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Citations de Clément Rosset (215)


(...) Il est étrange que tant d'énergie intellectuelle se dépense à vouloir percer à jours le sens du devenir et de la raison de l'Histoire, c'est à dire le sens de ce qui n'a pas de sens. [ I, 4 ]
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Pourquoi y a-t-il de l’être et non pas rien ? Pourquoi cet être a-t-il des tendances ? Questions absurdes, mais surtout questions déplacées dans un monde où la causalité n’est que mirage : le monde est muet.
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Que l’homme soit privé de chemin ne signifie pas du tout qu’il soit perdu dans un labyrinthe, ne sachant pas, pour aboutir, s’il vaut mieux emprunter le chemin de gauche ou le chemin de droite et retrouvant, à chaque nouveau carrefour, un problème analogue. Dans le labyrinthe il y a un sens, plus ou moins introuvable et invisible, mais dont l’existence est certaine : sont donnés de multiples itinéraires dont un seul, ou quelques rares, sont les bons, les autres ne menant nulle part. Le labyrinthe n’est donc pas un lieu où se manifeste l’insignifiance ; bien plutôt un lieu où le sens se révèle en se recélant, un temple du sens, et un temple pour initiés, car le sens y est à la fois présent et voilé. Le sens y circule de façon secrète et inattendue, à la manière de l’itinéraire improbable et déroutant que doit emprunter l’homme égaré dans le labyrinthe s’il veut trouver une issue. À l’absence de chemins – c’est-à-dire à leur omniprésence – propre à l’insignifiance s’oppose ici la complication des chemins. On sait le goût moderne pour les jeux du sens d’ordre labyrinthique : disparition du sens là où on le guettait, réapparition du sens là où on ne l’attendait pas, fausses communications entre éléments voisins et homogènes, communications véritables entre éléments lointains et disparates. Goût philosophique, comme en témoignent les premières lignes des Mots et les choses de Michel Foucault, la Logique du sens de Gilles Deleuze et son étude des paradoxes du sens, la bande de Mœbius et autres nœuds borroméens de Jacques Lacan. Goût littéraire : labyrinthes de Robbe-Grillet, itinéraires mystérieux et communications secrètes de Michel Butor, « jardins aux sentiers qui bifurquent » chez Borgès. Le goût du labyrinthe est manifestement un goût du sens qui, à le considérer isolément, traduirait plutôt une indifférence de la modernité à l’égard de la question de l’insignifiance.
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Le meilleur des mondes n’est pas celui où l’on obtient ce que l’on désire, mais un monde où l’on désire quelque chose.
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Mon goût du paradoxe m’amènerait même à soupçonner qu’on trouverait aisément de l’onirisme dans toute l’histoire de la peinture avant d’en trouver trace dans la peinture surréaliste.
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Pas d’échappatoire – pas de double : c’est cela qu’annonçait l’oracle à l’avance, et avec raison.
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Rien de plus fragile que la faculté humaine d’admettre la réalité, d’accepter sans réserves l’impérieuse prérogative du réel. Cette faculté se trouve si souvent prise en défaut qu’il semble raisonnable d’imaginer qu’elle n’implique pas la reconnaissance d’un droit imprescriptible – celui du réel à être perçu – mais figure plutôt une sorte de tolérance, conditionnelle et provisoire.
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C.R : Pour nombre de penseurs, l’enjeu de la philosophie n’est pas de changer le monde, ni de l’interpréter, mais plutôt de partir en quête de la sagesse, du bonheur. Ainsi, philosopher, c’est rechercher une bonne entente entre la réalité et soi-même.
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Nous sommes dans l’incapacité foncière de définir notre identité personnelle, quelque mal que nous nous donnions pour y parvenir. Nous connaissons des aspects de notre moi, mais pas sa totalité. Nous ne nous saisissons que comme un assemblage de perceptions disparates. Je sais si j’ai chaud ou froid, si je suis en colère ou joyeux, si telle pensée ou telle chansonnette me trotte dans la tête. Il y a une collection de sensations et d’idées qui se promènent en moi.
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Conséquence curieuse de ce totalitarisme : l’homme véritablement joyeux se reconnaît paradoxalement à ceci qu’il est incapable de préciser de quoi il est joyeux, de fournir le motif propre de sa satisfaction. Car il aurait sur ce point beaucoup trop de choses à dire en général, tout en ne trouvant rien à alléguer en particulier.

La force majeure, p. 8
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L'artificialisme est une pensée du présent, c'est-à-dire de ce qui existe; le naturalisme est une pensée du passé et du futur, c'est-à-dire de ce qui n'existe pas, et qui ne trouve dans la notion d'être qu'un réceptacle purement terminologique. La nature est certes louée sans réserves, mais elle est à restaurer (naturalisme conservateur) ou à instaurer (naturalisme révolutionnaire): seuls le passé et le futur retiennent l'attention naturaliste, l'existence présente ne figurant qu'un accident passager et malencontreux. L'homme de l'artifice, approbateur du réel, limite au contraire son approbation au seul présent.
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Un mot exprime à lui seul ce double caractère, solitaire et inconnaissable, de toute chose au monde: le mot idiotie. Idiötès, idiot, signifie simple, particulier, unique; puis, par une extension sémantique dont la signification philosophique est de grande portée, personne dénuée d'intelligence, être dépourvu de raison. Toute chose, toute personne sont ainsi idiotes dès lors qu'elles n'existent qu'en elles-mêmes, c'est-à-dire sont incapables d'apparaître autrement que là où elles sont et telles qu'elles sont: incapables donc, en premier lieu, de se refléter, d'apparaître dans le double du miroir. Or, c'est le sort finalement de toute réalité que de ne pouvoir se dupliquer sans devenir aussitôt autre: l'image offerte par le miroir n'est pas superposable à la réalité qu'elle suggère. C'est le cas, notamment, de l'univers, qu'Ernst Mach a décrit, dans une formule très étrange et très profonde, comme "un être unilatéral dont le complément en miroir n'existe pas ou, du moins, ne nous est pas connu*".

* Cité par R. Caillois, Cohérences aventureuses, Gallimard, p. 243
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La pensée métaphysique se fonde sur un refus presque instinctif de l'immédiat, comme si on doutait de celui-ci qui apparaît comme truqué.
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Il est une personne qu'on ne reconnaît jamais parce qu'elle est constamment invisible, et c'est évidemment soi-même.
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P. 42 On sait que l'ordinaire surestimation des fonctions intellectuelles est telle que les hommes, qui redoutent pour la plupart et dans leur folie d'être considérés comme impuissants en matière sexuelle, redoutent au moins autant d'être tenus pour des imbéciles : comme si c'était perdre tout honneur et se voir presque rayé de la carte de l'existence que d'avouer un défaut d'intelligence. Descartes illustre très bien, quoique apparemment sans y voir de malice, cette revendication universelle d'intelligence, aussi opiniâtre qu'absurde, dans la tout première phrase du Discours de la méthode : "Le bon sens est la chose du monde la mieux partagée : car chacun pense en être si bien pourvu, que ceux même qui sont les plus difficiles à contenter en toute chose, n'ont point coutume d'en désirer plus qu'ils n'ont." Je soupçonne fort, pour ma part, cette inflation des valeurs purement intellectuelles, manifeste dans toutes les entreprises de séparation radicale du corps et de l'esprit, d'être principalement attribuable à un fantasme mégalomane issu du souci - dont les psychiatres font aujourd'hui le centre nerveux de la névrose obsessionnelle - de couper les ponts entre la nature de l'homme et la nature de toute chose, qu'il s'agisse de l'animal ou de la matière inanimée.
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Je peux enfin, sans rien sacrifier de ma vie ni de ma lucidité, décider de ne pas voir un réel dont je reconnais par ailleurs l’existence : attitude d’aveuglement volontaire, que symbolise le geste d’Œdipe se crevant les yeux, à la fin d’Œdipe roi, et qui trouve des applications plus ordinaires dans l’usage immodéré de l’alcool ou de la drogue.
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La chose dont on rêve de loin et qui déçoit de près illustre bien la connaissance selon Nivernois : elle est petite vue de près, mais grande vue de si loin qu’on ne la voit pas.
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La simple lecture de copies d’étudiants, notamment si ceux-ci étudient la philosophie, témoigne par exemple surabondamment de l’existence de cette faculté étonnante de ne rien penser alors qu’on croit de bonne foi penser quelque chose ; en quoi ces étudiants n’ont d’ailleurs pas entièrement tort : car, si la pensée n’existe pas, la copie est là qui en témoigne, ou prétend en témoigner.
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C’est le thème, à la fois stoïcien et nietzschéen, du retour éternel, qui vient paradoxalement combler le présent de tous les biens dont le prive la duplication métaphysique.
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[Selon Hegel] L’autre monde est invisible parce qu’il est précisément doublé par ce monde-ci, qui interdit de le voir. Si ce monde-ci différait un tant soit peu du monde suprasensible, ce dernier serait en quelque sorte plus tangible : on pourrait le repérer dans l’écart même qui le ferait différer du monde sensible. Mais justement, cet écart n’est pas.
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