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Citations de Junichirô Tanizaki (471)


En la palpant, je me suis rendu compte de ses formes et j'ai pensé qu'elle possédait un corps splendide. C'était pour cette raison que j'aspirais à la voir en pleine lumière, non seulement je n'étais pas frustré dans mon attente, mais celle-ci se trouvait comblée. C'était la première fois depuis notre mariage que je pouvais voir les formes de son corps totalement nu. En particulier, il m'était permis de voir la partie inférieure de son corps dans tous ses recoins. Elle est née en 1913. Elle n'a pas les mêmes proportions que nos jeunes filles actuelles qui singent les Européennes. Elle a été, dans sa jeunesse, une championne de natation et de tennis ; pour une femme de sa génération, elle a les membres bien proportionnés, mais sa gorge n'est pas remplie, ses seins et ses fesses ne sont pas assez développés. Ses jambes sont fines et suffisamment longues mais la partie inférieure des cuisses est légèrement incurvée en dehors et tend à dessiner un () ; cela m'ennuie de le dire, mais elles ne sont pas droites. En particulier, ses chevilles ont le défaut de ne pas être minces, mais je n'aime pas tellement les jambes toutes droites des Européennes ; les jambes incurvées à la mode des femmes du vieux Japon, celles de ma mère ou de ma tante par exemple, me sont restées chères. Les jambes qui sont droites comme des bâtons sans caractère n'ont pas d'intérêt pour moi. Au développement excessif de la poitrine et des fesses je préfère les formes à peine indiquées telles que celles de la divinité du temple Chùgùji.
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"Décidément, quel que soit le pays les vieux disent tous la même chose, me disais-je, il semble bien que l’homme, au fur et à mesure qu’il avance en âge, soit toujours prêt à trouver que c’était mieux avant"
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31 mars.

Hier soir nous nous sommes couchés, mon mari et moi, sans boire d'alcool. Pendant la nuit, j'ai fait passer le bout des ongles de mon pied gauche hors des couvertures, à la lueur éclatante de la lampe fluorescente. Mon mari le remarqua et se glissa aussitôt dans mon lit. Sans recourir à l'alcool, baigné par la lumière, il accomplit sa besogne, et avec quel succès ! Cet acte miraculeux montre clairement son état d'agitation [...]


31 mars.

La nuit dernière, ma femme m'a donné un plaisir extrême. Elle ne fit pas semblant d'être ivre. Elle ne me demanda pas d'éteindre la lumière. Puis elle se mit à me provoquer de toutes manières, découvrant les points de son corps qui m'excitent, elle me poussa à accomplir ce que... Je ne me doutais pas qu'elle fût au courant de tant de pratiques ingénieuses. Ce changement brusque doit avoir une signification.
Mes vertiges étant devenus plus prononcés, je suis assez inquiet. Je suis allé chez le docteur Kodama pour qu'il prenne ma tension. Sur son visage passa une lueur d'épouvante. Il me dit que ma tension était si élevée qu'elle allait faire éclater son appareil. Je devais renoncer à toute occupation ; un repos total était nécessaire.
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Aux concours de tatouages qui, de temps à autres se tenaient à Ryôgoku, les participants, tapotant chacun son épiderme, échangeaient leurs critiques, exaltaient l'originalité du motif de leur invention.
Un jeune tatoueur du nom de Seikichi était orfèvre en la matière. Célébré comme étant au moins aussi habile que Charibun d'Asakusa, que Yappei et Konkonjirô de la rue de Matsushima, que d'autres encore, c'est par dizaines que les clients déployaient le satin vierge de leur épiderme sous la pointe de ses pinceaux.
La plupart des tatouages les plus hautement prisés lors des concours étaient des oeuvres de sa main.
Si Darumakin passait pour le spécialiste des tons dégradés, si de Karakusagonta on portait aux nues les tatouages au cinabre, Seikichi les surpassait encore en réputation par ses singulières compositions et la souplesse voluptueuse de ses tracés.
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Je crois que le beau n’est pas une substance en soi, mais rien qu’un dessin d’ombres, qu’un jeu de clair-obscur produit par la juxtaposition de substances diverses. De même qu’une pierre phosphorescente qui, placée dans l’obscurité émet un rayonnement, perd, exposée au plein jour, toute sa fascination de joyau précieux, de même le beau perd son existence si l’on supprime les effets d’ombre.
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La nuit printanière fit place au point du jour dans les bruits d'avirons des barges remontant et descendant la rivière. À l'heure où, parmi la brume en train de s'effilocher au-dessus des voiles blanches gonflées par la brise matinale et glissant vers l'aval, étincelèrent les toits de tuiles de Nakasu, de Hakozaki, de Reiganjima, Seikichi laissa retomber son pinceau et resta en contemplation devant l'araignée incrustée dans le dos de la jeune fille. Oui, toute sa vie avait passé dans ce tatouage, et maintenant qu'il avait achevé son travail, il se sentait dans l'âme un vide immense.
Un moment encore les deux silhouettes demeurèrent ainsi complètement immobiles. Et puis très faible, un peu rauque, une voix vibra entre les quatre murs de la chambre :
- Pour faire de toi une femme vraiment belle , c'est toute mon âme que je t'ai instillée avec mes encres. Désormais, dans tout le Japon, aucune femme ne te surpassera. Te voilà délivrée de ce qu'il y avait de pusillanime en toi. Tous les hommes, oui tous, seront ta riche pâture.
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Junichirô Tanizaki
La véracité des êtres se trouve dans le mensonge.
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Avez-vous jamais,vous qui me lisez, vu "la couleur des ténèbres à la lueur d'une flamme"? Elles sont faites d'une autre matière que celles des ténèbres de la nuit sur une route, et si je puis risquer une comparaison, elles paraissent faites de corpuscules comme d'une cendre ténue, dont chaque parcelle resplendirait de toutes les couleurs de l'arc-en-ciel.
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Je tiens un journal simplement parce que cela m'intéresse de l'écrire. Je n'ai pas l'intention de le montrer à qui que ce soit. Ma vue s'est affaiblie terriblement de sorte que je ne peux pas lire autant que je le voudrais, alors, n'ayant pas d'autre moyen de me distraire, j'écris pour tuer le temps. J'écris au pinceau en gros caractères pour être lisible. Pour qu'il ne tombe pas sous les yeux d'indiscrets j'enferme mon carnet dans un coffre-fort. J'en ai déjà accumulé cinq maintenant. Je crois que je devrais brûler le tout un de ces jours mais j'ai peut-être avantage à les conserver. De temps en temps j'en ouvre un vieux, je suis étonné de voir combien je perds la mémoire. Les événements d'il y a un an me paraissent nouveaux ; je ne trouve pas que leur intérêt ait diminué.
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Sonomura avait parlé d'un ton étrangement calme et tranquille.
Son flegme, voilà qui me faisait douter de l'état mental du bonhomme. Il en était encore au milieu de ses explications quand je fus pris de palpitations d'effroi. Non, mais tu n'es pas un peu malade de parler sérieusement de ce genre de choses ? Tu es devenu fou ou quoi ? J'étais si inquiet pour lui, j'avais si peur que cela lui arrive un jour, que dans un instant de panique le mot avait tout à fait pu franchir mes lèvres.
Sonomura vivait en décadent, ce que lui permettaient sa fortune et son oisiveté. Ces derniers temps, lassé des loisirs ordinaires, il montrait une passion coupable pour le cinéma et les romans policiers, ce qui l'amenait à passer le plus clair de son temps dans son imagination, dans un état de mutisme proche de l'hébétude. Nous voilà bien, me dis-je alors que se dressaient tous les poils de mon corps, à force de tirer sur la corde de son imagination, sa démence s'est déclenchée.
J'étais son seul véritable ami, ses parents n'étaient plus de ce monde, il n'avait ni femme ni enfant. Riche à centaines de milliers, sa vie était solitaire au point que, s'il devenait fou pour de bon, il ne se trouverait personne d'autre que moi pour le prendre en charge. Éviter autant que possible de le froisser et donc achever mon travail le plus vite possible pour me rendre auprès de lui, c'était la moindre des choses que je pouvais faire pour lui.
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La femme restait dans la même position, les yeux baissés. Et l'homme, debout comme un piquet, le regard fixé sur elle. Dans le silence nocturne, lourd comme une eau au repos, les prunelles de l'homme semblaient la seule chose vivante. Ces prunelles dévoraient la zone autour de la poitrine et des genoux de la femme et rien d'autre. Des mouvements d'yeux pour le moins étranges, comme s'il était en train de réfléchir à l'endroit où positionner son appareil. Pour en avoir le coeur net, je revérifiai le point exact sur lequel le regard de l'homme déversait son poison brûlant.
Mais j'eus beau vérifier, j'eus beau conjecturer, ce regard ne cessait de divaguer entre la poitrine et les genoux de la femme. Ce n'est pas tout. Alanguie sur le tatami, la femme avait conscience de ce regard sur son corps. Cela du moins expliquait l'apparition d'une certaine tension au niveau des coudes, et de ses mains qu'elle avait déplacées sur ses genoux comme pour effectuer un travail de couture, car elle tripotait quelque chose entre ses doigts. En effet, je remarquais maintenant quelque chose sur ses genoux, quelque chose de noir qui avait commencé à prendre de l'importance et semblait s'étendre devant elle, dans son ombre, une chose qui débordait maintenant jusque sur le tatami...
Mais... n'était-ce pas un homme, là, la tête posée sur les genoux de la femme ?
À peine m'étais-je fait cette réflexion... Soudain, avec la vibration tellurique qui accompagne l'action de traîner un corps excessivement massif, la femme se retourna face à l'appareil photographique. Sur ses genoux était posée la tête d'un homme, couché sur le dos, mort.
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Elle me dépassait de quelques centimètres, et de plus, les femmes qui sont belles, même si elles n'ont pas l'intention de se vanter de leur apparence, se révèlent tout de même par leur comportement sûres d'elles, à moins que ce ne soit qu'une impression chez quelqu'un qui, comme moi, est intimidé.
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Certains diront qu'un art entre en décadence quand il se fixe, s'emprisonne dans des formes stéréotypées.
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Sans doute n'es-tu pas encore capable de ressentir toute la mélancolie de cette nuit d'automne...mais un jour tu comprendras.
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Je crois que la beauté n'est pas une substance en soi, mais rien qu'un dessin d'ombres, qu'un jeu de clair-obscur produit par la juxtaposition de substances diverses. De même qu'une pierre phosphorescente qui, placée dans l'obscurité émet un rayonnement, perd, exposée au plein jour, toute sa fascination de joyau précieux, de même le beau perd son existence si l'on supprime les effets de l'ombre.

(p.64)
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Une moitié de moi-même déteste violemment mon mari, mais une autre l'aime tout aussi violemment. Nous ne sommes en réalité pas faits pour nous entendre, mais je ne suis pas pour autant disposée à aimer quelqu'un d'autre. Je suis engluée dans de vieux idéaux de fidélité, et par nature incapable de les transgresser. Certes, cette façon perverse et insistante de me caresser m'est insupportable, mais, d'un autre côté, comme il est évident qu'il m'aime à la folie, je me sentirais coupable de ne pas le récompenser d'une manière ou d'une autre.
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[...] à un éclat superficiel et glacé, nous avons toujours préféré les reflets profonds, un peu voilés; soit, dans les pierres naturelles aussi bien que dans les matières artificielles, ce brillant légèrement altéré qui évoque irrésistiblement les effets du temps. "Effets du temps", voilà certes qui sonne bien mais, à vrai dire, c'est le brillant que produit la crasse des mains. Les Chinois ont un mot pour cela, "le lustre de la main"; les Japonais disent l'"usure" : le contact des mains au cours d'un long usage, leur frottement, toujours pratiqué aux mêmes endroits,produit avec le temps une imprégnation grasse; en d'autres termes , ce lustre est donc bien la crasse des mains.
[...] Contrairement aux Occidentaux qui s'efforcent d'éliminer radicalement tout ce qui ressemble à une souillure, les Extrême-Orientaux la conservent précieusement, et telle quelle, pour en faire un ingrédient du beau.
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Aujourd'hui vers 15heures, j'ai fait l'expèrience de mon frisson érotique. Mais je n'ai pas eu les yeux rouges. Ma pression sanguine m'a semblé normale. J'ai resenti une petite déception. Il me manque quelque chose si mes yeux ne s'injecte pas de sang et si ma pression ne monte pas au-dessus de 20.
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Je souffrais tant de la main, j'avais si mal du matin au soir que je n'éprouvais plus aucun plaisir à voir le visage de Satsuko, qu'elle-même, me traitant comme un grand malade, avait cessé de me considérer comme un partenaire sérieux : quel sens cela avait-il de survivre ainsi? Pour elle, j'avais envie de vivre à tout prix, laissant le ciel décider de ma chance - car, sinon, survivre était inutile...
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Elle se prenait pour la beauté du siècle, elle était orgueilleuse et elle était triste s'il n'y avait pas quelqu'un prêt à l'adorer. Elle pensait que c'était pour elle déchoir que de faire le premier pas.
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