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Critiques de Sabrina Calvo (205)
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Melmoth furieux

Pour une première confrontation à la plume de Sabrina Calvo, je dois avouer que j’ai été pas mal soufflée par l’intensité qui s’en dégage. Puissante, poétique, dévastatrice, son écriture m’a emportée bien souvent dans une vague d’émotions qui ravage tout sur son passage. C’est beau et terriblement piquant comme une armée de rose aux épines en bouclier. Melmoth furieux, surtout dans son premier tiers, contient une rage phénoménale qui transcende la page et marque les esprits. Dans cette Belleville de résistance au coeur d’un État totalitaire qui cherche à tout lisser, la communauté des communardes dans laquelle Fi évolue est un territoire chaotique mais aussi très beau, porté par une écriture bercée de références nineties et de clins d’oeil au monde de Disney. Dans l’odeur de la cendre, dans l’ombre de l’avenir incertain, Sabrina Calvo laisse traîner de très légères notes d’espoir, d’innocence et d’amour dans le descriptif de la vie de ces zadistes et dans les rêves qu’ils portent au fond d’eux-mêmes en bouclier face au monde qui cherche à les écraser.

L’histoire se tisse doucement, de points en avant mais aussi de points retours, parfois en faisant des noeuds, des déchirures dans la trame du tissu, dans un patchwork un peu déstabilisant. L’intrigue initiale: aller brûler Disney, reste majoritairement en trame de fond et s’insère plutôt dans le descriptif de cette société communautaire vouée à disparaître. L’histoire prend cependant un chemin fantastique qui, progressivement installe du rêve et du cauchemar dans ce monde et de la magie dans les fils narratifs. Un peu trop perché pour moi, ces éléments d’intrigue m’ont progressivement mise de côté alors que l’écriture m’avait conquise dès les premières pages. Le final, plus chaotique encore, un peu flou, un peu brouillon, m’a laissé des images fortes en tête mais aussi la déception de ne pas avoir réussi à m’y immerger pleinement. Je reste malgré tout bluffée par la plume de cette autrice, par ses engagements, par sa force et sa poésie et je me plongerai avec plaisir dans sa bibliographie pour m’y confronter à nouveau.



En bref, Melmoth furieux est un roman qui m’a soufflé par la plume furieuse et poétique de son autrice. C’est une vague furieuse qui porte le rêve en arme face à la barbarie totalitaire, l’espoir et le beau en bouclier. C’est chaotique, perturbant, parfois un peu trop alambiqué ou déstabilisant pour moi dans la narration, mais c’est indéniablement un roman qui a de la personnalité et qui porte en soi des engagements puissants. Oh, et puis une bibliothécaire armée d’une batte de baseball, ça me parle bien!
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Melmoth furieux

J’ai, avec ce livre, fait un voyage furieusement coloré et déglingué ! Avec ce roman inclassable, je me suis perdu comme j’aime à me perdre. Dans cette histoire existentialiste où la passion de la couture donne sens au combat contre un monstre tapis, souterrain dans ses actions, que l’on nomme ogre de capitalisme !



Le lecteur suivra la rébellion d’une joyeuse bande désespérée, dont le personnage principal naviguera entre rêves opiacés, devenant ami avec un certain François Villon et réalité casse gueule dans le désir de dynamitage d’une certaine figure aux grandes oreilles !

La rébellion du peuple contre les douleurs du passé et en marche !



Melmoth furieux ou le roman poétique et politique ! Ami(e)s lecteur(rice)s, si tu cherches une lecture riche dans son écriture, ses idées ! Si tu cherches un voyage improbable, original, je te conseille ce livre furieux de talent !

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Délius, une chanson d'été

C'est la magnifique couverture qui a d'abord attiré mon attention puis le résumé prometteur a finalement eu raison de moi !



Des corps sont retrouvés délicatement ornés de fleurs. Une enquête s'ouvre et Bertrand Lacejambe, botaniste, ainsi que son acolyte Fenby vont devoir trouver qui est le coupable.



On navigue dans un monde magique qui aurait pu être très intéressant mais je suis passée totalement à côté. Et ce pour plusieurs raisons.

D'abord à cause des personnages. On remarque vite le côté loufoque des deux acolytes mais ça reste trop sérieux pour vraiment en rire. La plupart du temps leurs déductions sont complètement hasardeuses, et ils n'arrivent au résultat que par un pur hasard...

L'intrigue autour du tueur me semblait trop floue, pas assez développée, et le mystère autour du "diadème" pas assez approfondi.

J'ai trouvé le tout long à se mettre en place, brouillon, pourtant l'écriture est belle. Je n'ai pas détesté mais je l'ai lu sans m'attacher à quiconque, sans avoir vraiment envie de connaître la fin car il y a très peu de suspense.



Parfois des éléments étaient très intéressants : de petits détails sur le monde fantastique m'émerveillaient mais ils étaient engloutis par la lourdeur de l'enquête. Certains éléments étaient pour moi complètement inutiles : Arthur Conan Doyle, ou les nombreux personnages du début qui viennent trouver Lacejambe; et même Délius me semblaient être posés dans l'histoire sans véritable but.



J'ai été déçue par cette lecture...

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Sunk

Sunk est un roman de Fantasy co-écrit par Sabrina Calvo et Fabrice Colin, illustré par Arnaud Crémet.

Les auteurs y décrivent Sunk, un monde en perdition, peu à peu englouti par les eaux. Sébastien et Arnaud, deux frères orphelins d’un Village sur le point d’être noyé, accompagnés par un groupe de personnages aussi fantasques les uns que les autres, tentent d’atteindre le sommet de leur monde pour le sauver.

Le roman joue et détourne avec un humour souvent très noir les codes de la Fantasy dans un univers barré, doté de Villes où les vivants se prennent pour des morts, où les canards sont marxistes et révolutionnaires, et où les taupes naissent de manteaux qui éclatent.

Si vous aimez l’humour noir et la Fantasy, si vous appréciez l’œuvre de Sabrina Calvo et/ou celle de Fabrice Colin, je vous recommande ce roman !
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Toxoplasma

Extrait de ma chronique :



"J'ai l'air d'insister sur les portions les plus ouvertement "poétiques" du texte, mais en vrai, comme Léo Ferré, Sabrina Calvo ne croit pas au "snobisme scolaire qui consiste, en poésie, à n'employer que certains mots déterminés, à la priver de certains autres, qu'ils soient techniques, médicaux, populaires, ou argotiques", et elle sait également nous régaler, notamment dans les dialogues, de phrases aussi savoureuses que (page 17, avec là aussi une allitération en labiales) : "quand est-ce que tu accepteras de te pogner une pitoune qui soit pas un genre d'artiste complètement tarée ?"



Ce sont sans doute ces apparents "grands écarts", thématiques aussi bien que stylistiques, qui provoquent autant d'incompréhension chez les lecteurs de Sabrina Calvo, mais ce sont aussi eux qui font la force de Toxoplasma, parce que derrière le disparate court un vrai fil conducteur, qui personnellement m'a porté sans effort d'un bout du roman à l'autre."
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Au bal des actifs : Demain le travail

Cette anthologie, c'est du très lourd. Damasio, Dufour, Beauverger, Calvo, Kloetzer, Henry: y a du pedigree de la SF et fantasy au sommaire, là. Un conglomérat, on pourrait dire. Les gros salaires de la start-up La Volte. Et ça a bien bossé pour nous construire une vision affreusement dystopique du monde du travail. Du sacrément bon no bullshit job. C'est très clair: il fait pas bon être salarié, ou plutôt uberisé, dans la tête de ces écrivains-là. On y va de la vie mise en évaluation continuelle au concierge en cercueil, du taux de citoyenneté aux pubards arty de multinationales sans oublier les écrivains en work-in-progress perpétuel. Ma grosse préférence va "Vertigeo" de Emmanuel Delporte, cauchemardesque hyperbole de la lutte des classes, Transperceneige à la verticale à donner le vertige, oui. Jusqu'à la nausée.
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Sunk

C'est l'histoire de deux frères qui ne savent pas si l'eau monte ou si leur île descend. Ce qu'ils savent en revanche, c'est qu'ils aimeraient bien ne pas se faire bouffer par les requins anthropophages qui les guettent avec amour (et surtout avec un peu de bave au coin des lèvres) depuis ces flots remuants. Si possible. Alors ils grimpent, ils grimpent vers le sommet de l'île. Accompagnés d'une bande d'uluberlus sortis d'une parodie de la fantasy (la potiche, le nain, le guerrier...). Ils croiseront sur leur route des villes étranges, des villages bizarres, des personnages allant du déconcertant à l'excentrique. Bref, un sacré bordel.



Ce récit m'a tantôt fait rire, tantôt joué avec mes nerfs. Dans le sens où ma patience a quand même quelques limites. Les auteurs jouent autant avec l'absurde qu'avec les circonstances. Pour une fois c'est au sein du même livre que parfois ça l'a fait, parfois pas ! Il y a de vraies bonnes trouvailles, j'ai bien aimé la fin mais franchement, je ne savais parfois plus si on se fichait de la gueule du genre ou de la mienne. Un sacré navet !



Sur la sphère, on parle parfois d'ovni littéraire. Sunk l'illustre bien. Il a raflé il y a quelques années un razzie du pire roman francophone (forcément, ça donne envie !). Je n'arrive toujours pas à savoir s'il le mérite ou si c'est de l'ordre du génie incompris.

En tout cas, je veux absolument connaître les "fournisseurs" des deux auteurs, elle a l'air bonne !
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Sauve qui peut : Demain la santé

J'ai adoré cette anthologie qui dresse une image des débats qui traversent notre société autour de la santé. Avec humour, poésie, lucidité, ces nouvelles tissent des futurs souvent peu souhaitables mais dans lesquels luisent de l'espoir, des germes de solutions.

FeelGood, Les derniers possibles, À l'intérieur d'orchidée Naakey, À cros perdus, de nos corps inveillés viendra la vie éternelle, CRISPR casse Desneuf, Protocole d'urgence et Considère le nénufar m'ont enthousiasmée.

Une très belle sélection !

Une anthologie "Feel Good" comme le titre de la première nouvelle du recueil. Ces fictions brossent un portrait noir de notre présent au travers de futurs trop parfaits qui se fissurent, de futurs précaires d'où tout peu jaillir, de futurs en déconstruction,... Désillusions et espoirs se mêlent.

Les nouvelles jettent leur éclairage situé sur l'état de la santé dans notre pays.

On y rencontre les grandes problématiques liées à l'hôpital, à la recherche, au diagnostic, au transhumanisme, au statut des soignés comme des soignants,.. .

La Volte nous donne une fois de plus la possibilité de lire de la Sf qui sait sortir des sentiers battus pour nous faire rêver, réfléchir, ressentir.
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Sous la colline

Au-delà du gros macho qui sauve la fille des barbares dans la fantasy, l'imaginaire questionne le "totalitarisme de l'identité" (Sabrina Calvo) et rêve d'un monde nouveau. Un roman "littératures de l'imaginaire" dans l'univers LGBT
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Délius, une chanson d'été

Étourdissant, délirant sont des mots qui caractérisent parfaitement ce roman à l’intrigue complexe et complètement déjantée. Déjantés dans un premier temps ses personnages. D’abord Bertrand Lacejambe, botaniste marseillais vivant dans un capharnaüm mélange de verrière, jardin excentrique et bibliothèque d’antiquités. Puis Fenby, son assistant, ami et plus si affinité, à la recherche des fées et de sa mémoire disparue (une décennie envolée ça a de quoi vous changer un homme). Ou encore Délius, compositeur au talent fou chassant et accrochant les notes dans les allées, autour des passants, dans les ciels cotonneux. Ou bien Lady Rachel qui semble en savoir bien long drapée dans son élégante coquetterie mystérieuse. Oui déjantés sont ces personnages qui forment une fresque tantôt originale tantôt déconcertante et dont nous avons bien du mal à suivre les pérégrinations.



Déjantée dans un second temps cette intrigue où un homme fou, pleurant sur ses victimes, observent les autres découvrir son ouvrage, ces corps déposés là, parsemés de pétales de fleurs. Où un groupe de personnages hétéroclites rassemblant horloger de Big Ben, fleuriste, policier des deux côtés de l’Atlantique et j’en passe engage un botaniste pour enquêter sur celui qu’on surnomme désormais « Le Fleuriste ». Où des cerveaux ont un diadème gravé. Où les fleurs ne sont pas des fleurs, où les cerfs-volants ont des visages qui parlent et où les hommes peuvent être transformés en plantes. Mais comment pourrait-elle ne pas l’être quand on touche à la Faërie et que même Sir Arthur Conan Doyle semble s’y compromettre se faisant huer devant des amphithéâtre entier ?



Cette déjanterie poussée à l’extrême, dans un univers dont on ne connaît pas les limites, où des hommes chassent des edelweiss sur les toits, poursuivis par des ramoneurs mais prennent le train et le bateau pour aller de pays en pays, de ville en ville, peut être parfois un peu trop. Manque d’un solide plancher sous ses pieds pour pouvoir mieux rebondir. Finalement on a que de l’eau, et on s’y enfonce allègrement jusqu’à s’y noyer. Noyé dans le flot ininterrompu de féerie, dans les joutes verbales loufoques qui ne sont pas sans rappeler un Eugène Ionesco ou Beckett (En attendant Godot étant une de mes œuvres préférées) et dans le lyrisme poétique de l’autrice.



Pour ma part, j’aime que les univers me surprennent, que les personnages me stupéfient et que je reste comme de rond de flan à ne pas savoir comment on est passé d’un passage à l’autre, ahurie devant les déductions apparemment illogiques du botaniste Lacejambe qui ne sont pas sans rappeler celles d’un certain Sherlock Holmes. Je me suis laissée emportée par la musique, la poésie et les odeurs de fleurs, par cette faërie qui vient souffler des rêves aux enfants, par cette allégorie de l’inspiration qui ne serait qu’un mythe sournois, par ce dandy victorien aux cheveux changeant au grès de ses humeurs, le tout saupoudré d’une dose d’humour alléchante qui m’a bien arraché quelques sourires.



En résumé



Délius une chanson d’été est un roman étonnant, un OVNI en fantasy, qui n’a rien à envier aux pièces de Samuel Beckett. Sur fond d’enquête surréaliste où un Botaniste pourchasse un Fleuriste à l’aide de ses sens et de son ami versé dans l’art de la faërie, on égrène petit à petit les pétales de la raison pour nous enfoncer un peu plus dans le non sens, le tout avec humour et panache. C’était riche, enthousiasmant et on en ressort perplexe, abasourdie, vaguement étourdie d’odeurs florales.
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Toxoplasma

Thriller, fantastique, réalisme magique, cyberpunk et punk tout court, Toxoplasma multiplie les étiquettes à cause de sa construction tentaculaire et de toutes les touches, les références que parsème Sabrina Calvo dans son texte au style pointilleux mais généreux qui rend aussi hommage à tout un pan de la contre-culture et de l'underground. Un roman à lire et à recommander autour de soi !
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Délius, une chanson d'été

Vous aimez la magie, les fleurs, les ambiances féeriques et colorées ? Alors ce livre est fait pour vous.

Mais peut-être préférez-vous les enquêtes, les aventures à travers le monde ? Alors ce livre est à emprunter sans hésiter !

A la fin du XIXème siècle, de Marseille à la côte est des Etats-Unis en passant par Londres, suivez l’élégant botaniste Bertrand Lacejambe et son fidèle compagnon, Fenby, à la recherche d’une fleur merveilleuse. Cette quête ouvrira la porte du mystère qui entoure les meurtres commis par un tueur au modus operandi des plus étrange. En effet, ces victimes aux visages radieux sont retrouvées embaumées de ces fleurs extraordinaires.

Vous découvrirez également l’énigmatique Délius, compositeur de génie, chargé de composer une symphonie pour le Bal des Lucioles de New-York. Quel lien occupe-t-il au cœur de cette affaire ?

Ce roman est une véritable fragrance poétique. Dans une esthétique oscillant entre féerie et steampunk où parfois on semble traverser une œuvre de Lewis Caroll, cette enquête fleurira au cœur de vos rêves et de votre imagination.

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Wonderful

Wonderful, c'est ma came. Et même totalement, d'ailleurs. C'est bien pour ça que je vais devoir me faire un plaisir d'expliquer la note maximal que je lui décerne.



Ce roman, c'est un beau foutoir si vous me passez l'expression. Et c'est justement ce que j'aime le plus dedans, son délire unique et partant jusqu'au bout. Si ce n'est pas votre genre, passez immédiatement votre chemin !

Sabrina Calvo à développé ici un univers à sa façon : elle navigue entre les réalités alternatives, la multiplicité des références et des délires personnels, le tout enrobé dans une histoire tragique à souhait (la fin du monde inévitable) avec des personnages hauts en couleur et une bande-son intégrée (si, je vous jure). L'ensemble est un fouilli soigneusement ordonné, comme j'adore, qui semble loucher du côté de certains auteurs (on peut noter une inspiration de Neverwhere, bien sur) mais résolument personnel. Et inspiré, aussi. Ce roman déborde d'originalité, dans ses propos, dans ses loufoqueries mais aussi dans son ton. C'est une histoire triste, mélancolique, pleine de beautés éphémères et de sursauts d'humanité ridicules.

Mais j'aime ce roman. J'aime son ton à mi-chemin du tragique et du comique, sa bande-son proposée dans les pages, les petites perles qu'on trouve au fur et à mesure de son déroulée. Et son final, à la hauteur du reste. On ne pouvait s'attendre qu'à cela, mais quelle maestra, quelle beauté dans la résolution finale. C'est une superbe façon de conclure un livre de ce genre, avec amour et tendresse. C'est un final émouvant.



Je reconnais que le livre est déroutant, et qu'il pourra en rebuter plus d'un. Il faut accepter de rentrer dans le jeu de l'auteure et de se laisser porter au gré des pages dans cette fantasy de Londres sous la fin du monde. C'est le genre de roman lunatique, dont on ressort soit transformé soit écoeuré. Pour ma part j'ai découvert un genre et une auteure, tout autant que j'ai voyagé comme rarement avec un livre. Au gré des péripéties, je plongeais délicieusement dans un univers que j'ai apprécié de bout en bout.



Alors quoi ? Dois-je résumer ce livre à une expérience personnelle et impossible à transmettre ? Je dirai que oui, mais aussi à une expérience sensorielle et émotionnelle. Une envie de reprendre le chemin de la fin du monde lorsque le livre est fini, de retrouver ces personnages figés dans un temps qui va disparaitre, tout comme le reste. C'est une histoire qui m'entraine à chaque relecture, et c'est pour moi le plus important.
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Kaarib, tome 1 : La dernière vague

Des monstres, des jambes de bois, un œil de verre, le fantôme de Barbe Noire, des perroquets oracles, une grande prêtresse, une sirène pirate, un gamin qui répare ses blessures, des vagues géantes, des restes d'Atlantide, l'imaginaire est au galop dans ces pages ! Le duo Calvo / Krassinsky se plie en quatre pour nous offrir un grand divertissement et l'ensemble tient fichtrement la route et se rapproche de grandes sagas telles que Azimut ou La Nef des fous.



Cependant, contrairement à Zidrou et Turf, la gouaille de Calvo n'est pas au rendez-vous (difficile d'extraire une citation croustillante), ça manque vraiment de tournures jubilatoires, d'une écriture personnelle et créative. Les intrigues sont assez brouillonnes (mais le premier tome d'une saga connaît souvent ces soucis, désireux de poser les bases de l'histoire). Calvo jongle avec les styles, le fantastique côtoie l'historique, les créatures imaginaires se mêlent à des communautés secrètes.



C'est riche, généreux et attractif. Il manque cependant un petit quelque chose pour que la mayonnaise ne prenne goulûment dans ce premier volet, pour totalement convaincre. Un dialoguiste de talent, peut-être ?
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Toxoplasma

Une expérience de pensée, une pensée réjouissante de la littérature. Toxoplasma m'a apporté beaucoup, tout en vrac mais détaillé un peu, j'ai compris un peu mieux le milieu des hackeurs et des résistants numériques, celles et ceux qui structurent en creux ou très différemment ce qui semblait pourtant relever d'une figure imposée. J'ai aimé me balader dans Montréal, appréhender le québécois mieux, avec respect et sensibilité. La narration est un bijou d'orfèvre qui mérite largement plus qu'une simple critique passagère pour lui rendre l'hommage mérité, mais en quelques mots pour esquisser les contour de mon admiration, c'est un bijou parce qu'elle mêle des styles marqués très différents avec brio, lesquels s'inscrivent en plus dans des temporalités aux frontières volontairement flottantes. Sans que ça gêne la lecture. En effet, politique ce livre l'est à plus d'un égard, il y est question de Commune, et d'Histoires : celle qui se déroule dans cette Commune et les débouchées futures, celle passée du Québec, d'une relation à la terre non comme propriété mais comme socle de vie, celle aussi cinématographique . Et tout cela, et tout ce que j'ai tu du livre, constitue une lecture passionnante, fourmillante de vie et d'envies, qu'il est difficile d'arrêter avant d'avoir fini.
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La clef d'argent des contrées du rêve

Belle idée que de consacrer un recueil de nouvelles aux Contrées du Rêve. La Clé d’Argent des Contrées du Rêve (Mnémos 2017) poursuit de la sorte le travail important déjà effectué sur ce sujet avec la traduction de Davis Camus (Les Contrées du Rêve), le guide de Kadath et le recueil de Brian Lumley (Légendes des Contrées du Rêve). L’ouvrage s’ouvre sur une introduction fort intéressante de Frédéric Weill, montrant toute l’originalité de cette création de Lovecraft. Le recueil comprend 11 nouvelles, et comme d’habitude, il y a du bon et du moins bon, du téléphoné et quelques petites perles.

J’ai classé mes notules par ordre d’intérêt croissant (de 1 à 10), ce qui est évidemment totalement subjectif et n’engage que moi !



3 – David Calvo nous parle dans Mkraow des chats d’Ulthar, de façon certes poétique, mais sans aucune trame.



4 – Avec Urjöntaggur, Fabien Clavel nous entraîne sur les traces du Lieutenant A. Desplagnes, militaire à la « coloniale », mais aussi explorateur à ses heures perdues. Il est hanté par des rêves récurrents dans lesquels il voit une tombe gigantesque remplis de cadavres « noirs », une cité inconnue et un rocher rouge. Les médecins sont incapables de le débarrasser de ces songes qui lui pourrissent la vie. Mais l’un d’entre eux croit reconnaître dans sa description du rocher l’Ayers Rock qui se trouve au centre de l’Australie. Et de monter une expédition qui ne fera qu’accroître ladite maladie. Il tombera en transe au pied de la formation rocheuse en tenant des propos incohérents (Kadath, le château d’Onyx, Shantaks) et en affirmant avoir rencontré le Grand Ancien Urjöntaggur qui lui demande de le libérer de Nyarlathotep. La chute sera un peu confuse, et le Lieutenant reviendra en métropole à moitié fou avant de se faire tuer sur le front près de Charleroi.



Livres :

° Le Plateau central nigérien, A. Desplagnes

° Les mystères de l’Australie, id



4 – Dans Caprae Ovum, le rêveur erre dans une cité décrépie et découvre dans une barge pourrie un mystérieux cartulaire qui lui donne une idée de la géographie des lieux. Il retrouve une émanation de sa maison dans le monde de la réalité, mais n’y entre pas car elle semble maléfique. Il pénètre dans une crypte où était célébré le Culte de la Chèvre puis suit un groupe de pèlerins qui se dirigent vers un pic dans lequel est creusé une caverne. C’est le nouveau sanctuaire du Culte, et il va enfin pouvoir contempler la statue de la divinité avec son… œuf. Manifestement le but de sa quête, afin de le ramener dans le monde normal où il pourra éclore. Le texte est accompagné d’une illustration qui renforce notre éclat de rire !



Livre :

° Le Cartulaire encyclopédique des hautes et basses terres du rêve.



5 – C’est sous forme d’un long poème que Thimothée Rey nous conte l’aventure de Ylia de Hlanith. Une jeune fille recluse chez ses parents, commerçants dans les Contrées. Elle rencontre un jour une créature diaphane, un nouvel arrivant dans le monde des rêves. Elle accepte de répondre à ses questions. Il lui dit s’appeler Howard, et muni d’une Clé d’Argent, il est à la recherche de son Archétype Suprême. La jeune fille lui subtilisera la clé, pensant pouvoir ouvrir la porte qui la ramènera au monde de l’éveil. Mais elle ne fera que libérer les Grands Anciens qui patientaient de l’Autre Côté pour envahir les Contrées.



6 – Nos amis Ward & Miller nous font rencontrer, dans Le Rêveur de la Cathédrale, Kevin, un jeune guide de la Basilique de Saint-Denis. Dans une arrière crypte de l’édifice, il trouvera une vieille clef alors qu’une forme nébuleuse qui lui dit s’appeler Randolph Carter lui demande de le délivrer. Au sortir de la cathédrale, il se retrouve… dans Kadath. Il sera transporté au Château d’Onyx par des « maigres bêtes de la nuit », plongera dans les souterrains et, grâce à la clef, libérera Randolph Carter, prisonnier de Nyarlathotep. Il reprendra conscience dans la crypte de la cathédrale où il ne sera pas reconnu par les gardiens de nuit. Il est devenu un vieillard du nom de … Randolph Carter.



7 – Morgane Caussarieu nous apporte un peu d’humour félin avec Les Chats qui rêvent. On suit les aventures d’un petit chaton, prisonnier avec ses congénères d’un Vieil Homme morbide qui les martyrise Ce dernier passe son temps à étudier un ouvrage ancien en psalmodiant des invocations incompréhensibles. La maman chat parle à son rejeton de la magnifique cité d’Ulthar, qu’elle visite régulièrement en rêve. Le chaton arrivera à s’échapper pour rejoindre le paradis des chats mais sera attaqué par des créatures immondes qui l’enverront au paradis tout court !



8 – Belle petite pièce que De Kadath à la Lune de Raphaël Granier de Cassagnac. Le héros s’embarque avec le capitaine Omen au Port du Bout du Monde, à la recherche de sa belle. Ils croiseront Serranie, la Cité des Nuages où Kuranès leur remettra une carte des Contrées, Dylath-Leen, Ulthar ; ils rencontreront un dieu clochard et un sculpteur de rêves puis partiront pour la Lune sur les indications de certains prêtres. Le héros sera attaqué par des crapauds immondes et se retrouvera sur le plateau de Leng dont il sera expulsé par l’Innomé. Il poursuivra sa recherche à Paris où il se réveille et retrouvera une ombre qui a son propre visage. « Jamais je n’aurais dû quitter Kadath ! ». On croirait lire du Lovecraft ! Bravo.



8 – Bien ficelé également Le Tabularium de Laurent Poujois qui nous présente la caste des Arpenteurs, chargée d’établir la Carte des Marcheurs du Rêve. Nous sommes invités à participer à l’exploration d’un secteur fort mal connu des Contrées, le Dédale, dont personne ne semble être revenu vivant. En compagnie d’un marchand qui laisse pourtant entendre qu’il connaît le secteur, les Arpenteurs découvrent un gouffre au fond duquel se déploie une somptueuse cité d’albâtre. Le marchand s’écrie « enfin » avant de se réveiller dans le monde réel où il sera conduit dans un asile psychiatrique.

Cette nouvelle ne demande qu’à se transformer en jeu de rôle.



9 – Avec Le Corps du Rêve, Neil Jomunsi nous fait rencontrer une petite famille de 6 enfants, réfugiés dans les Contrées suite à une catastrophe (guerre ?) dans le monde de l’éveil. Ils vivent dans une grande demeure que l’aînée a façonnée à partir de ses souvenirs. Mais ils sont sans cesse menacés par des attaques du Rêve, les contraignant à se calfeutrer et à se cacher dans les sous-sols de la demeure. Une dernière attaque particulièrement violente détruira une partie de la maison…. que le Rêve reconstruira selon les canon architecturaux des Contrées et non de l’Éveil. Émouvant.



9 – Vincent Tassy, dans Le Baiser du Chaos Rampant, nous fait partager la quête d’une jeune femme, mal dans sa peau, qui se réfugie dans les Contrées pour rencontrer Nyarlathotep dont elle est éperdument amoureuse. Un périple haut en couleurs, comme il se doit, avec une petite incursion dans le monde du dessous, infesté de goules dont une lui ressemble étrangement. Elle finira par rejoindre le château du Prince Noir qui, entre deux étreintes, lui révélera sa véritable nature. Elle est la fille d’un écrivain fantasque, Howard, et de son épouse Sonia qui lui avait caché sa grossesse, comprenant bien que son mari n’était pas fait pour vivre en ce monde. On l’aura compris, Lovecraft est désormais une goule dans le monde du dessous.



10 – Mon coup de cœur pour Les Fragments du Carnet de Voyage Onirique de Randoph Carter qui se présente comme un document inédit mystérieusement récupéré par l’éditeur. Mnémos aime bien les « vrai-faux » lovecraftiens… et moi aussi ! La première partie qui nous est présentée ici, et qui sent bon la plume de Davis Camus, est un Fragments d’Atlas des Contrées du Rêve. Un document original, présenté sous forme d’encyclopédie, et qui, pour chaque entrée, reprend ce que Lovecraft en a dit. Fallait le faire, et c’est fait !

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Toxoplasma

interview de David Calvo en suivant le lien
Lien : https://thisisrocknpages.blo..
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La clef d'argent des contrées du rêve

MNÉMOS RÊVE







Dans la très, très riche actualité lovecraftienne francophone de ces derniers mois, chez les Indés de l’Imaginaire mais aussi ailleurs, La Clé d’argent des Contrées du Rêve se distingue peut-être, d’abord parce que l’on fait cette fois dans la fiction, ensuite parce que c’est en usant d’un cadre lovecraftien pas si pratiqué ou mis en avant : les Contrées du Rêve, donc.







Maintenant, il est vrai que Mnémos semble entretenir une relation particulière avec les Contrées – relation qui remonte au moins à la nouvelle traduction par David Camus, sous le titre donc Les Contrées du Rêve, de l’ensemble des nouvelles « dunsaniennes » de Lovecraft, incluant Démons et Merveilles, soit le « cycle de Randolph Carter », auquel le titre de la présente anthologie fait clairement allusion, mais aussi toutes les autres nouvelles « oniriques » : « Polaris », « La Malédiction de Sarnath », « Les Chats d’Ulthar », « Les Autres Dieux », et j’en passe.







Exactement au même moment, l’éditeur avait publié le très beau Kadath : le guide de la cité inconnue, superbement illustré par Nicolas Fructus (dans son édition originale : la reprise ultérieure se passe de la dimension graphique, ce qui me laisse assez sceptique…), avec des textes de David Camus donc, Mélanie Fazi aussi (surtout ?), Raphaël Granier de Cassagnac et Laurent Poujois. De la bonne came, ces deux bouquins…







Plus récemment, cependant, on a (re)trouvé chez Mnémos des choses… nettement moins bonnes, avec deux gros volumes pseudo-lovecrafto-oniriques de l’inqualifiable Brian Lumley. Ce qui, peut-être, fausse un peu mon jugement concernant la présente anthologie ? C’est dommage, mais…







ONIRIQUE… ET PÉRILLEUX







Cela dit, ce n’est clairement pas la plus évidente des matières, les « Contrées du Rêve »… C’est même assez franchement périlleux, et à plus d’un titre.







Dont un, bizarrement, ne ressort pas du tout ici – et notamment de l’introduction de Frédéric Weil : à l’exception de « Polaris », si l’on en croit Lovecraft lui-même, ces récits sont à certains égards des sortes de pastiches – de l’immense Lord Dunsany, donc. Les Dieux de Pegāna, Le Temps et les Dieux, L’Épée de Welleran, Contes d’un rêveur (parmi lesquels « Jours oisifs sur le Yann », nouvelle séminale en la matière), Le Livre des merveilles, Le Dernier Livre des merveilles… Autant de splendides petits recueils qui ont fourni, sinon la base ou le substrat, du moins des modèles pour que Lovecraft développe son propre univers onirique et baroque, au lexique chatoyant. Dès lors, pasticher Lovecraft dans les « Contrées du Rêve » peut revenir, indirectement, à pasticher Dunsany via les propres pastiches de Lovecraft ?







En théorie. Car, et ce n’est pas la moindre surprise de cette anthologie, aucun des auteurs ici présents (hors cas « ambigu » de « Randolph Carter », j’y reviendrai…) ne joue vraiment de cette carte merveilleuse. Laurent Poujois s’en approche timidement par endroits, Alex Nikolavitch et Vincent Tassy peut-être, avec moins de réussite, les autres n’essayent même pas ; il n’est pas dit qu’on puisse vraiment leur en vouloir, ni que ce soit forcément problématique…







Les « Contrées du Rêve », après tout, peuvent avoir d’autres couleurs – et la fantasy lovecraftienne, souvent, conserve quelque chose de l’horreur du Monde de l’Éveil ; cette fois, quelques auteurs s’en souviennent, mais somme toute assez peu, ou sans guère de réussite en tout cas.







Or ces différents registres ont leurs risques propres – et contribuent à rendre périlleux l’exercice d’équilibriste de Lovecraft, dont nombre des récits « dunsaniens » sont sur la corde raide : un faux pas et l’on tombe, ce qui charme et fascine s’avérant en fin de compte seulement grotesque au mauvais sens du terme, autant dire ridicule. Les auteurs se montrant prudents, ici, voire timorés, ils évitent pour l’essentiel cet écueil… sauf Sylvie Miller et Philippe Ward d’une part, et Vincent Tassy de l’autre, qui, chacun à sa manière, sautent à pieds joints dessus (et se cassent la gueule, comme de juste).







Autre ambiguïté du registre : la dimension proprement onirique de ces Contrées. Contre leur dénomination même, elle est en fait parfois discutable… Christophe Thill, dans un article figurant dans Lovecraft : au cœur du cauchemar, y insiste, à bon droit sans doute, même si je n’irais probablement pas jusqu’à me montrer aussi catégorique. Mais il y a bien une autre ambiguïté à cet égard, qu’il faut relever : ces Contrées sont peut-être oniriques (car on rêve beaucoup dans ces textes de Lovecraft, dont la célèbre citation est reprise ici en mot d’ordre : « Tout ce que j’ai écrit, je l’ai d’abord rêvé. »), ou peut-être pas, plutôt antédiluviennes ; ou alors les deux tout à la fois… Pourquoi pas, après tout ?







Cela a son importance, qui fait le partage entre une fantasy « classique », limite avec carte à l’appui, et quelque chose de bien moins organisé. La plupart des auteurs, ici, me semblent appuyer sur la dimension onirique, même en en évacuant le merveilleux – et souvent en faisant explicitement l’aller-retour entre Contrées du Rêve et Monde de l’Éveil ; ce qui paraît couler de source, alors qu’au fond, si l’on veut bien s’y arrêter un instant, ça n’a rien de si évident : en fait, cela introduit bel et bien un biais.







Et il y en a peut-être encore un dernier, pas forcément si inattendu que cela chez Mnémos, au vu de l’origine même de l’éditeur : la dimension rôlistique. Je crois qu’elle a laissé son empreinte (« mythique », si l’on y tient), et que les « Contrées du Rêve » ici arpentées doivent beaucoup à Sandy Petersen et compagnie, au projet préalable à L’Appel de Cthulhu – jeu dérivé de l’idée d’un supplément sur « Les Contrées du Rêve » pour Runequest… Pourtant sans insister sur la fantasy. Ce qui n’est pas forcément un problème, là non plus – mais conserver cette idée derrière l’oreille peut faire sens en cours de lecture, ai-je l’impression.







(Note : depuis cette chronique, au passage, j'ai eu l'occasion de causer des Contrées du Rêve rôlistiques, rééditées chez Sans-Détour.)







Y CROIRE ?







Reste que, si cette anthologie souffre avant tout d’un problème, il est tout autre… et bien autrement gênant. J’ai l’impression en effet d’un livre conçu sans y croire, d’une anthologie où les auteurs, au fond, et en tout cas la direction d’ouvrage, ne se sont pas « impliqués ». Même auprès des auteurs les plus sensibles à la dimension lovecraftienne, notamment pour en avoir déjà fait usage ailleurs, éventuellement de manière frontale, demeure ici l’impression vaguement ennuyeuse d’une commande. Le tout manque d’application et de cohérence, du coup… mais aussi et surtout d’enthousiasme ?







Sur le format relativement court de l’anthologie, c’est pour le moins frappant – et ça ne l’est que davantage, quand le dernier et le plus long texte du recueil et de loin, les « Fragments du carnet de voyage onirique de Randolph Carter », se contente sur une cinquantaine de pages de citer expressément Lovecraft, et/ou de broder sur ses descriptions « oniriques » sans même s’embarrasser d’une narration ! Or cet ultime texte confirme que les auteurs des nouvelles précédentes n’ont en fait même pas essayé de jouer de la carte baroque et chatoyante… Et il a d’autres connotations regrettables, sur lesquelles je reviendrai en temps utile.







Et, décidément, même en jouant au bon public dans la mesure de mes capacités (non négligeables) pour ce faire, je ne peux certes pas accorder une bonne note à cette anthologie ; on dit parfois « ni fait ni à faire », et c’est une expression hélas appropriée au contenu de cette anthologie …







Ma chronique pour Bifrost synthétise et « rassemble » les textes. Ayant davantage de souplesse rédactionnelle sur ce blog autorisant des développements bien plus amples, je vais tâcher de dire quelques mots de chacun de ces textes, dans l’ordre de présentation.



URJÖNTAGGUR







On commence avec « Urjöntaggur », nouvelle signée Fabien Clavel – un auteur que je n’ai à vrai dire jamais « pratiqué » (le bien grand mot…) que dans ce registre de la « plus ou moins commande », ce qui peut influer sur mon jugement. Mais le fait est que ce texte m’a paru sonner faux…







C’est d’autant plus regrettable qu’il contient des bonnes choses – avec un potentiel graphique et onirique marqué, des clins d’œil plutôt amusants aussi… Et, bien sûr, la dimension épistolaire, très adéquate.







Sauf que je n’ai donc pas l’impression d’un auteur qui « croit » en ce qu’il écrit – et j’ai bien au contraire la conviction qu’il ne fait finalement rien pour que le lecteur, au moins, y croie. Dimension rôlistique, avançais-je plus haut ? Peut-être, mais de manière ratée… La nouvelle m’a immanquablement évoqué un « scénario » conçu sur le pouce, pour une séance imprévue, en jetant au dernier moment les dés pour bâtir fissa quelque chose sur la base de tables aléatoires. Il y en a de bonnes, et cette méthode peut donner des choses très amusantes – mais à condition d’y travailler un peu plus, ne serait-ce que pour bétonner l’agencement. Sinon, ce ne sont que des cases dans des tableaux – des fragments qui au fond ne conduisent à rien ; et, au bout de la partie comme au bout de cette nouvelle, j’ai passé le temps, oui, mais sans vraiment m’amuser, et je n’en retiendrai rien.







Les gimmicks « stylistiques » de l’auteur ne font en fait que renforcer cette impression. La dimension épistolaire pouvait donner quelque chose d’intéressant, mais Fabien Clavel fait dans le gratuit (anglicismes, fautes d’accord), dans une vaine tentative, mais d’autant plus voyante, de conférer de la personnalité à ses protagonistes ; c’est au fond parfaitement raté, au mieux inutile. Et l’artifice n’en ressort que davantage.







Ce n’est même pas forcément que ce texte est « mauvais » : d’une certaine manière, il n’existe pas…







Hélas, il n’est pas le seul dans ce cas, ici.







LE RÊVEUR DE LA CATHÉDRALE







Suivent Sylvie Miller et Philippe Ward, pour « Le Rêveur de la cathédrale ». Le Noir Duo a pu, occasionnellement, livrer des choses tout à fait correctes, souvent dans un registre populaire, léger et divertissant, « Lasser » ou pas, mais pas que. Bien sûr, quelqu’un qui se fait appeler Philippe Ward n’a guère besoin de mettre en avant d’autres arguments pour témoigner de son goût pour Lovecraft…







Reste que cette nouvelle est un échec total – et qui, bizarrement, aurait sans doute gagné à se débarrasser de ses oripeaux guère seyants de lovecrafterie. Sur la base d’un cadre narratif qui aurait pu être intéressant (la basilique de Saint-Denis) mais qui s’avère bien vite inexploité, et d’ici à une conclusion tellement convenue que c’en est gênant, elle nous inflige un Nyarlathotep parfaitement grotesque, et un Randolph Carter qui l’est à peu près autant (outre qu’il est tout sauf sympathique – ce qui aurait pu constituer un bon point, je suppose, mais dans encore un autre univers parallèle) ; j’ose espérer que c’était délibéré de la part des auteurs, d’une certaine manière, mais sans en être totalement certain…







Et au final ? Là encore, une nouvelle « qui n’existe pas ».







DE KADATH À LA LUNE







Raphaël Granier de Cassagnac, pour sa contribution intitulée « De Kadath à la Lune », fait dans l’autoréférence, en brodant façon bref spin-off sur son texte dans Kadath : le guide de la cité inconnue, il y a de cela quelques années déjà. L’idée n’était pas mauvaise, même si tout cela est bien lointain pour moi… Mais cela a pu susciter quelques « flashs » occasionnels – cependant, plutôt dans son évocation du segment dû à l’époque à Mélanie Fazi, avec le personnage d’Aliénor. Eh…







Ce que Raphaël Granier de Cassagnac avait conçu dans ce cadre avec son « Innomé » était plutôt réussi, pourtant, et ne manquait pas d’à-propos, en fournissant au lecteur un guide de choix pour arpenter Kadath. En dehors de ce contexte, par contre, et avec cette seule anthologie pour référence, ça ne fonctionne hélas pas… et cela aboutit à un nouveau texte « inexistant ». Dommage…







CAPRAE OVUM







« Caprae Ovum » est une nouvelle d’Alex Nikolavitch, que je n’avais longtemps pratiqué qu’en tant qu’essayiste et traducteur (de BD notamment), sauf erreur, mais qui a publié assez récemment son premier roman, Eschatôn, aux Moutons Électriques – un roman, d’ailleurs, non dénué d’aspects lovecraftiens, et l’éditeur avait mis cette dimension en avant ; un roman, hélas, qui ne m’avait pas convaincu… mais pour de tout autres raisons (ses aspects lovecraftiens sont assez réussis, objectivement).







Avec la présente nouvelle, il nous livre un périple onirique adapté à la logique des rêves et/ou des cauchemars. Idée qui fait sens, sans doute… à ceci près que le résultat est d’un ennui mortel. Dans cette anthologie, c’est probablement la première nouvelle à tenter d’approcher véritablement la matière lovecraftienne onirique, ce qui est tout à son honneur – et je suppose qu’il y a notamment de « La Clé d’argent » là-dedans. Pas forcément le plus palpitant des récits lovecraftiens, je vous l’accorde… Mais là, c’est encore une autre étape : un somnifère radical.







Il y avait de l’idée – mais ça ne fonctionne pas vraiment, au mieux, et, une fois de plus, on n’en retient rien.







LES CHATS QUI RÊVENT







Avec « Les Chats qui rêvent », de Morgane Caussarieu, on en arrive – enfin ! – à un texte que l’on peut sans hésitation qualifier de « bon ». Pas un chef-d’œuvre, non, mais un « bon » texte. À vrai dire probablement le meilleur de cette anthologie autrement bien fade…







Je précise à tout hasard que je n’avais jusqu’alors (sauf erreur) jamais rien lu de la jeune auteure, dont des gens fiables ont cependant loué les romans, tout particulièrement Dans les veines – il faudra que je tente ça un de ces jours, quand même…







Mais revenons à nos moutons – ou plutôt, à nos chats… Ceux d’Ulthar, bien sûr ? Non : ceux qui aimeraient se trouver à Ulthar.







Parce qu’ils sont présentement en enfer.







Sur la base d’un titre pareil, je m’attendais à quelque chose dans le goût du très chouette « Rêve de mille chats » de Neil Gaiman – un épisode indépendant de la cultissime et fantabuleuse BD Sandman. Il y a peut-être un peu de ça, mais c’est finalement autre chose. Car ce texte n’est pas sans surprise, en fin de compte…







Notamment en ce qu’il évacue très vite tout ce qui pourrait être « naturellement kawaii » avec un postulat pareil. Chatons ou pas, cette nouvelle n’a rien de « mignon ». En fait, de l’ensemble de l’anthologie, elle est peut-être la seule (disons avec celle de Laurent Poujois, plus loin) où l’angoisse, voire la peur, voire la terreur, ont quelque chose de palpable – un aspect qui, quoi qu’on en dise, n’est pas absent des récits de Lovecraft consacrés aux « Contrées du Rêve ». Mieux encore si ça se trouve, la brève nouvelle de Morgane Caussarieu parvient à véhiculer quelque chose de presque… dépressif ? qui, là encore, contrairement aux idées reçues, peut faire partie intégrante de l’onirisme chatoyant de Lovecraft – car, dans ses textes dits dunsaniens, sous les tours d’ivoire et les minarets scintillants peut se dissimuler l’échec, le navrant, le pathétique ; peut-être surtout dans un second temps de sa production « fantaisiste », certes, mais c’en est une dimension importante.







Mais, en combinant tous ces aspects, Morgane Caussarieu livre donc un texte plus qu’honorable, à propos dans ce contexte, mais qui se tient aussi en lui-même. Une réussite, à son échelle, donc – et peut-être bien la réussite de cette anthologie. Oui : un texte qui existe, voyez-vous ça !







LE BAISER DU CHAOS RAMPANT





Encore un jeune auteur, avec Vincent Tassy – qui, dans « Le Baiser du Chaos Rampant », use d’une esthétique gogoth qu’on aurait pu être tenté d’associer à Morgane Caussarieu, sauf que non, en définitive.







Malgré sa lourdeur démonstrative et son emploi pas toujours très assuré d’un lexique rare et se voulant riche, la nouvelle parvient (presque) à faire illusion un certain temps. Il s’y passe des choses, et si la focalisation morbide et goulesque ne suscite pas les mêmes connotations que les tours et minarets des cités merveilleuses de Céléphaïs et compagnie, au moins l’auteur parvient à peu près à en tirer un semblant d’ambiance. Ce qui aurait donc pu donner quelque chose de correct, j’imagine – en étant bon prince, oui, mais…







Mais en fait non, en raison d’une conclusion parfaitement ridicule. Je ne suis pas certain d’avoir lu une lovecrafterie qui m’ait autant donné envie de bazarder violemment le bouquin contre un mur depuis la « Maudite Providence » de Li-Cam – enfin, une lovecrafterie francophone, j’ai (re !) lu du Brian Lumley entre temps…







Non, vraiment, fallait pas.



LE TABULARIUM







Laurent Poujois remonte le niveau avec « Le Tabularium » ; après avoir, il y a longtemps de cela, fourni des choses intéressantes pour le Kadath du même éditeur – mais, à la différence de son collègue Raphaël Granier de Cassagnac, il a choisi de livrer une nouvelle se tenant avant tout en elle-même : le bon choix, m’est avis.







Entendons-nous bien : « Le Tabularium » n’a absolument rien d’un chef-d’œuvre. Mais c’est un texte divertissant, et qui fonctionne. Oui, c’est aussi assez convenu, voire éculé, mais ça fonctionne. Et au regard de la concurrence dans cette anthologie, ben, du coup…







En fait, si je confierais donc la première place du podium à la nouvelle de Morgane Caussarieu évoquée plus haut, la deuxième me paraîtrait pouvoir être attribuée à ce récit faisant la bascule entre Monde de l’Éveil et Contrées du Rêve avec… professionnalisme, disons. Terme assez peu généreusement connoté le plus souvent il est vrai, mais pour le coup Laurent Poujois ne nous fait pas du Fabien Clavel. Son texte est bien construit, l’ambiance est là, qui oscille entre fascination et angoisse avec la nécessaire touche de démence qui va bien. Autrement dit, ça marche – et comme il ne faut pas espérer beaucoup plus dans ce recueil…







LE CORPS DU RÊVE







« Le Corps du Rêve », de Neil Jomunsi, ne s’en sort pas si mal, cela dit. Formellement, cette nouvelle me laisse assez sceptique, mais je lui reconnais néanmoins d’avoir un thème assez intéressant, relativement original, et plutôt bien développé.







En fait, c’est là l’atout de cette nouvelle, qui la classe effectivement au-dessus de la médiocrité globale de cette Clé d’argent des Contrées du Rêve fort peu goûtue dans l’ensemble : lesdites Contrées y sont questionnées, dans leurs implications, et donc dans le rapport ambigu que les Rêveurs peuvent entretenir avec elles. Il n’est certes pas dit que la réponse apportée à cette problématique par Neil Jomunsi aurait parlé à Tonton HPL, mais, au fond, ça n’est d’aucune importance.







La nouvelle est critiquable, bancale parfois, mais donc assez futée, au fond, et parvient à mettre en place une ambiance des plus correcte ; allez, troisième place sur le podium.







YLIA DE HLANITH







… Quand soudain déboule le… le texte qui invalide l’idée même d’un podium pour les siècles des siècles.







« Ylia de Hlanith » est un… poème… de 480 vers, des alexandrins à vue de nez, commis par Timothée Rey. Et je ne suis pas bien certain de ce que j’en pense.







Booooooooooooooooon, côté « virtuosité poétique » et « joliesse des images et émotions », disons-le, ça n’est paaaaaaaaaaaaaaaaaas tout à fait ça ; mais probablement de manière délibérée, en partie du moins – semble en témoigner le goût de l’auteur pour les rimes improbables, en -ec, en -oth, que sais-je ; avec de la musique derrière et beaucoup de clopes ou d’alcool, ça aurait pu être du Gainsbourg, si ça se trouve – du Gainsbourg pété comme un coing et qui rigole tout seul dans son coin (donc) de la mauvais blague à laquelle il se livre.







Disons-le : c’est moche comme tout et ça croule sous
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Au bal des actifs : Demain le travail

Chaque nouvelle est un bijou qui m'a mis une claque.
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Territoires de l'imaginaire : Faites demi-t..

Faites demi-tour dès que possible: les territoires de l'imaginaire est une anthologie de nouvelle de science fiction / fantastique publié chez la Volte.



C'est une anthologie se basant sur un concept originale: à savoir que les 14 auteurs, vont chacun écrire une nouvelle sur un territoire différend, que ce soit ville ou région. Vous pouvez ce recueil de deux façon. La première est une lecture dans l'ordre, qui regrouperont les nouvelles par thème. Ou alors dans le désordre, avec le deuxième sommaire, qui vous permettra de lire les nouvelles par territoires.



Sentiment mitigé ici, la plupart des nouvelles ne m'on pas marqué outre mesure, et m'on laissé neutre. Cependant pour ma part deux nouvelle sont sortit du lot. A savoir le cul du loup de David Calvo, et Le signal de Jean-Phillipe Ourry, nouvelles que j'ai beaucoup apprécier.
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