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Citations de Cécile Coulon (1185)


C'est donc cela les pleurs : le sacre du désespoir.
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Maintenant qu'elle y passait ses nuits, Aurore comprenait qu'elle ne soignerait pas Gabriel, qu'il y avait en lui un arbre noir depuis l'enfance, que la mort de ses parents avait arrosé de colère ; elle ne pouvait pas le tomber, cet arbre, seulement couper quelques branches quand elles devenaient trop encombrantes. Elle le rafraîchissait, le frictionnait de ses mots et de son sourire, elle le secouait pour que tombent de son âme des feuilles mortes et des fruits empoisonnés.
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UNE FOIS PAR JOUR

Une fois par jour quelqu'un que je ne connais pas
me demande mon avis sur des choses
qui ne me regardent pas,
- comment faire pour se remettre d'une rupture -
- est-ce que je dois avoir honte de ce que je suis -
- Peut-on tout pardonner -
des questions de ce genre, des questions comme des briques
sur le coin de la figure et une fois par jour je réponds
que personne ne peut répondre à la place de celui
ou celle qui pose la question
et pourtant ça continue, plus j'écris des romans
et plus je raconte
des histoires idiotes en soirées plus on me demande des conseils
sur des passages difficiles du quotidien :
c'est la première et la dernière fois que je dis ce que j'ai à dire
là-dessus après je retournerai couper la tête des poules
dans la basse-cour
ou jouer aux cartes.
Si tu veux te remettre d'une rupture, d'un deuil, cesse d'avoir
honte de ce que tu es et pardonner au monde extérieur
ses innombrables trahisons, mensonges
et croche-pattes,
travaille comme un âne du dix-huitième siècle,
avec acharnement et en silence,
bois souvent mais jamais seul,
fais-toi jouir une fois par jour au moins,
pour que ton corps se souvienne de ce que ça fait,
de plus jouir est excellent pour le sommeil
et contre les mauvaises pensées,
ouvre les fenêtres en plein hiver le froid ça occupe la tête
et ça empêche de pleurer
ne garde rien de ce qui t'a fait tant de mal, les lettres,
les photos, les listes de courses,
les partitions, les marque-pages,
ne garde rien, ne jette rien non plus,
fais-en cadeau à quelqu'un qui trouvera ça beau,
travaille comme un cheval du moyen-âge,
mange une seule fois dans la journée,
la faim ça occupe la tête et ça empêche de pleurer,
vois tes amis mais jamais chez toi
vois tes familles mais jamais chez toi
vois tes collègues mais jamais chez toi
répète que ce n'est pas grave, tu as atrocement mal
et ton sourire est une plaie ouverte
mais ce n'est pas grave, ça ne le sera jamais
répète que ça n'a pas d'importance, ne réponds pas
au téléphone, ne réponds pas aux messages sur le répondeur,
ne réponds pas aux lettres, ne réponds pas à toutes
ces formes de signaux lancés à travers les autres,
les sites internet et les inscriptions sur les murs dans l'entrée,
claque tout ton pognon, achète des objets inutiles et très chers,
fais-toi jouir une fois par jour au moins,
pour que ton corps se rappelle que tu en es capable,
fume, mais pas dans ton lit
fume, mais pas dans les toilettes
fume, mais pas en regardant les voisins
qui s'embrassent sur la terrasse
si tu veux t'en sortir, nom de dieu,
fais absolument ce que tu veux de ta vie mais cesse donc
de poser la question à quelqu'un qui a mis du temps
avant de trouver ses propres réponses.

(P41-43)
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Alors Dieu, ou Jésus, je vous ai toujours confondus de toute façon, prends tes cliques et tes claques, retourne là d’où tu viens, enlève-moi cette couronne à la con et trouve-toi des fringues propres. Cherche un taf, un vrai, fais-toi à manger le soir en rentrant, regarde la télé ou fais des mots croisés, appelle tes potes de la Cène et organise un barbecue avec merguez et sauce piquante, et surtout, ne me dis plus ce qui est bien ou mal, n’essaie pas de me montrer le chemin, parce que vu tout ce que tu as fait dans ta longue vie d’Éternel, il n’y a pas de quoi être fier. Vraiment pas.
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Sa robe emportait derrière elle du foin séché, l’odeur de crottin et de crin lui bouchait les narines, et l’absence de clarté l’oppressait, jusqu’à donner l’impression d’être, dans cette écurie, une jument égarée qu’on poussait vers le piège.
(page 210)
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Il ne faisait pas partie de la famille. Il était employé, ici. On ne lui avait rien dit, parce qu'on attendait de lui ce qu'on attendait d'un commis de ferme. Nourrir les poules. Nettoyer la cour. Inspecter la grange. Trier les œufs. traire les vaches. Il ne faisait pas partie de la famille.Il faisait partie de la ferme. Louis avait oublié ce que c'était d'être du paysage sans être de la photo.
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Nous avons trois familles. Celle que l’on rêve d’avoir, celle que l’on croit avoir, et celle qu’on a vraiment. Déjà qu’avec une seule rien n’est simple, pas étonnant que ça craque. P 161
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Gabriel grandit tordu. Gentil, mais d’une gentillesse obligée, une gentillesse de celui qui ne sait rien faire que penser à ceux qui devraient être là mais ne sont pas là, une gentillesse qui signifie « ne me faites pas de mal, je suis déjà griffé »
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Pour la fille Émard, Louis n'avait aucun charme, aucun pouvoir érotique, il occupait la place d'un animal domestique, intelligent et docile.
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Peut-être que les gens vous aiment mieux quand ils ne vous connaissent pas. Quand ils peuvent vous modeler à leur désir.
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Alexandre était si beau, si tendre, son visage, même abîmé par Louis, semblait de cire tiède, ses émotions passaient dessus, légères comme une pluie fine. Qu’elle aimait cette figure, ces fossettes indévissables.
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Il n'avait pas pu, ce n'était pas que son corps refuse de la besogne, au contraire, mais Alexandre n'était pas un garçon de grange, d'oeufs, de de cornes, Alexandre n'était pas un garçon de marécage, de lisier, de grenouilles, Alexandre était un homme impatient dont les rêves dévorants dépassaient les contours du Paradis, et l'amour qu'il portait à Blanche, son amour d'adolescent, vif, éblouissant, ne suffisait pas à l'immobiliser en ces terres, près de ses pauvres parents, de leur maison étroite, près de la vieillesse d'Emilienne et du regard noir de Louis, près de la mélancolie quotidienne de Gabriel qu'il évitait à tout prix, craignant d'être contaminé par elle.
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Déjà, ailleurs, on s'armait contre la concurrence, d'une cruauté sans pareille, moderne, dévorante, indifférente ; la concurrence sonnait ses cloches dans les campagnes, aux informations on évoquait la détresse des agriculteurs, on parlait des suicides, des impayés, de la solitude affreuse.
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Le monde ne comprendra jamais que les grands hommes ne sont pas ceux qui gagnent, mais ceux qui n’abandonnent pas quand ils ont perdu.
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Ce fils fragile est mauvais signe : sa mère et lui rétablissent, depuis toujours, l'équilibre du monde. Ils ne tombent pas ....
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LA SURFACE, POÈME POUR CEUX QUI ONT MAL

dans ces moment où tu cesses de tourner avec le monde
quand tu ne comprends pas
que les autres ne puissent pas comprendre
que tu es blessée
que tu es cassée
qu'il y a dans ta tête
la voix insupportable du passé
qui répète
"je te l'avais bien dit
je te l'avais bien dit"
dans ces moment où tu ne peux pas
aller plus loin que la porte de ta chambre
où ta colère est une valise pleine impossible à fermer
quand tu saute sur ton cœur pour qu'il cesse d'aboyer
les autres ne comprennent pas
non
ils ne comprennent pas
que c'est comme être punie après un long voyage
qu'on t'a renvoyée
qu'on t'a humiliée
les autres ne peuvent pas faire autrement
que de te prendre dans leurs bras
en murmurant "ça va aller"
l'amour est un naufrage
et la voix du passé s'agace
"je te l'avais bien dit
je te l'avais bien dit
tu ne m'as pas écoutée"
ne t'inquiète pas
tu auras longtemps mal
ça peut prendre une semaine
un mois une année
jusqu'à ce que le prochain bateau passe
ne t'inquiète pas
il faudra du temps
avant que tu puisse enfin
remonter à la surface
dans ces moments où tu te demandes si tu as mérité
cette plaie grande ouverte qui bat comme un tambour
quand tu ne sais plus
si tu te détestes ou non d'y avoir cru
Personne ne devrait s'en vouloir d'avoir cru en l'amour
c'est un enfant farceur, c'est un mauvais joueur
qui est parti avec les meilleures cartes
et la voix du passé dans ton corps tout entier
Brisé de larmes et de fatigue
qui répète
"je te l'avais bien dit
je te l'avais bien dit
tu ne m'as pas écoutée"
ne t'inquiète pas
Il faut que tu apprennes à vivre de nouveau
à retrouver ta place
ta tristesse est un enclos
ouvert
Il faudra du temps
mais un jour
tu sauras comment
remonter à la surface.
Il n'y a pas de justice en amour
il n'y a pas de victime, de coupable
seulement des corps tendus, des promesses murmurées
des ronds de sueur sur vos deux oreillers
il n'y a pas de route nationales qui permette de contourner
les pires moments
il n'y a pas de bourreau, de responsables
il n'y a pas de passion plus respectable
que celle d'aimer
tu voudrais croire que ça ne recommencera pas
que tu as vécu assez
il n'y a pas d'expérience en amour
seulement des tremblements soudains
et des sourires navrés
et des valises fermées
ton cœur n'a pas manqué d'audace
il n'y a pas de chants sacrés
seulement le souvenir des bouches qui s’embrassent
il ne faudra pas les oublier
la vie ne se tait pas
il faudra l'écouter
si tu veux remonter
bientôt
à la surface.

(P76-79)
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Seule la terre comptait. Qu’elle explose, qu’elle vive, qu’elle déborde. Ils la vénéraient, ils la dressaient comme on apprivoise un cheval fou qu’on fait danser sur deux pattes pour des spectateurs médusés. Le terre donnait l’herbe, la pierre, l’eau, les arbres. La fortune des Fontaines venait d’elle, personne ne la gaspillait, ne la malmenait. On ne l’insultait pas quand les récoltes étaient mauvaises, on s’en prenait aux enfants, aux vieillards, à Dieu même, mais pas à la terre des Fontaines. Ses forces bouillonnaient, accordaient tout ce dont ils avaient besoin et plus encore, elle veillait sur eux, et, quand elles emportaient un enfant, on pleurait longuement, mais personne ne reniait la terre, personne n’élevait la voix contre les forces des Trois-Gueules, elles régissaient tout, elles n’avaient pas de nom, pas de forme, elles étaient le vent qui soufflait à travers les arbres, l’orage qui démontait les toits des maisons, les torrents énervés au pied des carrières, elles étaient le froid qui tombait brutalement à la fin du mois d’octobre, les cailloux qui s’enfonçaient dans les pieds nus des adolescents. Les forces étaient partout.
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Je vous parle d’un endroit qui est mort mille fois avant mon arrivée, qui mourra mille fois encore après mon départ, d’un lieu humide et brumeux, couvert de terre, de pierre, d’eau et d’herbe. Je vous parle d’un endroit qui a vu des hommes suffoquer, des enfants naître, d’un lieu qui leur survivra, jusqu’à la fin, s’il y en a une. P 10
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C'est ainsi que vient la mort, nous l'accueillons avec des bras pleins de fleurs, des yeux pleins de larmes, surpris qu'elle nous connaisse si bien, et qu'elle éveille en nous des amours plus fortes que la vie elle-même.

[Excipit]
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Sur la porte des enclos, le maître avait fait graver non pas les prénoms des bêtes mais leur destination. Église. Marché. Clos Deville. Bourg. Une dizaine de couples équestres se partageaient la cour, une fontaine crachait son eau glacée pour les chevaux rentrant de courses, luisants de pluie ou de sueur, beaux comme des dieux tombés du ciel.
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