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Citations de Delphine de Vigan (4405)


Elle rêvait de devenir invisible : tout voir, tout entendre, tout apprendre, sans que rien de palpable ne signale sa présence.
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Les loyautés.
 
Ce sont des liens invisibles qui nous attachent aux autres – aux morts comme aux vivants –, ce sont des promesses que nous avons murmurées et dont nous ignorons l’écho, des fidélités silencieuses, ce sont des contrats passés le plus souvent avec nous-mêmes, des mots d’ordre admis sans les avoir entendus, des dettes que nous abritons dans les replis de nos mémoires. 
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- Je voulais te demander un truc. Est-ce que tu sais dans quel sens on tourne la langue quand on embrasse un garçon ?
D'abord elle ouvre ses yeux, très très grand. Et puis elle rit. Je ne l'ai jamais vue rire comme ça. Alors je ris aussi. Si j'avais plus d'argent, j'appellerais le garçon et je crierais "Champagne", je claquerais dans mes mains, je ferais venir des petits-fours comme au mariage de ma grande cousine, des quantités, on mettrait la musique à fond dans le café, on danserait sur les tables, on inviterait tous les gens à notre fête, No irait se changer dans les toilettes, elle enfilerait une belle robe et des jolies chaussures, on fermerait les portes pour être tranquille et pour faire le noir, on monterait le son comme dans la chanson.
- T'as de ces questions ! Y a pas de sens pour embrasser, on n'est pas des machines à laver !
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Quand je les rencontre pour la première fois, c'est toujours la même image que je cherche, celle de l'Avant. Derrière leur regard flou, leurs gestes incertains, leur silhouette courbée ou pliée en deux, comme on tenterait de deviner sous un dessin au vilain feutre une esquisse originelle, je cherche le jeune homme ou la jeune femme qu'ils ont été. Je les observe et je me dis : elle aussi, lui aussi a aimé, crié, joui, plongé, couru à en perdre haleine, monté des escaliers quatre à quatre, dansé toute la nuit. Elle aussi, lui aussi a pris des trains, des métros, marché dans la campagne, la montagne, bu du vin, fait la grasse matinée, discuté à bâtons rompus. Cela m'émeut, de penser à ça. Je ne peux pas m'empêcher de traquer cette image, de tenter de la ressusciter.

Page 41, JCLattès, 2019.
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Si à travers l'écriture tu ne cherches pas à te connaître, à fouiller ce qui t'habite, ce qui te constitue, à rouvrir tes blessures, à gratter, creuser avec les mains, si tu ne mets pas en question ta personne, ton origine, ton milieu, cela n'a pas de sens. Il n'y a d'écriture que l'écriture de soi. Le reste ne compte pas.
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L'écriture est une arme de défense, de tir, d'alarme, l'écriture est une grenade, un missile, un lance-flammes, une arme de guerre. Elle peut tout dévaster, mais elle peut aussi tout reconstruire.
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Ils n’ont pas eu besoin de parler pour savoir qu’ils pouvaient s’entendre. Il suffisait de se regarder ; communautés tacites – sociales, affectives, émotionnelles – signes abstraits, fugaces, de reconnaissance mutuelle, qu’ils seraient pourtant incapables de nommer. Ils ne se sont plus quittés.

Page 46, Jean-Claude Lattès, 2018.
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Je ne suis pas triste. Mais il y a un vide à l'intérieur de moi, qui bat et couple le souffle. Je suis absente à moi-même.
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Le risque, ce n'est pas que je ne t'aime pas assez, c'est que je t'aime trop.
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— Mais l'un n'empêche pas l'autre, Michk’ : l’orthophoniste vient deux fois par semaine dans ta chambre, mais toi tu peux aller en bas à l'atelier mémoire, le mercredi, avec les autres. Tu as déjà essayé ?
— J'aime pas. Il y en a une qui répond à tout, comme ça, du tic au tic. . . pas une seconde d'hésitation. À brûle-pourpoint, elle dit la bonne réponse. Elle connaît tous les mots possibles et imaginaux, elle fait la fière, tu vois, ça me tagace. Pourquoi elle vient, si elle sait déjà tout ? En plus, elle pourrait s'habiller, eh ben non, même pas, elle passe sa vie dans une robe des champs comme si c'était du plus grand choc, tu vois...
— Elle se sent peut-être plus à l'aise comme ça.
— Oui, mais bon, un peu de clémence ne nuit pas. Pourquoi tu ris ? Au moins, si ça te fait rire. Mais tu sais, tu as mieux à faire, franchement. Tu ne devrais pas venir si souvent. Tu vas t'ennuyer.

Pages 62-63, JCLattès, 2019.
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.....j’ai découvert que mon mari avait également ouvert un compte sur Twitter, qui lui permet, dans un format plus incisif et de manière aussi sournoise, de commenter tout et n’importe quoi, sans jamais assumer la teneur de ses propos. Drôle de monde qui nous laisse déverser ici et là une parole anonyme, ambivalente ou extrême, sans jamais nous faire connaître.
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Je ne me suis jamais vraiment intéressée à la psychogénéalogie ni aux phénomènes de répétition transmis d'une génération à une autre qui passionnent certains de mes amis. J'ignore comment ces choses (l'inceste, les enfants morts, le suicide, la folie) se transmettent.
Le fait est qu'elles traversent les familles de part en part, comme d'impitoyables malédictions, laissent des empreintes qui résistent au temps et au déni.
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Vous êtes-vous déjà demandé combien de fois par jour vous disiez merci ? Merci pour le sel, pour la porte, pour le renseignement.
Merci pour la monnaie, pour la baguette, pour le paquet de cigarettes.
Des merci de politesse, de convenance sociale, automatiques, mécaniques. Presque vides.
Parfois omis.
Parfois exagérément soulignés : Merci à toi. Merci pour tout. Merci infiniment.
Grand merci.
Des merci de profession : Merci pour votre réponse, votre attention, votre collaboration.

Page 11, JCLattès, 2019.
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Un soir, le journal télévisé a diffusé un reportage sur une marée noire provoquée par un accident de pétrolier. Nous étions à table. J’ai regardé ces oiseaux, englués dans le mazout, et j’ai aussitôt pensé à nous, à nous tous, ces images nous représentaient mieux que n’importe quelle photo de famille. C’était nous, c’étaient nos corps noirs et huileux, privés de mouvement, étourdis et empoisonnés.

Page 65, Jean-Claude Lattès, 2018.
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Un jour, il aimerait perdre conscience, totalement.
S’enfoncer dans le tissu épais de l’ivresse, se laisser recouvrir, ensevelir, pour quelques heures ou pour toujours, il sait que cela arrive.

Page 17, Jean-Claude Lattès, 2018.
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Le doute est un poison.
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Attendre sans rien demander. Attendre un homme qui n'a rien promis.
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En quelques semaines, son élocution est devenue plus lente, plus sinueuse, elle s'arrête parfois au milieu des phrases, complètement perdue ou bien elle renonce au mot manquant et passe directement au suivant. J'apprends à suivre le chemin de sa pensée.
Je suis vaincu. Je le sais. Je connais ce point de bascule. J'en ignore la cause mais j'en mesure les effets. La bataille est perdue.
Mais je ne dois pas lâcher. Surtout pas. Sinon ce sera pire encore. La chute libre.
Il faut lutter. Mot à mot. Pied à pied. Ne rien céder. Pas une syllabe, pas une consonne. Sans le langage, que reste-t-il ?

Page 105, JCLattès, 2019.
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Quand j’étais enfant, je pleurais le jour de mon anniversaire. Au moment où les convives réunis entamaient la traditionnelle chanson dont les paroles sont sensiblement identiques dans toutes les familles que je connais, tandis que s’avançait vers moi le gâteau surmonté de quelques bougies, j’éclatais en sanglots.Cette attention centrée sur ma personne, ces regards brillants convergeant à mon endroit, cet émoi collectif m’étaient insupportables.
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Quelques minutes plus tard, une femme entre dans la chambre pour lui proposer une collation. Un petit jus de pomme avec une petite paille et un petit gâteau emballé dans un petit sachet. Les mêmes qu'au centre de loisirs.
Voilà donc ce qui t'attend, Michk' : des petits pas, des petits sommes, des petits goûters, des petites sorties, des petites visites.
Une vie amoindrie, rétrécie, mais parfaitement réglée.

Pages 32-33, JCLattès, 2019.
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