Citations de Jean-Paul Sartre (2294)
Écrire, ce fut longtemps demander à la Mort, à la Religion sous un masque, d’arracher ma vie au hasard. Je fus d’Église. Militant, je voulus me sauver par les œuvres ; mystique, je tentai de dévoiler le silence de l’être par un bruissement contrarié de mots et, surtout, je confondis les choses avec leurs noms : c’est croire
Terroriste, je ne visais que leur être : je le constituerais par le langage ; rhétoricien, je n’aimais que les mots : je dresserais des cathédrales de paroles sous l’oeil bleu du mot ciel. Je bâtirais pour des millénaires.
Ce père n’est pas même une ombre, pas même un regard : nous avons pesé quelque temps, lui et moi, sur la même terre, voilà tout. Plutôt que le fils d’un mort, on m’a fait entendre que j’étais l’enfant du miracle. De là vient, sans aucun doute, mon incroyable légèreté. [...] De ma vie je n’ai donné d’ordre sans rire, sans faire rire ; c’est que je ne suis pas rongé par le chancre du pouvoir : on ne m’a pas appris l’obéissance.
Ce pauvre gars qui s'imaginait partir pour la croisade du Droit et de la Justice, vous voulez le persuader qu'il s'est laissé embarquer par étourderie dans une guerre capitaliste ; il ne sait plus ce qu'il veut, il ne reconnaît plus ce qu'il a fait. [...] vous lui avez foutu la mort dans l'âme.
Vierge, réduit à la pureté d'une essence négative, il gardait la transparence incompressible du diamant. Puisque c'était mon lot, à moi, d'être à chaque instant situé parmi certaines personnes, en un certain lieu de la terre et de m'y savoir superflu, je voulus manquer comme l'eau, comme le pain, comme l'air à tous les autres hommes dans tous les autres lieux.
La violence, sous quelque forme qu'elle se manifeste, est un échec.
Soyez complaisant à vous même les autres complaisant vous aimeront.
Déchirez votre voisin, les autres voisins riront.
Mais si vous battez votre âme, toutes les autres crieront.
Moi j'ai les mains sales. Jusqu'aux coudes. Je les ai plongées dans la merde et dans le sang. Et puis après ? Est-ce que tu t'imagines qu'on peut gouverner innocemment ?
Tout existant naît sans raison, se prolonge par faiblesse et meurt par rencontre.
ORESTE : Comme tu es loin de moi, tout à coup… Comme tout est changé ! Il y avait autour de moi quelque chose de vivant et de chaud. Quelque chose qui vient de mourir. Comme tout est vide… Ah ! quel vide immense, à perte de vue…
[Les mouches]
La mort brillait par son absence : décéder, ce n’était pas mourir, la métamorphose de cette vieillarde en pierre funéraire ne me déplaisait pas ; il y avait transsubstantiation, accession à l’être (…).
La bibliothèque, c’était le monde pris dans un miroir ; elle en avait l’épaisseur infinie, la variété, l’imprévisibilité.
Au bout d’un instant j’avais compris : c’était le livre qui parlait. Des phrases en sortaient qui me faisaient peur : c’étaient de vrais mille-pattes, elles grouillaient de syllabes et de lettres, étiraient leurs diphtongues, faisaient vibrer les doubles consonnes (…).
Ce n’est pas assez que mon naturel soit bon ; il faut qu’il soit prophétique : la vérité sort de la bouche des enfants. Tout proche encore de la nature, ils sont les cousins du vent et de la mer : leurs balbutiements offrent à qui veut les entendre des enseignements larges et vagues.
- Ça les ennuie d'être morts?
- Il y a des caractères chagrins...
- Moi, vous comprenez, explique Pierre, je ne laisse personne derrière moi, je suis bien tranquille.
Il se met à marcher dans la pièce avec animation et ajoute :
- Et puis, l'essentiel, c'est d'avoir fait ce qu'on avait à faire.
IL est rare qu 'un homme seul ait envie de rire ;l 'ensemble s 'est animé pour moi
d 'un sens très fort et même farouche, mais pur .
Je n'ai pas rêvé cet héroïsme. Je l'ai choisi. On est ce qu'on veut.
Moi, je suis méchante: ça veut dire que j'ai besoin de la souffrance des autres pour exister. Une torche. Une torche dans les coeurs. Quand je suis toute seule, je m'éteins.
On ne fait pas ce qu'on veut et cependant on est responsable de ce qu'on est
Au fond, on ne paie pas l'écrivain, on le nourrit, bien ou mal selon les époques.