Citations de John Le Carré (846)
Il se demandait comment cela pouvait bien être de se forger dans ce creuset de culpabilité et de honte. De savoir que même si on y consacre sa vie, on n’arrivera jamais à effacer cette souillure. De s’investir tout entier chaque fois pour finalement voir tout s’effondrer, que ce soit en Pologne ou littéralement de manière encore plus cruciale, en Bosnie
Ce n'est pas parce qu'on a volé un dossier qu'on l'a lu.
Posséder une autre langue, c'est posséder une autre âme.
Il lui arrivait de penser qu'Alec était dans le vrai : qu'on croyait aux choses parce qu'on avait besoin de croire. Mais l'objet même de la foi n'avait aucune valeur en soi, aucune fonction véritable.
Le contre-espionnage ne se justifie que par le rendement. C'est la loi morale du métier.
De la cuisine, le mystérieux Mostyn apparut avec le thé: un enfant de l'époque, plein de bonne volonté, avec un pantalon évasé et une crinière de cheveux bruns. En le voyant poser le plateau, Smiley finit par le restituer dans son propre passé. Ann avait eu jadis un amant comme lui, un ordinand du collège théologique de Wells. Elle l'avait pris alors qu'il faisait de l'auto-stop sur l'autoroute M4 et avait prétendu plus tard l'avoir sauvé de l'homosexualité.
Mieux vaut combattre le système de l'intérieur que le critiquer de l'extérieur.
Woodrow et Gloria se disaient souvent en citant le proverbe chinois que les invités , c'est comme le poisson : ça pue dès le troisième jour .
- Tessa faisait une différence fondamentale entre la douleur constatée et la douleur partagée. La douleur constatée est journalistique, diplomatique, télévisuelle, finie dès qu’on éteint sa saleté de poste. Pour Tessa, ceux qui regardent la souffrance et ne font rien contre ne valaient guère mieux que ceux qui l’infligent. C’étaient les mauvais samaritains.
Là où va Tamara , ses saints la suivent , du moins , c'est ce que j'ai pensé . J'ai une tante comme ça , une ancienne prostituée convertie au catholicisme . Chacun de ses saints a une tâche attitrée . Si elle perd ses clés , c'est Antoine ; si elle prend le train , C'est Christophe ; s'il lui manque un peu d'argent , c'est Marc ; si un parent est malade , c'est François , et, si c'est trop tard ,saint Pierre ."
Notez bien ça, mon gars. On ne donne les denrées qu'aux femmes. Les hommes, on ne leur fait même pas confiance pour traverser la route, ces crétins, ça non ! Ils revendent notre bouillie sur les marchés ou ils en font faire de l'alcool par leurs femmes. Ils achètent des cigarettes, des armes, des filles. Les hommes sont des bons à rien. Les femmes s'occupent du foyer, les hommes font la guerre. L'Afrique entière est une lutte des sexes, mon gars. Seules les femmes accomplissent le travail de Dieu, ici. Prenez note.
Vivre aux crochets de l'intelligence de ses subordonnés, ma foi c'est peut-être comme ça qu'on est un chef aujourd'hui.
Le crachin avait laissé place à de grosses gouttes isolées. Birgit était assise sur un banc, près d'un portique de balançoires munies de barres transversales pour la sécurité des enfants, où il avait fallu installer Carl et le pousser. Il luttait contre le sommeil, paupières mi-closes, doux comme un chaton, le sourire aux lèvres tandis que Justin le poussait avec une prudence obsessive.
Je ne m'y connais pas en armes . [...] . Vous, vous vous y connaissez sûrement . Celui-là, c'était le gabarit famille nombreuse", précise-t-'il d'un ton navré .
Et partout cet air complice, supérieur presque, des tôt levés qui ont assisté ensemble à la disparition de la nuit et à la naissance du jour.
Ecrire, c’est comme se trouver dans une maison vide et guetter l’apparition de fantômes »
John Le Carré
Arrivé à la porte, il se retourna :
-Nous sommes tous pareil, vous savez ; c'est ça le côté farce de la chose.
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En hommage à John Le Carré décédé d'une pneumonie ce samedi 12 décembre à l'âge vénérable de 89 ans, un jour après la parution de ma chronique sur L'espion qui venait du froid. Si j'avais su j'aurais été plus explicite sur l'intérêt de relire son 3ème roman, publié en 1963 qui assis son statut en tant qu'écrivain remarquable. En effet, et voilà ce qui en fait un grand écrivain, sur base d'un thriller intense, John Le Carré pousse la question éthique de la désinformation et jusqu'à quel point la défense d'un système, d'une idéologie, d'un choix philosophique la rendrait-elle acceptable. Un temps limitées à un nombre restreint de spécialistes, ces techniques de manipulations se sont intensifiées et étendues aux politiques, aux multinationales, et à ce semblant de sphère privée via les réseaux sociaux. Les journalistes assurent rarement leur rôle d'investigation, se contentant le plus souvent de diffuser à tout va, dans des délais raccourcis de course au scoop ne permettant pas les analyses nécessaires, les slogans les plus sensationnels et/ou proches de leurs sources de financement. A ce titre nous devenons tous des Leamas dans un monde d'isolement où la paranoïa s'infiltre plus dommageable qu'un virus, où plus aucune confiance ne devient possible et par conséquent où l'amour se meurt.
Les premiers échanges entre Woodrow et les deux policiers furent la courtoisie même : eux avaient conscience d'être chargés d'une mission délicate, ne comptaient pas compromettre la communauté blanche de Nairobi, etc., etc., et lui leur promit en retour la coopération de son personnel et tous les moyens requis, amen. Ils s'engagèrent à le tenir informé des progrès de l'enquête tant que cela cadrait avec les instructions de Scotland Yard, et il leur fit aimablement remarquer qu'ils servaient la même reine et donc que si Sa Majesté se contentait de se faire appeler par son prénom, alors nous aussi.
Nous avons une éthique, dans notre métier. Une éthique basée sur une seule présomption : que jamais nous ne serons les agresseurs. Si bien que nous faisons de temps à autre des choses désagréables, mais toujours strictement défensives, si je puis dire. Nous faisons des choses pas agréables pour que les gens puissent dormir en paix. […] Bien sûr, de temps en temps, nous commettons même des actes franchement répréhensibles. […] Je veux dire que vous ne pouvez pas vous montrer moins brutal que l’adversaire sous prétexte que votre gouvernement a adopté une politique disons… euh… tolérante, n’est-ce-pas ? Alors-là, ça ne ferait pas du tout l’affaire !
"Selon ce même raisonnement ,l'aide au tiers-monde n'est qu'une autre forme d'exploitation , reprend-il.
Les vrais bénéficiaires en sont les pays qui avancent l'argent à crédit ,les politiciens et officiels africains qui touchent d'énormes pots-de-vin, et les industriels et marchands d'armes occidentaux qui s'en mettent plein les poches.Les victimes sont l'homme de la rue, les déracinés,les pauvres et les indigents...et les enfants qui n'auront pas d'avenir.