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Jeannine Kohn-Étiemble (Autre)Edwige de Chavanes (Autre)
EAN : 9782070710645
189 pages
Gallimard (31/05/1987)
4.13/5   19 notes
Résumé :
Après le choix de nouvelles qu'en 1965 nous donna Mori Arimasa : Rashômon et autres contes, voici des textes moins connus peut-être mais tout aussi saisissants : textes de jeunesse où perce cruellement l'influence occidentale dans laquelle se débattirent malaisément les écrivains du Meiji. Influence qui vient se perdre et se retrouver dans les hésitations morbides de La vie d'un idiot, journal autobiographique, dont Akutagawa confia au plus proche de ses amis le soi... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Ryûnosuke Akutagawa (1892-1927) était un écorché vif dans une époque troublée. Dans ce recueil qui contient neuf textes, on suit son cheminement intérieur et littéraire jusqu'à son suicide, qui coïncide avec la fin de l'ère Taisho. Akutagawa demeure le maître du récit court au Japon.

1.Le recueil s'ouvre sur un texte lyrique « L'eau du fleuve »que l'écrivain a composé alors qu'il était simple étudiant. Il s'apparente à un poème en prose avec des descriptions mélancoliques, reflet de son âme déjà tourmentée.

2.Suit une nouvelle historique « Un jour, Oishi Kuranosuke » composée en 1917. Il reprend une légende, celle des 47 rônin et raconte leur fin. Ils viennent de commettre leur vengeance et sont assignés à résidence en attendant que le shogun décide de leur sort. Il fait beau, on plaisante mais peu à peu, le grand Oishi Kuranosuke sombre dans la morosité car il se met à penser aux félonies, aux jalousies des uns et des autres et puis il ne se reconnaît pas dans l'image enjolivée que les autres ont de lui. A la fin du récit on retrouve la même description qu'au début mais notre perception, qui épouse celle d'Oishi a changé.

3. Lande morte. Un texte fictif fameux. le grand poète Basho est mort. Akutagawa imagine les réactions de ses cinq disciples. On s'attend à cinq variations sur leur douleur. On a cinq variations sur leur égoïsme. Même Jôsô « ce dévoué Jôsô des monastères zen »est envahi par une profonde sérénité, la triste et voluptueuse jouissance » d'être délivré. Akutagawa s'est-il senti aussi secrètement libéré à la mort de son maître Natsume Soseki ?

4. Les Mandarines. (1919) est un texte personnel très beau et construit magistralement. le narrateur est d'humeur morose dans un triste train de banlieue. Une petite paysanne est poussée dans le compartiment. Son apparence le dégoûte. Elle essaie maladroitement d'ouvrir la fenêtre et ses efforts renforcent le dégôut du narrateur devant » l'absurdité, la vulgarité, la monotonie de la vie humaine ». Au milieu du tunnel, elle parvient enfin à ouvrir la fenêtre et il croit étouffer en recevant la suie dans la figure. Il s'apprête à la rabrouer vertement quand elle lance quelques mandarines qu'elle tenait cachées sous sa blouse par la fenêtre… La perception du narrateur-auteur change alors. Les descriptions, les couleurs du temps, le portrait de la petite et les réflexions du narrateur sont construits symétriquement par rapport à l'événement.

5. le bal (1919) est un récit ironique. Nous sommes dans la bonne société le soir du 3 novembre 1886. Une jeune Japonaise Akiko vêtue comme une Pompadour croise le regard d' un officier français. « Sa robe de bal rose tendre, le ruban bleu pâle élégamment noué autour de son couet, dans sa chevelure de jais, cette rose au doux parfum » Vous aurez peut-être reconnu dans ce pastiche un écrivain français très en vogue à la fin du XIXème siècle. Akutagawa se moque des Japonais qui singent les occidentaux sans se rendre compte de leur ridicule et en même temps des préjugés exotiques des occidentaux sur les Japonais tout aussi ridicules.

6. Extraits du carnet de notes de Yasukichi (1923). le texte est très expérimental et donc déroutant. Yasukichi est un double de l'auteur sans doute et rappelle également le personnage des Mandarines. Il est imbu de sa personne et ne se supporte guère. le carnet est constitué de cinq fragments, cinq instantanés de vie.

7. Bord de mer(1925) Dans ce texte poétique , l'auteur expérimente la "touche lente". Aucun événement narratif d'importance mais une atmosphère intense qui mêle rêve et réalité. le narrateur contemple un étang ooù se mire la lune. Quelqu'un l'appelle...


8. Engrenage (1927, publication posthume).
C'est un récit à la première personne. le narrateur Monsieur A est un écrivain célèbre. Dans un taxi, son compagnon de voyage, un rondouillard à barbiche, lui apprend qu'un fantôme en manteau de pluie hante une propriété. le narrateur n'y prête guère attention, mais bientôt, il voit un manteau de pluie, à la gare, dans les rues qui lui semble être l'ange de la mort. Dès lors les hallucinations morbides s'enchaînent qu'il affronte d'abord avec calme avant que la honte et l'angoisse ne le submergent.
Ce qui apparaît d'abord comme une simple histoire de fantôme devient le récit bouleversant et extrêmement précis des souffrances du narrateur-auteur. Il scrute les mauvais présages dans des objets ou de simples couleurs, le rouge et le noir lui rappelle l'Enfer, il a des hallucinations visuelles et auditives impressionnantes (rires narquois, chuchotements dans la nuit). Il se voit dans un miroir déformant et un engrenage flotte dans ses yeux. le récit évoque Gogol, Poe, Dante, Maupassant (Le Horla), Sternberg, Dostoïevski et bien d'autres. La littérature semble avoir nourri la bête qui le rongeait depuis l' enfance.

9. La vie d'un idiot, (1927. Publication posthume). le journal d'un idiot est composé de 51 fragments poétiques que l'auteur rédigea en 1927 avant de se donner la mort. Ils sont écrits à la troisième personne. Akutagawa se met à distance et se regarde. On voit comme dans un film expressionniste, instantané par instantané, son cheminement littéraire et personnel. Chaque fragment porte un titre révélateur : 1 Époque... 2. Sa mère ...6. maladie. 9 cadavre...13 La mort du maître (Soseki) 17 Papillon...31 le grand tremblement de terre...49 Un cygne empaillé. 50 Prisonnier. 51 Défaite. Chaque fragment est magnifique, intense et marquant.
« La vie d'un idiot était achevée", quand il découvrit un cygne empaillé dans la boutique d'un antiquaire. L'oiseau était debout, le cou tendu, mais ses ailes jaunies étaient trouées par les mites. Songeant à sa vie, il sentit un sourire de dérision brouillé de larmes lui monter aux lèvres. La folie ou le suicide, c'est tout ce qui l'attendait. Il marchait, solitaire, dans les rues où tombait la nuit, résolu à attendre le destin qui, lentement, viendrait l'anéantir ». (49 Un cygne empaillé).

L'édition est accompagnée d'une préface et d'introductions éclairantes de la traductrice.
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Je reste assez partagé après la lecture de ces nouvelles.
Encore une fois, comme pour tous les auteurs de cette période - Meiji - Taicho - c'est l'ambiance générale et l'environnement que je préfère.
La plupart de ces courts récits autobiographiques m'ont paru avoir perdu de leur intérêt avec le temps. C'est surtout l'environnement dans lequel évoluent les personnages - la modernisation du Japon -qui me semble intéressant. Je retiens surtout le premier et le dernier récit.
Dans le premier, "L'eau du fleuve", on retrouve ici le thème également cher à Kafu (dans "La Sumida"), du passage du temps, en regardant la ville se moderniser de part et d'autre de la Sumida. Akutagawa, comme Kafu, nous décrit la modification des traversées du fleuve en bac et la nostalgie que lui procure la contemplation de l'eau.
Le dernier, "La vie d'un idiot" représente un peu l'oeuvre-testament de l'auteur. Rédigé peu de temps avant son suicide, il y aborde certains passages de sa vie. Fortement teintée par sa dépression et sa pensée suicidaire, c'est une approche très morbide, mais parfois très lucide, de son existence tourmentée que nous livre Akutagawa.
Donc, recueil de nouvelles d'intérêt inégal, ce livre est à lire, une fois de plus pour l'ambiance d'une époque.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Profitant de ce qu'il restait seul dans la chambre, il voulut s'étrangler avec une ceinture au treillis de la fenêtre. Toutefois, dès qu'il eut passé son cou dans la boucle, il se mit soudain à redouter la mort. Mais ce n'était pas par crainte de souffrir. Il reprit sa montre, curieux de mesurer à titre expérimental le temps que prendrait la strangulation. Après un bref instant de souffrance, tout commença à devenir confus. Passé ce cap, c'était probablement le glissement vers la mort. Il consulta les aiguilles de la montre : la sensation de douleur avait duré une minute et quelque vingt secondes.
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L'eau du fleuve
Chaque fois que je vois cette eau, je ressens depuis toujours comme une inexplicable envie de pleurer, un indicible sentiment d'apaisement et de solitude ; vraiment, j'ai l'impression de m'éloigner du monde où je vis pour pénétrer dans un royaume de tendresse et de réminiscences nostalgiques.
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LA VIE D'UN IDIOT
Soudain -- ce fut vraiment soudain. Arrêté à la devanture d'une librairie, il regardait un livre de peintures de Van Gogh quand soudain il comprit la peinture. Le livre ne reproduisait bien sûr que des photographies. Mais, même à travers elles, il sentait vivre la nature dans toute sa fraîcheur. La passion qu'il nourrit pour ces peintures transforma sa vision des choses.
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LE MAÎTRE
Il lisait un livre du Maître à l'ombre d'un grand chêne. Dans la lumière du soleil d'automne, pas une feuille ne bougeait. Au loin, dans l'espace, une balance aux plateaux de verre observait un équilibre rigoureux. Telle était l'image qu'il ressentait en lisant le livre du Maître ...
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LA VIE D'UN IDIOT
Il la rencontra par hasard dans l'escalier d'un hôtel. Même ainsi en pleine journée, son visage semblait baigner dans le clair de lune. Tandis qu'il la suivait du regard (ils ne se connaissaient pas même un peu), il ressentit une tristesse jusqu'alors inconnue ...
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Videos de Ryûnosuke Akutagawa (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Ryûnosuke Akutagawa
« […] Akutagawa Ryunosuke (1892-1927) tenait cette nouvelle pour l'une des oeuvres les plus fortes de Shiga Naoya (1883-1971). […] Tout en usant de mots familiers réussir à donner une pareille sensation de transparence, voilà ce qui dans tout texte, à quelque genre qu'il appartienne, importe au plus haut point. […] Une telle forme d'écriture dédaigne la fleur pour obtenir le fruit : par la simplicité même, elle accède à l'essentiel comme aucun mode d'expression de la vie quotidienne ne le pourrait. […] » (Junichiro Tanizaki [1886-1965])
« […] Sa légèreté n'est qu'apparente. Elle recèle une puissance insoupçonnée. Ainsi de ces variations de Chopin, subtiles, presque imperceptibles, qui résonnent en nous, se propagent jusqu'au fond de nos entrailles comme la douleur d'une dent. […] » (Hideo Kobayashi [1902-1983])
« […] l'originalité de Shiga Naoya tient au fait que jamais dans aucune de ses nouvelles il ne se laisse aller à l'analyse psychologique de son personnage principal. Il le présente seulement comme un homme qui lutte pour essayer d'établir des relations humaines rationnelles dans le monde qui l'entoure. le personnage apparaît si profondément hanté par cette quête que Shiga Naoya ne s'attarde pas à une étude de son caractère. […] » (Sei Ito [1905-1969])
« […] En janvier 1913 paraît un premier recueil de nouvelles, dédié à sa grand-mère. le 5 août de cette même année, Shiga Naoya est renversé par un train de la ligne Yamanote. Il est grièvement blessé et doit se faire hospitaliser. Il écrit en septembre la nouvelle Han no hanzaï (Le crime de Han) puis, en octobre, part en convalescence à Kinosaki. […] L'une de ses plus belles nouvelles, Wakaï (Réconciliation) […] est publiée en 1917, peu de temps après Kinosaki nite (Le séjour à Kinosaki). […] »
17:55 - Générique
Référence bibliographique : Naoya Shiga, le séjour à Kinosaki suivi de le crime de Han, traduit par Pascal Hervieu et Alain Gouvret, Éditions Arfuyen, 1986
Image d'illustration : Autoportrait de Shiga Naoya daté de septembre 1912.
Bande sonore originale : P C III - O UT O UT by P C III is licensed under an Attribution License.
Site : https://freemusicarchive.org/music/P_C_III/O_UT_1733/O_UT
#NaoyaShiga #LeSéjourÀKinosaki #LittératureJaponaise
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