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Citations de John Le Carré (846)


Le colonel s'exprimait précautionneusement, avec cette méfiance qu'ont les militaires à l'égard des mots. Il avait une douce moustache couleur de miel et le regard limpide d'un homme parfaitement stupide.
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Après la conférence, Axel conduisit Pym dans les coulisses et frappa à la porte du vestiaire. Jusqu'alors, Pym n'avait pas tellement prisé Thomas Mann. Il trouvait sa prose lourde et fumeuse malgré les efforts répétés qu'il avait faits pour plaire à Axel. Maintenant pourtant, c'était Dieu en personne qui se tenait devant lui, grand et anguleux comme oncle Makepeace. "Ce jeune gentleman anglais voudrait vous serrer la main, monsieur", l'informa Axel avec autorité. Thomas Mann examina Pym, puis Axel, que la fièvre avait rendu extrêmement pâle, presque diaphane. L'écrivain contempla ensuite la paume de sa propre main comme s'il se demandait si elle pourrait endurer l'effort de cette étreinte aristocratique. Puis il finit quand même par tendre une main que Pym serra, attendant de sentir le génie de Mann s'écouler en lui comme l'une de ces décharges électriques qu'on pouvait s'acheter dans les gares de chemin de fer : prenez cette poignée et laissez mon énergie vous régénérer. Rien ne se produisit mais l'enthousiasme d'Axel était assez grand pour deux.
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Comment imaginer plus grande liberté que celle de ne pas savoir où l'on va ni pourquoi ?
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"Montrez-lui ses mains", ordonna Kurtz lorsqu'il eut éteint le magnétophone.
"Tant qu'il vivait dans les camps, le travail manuel lui faisait des mains calleuses", expliqua Kurtz en venant les rejoindre. "Maintenant, c'est un grand intellectuel. De l'argent, des filles, de bons repas, la vie facile. Je me trompe, mon petit gars ? Tu es un grand intellectuel, c'est bien ça ?" Sa voix n'exprimait ni cruauté ni ironie. Il aurait tout aussi bien pu s'adresser à un fils dévoyé. "Mais tu fais faire le travail par les filles à ta place, n'est-ce pas mon petit gars ? En fait, il s'est même servi de l'une d'elles comme d'une bombe", raconta-t-il à Charlie. "Il l'a mise dans l'avion avec une très belle valise. L'avion a explosé. Je suppose qu'elle n'était pas au courant. Ce n'est pas très joli, n'est-ce pas, mon petit gars ? Cela ne se fait pas avec une dame."
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Comme une vieille maladie, sa colère l'avait pris par surprise. Depuis sa mise à la retraite, il en niait l'existence, évitant soigneusement tout ce qui pourrait la déclencher : journaux, anciens collègues, ragots comme ceux que colportait Martindale. Après toute une existence passée à vivre sur son intelligence et sa remarquable mémoire, il s'était consacré tout entier à l'art d'oublier.
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Il nous faut parfois accomplir quelque chose avant d'en trouver la raison, Tom. Nos actes sont parfois des questions, non des réponses.
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Vers 1 heure du matin, Barley appela sa fille Anthea à Grantham.
« _ Quelle est la différence entre l’amour et les toilettes ?
_ L’amour est enfant de Bohême et les toilettes sont enfant du couloir à gauche. Comment ça s’est passé à Moscou ?
_ Pourquoi les rhinocéros se peignent ils en vert ?
_ Raconte moi Moscou.
_ Pour mieux se dissimuler sur les tables de billard. Tu as déjà vu un rhinocéros sur une table de billard ?
_ Non. Ca fait trois fois que je te le demande. C’était bien, Moscou ?
_ Ca prouve que c’est un excellent camouflage. Comment va ton sinistre mari ?
_Il dort…enfin, il essaye. Qu’est devenue la nana que t’as emmenée à Lisbonne ?
_ Je l’ai larguée.
_ Je croyais que c’était du solide.
_ Pour elle, oui, pas pour moi.
Barley appela ensuite une ex-épouse auprès de laquelle il s’était réservé un droit de visite, puis une femme que nous n’avions pas fichée, mais aucune ne pouvait satisfaire à sa requête dans un délai aussi bref, d’autant qu’elles étaient au lit avec leurs maris respectifs.
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Il est plus difficile, en revanche, d’expliquer ma passion inconditionnelle pour la littérature allemande à une époque où, pour de nombreuses personnes, le mot « allemand » était synonyme de mal absolu.
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Smiley regarda s'éloigner la voiture. Sans hâte, roulant prudemment sur la chaussée mouillée. Après qu'elle eut disparu il demeura longtemps à la fenêtre, inconscient de la curiosité des passants qui le dévisageait en se demandant ce qu'il pouvait bien regarder ainsi.
Mais il n'y avait rien à voir. Rien que la rue mal éclairée, et les ombres qui s'y mouvaient.
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Hector était-il ivre ? Trop de pur malt de l’île de Skye ?
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Ma conclusion d'expert, assène-t-il, est que, en tant que grande nation, nous souffrons de pourriture managériale du sommet à la base.
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Il aime Dieu et le monde entier, mais aussi les espèces sonnantes et trébuchantes et le dieu Profit. C'est ce qu'il dit : "Le jeune Lorbeer est croyant, il vénère le Dieu chrétien, il vénère les femmes, mais il vénère aussi beaucoup le dieu Profit." Ce sera sa perte. Il croit en Dieu et n'en tient pas compte. Personnellement, je désapprouve, mais peu importe. Pour un humaniste, Dieu est un prétexte pour ne pas être humaniste. Nous serons humanistes dans l'au-delà ; en attendant, vive le Profit.
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[…] Un beau salaud. Catholique intégriste, fasciste débridé, il trouvait les nazis tip top. Il leur a léché le cul, il les a aidés pour les déportations, il leur a indiqué des cachettes de juifs et il a décroché un emploi de bureau pépère qui consistait à les expédier en masse dans les camps. Bref… Après la guerre, il s’est fait serrer. Il se planquait dans une ferme en jouant les bouseux. Procès expéditif, pas de fioriture, pendaison sur la place du marché devant un gros public. […]
(p. 102)
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Vivre aux crochets de l'intelligence de ses subordonnés, ma foi c'est peut-être comme ça qu'on est un chef aujourd'hui.
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Mickie, comme Pendel, adorait la mer. De fait, en passant sa vie en revue il prit conscience à retardement que la mer avait eu une influence apaisante sur ses nombreux dieux guerriers, raison pour laquelle le Panama lui avait été particulièrement bénéfique jusqu'à l'arrivée d'Osnard. "Harry, mon garçon, tu peux te garder Hong Kong, Londres et Hambourg, je m'en fiche ! Benny l'avait-il assuré en lui montrant l'isthme sur un atlas de poche Philip's un jour de visite à la prison. Mais où peux-tu prendre le bus et voir la Grande muraille de Chine d'un côté, la tour Eiffel de l'autre ?"
De la fenêtre de sa cellule, Pendel n'avait vu ni l'une ni l'autre mais des mers de bleus différents de chaque côté, et l'évasion dans les deux sens.
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"Nous n'avons pas la vue d'ensemble, ni les données à l'échelle mondiale. Surtout dans une petite ambassade de seconde zone comme la nôtre. Nous sommes des ploucs, et ce n'est pas vous qui me contredirez.
_ Vous leur avez dit ça, aussi ?
_ Tout à fait, sur le téléphone magique d'Osnard. Les mots prennent un tel poids dans une atmosphère de secret, vous ne trouvez pas ?...
Le Foreign Office m'a reproché mon manque d'enthousiasme sur la dernière livraison... et le vôtre, du même coup. "Vous voulez de l'enthousiasme ? ai-je dit. Oh, ça, j'en ai à revendre, Andrew Osnard est un type charmant, consciencieux à l'extrême. Quant à l'opération BOUCAN, pour nous elle est édifiante, enrichissante, admirable, nous la soutenons, elle revitalise notre petite communauté. Il n'empêche que nous n'aurions pas la prétention de lui affecter une place dans le grand ordre des choses. Ca, c'est l'affaire de vos analystes et de nos supérieurs.
_ Ils l'ont bien pris ?
_ Ils étaient ravis. Comme je leur ai dit. Andy est un très chic type et il plaît beaucoup aux femmes. C'est un atout pour notre ambassade, ajouta-t-il avant de s'interrompre en laissant planer le doute, puis de reprendre un ton plus bas.
Bon, d'accord, peut-être qu'il ne joue pas vraiment huit, peut-être qu'il triche par-ci par-là, mais c'est humain. En tout cas, et cela n'a rien à voir avec vous, ni moi, ni personne à l'ambassade, sauf peut-être Andy, les renseignements BOUCAN sont un ramassis de sornettes."
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"Il nous manque une accroche émotionnelle qui passera bien à la télé, Ben, répéta Elliot imperturbable. La dernière fois, coup de pot, les bataillons de la Dignité de Noriega ont violenté des Américaines dans les rues de Panama, sinon on n'aurait pas pu bouger. On avait la drogue, on l'a montée en épingle. On avait l'attitude déplaisante de Noriega, on l'a montée en épingle. On avait sa laideur, on l'a montée en épingle, parce que le délit de sale gueule, ça compte pour beaucoup de gens, alors on a joué là-dessus aussi. On avait sa sexualité et ses tendances vaudou. On a joué la carte Castro. Mais il a fallu que d'honnêtes Américaines se fassent agresser par des soldats hispaniques irrespectueux au nom de la dignité avant que le président se sente obligé d'envoyer nos gars sur place pour leur apprendre les bonnes manières."
Ben Hatry implosa. essai souterrain. Juste un sifflement haute pression quand il expulsa air, frustration et colère en une bouffée.
"Mais putain de bordel de Dieu, ce canal vous appartient, Elliot !
_ Fut un temps où l'Inde vous appartenait, Ben...
Il nous faut un détonateur. Pas de détonateur, pas d'intervention. Le président ne bougera pas. Point final."
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Luxmore essayait toutes ses idées sur Johnson, qui commençait à comprendre que certains hommes ne peuvent pas réfléchir sans un public.
"C'est ça qui est le plus difficile à déceler pour un service comme le nôtre, Johnny. Sentir le tremblement de terre avant la première secousse, entendre la vox populi avant ses premières paroles. L'Iran de Khomeyni, l'Egypte à la veille de Suez, la perestroïka et l'effondrement de l'empire du Mal, Saddam, un de nos meilleurs clients... Qui les a senti venir, Johnny ? Qui les a vus à l'horizon comme autant de nuages noirs ? Pas nous. Et Galtieri, et la poudrière des Malouines ? Mon Dieu ! Chaque fois, le puissant vilebrequin du Renseignement arrive à percer tous les mystères sauf celui qui compte : le facteur humain ! clama-t-il en accordant son pas au rythme de sa grandiloquence. Mais ce coup-ci, nous percerons le mystère qui compte. Nous sommes en avance sur l'événement, nous avons les souks sur écoute, nous captons l'humeur de la foule, ses objectifs inavoués, ses détonateurs cachés. Nous pouvons anticiper, déjouer le cours de l'histoire, lui tendre une embuscade..."
Il décrocha le téléphone presque avant qu'il ait eu le temps de sonner. Ce n'était que son épouse, pour savoir s'il n'avait pas encore mis les clés de sa voiture à elle dans sa poche à lui avant de partir au travail. Luxmore reconnut sèchement son crime, raccrocha, rajusta sa veste et reprit son marathon.
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"_ Laissez-moi vous expliquer les principes du journalisme, soupira l'Ours d'une voix monocorde depuis longtemps vide de compassion, d'humanité et de curiosité, à supposer qu'elle ait jamais été autre. Je me fais de l'argent de deux façons. Première possibilité, les gens me payent pour écrire des histoires, alors je les écris. J'ai horreur de ça, mais il faut bien que je mange, que je finance mes appétits. Deuxième possibilité, les gens me payent pour ne pas écrire certaines histoires. Ca, c'est beaucoup mieux pour moi : je n'ai rien à écrire et je gagne quand même mon fric. En me débrouillant bien, je touche plus pour ne rien écrire que pour écrire."
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A cet instant on sonne à la porte et entrent Rafi Domingo, son eau de toilette, son regard concupiscent, ses rouflaquettes et ses souliers en crocodile. Malgré toutes les ruses vestimentaires déployées par Harry, Rafi sera toujours l'archétype du métèque de comédie, et le père de Louisa l'aurait renvoyé à l'entrée de service rien qu'à voir sa couche de brillantine.
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