.

Cette jeune femme pieuse, ni riche, ni pauvre, ni laide, ni vraiment jolie, ni bête ni très intelligente, à une vie assez terne jusqu'à l'arrivée de nouveaux locataires en dessous de chez elle.

Ce jeune couple composé d'un officier de marine et d'une femme anthropologue a de quoi étonner Mildred, qui ne connaît pas grand chose, aux relations de couple, à l'anthropologie, à la liberté de penser, à l'athéisme...bref, à la vie en général.

Ce portrait d'une femme banale est émouvant et poignant tant cette vie semble vide, mais Mildred au fond ne s'ennuie pas, même si sa vie bien réglée par les mêmes ventes de charité, les mêmes tasses de thé prises avec les mêmes personnes, les mêmes discussions avec les mêmes amies, semaines après semaines et mois après mois n'ont rien de bien passionnantes.

Au fond, la vie de couple est-elle la seule alternative ?

Après avoir eu un aperçu de ce qui se passe réellement au quotidien entre des époux, Mildred aura peut-être envie de rester célibataire par choix et non par obligation.

Une jolie comédie des moeurs, car de l'humour, il y en a dans ce roman qui dégage autant de mélancolie et de douceur que de dérision.
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Quatuor d'automne



Ce quatuor d’automne, ce sont quatre collègues de bureau célibataires à l’automne de leur vie. Ils se retrouvent chaque jour, ont chacun leurs petites manies, échangent des banalités et évitent soigneusement d’aborder tout sujet personnel.



Barbara Pym nous montre la solitude et la misère. Misère professionnelle, ils ont tous quatre un travail bien peu passionnant et qui ne semble pas d’une très grande importance, ils ne seront d’ailleurs pas remplacés l’heure de la retraite venue. Misère affective, leur seule vie sociale se résume à leurs rencontres quotidiennes au travail. Misère pécuniaire, vivant chichement, louant une chambre chez un propriétaire. Misère intellectuelle, le rêve de s’attaquer enfin à la lecture de livres de sciences sociales menant à une impasse.



C’est un roman empreint de nostalgie, de regrets aussi. Nous suivons la vie terne de petites gens ordinaires, coincés entre le travail, la bibliothèque et l’église. Barbara Pym nous décrit une société implacable sur un ton cynique, des vies que l’on passe seul, sans rêve, ambition ou réussite.



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La douce colombe est morte

Quand Léonora, femme élégante, courtisée mais vieillissante, rencontre Humphrey et son neveu James, antiquaires, à une vente aux enchères, c’est vers le jeune homme que se porte sa préférence. Et alors qu’elle entame une relation d’amitié amoureuse avec James, l’oncle se résout au rôle d’amant éconduit qui attend son tour…



Léonora ferme les yeux sur la liaison éphémère et sans passion de son protégé avec Phoebe, jeune femme sans attrait qu’il a rencontrée au hasard d’une soirée. Mais quand James tombe sous le charme de Ned, un éphèbe américain venu terminer sa thèse à Londres, le combat s’avère inégal…Et les conseils de son amie Meg qui a pris sous son aile protectrice Colin et le console entre deux escapades amoureuses ne suffisent pas à la consoler…



Sous ses allures désuètes, le roman de Barbara Pym aborde beaucoup de thématiques qui restent d’actualité, le célibat des femmes, l’âge mûr, l’homosexualité, le refus ou l’impossibilité de rentrer dans les normes du mariage et de la vie de famille et les difficultés qui en découlent. Une analyse très fine, avec une pointe d’humour très british, et le charme de ces demeures anglaises bien meublées et entourées de ravissants jardins où se dissimulent tant de lourds secrets…

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Lorsqu'un matin d'orage

J'aime énormément les romans de cet auteur.

Ils mettent souvent en scène des membres du clergé, des vicaires, des pasteurs et leurs douces épouses, des évêques, des cohortes de vieilles filles de tous les âges, lesquelles organisent des kermesses, des ventes de charité, le tout est abondamment arrosé de tasses de thé et de potins.

Ce recueil de 5 nouvelles m'a légèrement déçu.

J'ai du mal à entrer dans une atmosphère en seulement quelques pages, d'autant qu'ici, pas de chutes humoristiques ou totalement imprévues.

On retrouve quelques personnages déjà évoqués dans certains romans de l'auteur, mais cela ne gêne en rien la compréhension de ces petits épisodes paisibles qui montrent une fois encore qu'il y a une énorme différence entre la vie qu'on voudrait et celle qu'on a, entre ce que l'on croit et ce qui arrive vraiment et surtout que les histoires sentimentales ne prennent que rarement le chemin que l'on aimerait.
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Les ingratitudes de l'amour

C’est drôle comme l’héroïne de ce roman peut soudainement se passionner pour la vie de parfaits inconnus juste parce que la sienne est d’un vide sidéral !

C’est encore une fois une jeune femme non mariée d’une trentaine d’année que Barbara Pym a choisi comme héroïne de ce roman.

Dulcie travaille, elle rédige des index et des bibliographies, mais ce travail plutôt obscur semble assez ennuyeux et lors d’un colloque, elle rencontre deux personnes qui vont prendre une importance capitale dans sa vie.

Elle va alors se mêler de leurs vies allant jusqu’à enquêter sur eux et leur entourage.

J’ai trouvé cette jeune femme bien pathétique, elle est persuadée que la vie des autres est passionnante et pleine de mystères, alors elle se permet de les espionner et d’interférer dans leur quotidien avec beaucoup de sans-gêne.

Les femmes semblent souvent un peu stupides dans les romans de cet auteur, elles s’amourachent du premier venu juste parce qu’il mesure plus d’un mètre 80 ou qu’il est capable de parler devant un auditoire.

Elles ont toutes une vision romantique et complètement mièvre de l’amour et de la vie conjugale et elles se trouvent toujours très intéressantes alors qu’elles sont souvent banales.

J’ai beaucoup aimé cette histoire au charme suranné qui montre une fois encore qu’on recherche toujours ce qu’on a pas juste parce qu’on est persuadé que la vie des autres est plus palpitante que la nôtre.

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Moins que les anges

Encore une magicienne anglaise à lire cet relire !

Ce roman tourne, comme quelques uns de Miss Pym, autour des anthropologues...Mise en abime subtile que l'observation au microscope de cette tribu d'intellectuels chargée par l'Université d'observer les tribus étrangères...Ce sont des anthropologues et des Anglais, des personnages entourés de leurs familles, de leurs amours. Le personnage central est Tom Mallow, jeune anthropologue prometteur de retour de mission. Après deux ans d'absence, il retrouve Catherine, la jeune fille bohème, romancière à l'eau de rose, avec laquelle il vit...Mais il rencontre Deirdre, étudiante de dix neuf ans, qui s'amourache de lui...Complications en vue : comment écrire tranquillement sa thèse entre ces deux aimables filles ? D'autant plus qu'un homme a besoin de confort, d'un appartement meublé comme celui de Catherine, et qui cuisine et repasse, en plus...Mais Deirdre...Elle est jeune et jolie, quoique moins efficace niveau confort dû à un homme...Quel terrible dilemme ! Comme l'amour est une force puissante ! Autour du trio vagabondent de désopilants personnages, les professeurs de l'Université, deux etudiants fauchés en quête d'une bourse d'étude, et la tante et la mère de Deirdre, austeniennes, qui voient en tout célibataire un mari pour leur nièce et fille...

Un humour extravagant traverse ces pages infiniment délicieuses. Mais ne nous y trompons pas : le monde est dur et cruel, même et surtout pour celui qui croit que tout lui est dû. A ne penser qu'à soi on finit par se perdre, tandis que les autres, plus aguerris, continuent sans plus y songer...

Je ne saurais trop conseiller cette lecture !
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Comme une gazelle apprivoisée

Dans une petite ville de la charmante campagne anglaise, les soeurs Bede, deux célibataires sexagénaires vivent ensemble. Belinda, l'aînée, éternelle sentimentale, se morfond d'amour pour Henry, l'archidiacre, depuis trente ans, épiant tous les signes d'un amour qu'elle voudrait reciproque alors qu'il a choisi Agatha, une femme de tête. Quant à Harriet, la plus jeune, elle refuse toutes les demandes en mariage. La vie des deux soeurs est ponctuée de thés de l'après-midi, de déjeuners après l'office, de kermesse et de fêtes de Noël ou l'on croise des personnages tels que les fameux archidiacre et sa femme, mais également le vicaire tout jeune à qui l'on prête une romance avec une jeune niece d'Agatha, uen comte italien amoureux éconduit d'Harriet, une ancienne baroudeuse qui a recueilli une lointaine cousine, sans parler de deux bibliothécaires de Londres, de passage dans la région, dont l'un apprécie particulièrement ses passages dans le pub local. Tout ce monde se réunit régulièrement, partageant les potins, s'amusant des petits événements de la vie locale.



Une peinture plaisante de la vie provinciale de l'Angleterre des années cinquante, entre visites chez les uns et offices du dimanche où l'on commente les sermons et les tenues vestimentaires des unes et des autres, avant d'aller boire un sherry, où l’on suit les aventures sentimentales de Belinda qui rêve sa vie et s'imagine une histoire d'amour en laquelle elle est la seule à croire et sa soeur qui profite de la vie, plus enjouée mais qui privilégié sa vie affective avec sa soeur.

Barbara Pym, avec son regard tendre et humoristique, révèle les failles de ses personnages, leurs petites manies et leurs sentiments avec beaucoup d'humanité et de subtilité.
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Les ingratitudes de l'amour

Comment tout cela a-t-il commencé ? S’interroge Dulcie. Eh bien parce que Barbara Pym, comme à son habitude, lui a donné le rôle de la trentenaire encore désespérément, et même, disons-le franchement, honteusement célibataire. Pourtant, Dulcie était fiancée mais ce statut ne convenait pas à cette histoire alors, dès l’ouverture du livre, le fiancé a rompu, sous le prétexte flatteur pour Dulcie qu’il se jugeait indigne de son amour. Le résultat n’en reste pas moins un cœur brisé et surtout, la continuité d’une vie de célibataire.

Pour en finir avec les premiers mois d’abattement, elle se rend à un colloque, le temps d’un week-end, où écrivains et membres du clergé vont débattre de quelques questions du monde intellectuel.

Dulcie y fait la connaissance de Viola, une autre célibataire, qui travaille comme elle dans ce qu’elle qualifie de tâches ingrates et monotones en périphérie des écrivains : correction d’épreuves, bibliographie et élaboration des index.

Dans les participants, elles cherchent, sait-on jamais, les hommes séduisants et Aylwin Forbes, directeur d’une revue, beau blond aux yeux foncés, peut amplement mériter ce qualificatif. Viola a déjà travaillé pour lui et, tout en essayant de fausser compagnie à Dulcie, elle compte bien attirer vers elle ce conférencier dont la femme vient de quitter le domicile conjugal.

Et Dulcie de s’exclamer « Mon Dieu, comme il est beau ! »

Alors qui, de ces deux célibataires, arrivera à charmer Aylwin Forbes afin d’y gagner un mariage qui représente une fin en soi dans ces années soixante, l’accomplissement indispensable pour être une « vraie femme » ?



Barbara Pym, avec cette saveur quelque peu désuète qui s’attache à ses romans, observe la vie de ces deux Londoniennes. Une vie plutôt terne qu’il faut donc pimenter un peu avec la recherche d’un mari. Pourtant, dans ces pages, les hommes présents ne brillent pas par leur clairvoyance, ni leur force de caractère !

De retour à Londres, où Dulcie vit dans une maison trop grande pour elle seule, elle va héberger une nièce venue prendre des cours de secrétariat sur la capitale. Puis ce sera au tour de Viola de lui demander l’hospitalité pour un temps. Le caractère de cette dernière reste assez insaisissable, plutôt morne et peu sympathique.

Dans ce trio de femmes bien peu assorties, on assiste à des conversations pleines d’embarras, au mépris de la jeune nièce Laurel pour les deux trentenaires trop ringardes, à la honte d’habiter en banlieue de Londres, si loin des quartiers plus branchés, plus animés et plus riches.

Mais surtout, on va suivre Dulcie qui a enfin trouvé un dérivatif passionnant à sa solitude en farfouillant dans la vie du beau quadragénaire. «J’adore faire des découvertes sur les gens, reprit Dulcie. Je suppose que c’est une espèce de compensation pour pallier la monotonie de la vie quotidienne ».Après quelques infos glanées dans le Who’s Who, elle se lance avidement dans ses recherches, multipliant les approches auprès de la femme, du frère pasteur ou de la mère du bel Aylwin. Elle est elle-même surprise et confuse, avec quelques scrupules faisant surface, de sa détermination et de son indiscrétion.



Encore une fois, rien de trépidant dans ce roman de Barbara Pym mais une moquerie douce amère autour du mariage coûte que coûte alors que des mésalliances existent bel et bien. Dulcie s’acharne à trouver un mari mais n’en demeure pas moins consciente que les mariages raisonnables sont peu nombreux, ceux mal assortis par faute de goût des hommes sont beaucoup plus fréquents.

Tout en prenant des tasses de thé et d’Ovaltine, ou occasionnellement quelque chose de plus corsé comme du sherry ou même du gin, Dulcie dérive sur la vie et ses déconvenues « Peut-être la vie répondait-elle à quelque dessein en fin de compte. C’était peut-être comme un roman bien élaboré, où chaque incident contenait sa propre signification particulière et s’avérait indispensable à l’intrigue. »

Ces ingratitudes de l’amour m’ont moins passionnée que mes deux précédentes lectures de l’auteure, peut-être parce que ces deux célibataires-là sont plus lisses, plus ternes que celles qui évoluaient dans les autres titres. L’écriture, elle, reste toujours aussi délicieuse et ce petit échantillon romanesque de la vie londonienne se savoure tout de même, coloré par son irrésistible mordant so british.

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Une demoiselle comme il faut

Une demoiselle comme il faut, c’est une demoiselle qui se comporte en société et chez elle exactement comme on s’attend à ce qu’elle le fasse. Avec modération en toute chose, respect, courtoisie et sans aucune fantaisie ou presque. Très réjouissant en somme…

Les héroïnes de Barbara Pym sont souvent de vieilles filles, pas vieilles dans le sens « âgées » pourtant, car elle peuvent tout à fait avoir 25 ou 30 ans, mais puisqu’elles ne sont pas mariées, elles ont un statut à part.

Elles travaillent, sont raisonnables dans tous leurs comportements, ont des vies bien réglées et sont souvent actives au sein de leur paroisse. Que des vies bien folichonnes !

L’auteur elle-même ne s’est jamais mariée et a longtemps vécu avec sa jeune sœur, on sent qu’elle connaît donc bien ce genre de vie solitaire. Elle décrit ces existences avec beaucoup de minutie et on sent qu’elle a de la tendresse pour ces femmes qui ne peuvent se permettre de vivre comme elles l’aimeraient réellement, car bien que plus libres que les consœurs mariées et mères de famille, la bonne société anglaise ne leur reconnaît pas le droit d’être trop indépendantes quand même.

Il y a toujours un collègue, un parent, un voisin attentionné ou le prêtre de la paroisse pour veiller sur elles et les surveiller au besoin. Ianthe est l’héroïne de ce roman, et c’est cette bibliothécaire d’une trentaine d’année que nous allons suivre pendant quelques mois.

J’ai beaucoup aimé ce personnage, même si je ne me suis pas reconnue du tout dans l’image de la bibliothécaire type qui s’habille très sobrement, ne fait que chuchoter et exerce son métier avec une rigueur qui ne laisse pas beaucoup de place au plaisir de lire !

L’autre protagoniste important de cette intrigue est un anthropologue, le nouveau voisin de Ianthe, et là encore les clichés sur cette profession m’ont bien fait rire.

Barbara Pym manie l’ironie avec subtilité, ses romans ont un coté suranné et ses personnages sont tous croqués avec malice.
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Comme une gazelle apprivoisée

N’avez-vous jamais rêvé de rentrer dans le quotidien de vos personnages préférés en dehors de tout drame ? Parfois, la vie sentimentale d’un inspecteur ou les relations d’une enquêtrice avec ses proches sont tellement bien croquées qu’on se plairait à imaginer qu’elles ne soient plus seulement l’arrière-plan d’une intrigue policière mais deviennent l’objet d’un roman à part entière.



Cette fantaisie est devenue réalité avec Comme une gazelle apprivoisée. Ses deux héroïnes, les demoiselles Bede, semblent en effet tout droit sorties d’un roman d’Agatha Christie avant qu’aucun meurtre ne soit commis. Dans un village d’Angleterre du début du 20e siècle, les deux sœurs, à la fleur de l’âge bien entamée par une cinquantaine assumée, vivent une confortable et convenable existence de bonnes paroissiennes.



Bien qu’assez malhabile, à ses dires, l’ainée, Belinda, participe à la préparation de la kermesse dans le jardin de son amour de jeunesse, l’archidiacre Hoccleve, un homme pompeux, paresseux et tout à fait imbuvable, ce qu’elle ne parvient pas tout à fait à nier mais qui ne lui enlève aucun des tendres sentiments qu’elle continue de lui porter secrètement. Tandis qu’elle élabore des pyramides de courges, sa sœur Harriet met la dernière main au plantureux repas qui sera servi au jeune vicaire. Harriet a une passion immodérée pour les vicaires. Elle n’aime rien tant que de les gaver de volailles et de gelée de pomme maison, leur tricoter des chaussettes grises, toujours légèrement trop grandes ou trop petites, fidèle en cela à la ligne de conduite que semblent s’être fixé toutes ces dames à l’endroit des hommes d’église qu’elles choient avec autant de zèle que d’approximation. Pour ces guirlandes de vicaires qui se succèdent au fil des ans affichant une similitude physique et morale des plus remarquables, Harriet cultive une coquetterie vestimentaire qui met en valeur ses formes rondes.



Dans le cercle étroit de leurs estimables relations, les sœurs comptent, outre l’archidiacre et le vicaire du moment, un comte italien de tout temps épris d’Harriet, un bibliothécaire, un évêque anglican, une couturière qui n’est pas tout à fait de leur monde et quelques vieilles filles qui n’ont pas leur charme. Ce petit monde s’observe, se reçoit et se jauge, passant au crible des bonnes mœurs revendiquées le moindre geste de ses voisins.

Bien sûr, tout ceci nous est raconté avec l’humour et la finesse d’analyse d’une romancière délicieusement anglaise. Ainsi cet échange avec le bibliothécaire d’un collège d’Oxford après qu’il aura précisé que le chauffage central et des cabinets de toilettes pour les dames ont été installés depuis une dizaine d’années : « « Je n’aime pas beaucoup cette attitude révérencieuse et pleine de discrétion à l’égard de notre grande bibliothèque. Après tout, elle est faite pour les êtres humains, n’est-ce pas ? – oui, je le suppose », répondit Belinda peu convaincue : elle se rappelait en effet les personnages étranges qui y travaillaient du temps où elle était étudiante et dont beaucoup, si l’on s’en tenait à leur apparence, n’auraient guère mérité ce qualificatif. »



Il parait que le vicaire se serait fiancé. Harriet est aux quatre-cents coups. Belinda renonce à tricoter un chandail pour l’élu de son cœur. La couturière a trouvé une chenille dans le gratin de chou-fleur qu’on lui a servi. L’épouse de l’archidiacre part prendre les eaux quelques semaines pour remédier à ses rhumatismes. Il n’en faut pas plus pour rendre toute chose cette brave Belinda bien qu’elle ne parvienne pas réellement à profiter de la situation. « Et pourtant, comment pouvait-on profiter pleinement de l’absence de la femme d’un archidiacre ? Aucune demoiselle vraiment respectable n’aurait pu, ni voulu, le faire. C’est ce qu’elle rappela à Harriet, laquelle, avec son obstination caractéristique, refusa de comprendre, et se contenta de souligner que nous ne rajeunissons pas. »



Et voilà qui fera l’intégralité du roman. Il sera à peine question de demandes en mariage, juste assez pour que la potentialité d’un changement rende plus rassénérant le retour à la tranquille normalité d’une vie où il ne se passe absolument rien. Mais de manière si délicate, désuète et surannée qu’on en redemanderait (presque). Il est toutefois remarquable que ce charmant roman malgré qu’il ait abordé la condition des femmes célibataires et autonomes, les colonies anglaises en Afrique, les prétentions d’une élite culturelle bien peu à même d’utiliser son bagage au service d’un regard plus clairvoyant sur le monde, n’ait strictement rien dénoncé. Peut-être que toute la charge doit être assumée par un regard amusé, à peine taquin, pas même mordant ?



Quoiqu’il en soit, après ces délices suaves et subtiles qui feraient passer une tasse de tilleul pour un alcool fort, je me suis sentie d’attaque pour entamer quelque chose d’un tout petit peu plus costaud. Quelque chose où il y ait un peu d’action, tiens.

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