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Citations de Ryûnosuke Akutagawa (114)


"Il arrive parfois qu'un homme consacre sa vie entière à un désir qu'il ne pourra peut-être jamais réaliser. Celui qui se moque d'une telle illusion ne connaît rien à la vie."
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Même s’il était vain de lutter, les passagers ne pouvaient néanmoins rester sans rien faire. C’est pourquoi, dès qu’ils avaient un moment, ils se livraient à la chasse aux poux. Du plus considérable au plus humble, du premier vassal au porteur de socques, chacun se mettait nu et attrapait ci et là les bestioles pour en remplir au fur et à mesure sa tasse à thé. Un konpira-bune dont les grandes voiles captent les rayons du soleil hivernal de la Mer intérieure et à son bord, une trentaine d’hommes en pagne déambulant une tasse à la main, occupés à débusquer les poux sous les cordages, derrière l’ancre : quiconque à notre époque imagine pareille scène la trouvera d’emblée ridicule, mais face à la « nécessité », n’importe quelle entreprise peut se révéler sérieuse, aujourd’hui comme avant la Restauration de Meiji.
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(…) tout ce que l’expédition comptait de samouraïs avait le corps criblé de piqures, les ventres et poitrines étaient uniformément rouges et enflés au point qu’on eût dit que ces guerriers souffraient de la rougeole.
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Oui vraiment, la vie humaine n'est-elle pas comme une rosée ou comme un éclair...
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Mais à l'aube, j'ai pu observer mon père, le visage vieilli, perdu dans la contemplation des poupées. Cela au moins est certain. Et même si c'était un rêve, je n'en ressentirais pas pour autant la moindre déception. Car il m'a été donné de voir de mes yeux, cela au moins est certain, mon père, qui ne différait en rien de moi-même... oui, j'ai pu voir de mes yeux mon père, sensible et vulnérable, grave pourtant...

[Les poupées]
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d’un ton brusquement amer, il dit :
- Dans le char, on a enchaîné une dame de cour qui a fauté. Ainsi, quand le feu sera mis, cette femme, chair brûlée, os calcinés, expirera dans de terribles supplices. Ce sera un modèle sans précédent pour parfaire ton paravent. Ne manque pas d’observer comme une peau blanche ainsi que la neige brûle et se crevasse. Regarde bien aussi les cheveux noirs se dresser en étincelles de feu !
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- Vous tuez par le pouvoir, par l'argent ou même au moyen d'une simple parole d'apparence bénigne. Évidemment, le sang ne coule pas. La victime continue à vivre. Mais vous ne l'en avez pas moins tuée ! Du point de vue de la faute, je me demande qui de nous, vous ou moi, est le plus criminel.
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C’était alors que le grand tremblement de terre s’est produit – c’était le 28 octobre, vers sept heures du matin, comment pourrais-je oublier ? J’étais près du puits à me curer les dents, et ma femme en train de verser le riz d’une marmite dans la cuisine… La maison s’est écroulée sur elle. En à peine une ou deux minutes, un grondement formidable, digne d’un typhon, a retenti dans la terre, la maison s’est mise à pencher sous mes yeux, puis je n’ai plus vu que des tuiles voler. En un clin d’œil, je me suis retrouvé plaqué au sol sous l’auvent effondré, complètement abasourdi, et secoué par les vagues du séisme qui déferlaient de toutes parts. J’ai rampé au milieu de la fumée de poussière et, lorsque j’ai enfin réussi à m’extraire de sous l’auvent, le toit de ma maison était par terre, je voyais même des brins d’herbes entre les tuiles.

A ce moment-là, je ne saurais dire si j’étais ahuri ou en proie à la panique. J’étais comme absent à moi-même, pétrifié sur place, et c’est alors que, tandis que je jetai un œil à l’aspect de mer déchainée que présentaient les toits effondrés partout aux alentours, j’ai entendu un brouhaha considérable mêlant bruits et voix indistinctement – grondement de la terre, poutres qui tombent, arbres qui se brisent [...]
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J'ai dit tout à l'heure que sa voix faisait penser au coassement d'un crapaud, mais quand on l'avait sous les yeux, on sentait l'envie de préciser : elle faisait penser à un crapaud, certes, mais plus exactement elle évoquait le spectre indescriptible d'un crapaud à forme humaine, sur le point de cracher sa bave venimeuse. Et Shinzô avait beau vouloir faire le fier, il ne sentit pas moins la frayeur l'envahir, au point qu'il redouta même que la lampe au dessus de sa tête ne se mît à faiblir.

[Extrait de "La magicienne"]
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Cela s’est passé un jour au crépuscule : un homme de basse condition était là, sous la Porte Rashô ; à attendre une accalmie de la pluie.
Il n’y avait personne d’autre que lui sous la vaste Porte. Seul, sur une colonne énorme, dont l’enduit rouge était tombé par endroits, un criquet s’était posé. La Porte Rashô se trouvant dans l’avenue Suzaku, on se fût attendu à y rencontrer, outre cet homme, deux ou trois personnes, des femmes en chapeau conique ou des hommes coiffés d’eboshi, cherchant abri contre la pluie. Et pourtant, il n’y avait personne d’autre que lui.
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De surcroît, il y avait à bord quantité de poux. Notez, ce n'était pas des poux de bonne composition, restant cachés dans les coutures des habits. Ils grouillaient sur les voiles. Sur les bannières. Sur le mât. Sur l'ancre. En forçant un peu le trait, disons qu'on ne savait plus si ces bateaux servaient à transporter des hommes ou à promener des poux.
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[...] il se retourna brusquement vers moi et me demanda : «Es-tu capable de ressentir de la pitié à mon égard ?» avec une expression sérieuse. Moi naturellement, en bon élève qui revient d'Europe, je tenais en horreur tout ce qui reflétait les coutumes désuètes qu'on mettait à l'honneur autrefois, et je lui répondis d'un ton glacial : «Non, je n’éprouve pas la moindre compassion. Ceux qui ont fomenté une rébellion sous le seul prétexte qu'on leur a donné l'ordre d'abandonner le port du sabre se suicident, quoi de plus naturel ?» Lui, hochant la tête d'un air désapprobateur rétorqua : «Leurs revendications n'étaient peut-être pas recevables, mais le respect de leurs principes, qui les a entraînés jusqu'au sacrifice de leurs vies, mérite mieux que de la pitié.»

[Extrait de "Un mari moderne"]
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Yoshihidé ! Peut-être même de nos jours, ce nom rappelle-t-il quelque chose à certains. C'était un peintre bien connu avec lequel, disait-on, nul contemporain n'aurait pu rivaliser pour la maîtrise des couleurs et du dessin. Lors de l'événement que je vais raconter, il avait dépassé la cinquantaine. Il avait l'aspect d'un vieillard, petit, maigre, n'ayant que la peau sur les os, et l'air méchant. Quand il se rendait à la résidence du Seigneur, il était toujours habillé d'un vêtement de chasse orange foncé, et coiffé d'un eboshi souple. Sa personne donnait une impression de vulgarité extrême. On ne savait pourquoi, ce vieillard ne paraissait pas son âge. De plus, la couleur toute rouge de ses lèvres faisait soupçonner chez lui quelque chose de bestial, de répugnant. Certains en attribuaient la cause au pinceau qu'il ne cessait de sucer. Mais je ne sais quoi en penser. Des gens plus malveillants encore le surnommaient Saruhidé (Hidé-singe), disant que ses gestes rappelaient ceux des singes.

[AKUTAGAWA Ryûnosuke, "Figures infernales" (1918) in "Rashômon et autres contes", traduction du japonais par Mori Arimasa, 1965 - chapitre II, page 34 de l'édition en coll. "folio 2 euros", éd. Gallimard (Paris), 2003]
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Le rythme entraînant des répliques qui s'échangeaient fit retrouver à Nobuko sa jeunesse. Le regard passionné, elle déclara : «Et si je me mettais pour de bon à écrire un roman ? » Alors son cousin, en guise de réponse, lui lança un aphorisme de Gourmont : «Puisque les Muses sont des femmes, seuls les hommes disposent du pouvoir de les tenir captives à leur guise.» Nobuko et Teruko s'allièrent pour dénier toute autorité à cette sentence de Gourmont. «Alors si je comprends bien, seule une femme pourrait devenir musicienne ? Apollon n'est-il pas un homme ?» Teruko alla jusqu'à se poser sérieusement la question.

[Extrait de "L'automne"]
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Profitant de ce qu'il restait seul dans la chambre, il voulut s'étrangler avec une ceinture au treillis de la fenêtre. Toutefois, dès qu'il eut passé son cou dans la boucle, il se mit soudain à redouter la mort. Mais ce n'était pas par crainte de souffrir. Il reprit sa montre, curieux de mesurer à titre expérimental le temps que prendrait la strangulation. Après un bref instant de souffrance, tout commença à devenir confus. Passé ce cap, c'était probablement le glissement vers la mort. Il consulta les aiguilles de la montre : la sensation de douleur avait duré une minute et quelque vingt secondes.
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On disait que cette usine produisait annuellement sept million d'exemplaires. Ce chiffre cependant ne me surprit pas. Ce qui me surprit c'est le fait que, pour une telle production, il ne fallait presque pas de main-d'œuvre. Car pour fabriquer ces livres, il suffisait de mettre dans la gueule en forme d'entonnoir d'une machine, du papier, de l'encre et de la matière grise en poudre. Ces matières premières une fois introduites, il n'y avait pas à attendre cinq minutes pour en voir sortir d'innombrables livres de formats divers : in-octavo, in-douze, in-seize... Regardant des livres tombés en cataracte, je demandais à l'ingénieur kappa planté là, bombant le torse, quelle était cette poudre grise. Immobile, devant la machine noire et luisante, il me répondit d'une voix morne : 

- Ceci ? C'est de la cervelle d'âne. On la dessèche et on la pulvérise grossièrement. Le prix de revient en est de deux ou trois centimes la tonne.

Il est évident que de tels miracles industriels ne se limitaient pas à la fabrication de livres.
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Extrait de "la Vie d'un idiot" :

Songeant à sa vie, il sentit un sourire de dérision brouillé de larmes lui monter aux lèvres. La folie ou le suicide, c'était tout ce qui l'attendait. Il marchait, solitaire, dans les rues où tombait la nuit, résolu à attendre le destin qui, lentement, viendrait l'anéantir.
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Animé d'une joie sauvage, j'avais le sentiment de ne plus avoir ni père ni mère, ni femme ni enfants, il n'existait plus pour moi qu'une seule et unique chose : la vie qui s'écoulait de ma plume.
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L'eau du fleuve
Chaque fois que je vois cette eau, je ressens depuis toujours comme une inexplicable envie de pleurer, un indicible sentiment d'apaisement et de solitude ; vraiment, j'ai l'impression de m'éloigner du monde où je vis pour pénétrer dans un royaume de tendresse et de réminiscences nostalgiques.
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Le chien habitué aux coups n'ose pas s'approcher du morceau de viande qu'on lui jette rarement. (Gruau d'ignames)
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