Citations de Raoul Vaneigem (275)
Une école où la vie s'ennuie n'enseigne que la barbarie.
... quand l'air du temps est à la peste, les pestiférés font la loi.
739 - [La petite collection n°69, p. 12]
J’appelle jouir pleinement de sa paresse le plaisir de se dire en s’assoupissant : que s’accomplisse maintenant, sans que j’aie à lever le petit doigt, la destinée que je ne cesse de vouloir à longueur de journée.
Septembre 2019 : Entretien paru dans " Le Monde " , l'ancien membre de l'internationale situationniste explique pourquoi , afin d'abolir la situation marchande il est préférable de miser sur un " pacifisme insurrectionnel " plutôt que sur le moyen de lutte des black bloc :
-- Quelle sorte de civilisation voyez-vous , timidement , poindre sur les décombres de l'ancienne ?
-- Bien qu'ayant échoué à mettre en œuvre le projet d'une autogestion de la vie quotidienne , le mouvement des occupations , qui fut la tendance la plus radicale de mai 68 , pouvait néanmoins se prévaloir d'un acquis d'une importance considérable , il avait suscité une prise de conscience qui allait marquer un point de non retour dans l'histoire de l'humanité : la dénonciation massive du " welfare state " ( l'état providence ) , de l'état du bien-être consumériste , du bonheur vendu à tempérament , avait porté un coup mortel à des vertus et à des comportement imposés depuis des millénaires et passant pour d'inébranlables vérités : le pouvoir hiérarchique , le respect de l'autorité , le patriarcat , la peur et le mépris de la femme et de la nature , la vénération de l'armée , l'obédience religieuse et idéologique , la concurrence , la compétition , la prédation , le sacrifice , la nécessité du travail .
La conscience d'une présence vivante dans le sujet et dans l'objet n'est-elle pas de nature à manifester ce qu'il y a de maître dans l'élève et d'élève dans le maître ? Où manque l'intelligence de la vie, il n'y a que des rapports de brutes.
Maintenant que les idéologies de gauche et de droite fondent au soleil de leur mensonge commun, le seul critère d'intelligence et d'action réside dans la vie quotidienne de chacun et dans le choix, auquel chaque instant le confronte, entre ce qui affermit sa propre vie et ce qui la détruit. Si tant d'idées généreuses sont devenues leur contraire, c'est que le comportement qui militait en leur faveur en était la négation.
La poésie se fait entendre quand les mots se taisent. (p. 140)
La plupart se transmettent, de génération en génération, des banalités ressassées sans fin.
J'invente les miennes. (p. 26)
Le pas en avant de la radicalité sera toujours suivi des deux pas en arrière de l’idéologie.
Il n’y a pas de dialogue avec les propagateurs de la misère et de l’inhumanité. Il n’y a pas de dialogue avec le parti de la mort. Aucune discussion n’est tolérable avec les tenants de la barbarie. Seule l’affirmation obstinée de la vie souveraine et sa conscience briseront les fers qui entravent le progrès de l’homme vers l’humain.
Que le maître soit un accompagnateur d’apprentissage, un précepteur prêt à communiquer son savoir en s’imprégnant de la poésie de l’enfance, un être passionné par la compréhension du vivant sous toutes ses formes, quelqu’un qui sait fonder sur son expérience vécue l’art d’apprendre à se connaître et à connaître les autres.Ni compétition ni concurrence, mais émulation, passion de savoir et d’enseigner aux autres.
Rien n’est sacré. Chacun a le droit d’exprimer et de professer à titre personnel n’importe quelle opinion, n’importe quelle idéologie, n’importe quelle religion.
Aucune idée n’est irrecevable, même la plus aberrante, même la plus odieuse.
Aucune idée, aucun propos, aucune croyance ne doivent échapper à la critique, à la dérision, au ridicule, à l’humour, à la parodie, à la caricature, à la contrefaçon.
La peur de vivre prête à la mort les ailes arrachées au vivant. Quel enthousiasme dans le lynchage, quel orgasme dans la haine assouvie, à défaut de l’amour, avec l’assentiment du bon droit !
Nous sommes entrés dans une période critique où la moindre contestation particulière s’articule sur un ensemble de revendications globales et vitales.
Chaque progrès de la marchandise engendre des libertés formelles et une conscience qui a sur elles l'inestimable privilège de s'incarner dans les individus, de s'identifier au mouvement des désirs
La haine des esclaves pour les maîtres a toujours consolidé leurs jougs plus efficacement qu’elle ne les brisait. La haine enchaîne à son objet, elle n’en délivre pas. En revanche, la volonté de vivre est pareille à la saxifrage : elle contourne le roc qui s’oppose à sa progression, elle l’entoure, découvre la faille, s’y glisse et lentement le brise. Nous ne viendrons à bout du cynisme néolibéral qu’en rétablissant la valeur de la vie, en la débarrassant du prix de vente que lui assigne le marché.
La vraie jeunesse est toujours dans l’exaltation de la vie. C’est elle qui nous libérera de cet affairisme gâteux, si attentif à nous faire vieillir sous le joug de l’argent.
Partout où le commerce des choses gère le commerce des êtres, la logique du profit préfère aux pillages, à la barbarie vengeresse, aux guerres inexpiables une politique de subornation, un art du compromis politique et de la palabre diplomatique où les affrontements impitoyables de la concurrence cultivent les vices et les vertus de la courtoisie.
Aucun problème ne vaut pour moi que celui que pose à longueur de journée la difficulté d'inventer une passion, d'accomplir un désir, de construire un rêve comme il s'en construit dans mon esprit, la nuit. Mes gestes inachevés me hantent et non pas l'avenir de la race humaine, ni l'état du monde en l'an 2000, ni le futur conditionnel, ni les ratons laveurs de l'abstrait. Si j'écris, ce n'est pas, comme on dit, « pour les autres », ni pour m'exorciser de leurs fantômes ! Je noue les mots bout à bout pour sortir du puits de l'isolement, d'où il faudra bien que les autres me tirent. J'écris par impatience et avec impatience. Pour vivre sans temps mort.