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Critiques de Jacques Spitz (87)
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L'oeil du purgatoire

Vous lecteurs ! Vous qui lisez ce billet ! Pauvres petites âmes mortelles ! Surtout faites pénitence suffisante avant votre trépas sinon... Sinon qui sait ce qu'il pourrait advenir. Comme Jean Poldonski le narrateur de cet étonnant roman d'anticipation, vous pourriez être condamnés à voir l'inimaginable, vous pourriez être condamnés à ne plus jamais voir les nuages, les fleurs, les couleurs, la beauté et la jeunesse du monde qui vous entoure et n'avoir pour seul horizon que le crépuscule désolant et infini.



Jacques Spitz a écrit L'oeil du purgatoire en 1945, il a été réédité en 1972. Il est considéré comme l'un des plus grands classiques du roman d'anticipation. Verdict : brillant.



Une écriture audacieuse parfois même dérangeante, teintée d'humour noir, qui met en scène dans un Paris intemporel (l'auteur a choisi de ne pas dater les faits) Jean Poldonski, jeune peintre raté et égocentrique qui cultive, il faut bien le reconnaître, l'art de la misanthropie avec excellence. Blasé de la vie, suicidaire, la seule chose qui le retient sur terre c'est son génie (auquel il est bien le seul à croire) et les femmes (dont il n'a que peu de respect ceci-dit en passant).



Mais la vie peut parfois prendre un tournant inattendu. Une rencontre hasardeuse rue de Rivoli dans une boutique de cartes de visite avec Christian Dagerlöff, une espèce d'illuminé, de savant fou, qui officie comme laborantin à l'Institut Pasteur, va modifier irrémédiablement le cours de la misérable petite vie de notre narrateur Une rencontre qui va le mener tout droit dans les méandres du temps, de l'espace-temps plus précisément, par le biais d'un bacille que Dagerlöff en personne lui inocule à son insu dans les yeux, lui offrant ainsi la capacité de percevoir le "présent vieilli".



Ce qui n'est au départ qu'une vision anodine d'un présent vieilli va progressivement se transformer en une vision plus aboutie dans le temps mais aussi bien plus effrayante. Poldonski ne voit pas l'avenir, oh non, pire que ça, il voit la dégénérescence, le désordre, la destruction, les ruines, de tout objet, de toute matière, vivante, organique. Comment supporter cette vision chaotique et ce décalage qui apparaît entre ce qui est (dans le présent) et ce qu'il voit (dans le présent vieilli) ? Comment ne pas devenir fou ?



Imaginez une pomme, une belle Granny Smith, bien verte, toute lisse, toute brillante, si vous aviez la capacité de percevoir le présent vieilli, vous ne verriez que le trognon informe et insipide de cette pomme. Il en serait de même pour tout ce qui vous entoure. Comment pensez-vous que vous percevriez alors les hommes ? Je vous laisse le soin d'imaginer...



"L'oeil du purgatoire" c'est la misanthropie, c'est la solitude d'un homme condamné à voir ce que personne ne supporterait de voir. N'y aurait-il pas là comme une punition ou un châtiment divin envers celui qui peu de temps encore auparavant abjectait les hommes et sa propre vie ?

N'est-il pas vrai que c'est quand on perd définitivement une chose, que l'on se rend compte combien elle était importante à nos yeux ?



"Certains hommes vivent leur paradis sur terre en subissant l'enfer de leur purgatoire."

(Anonyme)



* Je remercie Tetrizoustan qui a rendu possible cette lecture et dont la critique m'a aussitôt rappelée à ce roman.
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L'homme élastique, la création d'une humanité nou..

"L'homme élastique" ou comment la science devient-elle un effroyable instrument de pouvoir et de domination militaire, économique et sociale. Le pouvoir de transformer la nature humaine mais à quel prix ?



Jacques Spitz nous sert un récit audacieux, d'une intelligence remarquable, tant pour son esprit d'anticipation que pour son esprit visionnaire car ne l'oublions pas ce roman a été publié pour la première fois en 1938. Un récit qui nous est narré en deux parties, incluant une double narration des plus pertinente qui nous apporte ainsi deux points de vue sur l'histoire. La première partie est rédigée sous la forme d'un journal, celui du Docteur Flohr (notre personnage principal) et la deuxième, sous la forme de mémoires, celles de sa fille Ethel.



Un scientifique qui répond au nom de Docteur Flohr, Docteur ès sciences s'il vous plaît, n'exerçant plus la médecine mais continuant d'officier dans un des laboratoires de la Faculté de Paris - curieux personnage que ce génie de la physique quantique en proie à la misanthropie et au cynisme - fait une découverte qui va révolutionner le monde : il découvre le moyen de dilater ou comprimer les atomes, offrant ainsi à l'humanité la capacité de redimensionner à volonté n'importe quel organisme, vivant ou non. de l'infiniment petit à l'infiniment grand, il n'y a qu'un pas pour le Docteur Flohr.



Nous sommes dès les premières pages intrigués, il règne un climat d'étrangeté, un je-ne-sais-quoi qui nous laisse supposer que cette découverte ne va pas être utilisée qu'à bon escient. Quoi qu'il en soit notre étrange docteur prend ses cliques et ses claques et part s'installer loin de Paris en rase campagne à Chantambre avec pour seule compagnie son chien, son chauffeur et la bonne. Il installe son laboratoire dans une des granges attenantes à la propriété dans laquelle il réside.



C'est donc par le biais d'un journal intime que nous prenons part, étape par étape, jour après jour, à cette expérience hors du commun alors que la deuxième guerre éclate, le 14 juillet, guerre dont le Docteur Flohr se soucie peu (pour le moment seulement) enfermé dans son laboratoire avec ses premiers cobayes : plantes, fleurs, légumes, lapins, poules, tout y passe... Jusqu'au 17 juillet, date à laquelle il parvient à redimensionner avec succès un homme atteint de nanisme, le gratifiant au passage d'une quarantaine de centimètres supplémentaires.



Puis tout s'accélère, le 29 juillet, exalté par les résultats probants de la dilatation de l'atome, il part pour Paris soumettre sa découverte au Ministère de la guerre dans le but de la mettre au service de la Défense nationale. 7000 hommes, des divisions entières, des bataillons, sont redimensionnés à la taille de lilliputiens de 5 centimètres, je vous laisse imaginer la guerre revue et corrigée par Jacques Spitz alors qu'elle n'a pas encore eu lieu (très fort !). le monde entre alors dans une ère nouvelle, l'ère de la "flohrisation", dans les rues, partout à travers le monde, géants et lilliputiens se côtoient sans que personne ne s'en offusque, on se "flohrise" sur un coup de tête, pour un oui ou pour un non, pour améliorer ses conditions de travail, pour pimenter sa vie ou pour se débarrasser d'un vilain complexe, stupéfiant !



J'ai retrouvé dans ce roman l'écriture qui caractérise l'auteur, une écriture acérée, sans fioriture, avec ce savant mélange d'humour noir et de cynisme que j'affectionne tant. Jaques Spitz nous dresse le portrait édifiant d'un homme méprisant et méprisable, prêt à tout pour servir son art, entre raison et déraison, qui offre à l'humanité le moyen de corriger les défauts de la nature humaine en la rendant encore plus monstrueuse qu'elle ne l'est déjà.



Alors pour l'homme élastique, un poème élastique de Carl Norac :



Je

t'écris

un poème

qui va grandir

s'allonger d'un pied

à chaque vers tracé

sans plus jamais s'arrêter

jusqu'à remplir tout l'Univers

(peux-tu m'aider à le rétrécir Docteur Flohr ?)
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Les évadés de l'an 4000

L'homme a dit : les cieux m'environnent

Les cieux ne roulent que pour moi

De ces astres qui me couronnent

La nature me fit roi :

Pour moi seul le soleil se lève

Pour moi seul le soleil achève

Son cercle éclatant dans les airs

(Jacques-Charles-Louis Clinchamps de Malfilâtre)



Dans ce court roman fantastique (160 pages pour la version numérique) l'écrivain brillant et visionnaire qu'est Jacques Spitz installe le décor et les personnages de son histoire dans un futur dystopique puisqu'il nous fait voyager aux confins de l'an 4000 et quelle prouesse quand on sait que ce roman a été publié en 1936.



Contrairement à "L'homme élastique" et à "L'oeil du purgatoire" que j'ai eu le plaisir de lire, respectivement publiés en 1938 et 1945, dans lesquels l'auteur nous offre une vision chaotique et sans espoir (ou si peu) de l'humanité, à ma grande surprise la trame ici prend un aspect plus romanesque et même si l'espoir revêt sa part sombre il est bien présent et ce n'est pas pour me déplaire d'autant plus que Monsieur Spitz a su conserver son style habituel un brin cynique et enjoué qui lui sied à merveille. Et, petite anecdote que je permets de partager au passage, ce roman devait être adapté pour le cinéma en 1941 par Marcel Carné : Jean-Anouilh pour les dialogues, Jean Marais et Danielle Darrieux dans les rôles principaux, le film n'a jamais vu le jour, dommage pour nous...



Celui-là même qui nous donnait la faculté de percevoir le présent vieilli dans "L'oeil du purgatoire" et qui prévoyait la deuxième guerre mondiale avant même qu'elle n'ait lieu dans "L'homme élastique" fait la part belle aux nombreuses théories avancées par les scientifiques en son époque qui envisageaient pour la majorité l'extinction de notre humanité par le refroidissement climatique qui laisserait notre bonne vieille planète à l'agonie dans un hiver sans fin car c'est bien d'une longue, très longue course contre la montre dont il s'agit ici pour parvenir à sauver l'humanité de son sort funeste qui est celui de devoir creuser sa propre tombe pour s'enterrer vivante dans les entrailles de celle qui l'a vue naître.



Qu'en est-il de notre bonne vieille planète à la veille de l'an 4000 ? Les nouvelles ne sont pas réjouissantes : l'ère quaternaire qui a pris fin en 2006 en même temps qu'a débuté une série de catastrophes climatiques provoquée par l'affaiblissement du rayonnement solaire n'est plus qu'un songe lointain dans l'esprit de l'Homme du XLème siècle, la révolution astrale l'ayant obligé à migrer vers la zone équatoriale et à constituer un nouvel état en les État-Unis d'Afrique dont la capitale est Tombouctou. Ainsi en 2815 il n'existe plus sur Terre qu'un seul état, une seule race et une seule langue, c'est l'ère dite "quinquennaire", elle est qualifiée comme étant la planche de salut de l'humanité qui dès 3600 n'a plus d'autre choix que de devoir s'enfoncer sous terre à 800 mètres de profondeur, l'astre malade continuant inexorablement de s'éteindre. Tombouctou2 gigantesque ville "caveau" voit donc le jour (quel paradoxe) laissant l'Égypte et la Méditerranée sous une couche de glace, réduisant feu Paris notre capitale à un insignifiant petit point à -18°C sur la carte. Le monde est devenu troglodyte, on cultive le lichen en masse, on boit du lait de baleine stérilisé à l'ozone, la vie est suspendue aux réserves de radium principalement utilisées pour la fabrication de la petite pilule radioactive, rituel du soir sans lequel Pat, héros bien malgré lui de ce récit, ne pourrait vivre et question "vie" il va être servi car rien n'est jamais acquis dans la vie et encore moins quand on est le neveu de l'éminent professeur Sandersen qui lui ne voit la survie de l'humanité que par l'astronautisme, soit un avenir ailleurs sur une planète plus accueillante qui n'est autre que la bien nommée Vénus.



Je ne vous en dis pas plus et je vous invite à découvrir ce roman. L'écriture de Jacques Spitz est fascinante. Il a ce talent de réussir à nous emporter dans la liesse de ce monde qui pourrait être le notre demain (à quelques détails près bien entendu) et dans lequel nous pourrions nous aussi scander parmi la foule en délire : "Ceux qui vont mourir vous saluent !"

Les dernières pages sont lumineuses, l'auteur nous offre un texte d'une beauté à couper le souffle, un pur moment d'extase qui nous ferait presque oublier que l'Homme de Jacques Spitz n'accomplit jamais aussi bien sa destinée que dans la vanité et la suffisance.

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L'oeil du purgatoire

"La croyance dans les démons se trouve à la racine de notre concept de causalité."

(A. Einstein)



Voyage, voyage... dans le temps, entre les galaxies, à l'intérieur du corps humain... la SF a déjà exploré un tas de chemins. Mais arrivez-vous à imaginer un voyage dans la causalité ?

Nous savons tous qu'il y a un rapport irréfutable entre la cause et son effet; autrement dit, la connaissance de la "cause" permet de prévoir des "choses" à venir. On sait pourquoi notre corps vieillit, et pourquoi il en va de même pour les choses qui nous entourent. Alors, logiquement et en toute lucidité, on peut prévoir notre inévitable "retour à la poussière". C'est triste, mais c'est comme ça; les empiriques et les positivistes ne vont pas le démentir. Avec sa phrase, Einstein rajoute un brin de métaphysique, et on commence déjà à se rapprocher du livre de Spitz.

J'ai un rapport spécial, avec la SF. Quand j'ai envie d'un peu de SF, je me contente d'imaginer qu'il y a quelque chose d'intéressant le samedi soir à le télé, ou que je fais le ménage pour le plaisir. Sauf que, dans ce cas, le rapport de cause à effet est un peu brouillé, et le peu de SF qui a passé entre mes mains m'a toujours bien plu. Y compris ce court roman de Spitz, qui nous immerge peu à peu dans sa sombre vision de la "causalité".



Il ne serait peut-être pas sans intérêt de savoir quelque chose sur cet auteur un peu oublié par les éditeurs, né dans la dernière décennie du 19ème siècle. Est-il tout à fait compréhensible de devenir écrivain et poète surréaliste après des études d'ingénieur ? La plupart de ses romans fantastiques datent des années 30-40, et le surréalisme, l'un des courants toujours en vogue à l'époque, s'y reflète avec bonheur, sans oublier le fait que cet ancien diplômé de polytechnique sait vraiment bien écrire, et possède le don de rendre ses descriptions aussi visuelles qu'un roman-photo.



Jean Poldonski est un misanthrope cynique, un peintre dépressif au génie incompris. Par hasard, son chemin va croiser celui de Dagerlöff, un étrange vieillard et un "génie" authentique, comme l'affirme la carte de visite qu'il offre à Poldonski. Leur bref échange convainc plutôt le peintre que ce Dagerlöff est un authentique fou, mais quelque chose l'attire : peut-être ces divagations sur la causalité, peut-être juste l'envie de mépriser ouvertement ce prétendu "génie". Peu importe, car Poldonski a déjà décidé de faire ses "adieux au monde cruel", le soir même de la dernière altercation avec Dagerlöf. Pourtant, quelque chose a changé...

Ses idées morbides s'envolent comme par magie, car soudain le monde devient un merveilleux paradis parfaitement équilibré. Mais pour combien de temps ?

Quand vous commencez à remarquer des petits détails - un coin jauni de votre livre, une fleur fraîchement cueillie déjà fanée, un cheveu blanc qui n'était pas encore là hier - cela peut encore aller.

Et puis, tout s'accélère.

Vous vous souvenez peut-être de cette scène dans le "Dracula" de Coppola, où le bouquet de fleurs sèche subitement au passage du vampire : voilà le monde tel que le voit désormais Poldonski. Chaque regard dans son miroir est une contemplation du portrait de Dorian Gray, et ses sorties deviennent peu à peu des excursions dans les gravures macabres de Vogelmut. A la fois terrifiant et hilarant, mais comment ne pas devenir fou : tout cela n'est qu'une illusion, un effet d'optique vu par l'oeil du purgatoire; le monde se porte à merveille. C'est le regard de Poldonski qui ne va pas, alors comment se comporter avec ses proches, en train de devenir des... brr !

Et quoi faire, en voyant sa propre mort s'approcher dans un miroir, en supposant que dans le monde "normal" nous sommes toujours bien portants ? Où est Dagerlöff ? Et comment tout ça va se finir ?



4/5 pour cette histoire toute en images, à la fois drôle et inquiétante, écrite avec beaucoup d'inventivité. Et un grand merci à la Grenouille de l'étang pour me la faire découvrir !

Tiens, c'est normal que le pain acheté ce matin est déjà aussi sec, ou alors...
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La guerre des mouches

Avec la lecture de "l'Oeil du purgatoire", j'avais déjà pu constater que J. Spitz, écrivain d'entre deux-guerres et rattaché au courant surréaliste, n'avait jamais été un défenseur du genre humain.

Ce roman-ci -d'anticipation-, écrit en 1938, le confirme. Restant dans la conjecture science-fictive de "Et si un jour..." (...une mutation de la mouche rend cet espèce intelligente...), le récit linéaire de 150 pages s'approche pourtant d'avantage, par son style et les descriptions narratives, du fantastique horrifique.



Mais SF ou histoire d'horreur, c'est avant tout une satire jouissive qui met en évidence les faiblesses de l'homme, son incapacité de cohabitation et de réflexion afin de faire face ensemble (!) au danger (ici, l'invasion des mouches), qui voue la civilisation humaine à une totale disparition.



Comme un entomologiste (à l'instar de son personnage principal qui étudie les mouches), Spitz examine sous la loupe les comportements humains à travers les corps sociaux dits "responsables" (savants et scientifiques, militaires, gouvernants, religieux...) dont aucun ne s'en sort indemne, sous la pointe de son stylo venimeusement sarcastique. le lecteur rit...souvent jaune... : dans un des derniers chapitres p.e., Spitz se moque avec un humour grinçant, de l'Allemagne Hitlerien et ses "Krieger" néandertaliens.



Poussant, d'une manière excessive -surréaliste- le fléau diptère avec ses grouillements noirâtres, les pontes de larves, infections, épidémies... à son paroxysme, l'auteur cercle l'homme pour, au final, le cantonner dans la case de l'observateur observé.



...et la dernière phrase du livre, que je me refuse de citer ici, afin de laisser la surprise d'une belle conclusion, empreinte de véracité...fait mouche !
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La guerre des mouches

Excellent franchement.

L'espèce humaine n'est pas invincible et ce petit roman soigné à la langue très classique , vient judicieusement nous le rappeler .

Les mouches sont , ici , un fléaux quasi biblique , une redoutable métaphore qui est cinglante et implacable dans ce texte remarquablement construit et au style très classique .

Les mouches se mettent bizarrement à proliférer dans le sud-est asiatique et c'est localement une véritable catastrophe .

Le monde regarde , au début, de façon distante et perplexe ce phénomène qui prendra très vite une tournure dramatique .

Le fléaux finira par s'étendre à toute la planète alors que tous les continents seront progressivement affectés .

Ce roman post-apocalyptique soigné possède un parfum de réalisme qui est réellement savoureux . C'est une dynamique qui est antérieure à la vague postérieur des insectes , l'époque de la grande peur des insectes , qui fut assez florissante en SF dans les années Soixante-dix ..

La chute de Paris pourrait bien vous causer des sueurs froides .

C'est un petit bijoux de science-fiction francophone qui est réédité aussi régulièrement que sporadiquement .

Vraiment fameux , je le jure !



Un seul défaut , la toute fin est un peu trop anthropomorphique ( encore que c'est une métaphore ) , mais la ballade est quand même savoureuse !

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Les évadés de l'an 4000

En cette fin d'ère quinquennaire, le monde roule sur la pente descendante du thermomètre.

Car, au diable les climatosceptiques, dès 2006, les premiers troubles dans l'activité solaire avaient annoncé un refroidissement général du globe terrestre.

Et, en 2185, le monde devenu inhospitalier, l'humanité avait fini par se regrouper au sein des Etats-Unis d'Afrique, dans sa capitale Tombouctou, libre de glace toute l'année.

L'humanité, devenue troglodyte, avait commencé à s'enterrer dans de profondes cités ...

"Les évadés de l'an 4000" est un roman écrit par Jacques Spitz en 1936, et paru dans la prestigieuse collection Nrf des éditions Gallimard.

C'est un roman de science-fiction marqué du style très personnel de Jacques Spitz.

Le ton y est comme souvent teinté d'humour.

C'est un roman captivant, réaliste et moderne.

Mais pour autant Jacques Spitz, dans son anticipation, ne s'embarrasse pas de prospectives prophétiques.

Sa plume imaginative se place au service d'un récit rapide et fluide.

Les personnages sont de ceux, qui pourtant intemporels, possèdent des caractères bien ancrés dans le siècle de l'auteur.

C'est la recette de Jacques Spitz : projeter dans l'avenir, dans des futurs complètement inattendus, des personnages avec lesquels on s'attendrait à le voir badiner dans un cocktail.

Le terme "classique" prend ici tout son sens dans une science-fiction française naissante.

D'ailleurs, l'épilogue des évadés de l'an 4000, surprenant et teinté de surréalisme, a été depuis repris, remodelé à plusieurs reprises, notamment par Bernard Werber.

Mais avec beaucoup moins de bonheur, de subtilité et de réussite, il faut le dire.

Le roman de Jacques Spitz décrit la lutte entre ce troglodysme ancien, qui prétend sauver l'humanité en l'enfouissant de plus en plus profond sous terre, et l'astronautique nouvelle et audacieuse qui voit l'avenir de l'espèce dans la conquête spatiale vers de nouvelles planètes habitables.

Il est aussi une histoire d'amour qui ne veut pas se déclarer.

Et, aujourd'hui, peut-être plus qu'hier, sonne-t-il d'une actualité plus pénétrante ...
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L'oeil du purgatoire

C’est sur les très bons conseils de Verdorie (que je remercie évidemment pour son agréable envoi) que je me suis attaqué à L’œil du purgatoire de Jacques Spitz. C’est en complet novice de cet auteur comme de son œuvre que j’attaquais ce court roman au titre énigmatique et mystérieux.



Le préfacier indique rapidement que cet auteur méconnu, qui apparaît malgré tout comme un des pères de la science-fiction surréaliste française (le dernier de cette lignée pourrait ainsi être Alain Damasio), a le talent de faire tenir en peu de mots une foule de sentiments, de situations et de sensations. Comment dire à quel point c’est vrai ?... L’œil du purgatoire est une lente agonie solitaire fondée sur un principe de science-fiction très simple, que je me garderais bien de dévoiler ici car sa découverte est bien plus agréable au fil du roman.

Même s’il ne met pas en scène des personnages hauts en couleurs ou subissant des péripéties épiques, le désespoir monte, inexorablement, la solitude aussi, et on se demande jusqu’où Jacques Spitz va bien pouvoir pousser notre imagination, jusqu’où il va bien pouvoir nous emmener encore, surtout qu’il le fait avec une concision experte. Fortement inspiré par le surréalisme, l’auteur imprègne son roman d’une forte dose de pessimisme, ce qui correspond parfaitement à mon état d’esprit la plupart du temps. La montée d’adrénaline m’a tellement transporté, jusqu’aux frontières de la mort et de la non-éternité, que les derniers paragraphes ont été lus la boule au ventre (l’idée de mort, j’ai toujours trouvé ça intolérable, personnellement ; mon futur beau-papa sera d’accord, je crois…). Mais en tout cas, qu’est-ce que ce roman est bouleversant ! Tellement que, pour une fois, je me passerai de faire une vraie conclusion, mais plutôt un bilan en une phrase. Le caractère irrémédiable de chaque chose en ce bas monde : un sujet bateau, semble-t-il, mais parfaitement traité par un Jacques Spitz surréaliste à souhait qu’il conviendrait de bien mieux mettre en valeur.



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La parcelle

Non, la parcelle Z n'est pas un endroit tenu secret des États-Unis où les extraterrestres auraient atterri le 17 janvier 1973, et où, depuis, le professeur fou Raouswellt se livreraient à des expériences afin de découvrir avant tout le monde la véritable recette du pistou !

Non, décidément non, la science-fiction française se tient mieux que cela.

D'ailleurs, ce livre de Jacques Spitz, écrit en 1942, est-il vraiment un roman de science-fiction ?

Pour ma part, j'aurai tendance à le décrire comme un roman de moeurs vaguement métaphysique, et teinté de fantastique et d'espionnage.

Les laboratoires Blandin ont fait leur fortune avec la poudre vitaminée, l'argénium qui est un métal vivant et la synthèse électrique des chromosomes dans les cellules végétales.

Ça vous en bouche un coin !

Mais ce n'est pas tout, un des scientifiques les plus doués du labo, Bernard Desmaisons, va se marier avec Cécile Morhange, la jeune secrétaire du patron .

Voilà qui annonce du bonheur dans la maison !

Seulement Cécile est une enfant de l'assistance publique, à la santé défaillante, et qui de plus vient de perdre son chien.

Ce qui ne serait rien si Bernard n'était pas un vieux garçon rétrograde et jaloux ...

Alors, vous allez me dire :

- "c'est bien beau tout ça. Mais où est donc passé le "fantastique" promis ?"

Et c'est là qu'intervient "la parcelle Z".

Un moyen bioélectrique dont je n'ai pas compris le traître mot du mode d'emploi, mais qui n'en permet pas moins de surveiller sa belle à l'intérieur d'un cadre dans lequel on a glissé une carte de Paris.

Ajoutez à cela deux ou trois agents secrets à surveiller parce qu'ils sont douteux et troubles, une vieille amie de l'assistance publique qui a mal tourné, un chien nommé "Cerbère" ... et vous obtenez un roman original et attachant, quoiqu'un peu lent et confus.

Le livre est écrit de main de maître.

Les descriptions sont plaisantes sans être surchargées.

Le lecteur a du plaisir à suivre les personnages de ce drame de la jalousie, de ce récit qui s'accroche au style élégant de la plume de son auteur, et qui, en cela, perd un peu de son efficacité.

De plus l'épilogue est un peu ridicule, un peu à la façon de ceux qui étaient accrochés à ces mélodrames du XIXème siècle.

Ce livre est aussi moins léger, plus désespéré dans son propos et sa manière, que le reste de l'oeuvre dédiée à la SF par Spitz, qui pourtant est apocalyptique.

Mais Jacques Spitz a su fouiller assez dans le coeur et dans les tripes de son personnage principal, Bernard Desmaisons, pour en extraire une splendide description de ses états d'âme d'homme jaloux.

Et, c'est ce qui fait l'intérêt principal, je crois, de ce bon roman que Jacques Spitz a signé d'un "Z" qui veut dire ... Cécile !

Nonobstant que la jalousie est un vilain défaut ...













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La guerre des mouches

Un classique de la science-fiction française que j’ai redécouvert avec plaisir. On suit les tribulations d’un jeune chercheur en entomologie se nommant Juste-Evariste Magne. Celui-ci doit faire face à une invasion de mouches devenues intelligentes suite à une mutation d’instinct. Le petit roman de Jacques Spitz écrit en 1938 (réactualisé en 1970 pour tenir compte des bouleversements historiques et géographiques et scientifiques) reste étonnamment moderne dans son style et dans le traitement de ses personnages. Il manie à la fois l’humour et l’horreur. Les scènes de batailles entre les hommes et les mouches sont dignes des romans post-apocalyptiques modernes ou des films jouant sur la grande peur des insectes.

Cette nouvelle est une vraie pépite de la science-fiction française. Elle n’a rien à envier aux classiques américains et anglais. A lire sans hésitation, à moins bien sur de souffrir d’entomophobie…

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Joyeuses apocalypses

Le saviez-vous ?

L'entre-deux guerres avait pris pour nom celui de "whisky ou vodka" !

Non, pas cette entre-deux guerres là, une autre qu'en son temps l'inclassable et quelque peu surréaliste Jacques Spitz a imaginé et chroniqué pour le petit lecteur européen tétanisé par cette guerre froide dont il était le juste point central de frappe.

Mais, bien heureusement, "la guerre mondiale n°3" est une uchronie, un récit imaginaire sorti tout droit d'un noeud de l'Histoire ayant dévié de son cours naturel.

Bien heureusement !

D'un côté les États-Unis et de l'autre l'URSS, deux blocs chargés d'électricité idéologique contraire.

D'un côté du ring, le président US Caffery, de l'autre, aux commandes du Kremlin, le maréchal Oustachine.

Capitalisme ou mystique sociale, faites votre choix !

Mais, me direz-vous, les Nations-Unis sont chargées de veiller sur la paix du monde, et c'est tant mieux.

Pourtant, un matin, le rideau de fer s'est levé sur 192 divisions blindées soviétiques en ordre de bataille ...

C'était là, le moment de ressortir de sa bibliothèque le savoureux petit guide de collaboration, "bienvenue à l'armée rouge" écrit en 1984 par Philippe Tretiack et Pierre Antilogus.

Ceci étant dit, en deux temps trois mouvements les russes sont arrivés à la pointe du Raz.

Le drapeau rouge à faucille flottait, non pas sur la marmite, mais au sommet du sémaphore.

Le croirez-vous, ça a été le bordel en France !

Les 200 députés communistes s'agitaient à l'Assemblée ...

N'ayant pas compris que mobilisation n'est pas départ de vacances, la SNCF a lancé une grève quelque peu inopinée ...

Jacques Spitz se fait ici l'historien d'une Histoire qui ne s'est jamais déroulée.

Il s'amuse à réchauffer la guerre froide !

Et, pour que ce récit soit vraiment "spitzien", son auteur y a introduit une arme secrète tout droit sortie de la plus imaginative science-fiction.

Le ciel y est survolé par une pluie d'étranges météores.

Le ton est trempé d'humour, d'ironie même.

La lecture de ce roman d'un peu plus d'une centaine de pages est plaisante, agréable.

Elle fourmille de clins d'oeil, de références et de retour en arrière.

C'est parfois inattendu, comme cette image de Sartre et de Claudel entravés à la même chaîne, attendant leur départ pour la Sibérie et devisant benoîtement.

Mais cette chronique d'une guerre qui, comme celle de Troie, n'aura pas lieu, cette chronique s'étire, finit par s'étioler de son manque de personnages principaux dont la lectrice, le lecteur auraient aimé faire connaissance, auraient souhaité partager le destin semi-tragique en ces temps troublés imaginaires.

Ce récit est un inédit de Jacques Spitz dont je ne retrouve nulle part trace de la parution initiale.

Il est disponible dans le recueil paru en 2009 aux éditions "Bragelonne" : "Joyeuses Apocalypses".

Il y est accompagné de deux autres romans, "la guerre des mouches", "l'homme élastique" et de six nouvelles parues initialement dans "V Magazine".

"La guerre mondiale n°3" est un petit roman, bien dans l'esprit de Jacques Spitz, de celui que Francis Lacassin avait coutume d'appeler "le père égaré de la science-fiction".

Un petit roman donc qu'il serait dommage de négliger ...







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L'homme élastique, la création d'une humanité nou..

Jacques Spitz. Malheureusement (scandaleusement) oublié ; et pourtant, à mon avis un des pères de la science-fiction française, vingt ans avant Barjavel. Jacques Spitz, ingénieur formé à Polytechnique ne lésine pas ici sur la partie technique de la découverte du Docteur Flohr, un savant un peu fou, quelque peu cynique et beaucoup misanthrope.

Tout commence en pleine campagne où le Docteur Flohr a installé son laboratoire pour confirmer, renforcer et développer sa découverte : la possibilité de réduire ou de gonfler la taille des atomes, permettant ainsi de modifier les proportions de toute chose ; et même de l'humain...

Nous assistons à l'installation des appareils d'expansion-réduction pas à pas à travers le journal de l'homme de Science... Mais les menaces de guerre se précisent à l'Est... La guerre est déclarée et l'armée va s'emparer de l'invention du fameux Docteur : une division de sept mille hommes va être transformée pour partir en première ligne...

La guerre treminée, le succès de la technique qui permet entre autre aux humains de ne pas être atteints d'infections virales ou bactériennes, se confirme et s'étend au monde entier. La flohrisation fait florès !



Un petit opus qui, outre l'attachement qu'on peut ressentir pour le génial savant fou, apporte une foule d'interrogations sur la place de la science dans le progrès social ; les relations entre science et armée ; la science et l'éthique ; la science et le pouvoir...

Bref, un roman de science-fiction comme je les aime : une histoire bien menée qui ouvre la réflexion sur le monde dans lequel nous vivons et celle sur le monde tel que nous le bâtissons ; et ce malgré une deuxième partie un peu faible et comme bâclée si on considère le nombre de voies de réflexion à peine ébauchées...
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L'oeil du purgatoire

De Jacques Spitz, Les évadés de l'An4000 m'avait captivé par la vue acérée et quasi-prémonitoire d'un pionnier de la science-fiction française.

Cette fois-ci, c'est le futur des êtres et des choses qui s'installe et s'impose dans la vue d'un homme du présent!... Un artiste peintre raté et salement aigri, victime toute désignée d'un laborantin-apprenti sorcier. Cela va crescendo, et c'est de plus en plus moche, désespérant et inquiétant!

La progression du mal, bacille inoculé et avançant de plus en plus dans la vision prémonitoire, est phénoménale jusque dans l'après de l'après... derrière la putréfaction, la fin des os et...et quoi? Et qu'est-ce qui peut être pire que cette prescience qui isole Jean Poldonski, le coupe du présent dans lequel il continue à survivre de plus en plus difficilement? Peut-on encore mourir, après ce chemin d’horrible croix ? Et quelles sont ces formes blanches qui viennent, partout, vous visiter?

Jacques Spitz a brillamment poussé les feux du postulat de base d’un roman méconnu mais constamment réédité : Une vision soignée (à l’œil, gag) sur le temps et notre passage dans cette quatrième dimension.

Un livre magistral et étonnant, à lire.

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L'agonie du globe

Des vents violents ravagent le Finistère, le phare de Penmarch est emmené comme un fétu de paille ...

Les câbles transatlantiques se brisent ...

Le phare de Peslouec, dans le Morbihan, signale sur la mer une lueur rousse de nature inconnue ...

Pluie, inondations et tremblements de terre à répétitions ...

Une atmosphère d'abord de dérèglement climatique, puis finalement une ambiance franchement apocalyptique !

"L'agonie du globe", écrit par Jacques Sptiz en 1935, était à sa parution un récit d'anticipation.

Avec le temps, il est devenu aujourd'hui une splendide uchronie.

"L'agonie du globe" est un livre à grand spectacle, celui d'un globe fracturé, d'une mappemonde démultipliée, celui d'une terre qui finit par se regarder elle-même.

Les descriptions sont époustouflantes.

Le moment est unique en littérature.

Et, dans l'édition originale, quelques illustrations viennent en souligner tout le côté pittoresque.

Mais Jacques Spitz va profiter des événements qu'il décrit dans son livre pour en dégager les grands sentiments et les petites mesquineries de l'âme humaine.

Car c'est bien là tout l'intérêt de l'ouvrage : l'âme humaine.

Le globe s'est fracturé en deux morceaux qui s'éloignent l'un de l'autre et qui menacent d'entrer en collision avec la lune.

Le premier moment d'émotion passé, les chicaneries aussitôt reprennent.

L'humain est incorrigible.

A la douzième seconde seconde, les paupières se sont fermées, alors naquit la treizième ...

Jacques Spitz installe dans son récit un suspens qui tient en haleine, qui captive son lecteur sans jamais le relâcher.

Mais "quand on écrit l'histoire de l'humanité, il faut se résigner à raconter bien des folies", et le ton, ici, n'est pas dénué d'humour.

Jacques Spitz s'amuse un peu, au passage, à déformer quelques patronymes :

Léon Plume, par exemple, est un dirigeant socialiste français, Estragon est le directeur de l'Observatoire de Paris et Praline est le président-dictateur d'une Russie devenue soviétique, Moïse Bloch, quand à lui, est un des prophètes dont les événements favorisent le retour.

Il n'est pas sûr que Spitz ne règle pas malicieusement quelques comptes !

Le récit, pourtant très attaché à son époque, est résolument lancé vers une anticipation proche, moderne et passionnante.

Seule, à la 196ème page, une petit tâche d'encre posée sur la condition féminine fait sursauter la lecture.

"L'agonie du globe" est adossé à un autre livre, "la fin du monde", écrit en 1874 par Camille Flammarion, avec lequel il entretient des liens de parenté, une même propension à la réflexion, à la philosophie, un même questionnement sur la science et la pensée, et un même optimisme teinté de fatalisme.

Mais le récit de Spitz est plus resserré, plus tendu, plus moderne.

Il est aujourd'hui un des piliers sur lequel est venu s'appuyer un genre devenu l'un des plus courus de la science-fiction contemporaine ...







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Les signaux du soleil

Que voilà un livre de saison en ce début juin où le soleil semble nous lancer des coups d'oeil, semble nous inciter à laisser derrière nous cette dernière mauvaise saison de pandémie !

Ce récit s'ouvre sur une cabane nichée à 2860 mètres d'altitude au sommet de l'observatoire du pic du Midi, observatoire qui pour l'heure n'observe rien en raison de violentes tempêtes de neige.

Philippe Bontemps est un astronome, et parce qu'il faut passer le temps en cette veille de Noël, parce qu'il s'ennuie d'Inès sa fiancée, il garde tout de même les yeux rivés sur le soleil.

Il observe et remarque une tâche sur le soleil qui au fil de ses observations semble clignoter.

Un déclic porte à son esprit de savant l'aspect mathématique et voulu de ces scintillements solaires.

Mars semble nous dire ...

Ce à quoi Vénus semble répondre ...

Ce roman de science-fiction a quelque peu vieilli.

C'est un roman écrit à l'ancienne, assez lent, un peu extravagant et naïf.

Il se perd parfois dans un drôle de badinage amoureux qui aujourd'hui semble très daté.

Mais "les signaux du soleil" est agréable à lire et porte en lui quelques germes de profondes réflexions d'éthique et de morale comparée.

L'humain est-il capable de solidarité lointaine ?

Doit-il toujours montrer sa force et ne jamais crier grâce ?

A quel moment lutter devient-il vain ?

Et, toujours Dieu qui revient dans les esprits au moment de l'apocalypse !

Quelques questions sont ici posées sérieusement ... auxquelles les personnages de Jacques Spitz, entre intelligence et sottise, répondent par d'ironiques solutions.

Ce roman n'est pas de ceux-là qui, apocalyptiques en diable, glacent le sang et terrifient la pauvre tante Agathe.

Il n'est pas très plausible.

Mais l'histoire de ce petit licencié, astronome révoqué et conférencier bafoué, qui grâce à une théorie fumeuse devient dictateur et finalement sauve le monde, cette histoire, donc, est assez plaisante.

Elle a été écrite, et publiée, en 1943 chez "Jean Vigneau", éditeur de Marseille.

C'est là de la bonne science-fiction de grand-papa, de celle qui existait avant que dans les années 70 quelques parangons viennent s'emparer du genre et l'enferment durant quelques années dans un pré carré prétentieux et quelque peu paranoïaque ...





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L'expérience du docteur Mops

Le docteur Mops n'aura finalement pas trouvé sa place dans la longue liste des savants fous et criminels qui ont, un jour ou l'autre, intéressé la littérature populaire par leurs démoniaques ambitions et leurs fourbes projets.

A l'épilogue du récit de Jacques Spitz, il s'avère que Mops n'aura été qu'un vieillard sordide et incapable de faire frémir la moindre des demoiselles.

N'est pas docteur Maboul qui veut !

Pour distiller efficacement l'angoisse et le suspens, ne faut-il pas un personnage vraiment diabolique ?

Et, il semblerait que contrairement à l'adage populaire, le ridicule parfois peut tuer ...

"L'expérience du docteur Mops" est un livre manqué.

A quelques kilomètres au dessus de Nice, au château de la Colle, sur la route de Vence, Pierre Delambre rencontre Yvane Suyter.

C'est le coup de foudre.

Il est architecte, de retour d'Asie, il est en congé pour un an.

Semblant venir d'un autre siècle, elle est étrange, lointaine.

Elle est la belle-fille orpheline du docteur Mops, celui-là même qui se devait d'être un neurologue inquiétant.

Car le docteur Mops a un secret !

Un terrible secret.

Derrière ses prétentions scientifiques, il cache d'horribles desseins ...

Le récit s'ouvre sur un badinage vieillot, une histoire d'amour un peu puérile qui ne parvient pas à lancer le roman.

De plus, les personnages, qui sont artificiels et guindés, n'arrivent pas à capter la sympathie du lecteur.

Et la suite est à l'avenant ...

Jacques Spitz a manqué son coup.

Et, le rythme morne et lent de son écriture ne fait qu'aggraver le manque de rebondissements.

Il manque, à mon sens, bien trop d'ingrédients pour n'avoir pas la moindre chance d'attirer l'intérêt d'un lecteur, si conciliant puisse-t-il être.

Au final, le tout est mièvre, peu captivant et pas très vraisemblable.

Ce qui, vous me l'accorderez, fait beaucoup pour un seul livre ...

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L'oeil du purgatoire

Poldonski, un peintre sans génie, écrivain médiocre à ses heures, suicidaire, qui n'aime rien ni personne, pas même lui, fait une drôle de rencontre.

Errant rue de Rivoli, à la recherche de modèles hideux pour son projet de toile intitulé "La kermesse burlesque", il fait la connaissance de Christian Dagerlöff, petit homme sec au poil blanc et aux yeux clairs..

Ce dernier se présente comme un homme de génie, il est, en fait, garçon de laboratoire à l'Institut Pasteur et professe un étrange voyage dans la "causalité".

Quelques jours plus tard, ayant oublié sa rencontre et las de la vie, d'Armande sa maîtresse, de babar son meilleur ami, Poldonski décide dans un sombre accès neurasthénique d'en finir avec la vie.

Sujet à un violent mal de tête, il quémande à l'homme de laboratoire, surgi devant lui, une drogue qui lui permettrait d'en finir sans douleur. Ce dernier lui propose une compresse humide à appliquer très bas sur les yeux.

Le lendemain matin, Poldonski s'éveille comme d'un sale cauchemar, guéri de sa migraine, aimant soudain la vie et impatient de pouvoir s'y frotter.

Mais Dagerlöff s'est livré à une expérience sur les yeux du jeune peintre, qui, en affectant sa perception du monde, va le transporter dans un futur macabre et glauque....

C'est un récit très dur que nous propose Jacques Spitz avec le premier roman de ce recueil. La noirceur du propos, sa cruauté parfois accuse la condition humaine et sa dérisoire raison. Ce texte, s'il en est loin dans sa forme, se rapproche par son propos de "La guerre des mouches". La fragilité de la condition de l'orgueilleux humain y étant observée sans concession et sans optimisme.
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La guerre des mouches

On démarre doucement, en suivant Juste-Evariste Magne, jeune chercheur travaillant sur l'hérédité des mouches sous la direction de Mr Carnassier. Une invasion de mouches se déclare en Indochine où Magne suivra son chef pour aller étudier la chose. le style du roman paraît longtemps comme une suite d'évènement où l'on suit l'évolution des insectes jusqu'en Europe, sérieux, austère, mais plus on avance, plus le ton devient sarcastique, l'humour cynique sous-jacent ce dévoile. Plus on avance dans l'histoire, plus l'espèce humaine, ses travers politiques, idéologiques, sociaux en deviennent ridicules, grotesques. Par le biais d'un scénario catastrophe, Jacques Spitz dresse un portrait sans concession des travers humains de son temps, 1938, c'est l'époque du colonialisme, des nationalismes extrémistes. Un cynisme assez pessimiste, en gros, il n'y a pas grand chose à espérer de l'espèce humaine, mais l'évolution du ton au fil de la lecture, sérieux au début, en devient de plus en plus drôle, sarcastique et jubilatoire vers la fin.
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La guerre des mouches

En 1938, après des débuts teintés de surréalisme, Jacques Spitz publie « La Guerre des mouches », un roman fantastique.



Un jeune chercheur travaille dans son laboratoire sur la transmission de caractères acquis chez les mouches drosophiles. Lui et son patron, le professeur Carnassier sont appelés en Indochine, alors colonie de la France, dans le but d’étudier un étrange phénomène : des essaims entiers de mouches « attaquent », dévastant tout ce qu’elles rencontrent en inoculant des maladies qu’on croyait disparues aux populations.

Tout d’abord quelque peu minimisée, l’épidémie s’étend. Personne n’est prêt. On emploie des moyens dérisoires contre le fléau. L’armée est appelée en renfort, «Tout l’arsenal de la Marine de guerre fut affecté à la fabrication de papier tue-mouche distribué gratuitement à chaque chef de famille ».

Les « sachants » s’en mêlent : « Pour lutter contre l’épidémie proprement dite, un conseil de défense sanitaire fut institué. Il délibéra longtemps sans pouvoir arrêter d’autres mesures que celles adoptées lors des grandes épidémies de 1868 et 1925.

Les industries sont réquisitionnées pour la production de scaphandres. Des combattants meurent en nombre, laissant les populations livrées à elles mêmes.

Des mesures de confinement sont prises, «Dans les rues de Saïgon où tous les magasins étaient fermés, où toute circulation frivole était interrompue, on voyait seulement de rares passants, le visage couvert d’un tampon de gaze, allant jusqu’aux bureaux de l’Intendance militaire où l’on distribuait des vivres », provoquant de lourdes séquelles psychiatriques chez les confinés.

Les mouches seraient elles devenues intelligentes, qui adaptent leur mode d’action à la riposte de l’humanité, «les vaccins semblaient n’opérer que contre une catégorie de microbes et laissaient proliférer les autres ». Car il s’agit bien de ça, face aux mouches mutantes (ou « variantes », comme vous voudrez ) : l’humanité est en danger.



Une histoire rondement menée qui n’est pas sans rappeler des situations contemporaines, quand des dirigeants, incapables de définir une politique commune, entretiennent, par action , omission , ignorance ou simplement bêtise (là aussi, comme vous voudrez) le mal qu’ils sont censés combattre, «Il comprit encore qu’il ne suffisait pas d’avoir raison et de le dire, mais qu’une vérité n’avait de sens que si elle était universellement partagée ».

Un bouquin qui ne manque pas d’humour non plus, quand les allemands partent au combat nus, lance flamme en bandoulière et que les russes tentent de mobiliser les forces révolutionnaires contre les mouches fascistes…



Bref. Un bon moment de lecture dans ces temps troublés.

« Et si L’aventure humaine devait échouer », comme disait Théodore ?

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La Forêt des Sept-Pies

Un bavard, un imbécile désireux de changer le cours du monde et des choses, est exécuté.

René Desmoiseaux, un jeune homme bouleversé a assisté à l'exécution.

Murmurant : "c'est un crime", une mystérieuse demoiselle est venue mettre la main dans la sienne ...

"La forêt des sept pies", dès son ouverture, est un roman intrigant.

Il s'articule autour d'un mystère, d'une affaire et d'un complot dont le lecteur entraperçoit le noeud sans jamais parvenir à le saisir vraiment.

De plus, le récit, très lent, s'encombre d'un fourmillement de détails, d'arrières-plans et de scènes qui ajoutent à la confusion.

Le drame s'invite, et la mort.

Le récit est fait d'événements qui n'ont pas l'air d'avoir le moindre rapport entre eux mais qui finissent par s'imbriquer dans l'épilogue.

Le tout est entrecoupé de rêves énigmatiques et de songes indéchiffrables, héritage conservé de l'attachement ancien de Jacques Spitz au surréalisme.

"La forêt des sept pies" se situe dans un pays indéfini, peut-être imaginaire, mais qui se donne des airs de "vieille France".

Sa situation politique est tendue mais le lecteur n'en apprendra pas ici ni les tenants, ni les aboutissants.

Ce livre est un bel exercice de style d'écriture.

Le mot y est élégant, stylisé et teinté d'humour mais moins que dans certains autres ouvrages de Jacques Spitz.

Celui-ci semble avoir sacrifié ici le fond à la forme.

Au fil de la lecture, le rythme ralentit, les personnages se multiplient au premier plan, le mystère s'épaissit et perd de son intensité, obscurci qu'il est d'un voile de mille détails.

L'ennui finit par être au rendez-vous, mais agrémenté par le sentiment d'être dans un beau livre, bien écrit.

Il ne faut pas lâcher le fil conducteur, et ne pas trop entrecouper sa lecture pour terminer ce qui se révèle être finalement une sorte de roman policier de genre, pour parvenir à un épilogue somme toute assez confus.

Le pays, les événements politiques, l'hôtel même qui est un des décors principaux du livre sont laissés dans un flou qui, je pense, est un effet voulu par Spitz.

L'effet est manqué.

Il aurait été certainement remarquable dans un récit plus développé et tendu, épuré de mille détails et plus inséré dans son intrigue.

D'autre part, "la forêt des sept pies", est un livre paru, en 1946, à la libération, et qui peut-être contient un double-sens ou des sous-entendus liés à cette époque, mais qui sont devenus aujourd'hui inaudibles.

Ce qui rend finalement sa lecture morne et fastidieuse ...

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